Cet article servira de conclusion à la fois au chapitre relatant la conquête de l'Algérie et à celui concernant les réactions des intellectuels face à cette conquête.
CONCLUSION GENERALE
Selon moi, la conquête de l’Algérie, révèle un
quadruple engrenage conduisant à la fois à l’asservissement physique et
civilisationnelle de toute une
population conquise et à l’émergence d’une mentalité de puissance coloniale en
métropole qui induira postérieurement à la conquête de nombreux autres
territoires extra-européens.
En ce sens, on peut considérer les évènements survenus en Algérie pendant la monarchie de juillet comme une expérimentation des méthodes à appliquer pour s’emparer de territoires coloniaux.
Le premier engrenage concerne l’action de l’armée En
1830, l’intervention militaire à Alger n’avait pour but principal que de
redorer le pouvoir décadent de Charles 10 en réparant l’outrage à la France
faite par le Dey, et aussi, à faire cesser les actes de piraterie commis en
Méditerranée. Profitant de la faiblesse des premiers gouvernements de la
monarchie de juillet, l’armée prit la décision de poursuivre la conquête, en
s’emparant d’abord des principales villes littorales de la côte nord-africaine.
Ensuite, elle s’attaquant à l’arrière-pays de ces villes, sous le prétexte de
les sécuriser, en luttant contre les raids des tribus, soucieuses de bouter les
infidèles hors de leurs terres ancestrales. Enfin, faute de venir à bout de ces
tribus, l’armée entreprit la conquête globale du pays.
Cette politique impérialiste impliqua que l’armée ait
le contrôle total de la situation. La conquête devint la chasse-gardée de
l’état-major qui se conduisit de manière proconsulaire, en se considérant comme
un état dans l’Etat. Le gouvernement fut sans cesse mis devant le fait accompli
et dût cautionner les décisions des militaires. C’est ainsi que le pouvoir
absolu de fait du commandant en chef de l’armée d’Afrique fut légalisé par les
ordonnances de 1834 qui remit au gouverneur général la totalité des pouvoirs,
établissant sa dictature de fait sur l’Algérie.
Certes, on pourrait objecter que l’inhumanité des combats caractérisait aussi les tribus arabes et leurs raids meurtriers, pourtant cette inhumanité des autochtones était d’une autre nature : les tribus arabes luttaient pour chasser les envahisseurs qui leur volaient leurs terres ancestrales, leurs biens et même leur âme, alors que l’armée ne songeait qu’à protéger et étendre sa conquête.
Le troisième engrenage concerne le
changement des mentalités dominantes régnant en métropole : on est passé,
peu à peu, d’une extrême méfiance vis-à-vis du fait colonial, à une acceptation
quasi générale de la conquête algérienne. Selon moi, deux facteurs ont
principalement joué pour expliquer cette mutation : il y eut d’abord,
l’exaltation patriotique devant le retour en puissance de la France, après
l’humiliation des défaites de l’époque impériale, ainsi que l’impression de
contrecarrer la politique anglaise en Méditerranée. Il y eut surtout l’action
de la propagande perpétrée en faveur de la colonisation orchestrée par certains
généraux comme le général Clauzel et par les médias : il convient à cet égard de rappeler qu’à
l’origine, la colonisation fut due à la présence de spéculateurs qui achetèrent
à vil prix des terres agricoles afin de se constituer de grands domaines. Pour
les cultiver, ils utilisèrent certes des autochtones, mais ils tentèrent aussi
de trouver de la main d’œuvre européenne en faisant vanter par les médias la
fertilité des terres algériennes. Puis on passa à l’idée de créer des villages
de colonisation qui permettraient de suppléer l’armée pour la défense des
possessions conquises. Comme pour l’expansion de la conquête, ce fut l’armée
qui imposa sa politique : tantôt, elle opta pour une immigration limitée,
tantôt, au contraire, elle incita le gouvernement à développer les villages
coloniaux en facilitant les départs vers l’Algérie.
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