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vendredi 10 février 2023

TALLINN CAPITALE DE L’ESTONIE (1)

 UN SITE EXCEPTIONNEL

 

La ville de Tallin (anciennement Reval) est, selon moi, une des villes baltes ayant le mieux conservé les traces de son passé germanique : en parcourant la ville, on se sent non dans une ville d’Estonie mais plutôt dans une cité née à la fois des traditions croisées et  hanséatiques avec, même, un rappel de l’architecture des conquérants russes.

 Le cœur primitif de la cité fut une colline appelée TOOMPEA située à peu de distance du port ; une forteresse en bois y est mentionnée en 1154 par Al Idrissi. De 1217 à 1345, la forteresse,  ainsi que la province de l’Estonie du nord, est possession du Danemark, qui y fera construire un premier château en pierres composé d’une tour et d’une courtine.

 En 1345, le roi de Danemark vendit l’Estonie à l’ordre militaro-monastique Livonien-Teutonique qui gardera Tallinn  jusque 1561 et transformera le château lui donnant une grande partie de son aspect actuel.

 Au pied de la colline, se développa une ville basse qui devint très vite prospère grâce à sa situation géographique  exceptionnelle comme le montre la carte ci-contre : Tallinn est située sur le littoral sud du Golfe de Finlande, face à Helsinki, dans une anse cantonnée de deux péninsules permettant l’installation d’un port bien protégé et, de ce fait, créant un site favorable au commerce :

     . Vers l’ouest, la cité est en liaison, par  la mer Baltique, avec la Scandinavie, le Danemark mais aussi avec les villes de la Hanse Germanique.

 . Vers l’Est, il est possible de gagner le fond  du golfe de Finlande puis de remonter le cours de la Neva jusqu’au lac Ladoga et, par le Volkov arriver à Novgorod, puis, au prix de portages, de descendre le cours du Dniepr jusqu’à la mer Noire et l’Empire Byzantin ou celui de la Volga jusqu’à la mer Caspienne, ce qui permettait des relations avec le monde arabe et asiatique

 Cette route fluviale fut ouverte par les Varègues qui fondèrent, en particulier, la cité-état de Novgorod et la principauté de Kiev puis, partiellement, par les marchands de la Hanse germanique qui fondèrent à Novgorod, un de leurs quatre principaux comptoirs, où étaient échangés les produits russes (miel, cire, fourrures) contre des denrées provenant de l’Europe occidentale (sel, vin, harengs, argent, cuivre article de luxe, étoffes de laine…).

 La ville basse bénéficia de la faveur des rois de Danemark qui lui conférèrent le 15 mai 1248 le droit de Lubeck  et la possibilité qui en découlait de s’auto-administrer et d’être régie par ses propres lois. En outre, le Danemark fit construire, à la même époque, le premier mur d’enceinte dont on peut voir de nombreux restes actuellement.

 Sous la domination de l’ordre Livonien-Teutonique, Tallinn devint membre de la ligue hanséatique et reçut le droit d’Etape. La ville, à cette époque, devint une des plaques tournante du commerce hanséatique : cette importance  commerciale de la cité, est montrée, en particulier, par le fait qu’en 1442, 47 navires chargés de sel en provenance des pays de la Loire, arrivèrent simultanément dans le port de la cité.

 La prospérité attira aussi de nombreux immigrants d’origine germanique qui s’installèrent dans la cité, lui donnant un aspect hanséatique qui en fait tout son charme.

 La prospérité de la ville déclina à partir du 16e siècle du fait du déclin de la Hanse et surtout des  guerres et des appétits de conquête des pays limitrophes, comme je le mentionnerai ci-après.

 Ainsi, l’actuelle ville de Tallinn se compose de deux ensembles que l’on perçoit encore nettement du fait qu’une grande partie des remparts a été conservée :

     . TOOMPEA, autour de son château et de la cathédrale, forme le centre politique administratif et religieux  de la cité. C’est une ville plutôt calme comportant de nombreuses résidences nobiliaires.

     . ALL LINN, la vieille ville centrée autour de la place du marché sur laquelle trône l’hôtel de ville ; c’est une cité d’artisans et de commerçants bruissante autrefois d’activités et de dynamisme à l’époque où elle était affiliée à la Hanse Germanique et qui conserve de nombreux témoignages de sa prospérité des 14e-16e siècles. 

 

La politique coloniale de la MONARCHIE DE JUILLET en ALGÉRIE (26) : conclusion générale

 Cet article servira de conclusion à la fois au chapitre relatant la conquête de l'Algérie et à celui concernant les réactions des intellectuels face à cette conquête. 

                      CONCLUSION GENERALE

Selon moi, la conquête de l’Algérie, révèle un quadruple engrenage conduisant à la fois à l’asservissement physique et civilisationnelle  de toute une population conquise et à l’émergence d’une mentalité de puissance coloniale en métropole qui induira postérieurement à la conquête de nombreux autres territoires extra-européens.

En ce sens, on peut considérer les évènements survenus en Algérie pendant la monarchie de juillet comme une expérimentation des méthodes à appliquer pour s’emparer de territoires coloniaux.

Le premier engrenage concerne l’action de l’armée En 1830, l’intervention militaire à Alger n’avait pour but principal que de redorer le pouvoir décadent de Charles 10 en réparant l’outrage à la France faite par le Dey, et aussi, à faire cesser les actes de piraterie commis en Méditerranée. Profitant de la faiblesse des premiers gouvernements de la monarchie de juillet, l’armée prit la décision de poursuivre la conquête, en s’emparant d’abord des principales villes littorales de la côte nord-africaine. Ensuite, elle s’attaquant à l’arrière-pays de ces villes, sous le prétexte de les sécuriser, en luttant contre les raids des tribus, soucieuses de bouter les infidèles hors de leurs terres ancestrales. Enfin, faute de venir à bout de ces tribus, l’armée entreprit la conquête globale du pays.

Cette politique impérialiste impliqua que l’armée ait le contrôle total de la situation. La conquête devint la chasse-gardée de l’état-major qui se conduisit de manière proconsulaire, en se considérant comme un état dans l’Etat. Le gouvernement fut sans cesse mis devant le fait accompli et dût cautionner les décisions des militaires. C’est ainsi que le pouvoir absolu de fait du commandant en chef de l’armée d’Afrique fut légalisé par les ordonnances de 1834 qui remit au gouverneur général la totalité des pouvoirs, établissant sa dictature de fait sur l’Algérie.

 Le deuxième engrenage fut celui de la violence. L’inadaptation des méthodes de guerre sévissant en Europe aux combats contre les tribus, amena les chefs militaires à utiliser des méthodes de plus en plus radicales, comme en témoignent les directives de Bugeaud : «  Le but n'est pas de courir après les Arabes, ce qui est fort inutile ; il est d'empêcher les Arabes de semer, de récolter, de pâturer… de jouir de leurs champs… Allez tous les ans leur brûler leurs récoltes…  ou bien exterminez-les jusqu'au dernier » : le but de la guerre n’était plus seulement de vaincre les armées mais aussi de s’attaquer à la population civile de vieillards de femmes et d’enfants en pratiquant la terre brûlée. Il fallait inspirer aux populations arabes une telle terreur qu’elles soient amenées à se plier au joug français par peur d’être exterminées. Notre époque qualifierait cette  politique de génocidaire.

Certes, on pourrait objecter que l’inhumanité des combats caractérisait aussi les tribus arabes et leurs raids meurtriers, pourtant  cette inhumanité des autochtones était d’une autre nature : les tribus arabes luttaient pour chasser les envahisseurs qui leur volaient leurs terres ancestrales, leurs biens et même leur âme, alors que l’armée ne songeait qu’à protéger et étendre sa conquête.

Le troisième engrenage concerne le changement des mentalités dominantes régnant en métropole : on est passé, peu à peu, d’une extrême méfiance vis-à-vis du fait colonial, à une acceptation quasi générale de la conquête algérienne. Selon moi, deux facteurs ont principalement joué pour expliquer cette mutation : il y eut d’abord, l’exaltation patriotique devant le retour en puissance de la France, après l’humiliation des défaites de l’époque impériale, ainsi que l’impression de contrecarrer la politique anglaise en Méditerranée. Il y eut surtout l’action de la propagande perpétrée en faveur de la colonisation orchestrée par certains généraux comme le général Clauzel et par les médias :  il convient à cet égard de rappeler qu’à l’origine, la colonisation fut due à la présence de spéculateurs qui achetèrent à vil prix des terres agricoles afin de se constituer de grands domaines. Pour les cultiver, ils utilisèrent certes des autochtones, mais ils tentèrent aussi de trouver de la main d’œuvre européenne en faisant vanter par les médias la fertilité des terres algériennes. Puis on passa à l’idée de créer des villages de colonisation qui permettraient de suppléer l’armée pour la défense des possessions conquises. Comme pour l’expansion de la conquête, ce fut l’armée qui imposa sa politique : tantôt, elle opta pour une immigration limitée, tantôt, au contraire, elle incita le gouvernement à développer les villages coloniaux en facilitant les départs vers l’Algérie.

 Enfin, le quatrième engrenage concerna surtout les intellectuels et les hommes politiques : celui de l’affirmation de plus en plus insistante de la supériorité de la civilisation de l’Europe occidentale et de la mission civilisatrice de l’Europe et, en particulier, de la France. Ces théories montrent que tous les autres peuples de la Terre sont considérés comme arriérés et que ce serait bien de leur apporter les bienfaits de notre civilisation : pour progresser, il fallait donc que ces peuples abandonnent leurs cultures et modes de vie, ressentis comme rétrogrades, pour apprendre à vivre et à raisonner comme des européens. De ce fait, les  colonisateurs de l’Algérie n’eurent aucun scrupule à détruire tout ce qui provenait des cultures autochtones et en particulier de la civilisation musulmane : le régime ancestral des terres fut oublié, les mosquées furent détruites ou converties en églises, le droit français se substitua en grande partie au droit musulman… la supériorité raciale de l’Europe occidentale fut érigée en dogme intangible. Il en est malheureusement toujours ainsi, quoiqu’on en dise, au 21è siècle.