LES PREMIERES ANNEES DE 1830 À 1834
La
capitulation et la Prise d'Alger surviennent le 5 juillet 1830 et sont connues à
Paris le 9 juillet. Fort de ce succès militaire, le roi Charles X, à une époque
de crise entre les ultras-royalistes et les libéraux, décide de reprendre la main en publiant
six ordonnances dont quatre évoquent un
coup d'Etat. (dissolution de la chambre à majorité libérale qui vient d'être
élue et modification du suffrage censitaire, musèlement de la presse). Cette
publication met le feu aux poudres, le peuple se soulève (les trois Glorieuses
des 26-27 et 28 juillet) mais, il se voit imposer par la bourgeoisie un nouveau
régime, celui dit de la monarchie de Juillet du roi Louis-Philippe.
L’ÉTAT DE L’OPINION PUBLIQUE
CONCERNANT LA PART CONQUISE DE L’ALGERIE
L’opinion publique est partagée en trois camps antagonistes :
. Certains prônent non seulement le maintien sous l’obédience française de la région
d’Alger et des zones conquises mais aussi l’extension de la conquête vers le sud. Dans un livre
pamphlet paru en 1835, un auditeur au conseil d’état, Agenor de Gasparin, indique, pour les rétorquer, leurs
arguments :
. En colonisant Alger, nous ouvrirons
un large débouché à nos produits, échangés avec ceux d'un pays
fertile, et transportés par notre marine marchande, qui recevra de ce
commerce une nouvelle activité.
. Nous
ouvrirons un lieu de déportation à nos condamnés, et un débouché à la lie
de notre population surabondante.
. Nous aurons une
école pratique où notre armée viendra s'instruire (à une époque où l’Europe est
globalement en paix), Nous fortifierons notre puissance militaire,
et acquerrons sur la Méditerranée la prépondérance.
. Par
Alger, nous nous assurons des communications importantes et un vaste commerce
d'entrepôt.
. Nous
obéirons à des motifs plus élevés encore, en accomplissant sur le
continent africain une grande mission civilisatrice.
. Il ne faut pas nous laisser décourager par la stérilité des
premiers efforts, car elle résulte essentiellement des fautes commises par les
administrateurs de la colonie.
. L'Angleterre nous conteste le droit de garder Alger, dit-on. Notre retraite serait donc une lâcheté, car elle aurait l'air d'être le résultat de ses menaces.
. D’autres voudraient abandonner les terres conquises en Algérie.
Comme je l’ai mentionné en prologue, la conquête coloniale est mal vue à
l'époque, on se souvient certes encore du cuisant souvenir de la perte de la plupart
de nos colonies après le traité de Paris de 1763 consécutivement à la guerre de
sept ans, mais la majeure partie des arguments contre la conquête sont plus
prosaïques et pratiques : en voici quelques-uns signalés par Agenor de Gasparin :
. La colonisation coûte cher et nécessite la présence d'importantes troupes de pacification. Les populations autochtones,
en effet, sont hostiles et prêtes à bouter l’ennemi hors de leurs
frontières : cela ne mérite pas les sacrifices d’hommes et d’argent
nécessaires pour maintenir la présence français.
. La colonie ne rapporte rien, comment
des colons pourraient cultiver dans l’état de guérilla perpétuelle ? En
outre, les terres fertiles sont peu nombreuses, le sol étant occupé par de
nombreux marécages infestés de moustiques qu’il convient de drainer au prix d’efforts
financiers considérables.
. La terre algérienne ne permet pas de
cultiver des produits complémentaires à ceux de la métropole comme la canne à
sucre et le tabac.
. Il est illusoire d’imaginer qu’à
partir des zones conquises, on puisse développer le commerce d’entrepôts et de
transit avec l’Afrique : les plaines littorales sont, en effet, bordées de
barres montagneuses et de hauts plateaux peu commodes à franchir. En outre, les
sites des ports sont médiocres (à l’exception toutefois de celui d’Oran conquis
en 1832)
. Quelques-uns veulent maintenir la présence française à la zone déjà conquise ; pour le reste, il suffirait de s’entendre avec les chefs locaux à qui on confierait le pouvoir sous la suzeraineté de la France. L’avenir montrera que cette position est intenable du fait du caractère belliqueux des tribus de l’arrière-pays, qui veulent chasser les français de leurs positions et de la configuration géographique du pays.
Cette division de l’opinion publique rejaillit bien
évidemment lors des débats, généralement houleux à la chambre, en particulier lors du vote du budget
du ministère de la défense et du coût prévisionnels du maintien d'une armée importante.
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