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dimanche 27 septembre 2020

LA TAPISSERIE DE BAYEUX, témoignage de la vie et des mentalités au 11e siècle (38)

  CHRONOLOGIE DE LA SUITE ET DE LA FIN DE LA BATAILLE D’HASTINGS

Épisode 4 (voir tableau article 35) : les normands entament une contre-attaque qui isole l’avant-garde de l’armée anglaise  et la décime.

Cet épisode est mentionné à la fois dans nos deux sources d’inspiration mais à des places différentes :
    . . Guillaume de Poitiers montre que la contre-offensive se produit quand le duc réussit à stopper la retraite de ses troupes.
   . Sur la tapisserie de Bayeux, elle est représentée immédiatement après l’épisode de l’attaque du camp retranché d’Harold, faisant ainsi croire que les anglais ont été vaincus sur la colline et qu’ils ont dû fuir.
 
Selon Guillaume de Poitiers les paroles du duc  ranimèrent le courage de ses troupes, Guillaume se mit alors à la tête de ses troupes et se prépare à  résister menant  une contre-offensive.

 A la tête de ses troupes, le duc lance sa cavalerie à l’assaut de  l’avant-garde de l’armée anglaise. Les normands réussissent à encercler une petite partie des soldats ennemis qui, rappelons-le, sont à pieds :   « Les Normands, enflammés d'ardeur, enveloppèrent plusieurs milliers hommes qui les avaient poursuivis, et les taillèrent en pièces en un moment, en sorte que pas un n'échappa »

 La figuration de cet épisode sur la tapisserie de Bayeux concorde avec le récit du chroniqueur et montre bien la manière dont s’est produite cette partie du combat : par des charges d’encerclement, les normands ont réussi à scinder l’avant-garde anglaise en petits groupes plus vulnérables que lorsque les fantassins forment un front uni.

On aperçoit les soldats anglais divisés en petits groupes (B) encerclés par les cavaliers qui les chargent en lançant leurs javelots (C) où en s’en servant comme une arme d’estoc, au moment des combats rapprochés ils utilisent aussi l’épée (D). Les anglais usent  de haches qu’ils manient à deux mains (E) ainsi que d’épées (F). L’un de ces anglais (G) s’attaque au cheval d’un normand , ce qui est un moyen efficace pour faire tomber son cavalier ; juste derrière lui, un homme tient un bâton dont le fer de la hache s’est détaché, il est évidemment complètement désarmé et sans bouclier pour se protéger.

 Ce premier épisode victorieux s’explique sans peine : autant ils sont dans une position défavorable lors de l’attaque d’une colline fortifiée ; autant en terrain plat, les cavaliers ne pouvaient que prendre l’avantage : étant juchés sur leurs chevaux, les normands dominaient de leur hauteur les fantassins anglais, ils profitaient aussi de la mobilité de leurs chevaux pour charger inlassablement. Les  soldats anglais  en position défavorable, ne pouvaient se défendre qu’avec les armes qu’ils avaient emportées au cours de leur poursuite.

 La bande inférieure du panneau montre les morts qui jonchent le terrain, certains ont la tête coupée (H), un autre a reçu un javelot dans le visage (J) le sol est parsemé de boucliers et d’épées cassées (K)

 Parmi les victimes anglaises  de la charge normande se trouvaient, selon la tapisserie de Bayeux, deux frères du roi : HIC CECIDERUM LEWIN ET GYRD FRATREAS HAROLD REGIS (ici succombèrent Lewin et Gyrd, frères du roi) . Selon Guillaume de Poitiers, la mort des deux frères du roi n’est pas rapportée à ce moment du récit mais beaucoup plus tard puisque, comme je l’ai mentionné sur le tableau comparatif des deux récits,  leurs corps ont été retrouvés à proximité de celui du roi Harold qui meurt à la fin de la bataille.

A suivre...

jeudi 24 septembre 2020

LA TAPISSERIE DE BAYEUX, témoignage de la vie et des mentalités au 11e siècle (37)

 CHRONOLOGIE DE LA SUITE ET DE LA FIN DE LA BATAILLE D’HASTINGS

Épisode 3 (voir tableau article précédent) : Guillaume se fait reconnaître et redonne courage à ses troupes

 Il se produit au moment de la retraite éperdue des armées de Guillaume et de ses alliés, racontée à la page 54. Le duc, à ce moment du récit, ôta son casque et se fit reconnaître. Il  arrêta les normands dans leur fuite et leur tint ce discours : « Voyez-moi tous. Je vis et je vaincrai, Dieu aidant. Quelle démence vous pousse à la fuite? Quel chemin s'ouvrira à votre retraite? Vous vous laissez repousser et tuer par ceux que vous pouvez égorger comme des troupeaux. Vous abandonnez la victoire et une gloire éternelle, pour courir à votre perte, et à une perpétuelle infamie. Si vous fuyez, aucun de vous n'échappera à la mort.»

 Cet épisode (entouré ci-dessous en rouge) est mentionné dans la tapisserie de Bayeux (voir tableau comparatif) avec la mention HIC EST DUX WILE.. (ici est le duc Guillaume).
 

On y aperçoit Guillaume (4) levant son casque pour se faire reconnaître alors que son porte-étendard (A) le désigne du doigt pour que tous puissent le voir. Le duc ne tient à la main qu’un bâton de commandement, il n’est ni armé d’une épée ni protégé par un bouclier, son porte-étendard ne porte pas d’armes non plus. Cette représentation de Guillaume n’est pas corroborée par le chroniqueur qui écrit que le duc combattait vaillamment avec son épée et son bouclier.

 Il convient aussi de remarquer que sur la tapisserie de Bayeux la scène se produit au moment où Guillaume est engagé dans la bataille finale qui lui donnera la victoire et non lors de la retraite de ses troupes découragées par leur échec comme l’écrit le narrateur

A suivre

dimanche 20 septembre 2020

LA TAPISSERIE DE BAYEUX, témoignage de la vie et des mentalités au 11e siècle (36)

 

CHRONOLOGIE DE LA SUITE ET DE LA FIN DE LA BATAILLE D’HASTINGS


Récit de Guillaume de Poitiers

Phylactère de la tapisserie de Bayeux

1 l’armée de Guillaume entame sa retraite, les normands croient que le duc a été tué.

 

2L’infanterie anglaise la poursuit croyant la victoire proche

 

3 Guillaume se fait reconnaître et redonne courage à ses troupes

 

4 les normands entament une contre-attaque qui isole l’avant-garde de l’armée anglaise  et la décime.

4 les normands attaquent les anglais, les isolent en petits groupes et les déciment

 

10  au cours de cette attaquent les deux frères du roi sont tués

5 cette  victoire partielle conduit les normands à utiliser la stratégie de l’attaque frontale contre d’autres contingents de l’armée anglaise,  c’est un échec.

 5 les anglais se ressaisissent et réussissent à stopper les attaques frontales des normands

6 Les normands usent d’une retraite stratégique pour isoler de nouveaux corps anglais lancés à leur poursuite afin de les attaquer par des mouvements d’encerclement. Cela réussit

 

7 les normands usent de la même stratégie d’enveloppement pour attaquer le corps principal de l’armée anglaise.

 

8 l’infanterie anglaise ploie sous les attaques incessantes des normands

 

9 le roi Harold est tué

 

10  les frères du roi sont également tués

 

11 les anglais fuient dans toutes les directions poursuivis par la cavalerie ducale

 

12 certains fuyards réussirent à se regrouper sur une colline entourée de marécages

12 les anglais se rassemblent sur une colline pour continuer la lutte

13 les normands les attaquent,  les premières charges échouent, les anglais disposant de l’avantage topographique

13 les normands les attaquent, leurs charges échouent

14 les attaques successives des normands réussissent, la colline est reprise

 

 

15 les anglais commettent une nouvelle fois l’erreur de descendre de la colline

 

16 par des charges successives,  les normands réussissent à isoler de petits groupes qu’ils peuvent plus facilement tuer

 

1 les normands croient que le duc a été tué, Guillaume lève son casque pour montrer qu’il est vivant.

 

9 le roi Harold est tué

 

11 les anglais fuient dans toutes les directions poursuivis par la cavalerie ducale


Sur quelle chronologie doit-on se baser pour raconter la fin de l’histoire de la bataille d’Hastings ?

Deux raisons me font penser que le récit de Guillaume de Poitiers est le plus vraisemblable.

   1 : Il est d’abord le plus complet, montrant l’alternance des déboires de l’armée de Guillaume et de ses réussites. La Tapisserie de Bayeux n’évoque que les réussites en occultant les moments pendant lesquels la défaite de l’armée ducale devenait vraisemblable.

On a l’impression que le récit de la bataille sur la tapisserie de Bayeux se réduit à deux phases : les difficultés passagères des armées ducales lorsque les anglais s’établissent sur des positions fortifiées et les victoires de la cavalerie normande sur l’infanterie anglaise dès que le combat se déroule en terrain plat. Comme lors de la guerre de Bretagne, délibérément, les phases d’échecs ont été largement occultées.

Cette manière de raconter la bataille, selon moi, se justifie par le fait que la tapisserie de Bayeux n’a pas pour but de raconter une conquête du duc mais beaucoup plus de montrer que Guillaume effectuait une guerre juste cautionnée par Dieu contre les impies ayant renié leur serment prêté sur les reliques 

2 : La deuxième raison qui me fait douter de la véracité de l’histoire racontée par la Tapisserie de Bayeux concerne les contradictions chronologiques relevées, la plus évidente concerne la mort du roi et de ses frères : la Tapisserie de Bayeux la place lors de deux phases différentes d’encerclement et de scission en petits groupes de l’infanterie anglaise. Guillaume de Poitiers nous indique simplement qu’après la bataille, les corps du roi et de ses frères ont été retrouvés sur le lieu de affrontement principal (§ 8,9 et 10 du tableau ci-dessus) ce qui l’a amené à penser que c’est là qu’ils avaient été tués.

 En conséquence de ce qui précède, même si cela peut paraître une position iconoclaste, je me propose de suivre la chronologie mentionnée par Guillaume de Poitiers en l’illustrant lorsque c’est possible, par l’image de la tapisserie de Bayeux  correspondant à l’épisode décrit dans la chronique.