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mercredi 14 décembre 2022

Les intellectuels face à la conquête de l'Algérie de la monarchie de juillet (13) : PROSPER ENFANTIN

L’ANALYSE DE LA SITUATION DE L’ALGERIE A LA FIN DE LA MONARCHIE DE JUILLET VUE PAR TROIS INTELLECTUELS

PROSPER ENFANTIN

LE CONSTAT DE CE QUI A DÉJÀ ÉTÉ RÉALISÉ EN ALGÉRIE

LES COLONIES CIVILES. 

Tandis que « pour les colonies militaires…, il y avait beaucoup à conserver peu à détruire et fort peu à innover » du moins quant à la constitution de la propriété, dans « les colonies civiles, au contraire, je crois qu'il y a considérablement à innover, beaucoup à détruire et fort peu à conserver ».

 D’abord Prosper enfantin se livre à une sévère critique des systèmes de colonisation mis en place  dans les premiers temps de la conquête. Il montre que les trois formes d’expériences menées jusque-là ont été des échecs :

     . certains, appelés « barons d’Algérie », se sont fait octroyer de grandes concessions de terres, ou bien ont acheté de vastes propriétés, sur lesquelles ils ont placé ou voulu placer un nombre assez considérable de petits métayers, les réduisant quasiment en servage,

     . d’autres ont acheté, vendu, racheté, revendu, des maisons, des jardins, des terres, sans s'inquiéter de ces maisons, de ces jardins et de ces terres, dévastant les maisons, dépouillant les jardins et laissant les terres en friche. 

     . Les rares villages qui ont été créés, ont complètement échoué du fait de la méthode employée pour les créer : « Nous agissons à peu près d'une manière inverse de ce qu’il convient de faire : nous n'établissons jusqu'à présent, en Algérie, que des individus pris au hasard, n'ayant aucun lien entre eux ; et, lorsque nous leur avons donné des terres, un maire, des gendarmes et même un percepteur, et quelquefois un curé, nous croyons avoir fondé un village colonial …  Quel miracle si de semblables agglomérations d'individus avaient la moindre force collective pour résister aux Arabes, ou pour combattre avec succès les puissantes exigences du sol et du climat. La plus faible tribu arabe dépouillerait facilement le plus gros …de ces villages. Quelques maraudeurs suffiraient pour mettre sur pied, nuit et jour, tous ces petits bourgeois campagnards, gardant chacun son lopin de terre et sa gerbe de blé. De pareilles concessions sont déjà faites, des villages, fort heureusement peu nombreux et près de la capitale, sont fondés sur ce principe de liberté, de divisibilité, de mobilité, que je crois tout-à-fait incompatible avec l'ordre, la constance que nous devons avoir en Algérie » pour coloniser le pays.

 Au vu de ces échecs, Prosper Enfantin, conformément à son programme socialiste, explique « qu'il faut détruire, au moins dans son absolutisme, et réduire à des limites infranchissables la propriété individuelle de la terre. ».

L’auteur va alors élaborer une méthodologie de la création du village colonial :

     . « Lors donc que des colons se présentent ou que le Gouvernement les appelle, la première chose n'est pas de leur distribuer individuellement des terres, comme on le fait aujourd’hui ; c'est de les former en société, de fixer les bases de leur association, de déterminer le nombre convenable de familles pour telle localité, l'étendue du territoire qu'elles occuperont, la forme de leurs villages et de leurs fermes, leur mode d'organisation et leur règlement de travail ; en un mot, de les. constituer en corps. ».

     . Il conviendra ensuite de créer la colonie : son territoire sera délimité et cadastré par l’Etat. Il sera impossible de le diviser. La colonie ne se composera  d’aucune ferme isolée, les colons seront regroupés dans un village au centre du terroir. Sauf dans les jardins, la culture du sol sera effectuée en commun par les familles qui composent le village.

 La seule exception au système communautaire résidera dans la jouissance individuelle des maisons et des jardins. Enfantin prévoit même que les colons pourront les vendre à condition que l’acheteur soit reconnu par la colonie comme un de ses nouveaux membres. De même, s’il est nécessaire d’agrandir le village, il sera possible d’insérer de nouvelles familles en permettant la création de nouvelles maisons et de nouveaux jardins.

 Le village colonial sera administré comme les sociétés anonymes existant en France :

     . « la propriété aurait le caractère foncier quant au fond, et  mobilier quant au titre » on distribuera à chaque ferme composant le village des coupons qui lui permettraient de recevoir sa part des recettes du village, déduction faite des frais généraux (entre autres, achat de semences et de matériel, frais de fonctionnement de l’association, impôts et amortissements…)

     . . « Les recettes générales comprendraient, outre les fruits du travail, le produit des lots de terre, vendus, pour jardins ou maisons, à des cultivateurs ou des artisans qui viendraient se fixer sur le territoire de la société. »

     . L’association « seraient gérée et administrée par les intéressés sous la surveillance des délégués de l'autorité publique, et conformément à des statuts autorisés par le Gouvernement, acceptés par les intéressés et publiés officiellement. 

 Prosper Enfantin termine ainsi sa description des colonies civiles par une interrogation : Trouvera- t-on des capitalistes qui consentent à courir le risque d’investir des fonds pour leur création en Algérie.

à suivre...


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