REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
. Toutes les citations de mes articles proviennent de recherches sur les sites gratuits sur Internet



Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

jeudi 15 avril 2021

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (18)





  LE TRIPTYQUE DU « JARDIN DES DELICES » (6)

LE PANNEAU DE DROITE 

Le panneau représente les tortures de l’enfer selon le modèle conventionnel habituel à Jérôme Bosch  avec une organisation en trois parties :

   . (1) : la destruction des œuvres humaines

   . (2) : les damnés sont amenés en cortège sur le lieu des tourments

   . (3) : les supplices








 La partie supérieure du panneau montre la destruction des œuvres humaines.

Tous les bâtiments construits par les hommes sont en feu, l’incendie projette des lueurs ressemblant à celles de volcans en éruption. Le ciel est complètement obscurci par les fumées.

 Au centre de la scène est représenté un lac sur lequel vogue un bateau. Au premier plan, on distingue nettement deux moulins, l’un possède des ailes, l’autre est mû par une roue à aube


 Le cortège des démons et des damnés est représenté en dessous de la ville en flammes. Il forme un défilé suivant un chemin qui serpente vers le lieu des supplices :



   . A : le cortège débute par la sortie de silhouettes d’une porte de la ville détruite, c’est comme si les démons avaient assemblés les damnés à cet endroit avant d’incendier la cité.

   . B : puis il traverse le lac par un pont. Sur le pont se trouve une cohorte de démons qu’on devine à cheval et armés de pieds en cap, l’un d’entre eux porte un étendard noir.

   . C : au-delà du virage formé par le chemin, un grand nombre de damnés reconnaissables à leur nudité sont forcés d’avancer malgré leurs tentatives de résistance.

   . D : ils s’engagent ensuite dans une vallée échappant  ainsi à notre vue.

   . E : enfin, ils arrivent sur le lieu du supplice, poussés par les démons ; en avant du cortège, un damné a été obligé de monter sur une grenouille.

A suivre..

 

samedi 10 avril 2021

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (17)

 LE TRIPTYQUE DU « JARDIN DES DELICES » (5)

Le PANNEAU CENTRAL (5) 

La partie centrale montre un carrousel d’hommes (L) tournant autour d’un bassin circulaire empli d’eau. Les montures de ces hommes sont variées : chevaux, chat tigré, ânes, dromadaire portant une balancelle, sangliers, vaches, cerfs ainsi que des animaux fantastiques (licorne) ou hybrides (cheval à tête d’oiseau).  Les cavaliers utilisent toute sorte d’artifices pour se faire remarquer : certains portent des bannières ornées d’oiseaux, d’autre tiennent de gros poissons, deux autres font de l’équilibrisme sur leurs montures…   

 Au centre, dans le bassin circulaire (M), certaines femmes se baignent, cependant, la plupart observent le carrousel et semblent en discuter avec leurs voisines, on peut penser que le but est, pour elles, de se choisir un homme avec lequel elles pourront avoir des relations amoureuses. Plusieurs femmes portent des fruits sur la tête, il peut s’agir de pommes (symbole de la tentation et du mal) ou de cerises (symbole de luxure).

La partie basse montre, en gros plan, les ébats amoureux quasiment érotiques  entre les couples,   sans cependant que l’on puisse parler de pornographie, ce que d’ailleurs l’époque n’aurait pas permis. Elle est si foisonnante de détails que je me bornerai à décrire des scènes particulièrement significatives :


     . (N) : deux personnages, la tête enfoncée dans une corolle de fleur dansent, ils portent des cerises à la main et sont entrelacés par des branches d’arbres portant des fruits. Au-dessus d’eux est posée une chouette (symbole au Moyen-âge du malheur et des mauvais esprits).

   . (O) : un groupe de femmes et d’hommes cueillent des fruits (des pommes ou des cerises ?) tandis qu’un homme présente une fraise à une femme, comme pour l’attirer dans ses rets.

   . (P) : un couple dans une forme sphérique flottant sur un petit lac  attire à lui une mûre  que d’autres, dans l’eau, s’apprêtent à déguster.

    . (Q) : sur le même lac, s’approche un groupe de gros oiseaux, certains portent des êtres humains et en particulier un couple composé d’un homme blanc enserrant une femme à la peau noire, sur la partie basse du panneau sont représentés d’autres personnes à la peau noire.

    . (R) : un couple est installé bien intimement dans un moule aux trois-quarts ouverte, portée par un homme.

     . (S) : un couple s’est enfermé dans un tronc d’arbre pour se livrer à des ébats amoureux. Derrière, un oiseau monté sur l’arbre distribue des fruits (cerises) à un grand nombre d’êtres assemblés autour de lui.

      . (T) : une femme émergeant d’un trou regarde tristement le comportement des humains, derrière elle se tient un homme habillé. Certains pensent qu’il pourrait s’agir d’Ève regardant tristement ce qu’est devenue l’humanité qu’elle a enfantée.

 Ce panneau central pose aux historiens de l’art, une énigme : quel était le dessein de Jérôme Bosch lorsqu’il peignit ces scènes ? De nombreuses interprétations ont été émises, je n’en citerai que quatre : 

 Certains y ont vu une signification pornographique suggérée (les grandes compositions florales comporteraient, selon eux, des phallus et des sexes féminins). Pour moi, cette interprétation n’est pas admissible, l’époque ne l’aurait pas permis.

D’autres donnent une explication ésotérique, ce qui, vu l’époque, est tout aussi peu probable,

 D’autres encore, pensent qu’il représente l’humanité avant le déluge, ce qui pourrait être vraisemblable ; pourtant cette hypothèse se heurte à de nombreuses interrogations : ainsi, il est rappelé dans la Bible, qu’après le péché originel, Adam et Ève se sont aperçus de leur nudité et l’ont couverte de feuilles, or les êtres humains du panneau central sont nus sans que cela ne les gênent.

La quatrième hypothèse découle d’une triple observation :    
     . D’abord la nudité assumée des êtres humains.
     . Ensuite l’impression que dans cette société, il n’y a ni hiérarchie sociale ni pouvoir constitué, ni d’exploitation de l’homme par l’homme : tous les êtres humains vivent librement et en paix,
     . En outre s’ajoute une autre remarque, le décor est semblable à celui de la création comme si une continuité existait entre les panneaux de gauche et du centre : grands motifs mi-architecturaux mi-floraux, campagne apaisée associant vertes prairies, lacs et forêts, lacs et bassins circulaires…

 Ces caractéristiques conduisent à imaginer que Jérôme Bosch aurait voulu représenter ce qui serait advenu si Adam et Ève n’avaient pas commis le péché originel (non d’ailleurs figuré sur le panneau de gauche), le panneau central représenterait alors le jardin d’Eden peuplés des descendants des premiers êtres humains.

Dans cette perspective, on peut facilement relier les scènes représentées dans le panneau central à celles du panneau de droite. Les êtres vivants dans le jardin d’Eden, au lieu de vivre sagement dans la dévotion de Dieu, se seraient dévoyés en pratiquant l’intempérance et la lubricité. Dieu ne pouvant l’admettre aurait donc livré ces êtres au Diable et au tréfonds de l’enfer. Dans cette hypothèse, le panneau central ne serait qu’une métaphore de la société du 15e siècle dominée par le péché.

Selon cette hypothèse, les trois panneaux du JARDIN DES DÉLICES, comme ceux du JUGEMENT DERNIER racontent une histoire :

     . La création d’Adam et Ève dans le jardin d’Eden
     . Les êtres humains vivants dans le jardin d’Eden n’ont pas respecté les « commandements de Dieu »
     . Dieu les punit en les livrant au Diable et en les vouant à l’enfer.

 Il est cependant à remarquer que cette hypothèse ne cadre pas avec le panneau de droite qui représente dans sa partie supérieure la destruction œuvres humaines et en particulier de bâtiments qui n’existent pas sur le panneau central.

 

mercredi 7 avril 2021

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (16)


 LE TRIPTYQUE DU « JARDIN DES DELICES » (3)

Le PANNEAU CENTRAL (4) 

Le panneau central comporte trois parties et, selon moi, se lit de haut en bas : 

     . (1) Un lac d’où émergent quatre rivières

     . (2) Un carrousel

     . (3) Les délicieux effets du péché.



Comme sur les autres œuvres de Jérôme Bosch et, conformément aux règles picturales des époques antérieures, le peintre n’utilise pas la perspective, il se borne à superposer les plans en dessinant des motifs de plus en plus petits au fur et à mesure que le regard passe du bas vers le haut, cette technique donne l’illusion d’espace et de profondeur.

 Cette méthode de peinture, effectuée de haut en bas, permet aussi de passer  de scènes vues dans leur ensemble donnant l’atmosphère générale, à des représentations très détaillées qui dévoilent la véritable signification de l’œuvre.

La partie supérieure comporte, à l’arrière-plan, une ligne de montagnes bleutées (F) : en avant de celles-ci, est figuré un lac (G) alimenté par quatre rivières, deux de ces rivières proviennent de compositions (H) mi-architecturales, mi-florales associant des formes complexes pour lesquelles le peintre a fait œuvre d’une imagination débridée et quasiment onirique. Trois autres compositions de ce type (I) sont représentées, l’une est située au milieu du lac, les deux autres au bord des rivières. La base de quatre sur cinq de ces compositions est formée d’un espace creux dans lequel se trouvent des êtres humains Certains sortent de ces espaces pour aller dans l’eau, d’autres s’y sont déjà installés.

Une disposition semblable comportant aussi un lac pourvu d’un motif décoratif et quatre rivières allant en digitant était déjà représentée mais sur le panneau consacré au paradis. Il est important de le noter.

Dans le lac se baignent de nombreux personnages. D’autres se trouvent sur les berges. Parmi eux, deux groupes attirent l’attention :

     . (J) des êtres humains sortent de l’eau pour se réfugier dans un œuf

     . (K) d’autres, sont assis en rond autour d’une énorme fraise (dans la symbolique médiévale, la fraise est symbole de plaisir, de l’amour et de la tentation).

A suivre...