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jeudi 3 février 2022

LA politique coloniale de la MONARCHIE DE JUILLET en ALGÉRIE (18)

 LE SYSTÈME BUGEAUD, GOUVERNEUR GÉNÉRAL DE L’ALGÉRIE DE 1841 À 1847

Dès son arrivée en Algérie, le général Bugeaud fait rédiger deux proclamations destinées aux habitants de la colonie et à l’armée.

LA PROCLAMATION DE BUGEAUD AUX HABITANTS DE L’ALGERIE :

En voici les idées essentielles :

Bugeaud annonce d’abord son revirement total face à la politique menée en Algérie (nom désormais utilisé depuis 1839 pour qualifier la colonie) : Après avoir tenté, en vain, de convaincre les français de l’inanité de l’occupation du pays, il appliquera désormais la politique décidée par le gouvernement, celle de la conquête globale du pays. C’est désormais la seule option existante puisqu’il est impossible de faire confiance aux « arabes » en ce qui concerne le respect des traités.

La conquête sera cependant inutile si on ne met pas en place une colonisation du pays.

Cette colonisation ne devra pas être basée sur le développement des villes et sur la création de grandes fermes isolées. Celles-ci obligent le commandement militaire à créer, à leur proximité, des postes fortifiés pour les protéger et donc à fractionner les effectifs en rendant difficiles les opérations militaires d’envergure.

 Bugeaud prône la mise en place de villages défensifs dont les habitants seront aptes à cultiver le sol et à se défendre jusqu’à l’arrivée, si nécessaire, d’une colonne militaire de secours. Ce système est conçu à l’image des colonies romaines peuplées de vétérans de l’antique Mauritanie.

Pour créer ces villages et les rendre attirants aux futurs colons, il convient de faire appel aux investisseurs privés, tant de la colonie que de la métropole, afin de bonifier les terres pour les rendre cultivables et aussi de construire des maisons.

LA RAZZIA : MÉTHODE DE GUERRE IDÉALE CONTRE LES TRIBUS ARABES.

Bugeaud, dès son arrivée au poste de gouverneur militaire, met en application les méthodes qui lui avaient valu une des rares victoires contre les troupes d’Abd-El-Khader.

La tactique des razzias existe depuis toujours, en particulier en Algérie, mais elle fut systématisée par Bugeaud, comme on le constate dans un extrait d’une lettre envoyée par le capitaine Montaugnac à sa famille :

« le général Bugeaud, la veille de notre départ, réunit tous les officiers de la division et nous dit : la guerre que nous allons faire n'est plus une guerre à coups de fusil. C'est en enlevant aux arabes les ressources que leur sol leur procure, que nous pourrons en finir avec eux. Ainsi, partez donc, aller couper du blé et de l'orge »

Le message est clair : il semble quasiment impossible de pouvoir lutter avec les moyens conventionnels contre les tribus qui, rappelons-le, utilisent deux formes de guerre complémentaires :

     .   Les incursions et les coups de main là où on ne les attend pas suivis de retraite dès qu’apparaît un début de réaction de l’ennemi,

     . Les embuscades au moment où les français s’aventurent dans les étroites vallées montagnardes qu’ils contrôlent.

En conséquence, selon Bugeaud, il faut adapter les méthodes de guerre aux caractéristiques locales et généraliser la razzia qui est, selon lui, la seule forme de guerre qui convienne. Certes les razzias étaient déjà utilisées précédemment mais ce n’était qu’un moyen parmi d’autre de combattre les tribus,

Bugeaud va théoriser cette forme de guerre ; c’est, en particulier, ce que Tocqueville mentionne dans son rapport à la chambre de 1847 :

 « Aujourd’hui, on peut dire que la guerre d’Afrique est une science dont tout le monde connaît les lois et dont chacun peut faire l’application à coup sûr. Un des plus grands services que M le Maréchal Bugeaud ait rendu à son pays, c’est d’avoir étendu, perfectionné et rendu sensible à tous cette science nouvelle. …

Il s’agissait moins de vaincre un gouvernement que de comprimer un peuple…. Il ne s’agissait plus, comme en Europe, de rassembler de grandes armées mais de couvrir le pays de petits corps légers qui puisse atteindre la population à la course. »

Selon Bugeaud, l’intérêt de la razzia est double :

     . En prenant par surprise une tribu, on peut à la fois faire le maximum de victimes et surtout détruire ses approvisionnements afin d’affamer toute sa population, y compris femmes et enfants.

     . La razzia amènera les tribus voisines, effrayés par la violence et la sauvagerie des français, à faire leur soumission en livrant par exemple des otages.

LA TECHNIQUE DE LA RAZZIA 

Elle a été parfaitement décrite dans un livre écrit par Philippe DUCUING (1817-1875) et paru en 1868, appelé la « guerre de montagne », dont un chapitre concerne les guerres en Kabylie et où on voit mis en œuvre la technique Bugeaud :

Le long texte qui suit permet de se faire une idée du déroulement d'une razzia:

LA CONSTITUTION D'UNE COLONNE ET LA MARCHE VERS L'ENNEMI

« Le système des colonnes mobiles, inauguré par le général Bugeaud, avait plus fait pour la conquête dans une seule campagne que toutes nos expéditions depuis dix ans.

« Vous devez aller soumettre ou punir une tribu lointaine, et vous n’emportez avec vous que dix jours de vivres, parcimonieusement calculés. Impossible d’ailleurs de bivouaquer la nuit, car il faut cacher sa marche à l’ennemi. Au risque donc de s’égarer dans les ténèbres et de doubler les fatigues par l’insomnie, il faut marcher, car on ne peut espérer atteindre l’Arabe que par surprise.

Les éléments constitutifs de ces colonnes mobiles avaient été choisis avec un soin extrême.. Les chasseurs d’Afrique (1) marchaient toujours en tête : lorsque la tribu poursuivie était en vue, ils prenaient le galop et la forçaient à s’arrêter pour combattre ; cela donnait aux zouaves (2) qui les suivaient le temps d’arriver pour achever le combat. Si les Arabes fuyaient, les spahis (3), qui se tenaient à portée sur les flancs de la colonne, se mettaient à leur poursuite pendant que le train des équipages recueillait les dépouilles abandonnées par les fugitifs. Lorsque les cavaliers allaient en reconnaissance, les fantassins préparaient le repas ou le bivouac. »

A « l’arrière-garde, marche un escadron, soit pour ramasser les traînards, soit pour éloigner les Arabes, car ceux-ci ont pour habitude constante de se porter sur la queue de nos colonnes, afin d’enlever les éclopés et de s’en faire un trophée, afin aussi de retarder la marche en forçant l’arrière-garde à s’arrêter pour faire face. Si on avance résolument, ils se cachent ; mais, sitôt qu’on hésite ou qu’on recule, ils fondent sur vous comme un orage subitement formé. »

Les éclaireurs indigènes se mettent en campagne ; habillés absolument comme les Arabes, ils vont à la chasse des prisonniers. Ils se mêlent aux nomades ; s’ils en trouvent quelqu’un d’écarté, ils le ramassent et le rapportent pour l’interroger.

Ainsi, apparaît clairement, dans ce texte, l’organisation d’une colonne :

     . En tête, les éclaireurs indigènes sont chargés de faire des prisonniers parmi les arabes afin de connaître l’endroit où campent les tribus.

     . Derrière, la cavalerie des chasseurs d’Afrique a pour mission de barrer la route des guerriers tribaux et de les rabattre vers l’infanterie pour les amener à combattre.

      . Derrière, se trouvent les zouaves à pied, ils sont encadrés par la cavalerie des spahis qui poursuivront ceux qui pourraient s’échapper.

      . Enfin, un escadron à cheval ferme la marche, il est chargé, entre-autre, de réprimer les attaques qui pourraient se produire du fait de petits groupes ennemis isolés.

 LA MÉTHODE DE COMBAT utilisée par la colonne :

  .  L’attaque se produit à l’aube au moment où les musulmans se préparent à la prière afin que la surprise soit totale,

  . Il faut immédiatement agir et s’emparer du camp sans se laisser intimider par les tirs des combattants de la tribu : en effet, ceux-ci font mine d’attaquer la colonne puis font retraite immédiatement, si la colonne commet l’erreur de les suivre, cela laisse le temps aux membres de la tribu de prendre leurs tentes et tous leurs biens et de disparaître.

 C’est ce qu’explique M Ducuin dans le texte ci-dessous :.

« Enfin, après bien des fatigues, bien des privations, bien des dangers de toute nature, nous atteignons au but de l’expédition. Voici le foyer de l’insurrection. Nous sommes sur le terrain où la tribu rebelle a planté ses tentes. Nos soldats pénètrent dans le camp ennemi une demi-heure avant le jour, au moment même où les Arabes vont faire leurs ablutions. Y pénétrer plus tôt, ce serait donner le temps à l’ennemi de s’échapper à la faveur de la confusion et des ténèbres ; plus tard, ce serait se découvrir et par conséquent leur donner le temps de nous éviter. Il faut enlever le camp à la baïonnette et sans répondre au feu de l’ennemi,

 En effet, les réguliers de la tribu surprise, portent nos efforts d’un seul côté ; ils s’exposent bravement à nos coups, résistent quelque temps à notre attaque et nous attirent enfin avec grand bruit à leur poursuite. Le jour venu, on s’aperçoit que le douar ou la smala, la tribu enfin, a disparu d’un autre côté, et il nous est impossible de retrouver ses traces. Quand, à défaut des tentes, le territoire abandonné par les tribus nous reste, on court aux silos, car l’orge manque aux mulets et aux chevaux ; l’orge, la providence de cette guerre ! …

Il arrive bien des fois aussi que ces coups de main lointains ne réussissent pas. Les tribus, averties à temps de notre approche, se sont enfuies au désert, détruisant tout ce qu’elles n’ont pu emporter. Les vivres manquent, les munitions sont épuisées, les ambulances sont remplies. Il faut retourner en arrière. »

LA RETRAITE

Vient ensuite la retraite, elle est source de nombreux dangers car les membres de la tribu ayant échappé au massacre harcèlent le convoi et tuent les fuyards :

« Dans la retraite, c’était l’infanterie qui formait l’arrière-garde ; elle soutenait le choc des Arabes, qui attaquent toujours une colonne en retraite. Au lieu de faire un retour offensif, l’infanterie se massait autour du convoi. Les Arabes alors s’engageaient de plus près ; lorsqu’ils étaient bien engagés, les chasseurs d’Afrique quittaient subitement la tête de la colonne, et tombaient au galop sur le flanc des ennemis. …Les corps égarés tombent presque inévitablement dans les embuscades des Arabes toujours en éveil et partout cachés comme des bêtes fauves, guettant la proie attendue. »

LA RAZZIA VUE PAR LE LIEUTENANT-COLONEL MONTAUGNAC

Dans ses lettres, le capitaine de Montaugnac, devenu depuis peu lieutenant-colonel, raconte des scènes semblables. La description d’une razzia est contenue, entre autres, dans une lettre de décembre 1841. Cette razzia réussit au vu du nombre de prises effectuées :

« Le 21 nous recevons l’ordre de filer à minuit sans tambour ni trompette. À la pointe du jour, nous tombons sur une tribu qui se croit parfaitement à l’abri dans ses excavations et ses ravins escarpés. Le régiment de spahis est lancé, nos deux bataillons d'élite qui font tête de la colonne, se précipitent dans toutes ces anfractuosités presque infranchissables ; deux heures après nous ramenons 614 bœufs, 684 moutons 400 ânes, 60 chevaux et 120 prisonniers hommes, femmes et enfants. Vous voyez que la Providence nous protège ! Nous avons tué une cinquantaine d'individus.  

Ce genre d’expédition a quelque chose de très bizarre et offre, en même temps, des scènes bien pénibles. Aussitôt l'emplacement de la tribu connu, chacun se lance, se disperse dans une direction quelconque ; on arrive sur les tentes dont les habitants réveillés par l'approche des soldats, sortent pêle-mêle avec leurs troupeaux, leurs femmes et leurs enfants ; tout ce monde se sauve dans tous les sens ; les coups de fusil partent de tous les côtés sur les misérables. Surpris, sans défense, hommes, femmes, enfants, poursuivis, sont bientôt enveloppés et réunis par quelques soldats qui les conduisent.

Les bœufs, les moutons, les chèvres, les chevaux, tous les bestiaux enfin qui fuient, sont vite ramassés. Celui-ci attrape un mouton, le tue, le dépèce, c’est l’affaire d’une minute…   Les autres se jettent sous les tentes où ils se chargent de butin et chacun sort de là, affublé, couvert de tapis, de paquets de laine, d'armes et d'une foule d'autres choses que l'on trouve souvent en très grande quantité dans ces douars souvent très riches. Le feu est ensuite mis partout à ce que l'on ne peut emporter, bêtes et gens sont conduits au convoi.

On quitte alors la position, fier de son succès ; alors commence la fusillade : les cavaliers qui d'abord avaient pris la fuite, reviennent lorsqu'ils voient la colonne leur tourner le dos ; ils harcèlent les arrière-gardes, on leur riposte, on les éloigne et on rentre avec des prises, glorieux trophées d’une brillante journée. »

Deux termes, dans ce récit, nous éclairent sur les sentiments profonds de Montagnac : « la Providence nous protège » et « brillante journée » : ils expriment selon moi, l'exaltation de la victoire. 

Dans d’autres lettres dont je citerai ci-dessous quelques extraits que je trouve significatifs et que j’ai classé chronologiquement, le colonel témoigne de son évolution mentale au fur et à mesure que le temps passe.

D’abord, on trouve, dans les deux premiers extraits mentionnés ci-dessous, la conscience que ce qu’il commet est abominable mais nécessaire, il exprime même parfois de la compassion envers ceux que la razzia condamne à la mort par la famine :

« Nous sommes dans les bois épais, pêle-mêle avec les arabes qui fuient, les chevaux qui renversent leurs charges, les chameaux qui se sauvent. Les femmes, les enfants accrochées dans les épaisses broussailles qu’ils sont obligés de traverser, se rendent à nous. On tue, on égorge, les cris épouvantés des mourants se mêlent au bruit des bestiaux qui mugissent, bêlent de tous les côtés. C'était un enfer ! chaque soldat arrive avec quelques pauvres femmes ou enfants qu’il chasse comme des bêtes devant lui ou tient par le cou un homme qui veut encore résister.. »   (mars 1842)

« Il est impossible de se figurer à quelle extrémité nous avons réduit ces malheureuses populations, nous leur avons enlevé pendant quatre mois, toutes leurs ressources en blé ou en orge. Nous leur avons pris leurs troupeaux, leurs tentes, leurs habits, tout leur objet de ménage, en un mot, toute leur fortune … il fallait couper les ailes à l'oiseau farouche pour le garder » (Avril 1842)

Les extraits suivants expriment une nette évolution mentale, sans doute due à la résistance des tribus qui oblige à recommencer sans cesse les razzia : pour les réduire, il faut tout saccager, faire place nette, tuer tous les arabes pris en combattant et déporter les autres, homme, femmes et enfants.  Ces deux extraits témoignent encore de quelques sentiments humains, il ne s’agit que de faire des exemples qui serviront à terrifier les autres tribus afin qu’elles se soumettent.

« Qui veut la fin veut les moyens. Selon moi toutes les populations qui n'acceptent pas nos conditions doivent être rasées, tout doit être pris, saccagé, sans distinction d'âge ni de sexe ; l'herbe ne doit plus pousser là où l'armée française a mis le pied. Si vos tendres cœurs saignent d'anéantir tous ceux qui résistent, entassez hommes, femmes et enfants sur des bâtiments de l'État, expédiez-les-moi tout cela aux îles Marquises ou ailleurs..(janvier 1843)

Chaque fois qu'un chef de tribu a trahi ou n'a pas agi avec vigueur, tous les hommes de la tribu doivent être tué et le reste exporté (pour déporté). Les tribus doivent nourrir l'armée lorsqu'elle voyage et, si des vivres n'arrivent pas à point donné, razzia pour la première fois, mort et exportation en cas de récidive (janvier 1843) »

Les deux derniers extraits des lettres du colonel Montagnac ajoutent encore à l’impression d’horreur, avec, d'abord, la scène de la décapitation d’un chef de tribu que le colonel voulut faire effectuer par un spahi arabe « afin de les compromettre complètement vis-à-vis des autres arabes du pays »,

Le colonel montre alors qu’il en est arrivé à un degré total de déshumanisation à la fois en voulant exterminer tous les hommes et déporter tous les autres et en comparant les arabes à des chiens :

« Je lui fis couper la tête et le poignet gauche et j’arrivai au camp avec sa tête piquée au bout d’une baïonnette et son poignet accroché à la baguette d’un fusil.

On ne se fait pas d'idée de l'effet que produit sur les Arabes une décollation de la main des chrétiens : il se figure qu'un arabe, qu'un musulman décapité par les chrétiens ne peut aller au ciel ; aussi, une tête de coupée produit une terreur plus forte que la mort de 50 individus.

Voilà mon brave ami comment il faut faire la guerre aux arabes : tuer tous les hommes jusqu’à l’âge de 15 ans, prendre toutes les femmes, les enfants, en charger des bâtiments, les envoyer aux îles Marquises ou ailleurs ; en un mot,  anéantir tout ce qui ne rampera pas à nos pieds comme des chiens » (mars 1843)

« Nous battons la campagne, nous tuerons, nous brûlons, nous coupons, nous taillons, pour le mieux dans le meilleur des mondes » (Mai1843)

Cette dernière phrase se passe de tout commentaire ! 

NOTE 1

   .1 : Cavalerie autochtone puis mixte incorporée en 1831 dans deux régiments de chasseurs à cheval provenant des escadrons débarqués en 1830.

   . 2 : les zouaves ont été créés par l’incorporation des soldats kabyles employés par le Dey, ils seront ensuite composés d’autochtones et français avant d’être composé uniquement de français en 1841

  . 3 : cavalerie autochtone à l’origine employée par le Dey et incorporés dans l'armée d’Afrique.

Rappelons que l’ensemble de ces forces fut autorisé par la loi du 9 mars 1831 permettant aux généraux commandant les pays occupés à former des corps militaires composés d’indigènes et d’étrangers. C'est la première mention des tirailleurs, zouaves, chasseurs indigènes, spahis…  

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