L’ANALYSE DE LA SITUATION DE L’ALGERIE A LA FIN DE LA MONARCHIE DE JUILLET VUE PAR TROIS INTELLECTUELS
PROSPER ENFANTIN
LE CONSTAT DE CE QUI A DÉJÀ ÉTÉ RÉALISÉ EN ALGÉRIE
LES COLONIES
CIVILES.
Tandis que « pour les
colonies militaires…, il y avait beaucoup à conserver peu à détruire et
fort peu à innover » du moins quant à la constitution de la
propriété, dans « les colonies civiles, au
contraire, je crois qu'il y a considérablement à innover, beaucoup à
détruire et fort peu à conserver ».
. certains, appelés « barons d’Algérie », se sont fait octroyer
de grandes concessions de terres, ou bien ont acheté de vastes propriétés,
sur lesquelles ils ont placé ou voulu placer un nombre assez considérable
de petits métayers, les réduisant quasiment en servage,
. d’autres ont acheté, vendu, racheté,
revendu, des maisons, des jardins, des terres, sans s'inquiéter de
ces maisons, de ces jardins et de ces terres, dévastant les maisons,
dépouillant les jardins et laissant les terres en friche.
. Les rares villages qui ont été créés,
ont complètement échoué du fait de la méthode employée pour les créer : « Nous agissons à peu près d'une manière inverse de ce qu’il
convient de faire : nous n'établissons jusqu'à présent, en Algérie, que
des individus pris au hasard, n'ayant aucun lien entre eux ; et,
lorsque nous leur avons donné des terres, un maire, des gendarmes et même
un percepteur, et quelquefois un curé, nous croyons avoir fondé un village
colonial … Quel miracle si de semblables agglomérations d'individus
avaient la moindre force collective pour résister aux Arabes, ou pour
combattre avec succès les puissantes exigences du sol et du climat. La plus
faible tribu arabe dépouillerait facilement le plus gros …de ces villages. Quelques
maraudeurs suffiraient pour mettre sur pied, nuit et jour, tous ces petits
bourgeois campagnards, gardant chacun son lopin de terre et sa gerbe de
blé. De pareilles concessions sont déjà faites, des villages,
fort heureusement peu nombreux et près de la capitale, sont fondés sur ce principe de liberté, de divisibilité, de mobilité, que je crois
tout-à-fait incompatible avec l'ordre, la constance que nous devons avoir
en Algérie » pour coloniser le pays.
L’auteur va alors élaborer une méthodologie de la création du
village colonial :
. « Lors donc que
des colons se présentent ou que le Gouvernement les appelle, la première
chose n'est pas de leur distribuer individuellement des terres,
comme on le fait aujourd’hui ; c'est de les former en société, de
fixer les bases de leur association, de déterminer le nombre convenable de
familles pour telle localité, l'étendue du territoire qu'elles occuperont, la
forme de leurs villages et de leurs fermes, leur mode d'organisation et
leur règlement de travail ; en un mot, de les. constituer en
corps. ».
. Il conviendra
ensuite de créer la colonie : son territoire sera délimité et cadastré par
l’Etat. Il sera impossible de le diviser. La colonie ne se composera d’aucune ferme isolée, les colons seront
regroupés dans un village au centre du terroir. Sauf dans les jardins, la
culture du sol sera effectuée en commun par les familles qui composent le
village.
.
« la propriété aurait le caractère foncier quant au fond, et mobilier quant au titre » on
distribuera à chaque ferme composant le village des coupons qui lui
permettraient de recevoir sa part des recettes du village, déduction faite des
frais généraux (entre autres, achat de semences et de matériel, frais de
fonctionnement de l’association, impôts et amortissements…)
. . « Les recettes générales comprendraient, outre
les fruits du travail, le produit des lots de terre, vendus, pour
jardins ou maisons, à des cultivateurs ou des artisans qui viendraient se fixer
sur le territoire de la société. »
. L’association « seraient gérée et administrée par les intéressés
sous la surveillance des délégués de l'autorité publique, et conformément
à des statuts autorisés par le Gouvernement, acceptés par les intéressés et
publiés officiellement.
à suivre...
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