REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
. Toutes les citations de mes articles proviennent de recherches sur les sites gratuits sur Internet



Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

vendredi 20 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (3) : vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale

Suite de l’article précédent

LA CONQUÊTE ET LA COLONISATION ALLEMANDE
La conquête allemande résulte de deux motifs très différents l’un de l’autre :
   . Pour l’église, il convient de christianiser les derniers peuples païens d’Europe ;  les premiers missionnaires chrétiens sont bientôt relayés par les croisades autorisées par les papes Célestin III et Innocent III (1198-1200).
   . Les  allemands effectuent à cette époque une vigoureuse expansion commerciale vers la Baltique qui se marque en particulier par la fondation de Lübeck en 1143 puis par la création de la Hanse en 1181. Les marchands hanséatiques ont alors pour ambition de se substituer aux scandinaves sur la route menant à Novgorod.

Ces deux motifs se conjuguèrent pour mettre en oeuvre la soumission des peuples Este et Letton.

La carte ci-contre montre LA SITUATION EN 1225, vingt-cinq  ans seulement après l’appel à la croisade d’Innocent III.

la conquête  fut l’oeuvre de trois protagonistes :
     . Le chef de la croisade l’évêque Albert de Buxhövden qui, dès 1200, fonda Riga à l’embouchure de la Daugava ; désormais, grâce à cette fondation, la voie de Novgorod s’ouvrit au commerce hanséatique,
     . La croisade d’Albert, composée de chevaliers allemands venus temporairement dans les pays baltes, fut relayée par la fondation d’un ordre de moines-chevaliers (les Fratres militiae Christi ou chevaliers Porte-Glaives) qui prirent la tête des expéditions contre les Lettons puis les Estes. Après de durs combats, les chrétiens furent vainqueurs. .
     . Le roi du Danemark qui fut appelé à la rescousse pour prendre à revers les Estes. Il reçut pour prix de son aide le Nord de la région. (1) et ville de Reval. Tallinn fut fondée par les danois en 1219.

1 :  Les danois perdront le pays Este dès 1226 du fait d’une rébellion des Estes qui amène les Porte-Glaives à s’emparer du pays mais ils le récupéreront en 1237.

A suivre






mercredi 18 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (2) : vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale

LES VICISSITUDES DE L’HISTOIRE.

A l’origine, les peuples Estes et Lettons n’étaient pas destinés à subir une histoire commune tant ils étaient différents par leur provenance :
     . Selon les sources archéologiques, les Estes sont arrivés au bord de la Baltique au 4ème millénaire, ils utilisent une langue dite finno-ougrienne que pratiquent aussi les finnois, les peuples du Nord de la Russie et les hongrois, ils viennent peut-être de la région ouralienne.
     . Les Lettons seraient arrivés plus tard, au 3ème millénaire ; tout comme les Lituaniens, ils utilisent une langue indo-européenne.

Ils ont laissé de leur lointain passé, des traces archéologiques comme de la céramique cordée et des haches de pierre polie.

Les deux peuples Este et Letton ont en commun de ne jamais avoir dépassé à cette époque le stade des petites tribus dispersées,  ce qui les rendait très vulnérables face à leurs puissants voisins.

Les premiers visiteurs étrangers furent des navires grecs et romains venus acheter de l’ambre. Des peuples appelés Estes  sont nommément cités par Tacite :

"Au-delà des Suiones est une autre mer, dormante et presque immobile. On croit que c'est la ceinture et la borne du monde, parce que les dernières clartés du soleil couchant y durent jusqu'au lever de cet astre, et jettent assez de lumière pour effacer les étoiles. La vérité est que la nature finit en ces lieux.

En revenant donc à la mer suévique, on trouve sur le rivage à droite les tribus des Estyens. Ils ont les usages et l'habillement des Suèves ; leur langue ressemble davantage à celle des Bretons. Ils adorent la Mère des dieux. Pour symbole de ce culte, on porte l'image d'un sanglier : elle tient lieu d'armes et de sauvegarde ; elle donne à l'adorateur de la déesse, fût-il entouré d'ennemis, une pleine sécurité.

 Les Estyens combattent peu avec le fer, souvent avec des bâtons. Ils cultivent le blé et les autres fruits de la terre avec plus de patience que n'en promet la paresse habituelle des Germains. Ils fouillent même la mer, et seuls de tous les peuples ils recueillent le succin, (l’ambre) qu'ils appellent gless : ils le trouvent entre les rochers et quelque fois sur le rivage." Tacite, Germanie, XLV


Dès l’époque des grandes invasions ayant mis fin à l'empire romain d'occident, les pays Letton et Este sont l’objet de double convoitises :
     . D’un côté, les Varèges venus de Scandinavie utilisent la rivière Daugava et les fleuves russes pour effectuer un fructueux commerce avec l’empire  byzantin, ils fondent les cités-états de Novgorod et de Kiev en tant qu'étape vers Constantinople.
     . Vers l’est, s’installent des slaves qui envahissent périodiquement les pays baltes pour leur extorquer des rançons.



L’occupation du pays ne fut cependant pas leur fait ; au 13ème siècle se développèrent  de nouvelles menaces émanant du saint Empire Romain Germanique alors que les tribus Estes et Lettones, à la  différence des Lituaniens,  ne formaient toujours pas d’entités politiques structurées.

A suivre

lundi 16 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (1) : les vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale


L’Estonie et la Lettonie possèdent une histoire particulièrement douloureuse marquée par les invasions successives de leurs puissants voisins scandinaves, allemands et russes et par l’asservissement de leurs populations aux envahisseurs.

À l'exception d’une brève période entre les deux guerres mondiales, ces deux pays furent sous le joug de puissances étrangères pratiquement   dès leur origine et jusque 1990.

Dans ces conditions, on peut considérer comme un miracle que les peuples Estes et Lettons aient pu préserver l’essentiel de leur spécificité culturelle ce qui leur a permis de se constituer, malgré toutes les vicissitudes de l’histoire, en tant que  nations unies et souveraines.

C’est ce paradoxe que je voudrais tenter de montrer en décrivant d’abord les grandes phases d’asservissement de ces peuples puis en montrant comment s’est constituée leur culture.

samedi 14 octobre 2017

… SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-60 : la vie quotidienne (16)

Suite de l’article précédent

Peut-on dire que l’on était plus heureux autrefois que maintenant ? Cette question n’a aucun sens ; nous sommes actuellement dans une société différente qui a rendu certaines valeurs obsolètes et en a développé d’autres. Certains peuvent  certes regretter  le déclin des valeurs d’autrefois, pourtant, réduire l’évolution survenue à ce simple déclin serait une simplification abusive.

Selon moi, la principale nouveauté de la société actuelle par rapport à l’ancienne, réside dans les progrès techniques qui ont considérablement transformé le cadre de vie : le téléphone portable, l’électronique et l’informatique ont permis, entre autre, cette mutation. Il suffit par exemple de brancher son ordinateur pour disposer d’une vision immédiate et planétaire de tout ce qui se passe, pour accomplir,  sans partir de chez soi, la plupart des tâches quotidiennes qui nécessitaient autrefois de longues files d’attente à la gare, à la poste, dans les services publics, dans les magasins… le téléphone portable permet de joindre tout de suite  un interlocuteur dans la plus grande partie du monde. Désormais, on peut vivre dans l’immédiateté, une question posée à un interlocuteur est généralement traitée dans la journée ; cela permet de disposer de plus de temps que l’on peut consacrer aux loisirs, à la vie familiale et à la culture.

Cette mutation nécessite une adaptation que la plupart des personnes âgées n’ont pas assumée. Elles  se trouvent, de ce fait, marginalisé et à l'écart d’un environnement qu’elles  ne comprennent plus.

A cela s’ajoute disent-elles, le fait que notre monde actuel a subi de plein fouet la déliquescence des valeurs morales traditionnelles qui n’ont pas été remplacées, sécrétant une société  où l’individualisme et la quête du plaisir par l’assouvissement immédiat de ses désirs sont érigés en valeurs suprêmes. Elles n’ont pas tout à fait tort.

Dans de telles conditions, on peut comprendre que beaucoup de personnes âgées se réfugient dans leur passé en idéalisant un mode de vie qui ne méritait probablement pas de l’être.

Fin

jeudi 12 octobre 2017

… SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-60 : la vie quotidienne (15)

Suite de l’article précédent 

La dernière caractéristique contribuant à notre bonheur était que nous disposions d’un cadre de vie stable et rassurant.

Il était très rare, au moins dans les milieux populaires, que l’on divorce, surtout quand il y avait des enfants ; les parents étaient mariés pour la vie entière, même s’il y avait des querelles dans le couple ou si la femme était malheureuse du fait de l’alcoolisme de son mari.

Dans la famille, chacun avait sa place, le père de famille travaillait pour subvenir aux besoins du ménage. La mère de famille, même si elle travaillait, était la maîtresse absolue dans la maison. Outre les tâches ménagères, c’est elle qui s’occupait de la tenue de son foyer ; elle considérait que, quand son mari rentrait harassé de sa journée de travail, il ne devait pas avoir à accomplir de tâches domestiques,

C’etait aussi à sa femme que généralement,  le mari remettait l’argent de la paie qu’il recevait en argent liquide ; de même, c’était elle qui gérait les comptes de la famille.

Enfin, c’est la mère de famille qui s’occupait prioritairement de l’éducation des enfants. Le seul moment où le père intervenait effectivement, survenait quand ceux-ci avaient commis une faute grave (bêtise, réprimande du maître, bagarre, impolitesse…) ; ces fautes graves étaient souvent assorties de menaces du type : «  quand ton père saura cela ! » Le père de famille devenait alors le recours qui jugeait sans appel, il était, pour un instant, le détenteur de l’autorité et personne ne contredisait ses décisions. À ce moment, les enfants craignaient l’autorité de leur père même si, au fond de lui-même, celui-ci savait qu’il jouait un rôle déplaisant qui lui répugnait. .

Il convient cependant de tempérer ce qui précède, car les moments de complicité étaient nombreux entre le père et ses enfants lors des activités de la famille, c’est lui qui présidait aux jeux de ballon, de cartes, aux baignades, aux sorties en vélo. C’est aussi avec leur père,  que les enfants participaient au bricolage, avaient un petit bout de jardin à entretenir...  Se voir déléguer un petit travail était à la fois un gage de l’estime que le père portait à son enfant et surtout un moyen pour lui de transmettre toutes les techniques et savoir-faire que l'expérience lui avait permis d’acquérir.

Ainsi, on peut résumer les trois critères qui rendirent ma jeunesse heureuse et que j’exprimerai par trois aphorismes :
   . Se contenter de ce qu’on avait mérité grâce à  son travail,
   . Communiquer pour aplanir les différends,
   . Vivre dans une cellule familiale stable où chacun à  sa place.

À suivre

mardi 10 octobre 2017

… SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-60 : la vie quotidienne (14)

suite de l'article précédent

La deuxième source du bonheur provenait du fait que l’on prenait le temps de se parler et de communiquer tant à l’intérieur de la famille qu’avec les autres. Le moment principal de la convivialité familiale était le repas du soir, chacun racontait sa journée, on commentait l’actualité, on faisait des projets. Certes, il arrivait que les discussions deviennent houleuses, en particulier quand les parents refusaient d’acquiescer à une demande de leurs enfants ; cependant, ces querelles avaient le mérite de la franchise et laissaient moins de rancœur que si elles n’avaient pas éclatées et si les différents avaient été dissimulés. D’ailleurs, sauf quand il s’agissait de la part des enfants de demandes d’argent, on arrivait assez vite à un modus vivendi entre eux et leurs parents.

Ainsi, pouvoir se parler avec franchise aplanissait beaucoup de difficultés et de différents en leur permettant de ne pas dégénérer.

Le fait de communiquer entre membres de la famille comportait un autre avantage : celui de permettre la mise en pratique des enseignements moraux appris à l’école et au catéchisme. Lorsque les enfants avaient eu des comportements s’éloignant de ces critères moraux, les parents leur expliquaient leur erreur, les sermonnaient ou même les punissaient. De même, il y avait la vertu de l’exemple, les parents mettaient en pratique devant leurs enfants les grands principes régissant leur vie, ce qui créait une harmonie des comportements autour de ces critères : tolérance, compassion, sens du devoir et du travail bien fait, tels étaient généralement les valeurs que les parents transmettaient à leurs enfants dans la plupart des familles.

Il va de soi que ce qui précède n’existait pas dans toutes les familles, c’était en particulier le cas quand le père et plus rarement la mère  buvaient et rentraient ivres à la maison, en ce cas, aucune communication n’était possible et les actes de violence dominaient. Selon ce dont je me souviens, ces situations étaient plutôt minoritaires.

A suivre...

dimanche 8 octobre 2017

… SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-60 : la vie quotidienne (13)

suite de l'article précédent

Il me reste à évoquer, en conclusion de ce chapitre, une question fondamentale : était-on heureux à cette époque ? La réponse à cette question ne peut être que subjective, car propre à chacun ; en ce qui me concerne, la réponse est, sans conteste, oui. Ce n’est pas parce que j’ai  la nostalgie de ma jeunesse ou parce que j’ai gommé de ma mémoire tous les événements négatifs que j’affirme cela ; je me base plutôt sur des critères objectifs d’explication.

D’abord, les classes populaires ne vivaient pas,  pour la plupart, dans une société de consommation alors en gestation, pour deux raisons au moins :
   . Nous n’avions pas d’argent pour le faire, ce qui était un facteur rédhibitoire pour freiner les dépenses.
   . Surtout, les équipements que nous achetions étaient simples et robustes, ils duraient très longtemps, le plus souvent une vie entière, c’était le cas du linge de maison, du matériel électrique et, bien entendu, des outils manuels. S’il y avait une panne, on pouvait trouver sans difficulté un réparateur.

Dans notre famille, on partait d’un principe simple : on achetait que ce qu’on pouvait se payer en faisant des économies. Certes, il fallait attendre parfois longtemps, mais, quelle joie c’était, quand un nouvel équipement arrivait dans la maison ! On en profitait d’autant plus que le temps permettant de l’acquérir avait été plus long ! On ne cherchait pas à s’endetter pour avoir tout, tout de suite, on préférait attendre et ressentir la satisfaction d’avoir gagné, par son travail, un nouvel équipement.

Certes, certains recouraient à l’emprunt, soit auprès des banques,  soit auprès d’usuriers. On ressentait cela comme  un mauvais calcul car il fallait rembourser et payer de lourds intérêts qui nécessitaient de nouveaux emprunts et faisaient entrer les gens dans un engrenage infernal. Dans notre famille élargie, on avait plutôt recours à des prêts internes :  celui qui avait un peu d’argent « de côté » se voyait sollicité par ceux ayant un besoin ponctuel d’argent pour des prêts de courte durée qui étaient au plus vite remboursés.

Ainsi, notre vie quotidienne n’était pas troublée par les désirs insatiables du « toujours plus », ni angoissée par la perspective de rembourser ses prêts. On se contentait de ce qu’on avait, ce qui était le plus sûr moyen d’être heureux.

Certes, ce que j’ai écrit est un peu idéalisé, car beaucoup de gens se laissait déjà séduire par la société de consommation, mais, c’était plus vis-à-vis des autres que cela se produisait : ainsi, avoir une voiture, puis posséder une voiture plus grosse que celle de son voisin était une préoccupation que l’on trouvait partout.

De même, un certain nombre de familles géraient leurs ressources dans l’immédiateté ;  le jour de la paie, elles achetaient ce qu’elles avaient envie et se serraient la ceinture le reste du temps.

A suivre

vendredi 6 octobre 2017

… SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-60 : la vie quotidienne (12)

Suite de l’article précédent

Nous n'avions pas non plus de téléphone. Les seuls moyens de communication à notre disposition étaient l’échange de lettres ou de cartes postales ; pour les nouvelles les plus urgentes, on pouvait aussi envoyer un télégramme, c’était angoissant d’en recevoir car, en général, il annonçait de mauvaises nouvelles. Dans le quartier, le bouche à oreilles fonctionnait parfaitement, tout le monde se connaissait et les nouvelles se transmettaient très vite dans tout le village ; cette transmission s'effectuait de toute sorte de manières : lorsque les femmes allaient laver leur linge au lavoir, lorsque les hommes se rassemblaient au bistrot, lors des files d'attente dans les boutiques, à la sortie de la messe... les nouvelles étaient ensuite colportées de voisins en voisins, avec, bien entendu, de nombreuses déformations.

A cette époque, il était impossible de vivre dans l’immédiateté, si on envoyait une lettre, on ne  pouvait espérer une réponse que plusieurs jours après. Il fallait se résoudre à attendre ! C’était surtout gênant quand quelqu’un partait en voyage, on ne pouvait pas savoir tout de suite si le voyage s’était bien passé. L’adage en mode était : « pas de nouvelles, bonnes nouvelles ».

L’absence de téléphone avait néanmoins un avantage : on envoyait beaucoup plus de lettres qu’actuellement, ce qui permettait aux adultes d’utiliser les acquis orthographiques appris à l’école et donc de ne pas les oublier ;  la plupart d’entre eux écrivaient sans pratiquement de fautes d’orthographe, l’écriture, comme d’ailleurs la lecture, était donc alors l’outil essentiel de communication, ce qui n’est plus le cas actuellement.

À suivre...