La protection de la Galilée et du nord de la Judée
Cette zone qui jouxte l'état de Damas est une des plus sensibles du royaume par le fait qu'on y trouve les seules voies de communication entre le royaume franc et l'émirat voisin, ces voies de communication devenant épisodiquement des routes d'invasion et d'incursions dans un sens ou dans l'autre. Hormis dans cette région, la protection du Nord du royaume de Jérusalem est assurée par les reliefs naturels, mont Liban au nord et monts de Judée au sud.
Une première voie de passage est constituée par une dépression qui sépare la Haute-Galilée de la Basse. Elle est parcourue par une voie importante partant d'Acre et conduisant à Damas en passant par un gué sur le Jourdain appelé le GUÉ DE JACOB. Ce chemin qui servait aussi aux pèlerins était gardé par la puissante forteresse de SAFED (19) construite dans les années 1100 et cédée aux templiers en 1168.
Pour les templiers, cette forteresse ne suffisait pas, c'est pourquoi l'Ordre décida en 1178 d'en construire une nouvelle plus l'est, au niveau même du fleuve et du GUÉ DE JACOB, LE CHASTELET. (25) La construction de ce château posa problème au roi de Jerusalem Baudouin V (roi de 1183 à 1186) qui avait, à l'époque, signé une trêve avec Saladin. Ce dernier était en pleine constitution de son état, il s'était rendu maître de l'Egypte en mettant fin au califat fatimide en 1171, il s'était emparé de l'émirat de Damas en 1174 puis avait entamé la conquête de l'émirat d'Alep en s'emparant de Homs et de Hama ; la construction du CHASTELET risquant de faire rompre la trêve, le roi de Jérusalem était venu avec l'ost royal protéger la construction.
Au sud du lac de Tibériade, le long du Jourdain se trouvent deux forteresses :
. LE BESSAN, (26) la première de Galilée, construite par Tancrède à qui Godefroy de Bouillon a concédé le titre de prince de Galilée et qui devait conquérir son fief. Ce château servait à la fois de refuge et de base de départ pour des razzias à l'Est du Jourdain.
. Beaucoup plus importante pour la défense du royaume était la forteresse de BELVOIR (27) tenue par les Hospitaliers et située au débouché d'un pont sur le Jourdain, appelé pont de la Judaire. Outre ce passage sur le Jourdain, le château, situé sur un promontoire, surveille la route qui part de Tibériade et permet de gagner le BESSAN et Naplouse(13)
En haute Galilée, on trouve d'abord en remontant vers le Nord, les trois forteresses qui ont servi à la prise de Tyr en effectuant un blocus terrestre autour de la cité et en contrôlant les voies de communication qui aboutissaient la ville : CHASTEL IMBERT (28), SANDELION (29), LE TORON (30).
A ce niveau, le prince de Galilée voulut étendre sa domination vers l'est, il s'empare en 1129 de BELINAS (31), l'ancienne Cesarée de Philippe, il construisit pour contrôler la région et barrer la route à une invasion venue de Damas la forteresse de SUBEIBE (32) sur les dernières pentes du mont Hermon. Cette conquête fut cependant éphémère : dès 1140, la zone est perdue pour le prince de Galilée ; ces événements sont exactement semblables à ceux qui eurent lieu dans le comté de Tripoli avec la prise de Rafanée, la construction de Montferrand et la perte de ces deux sites.
Il fallut reporter la défense le la région plus à l'ouest avec la construction de CHATEAUNEUF (33) par le sire de Toron.
Plus au nord, se trouve la vallée du Litani, ce fleuve coule du Nord au Sud empruntant la vallée de la Beqa puis il oblique à angle droit et se jette dans la mer au nord de Tyr. Cette voie possible d'attaque est gardée par la puissante forteresse de BEAUFORT (34) , elle est établie sur un promontoire suffisamment élevé pour que du haut, on aperçoive la mer. Le château appartenait à l'origine à l'émirat de Damas, il fut abandonné au roi Foulques de Jérusalem par l'atabeg de Damas puis concédé au sire de Sagette qui le fit reconstruire.
Au nord de la vallée du Litani, se déploie la partie du mont Liban formant une barrière massive et peu franchissable, avec de courtes vallées comme celle du Nahr Aouli ; deux forteresses ont été construites pour surveiller cette vallée : BELHACEM (35) établie sur le versant escarpé d'un coude de la rivière et le château troglodyte de CAVE DE TYRON (36).