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. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
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Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

mardi 31 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (8) : vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale

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La  SITUATION EN 1660 APRÈS LA PAIX D’OLIVA consacre la prépondérance de la Suède sur les pays Estes et Lettons. Celle-ci fait suite à plusieurs guerres entre la république des deux Nations (royaume de Pologne et grand-duché de Lituanie unis par le compromis de Lublin depuis 1569)  la Russie et la Suède. La dernière de ces guerres, appelée le déluge, vit la Pologne-Lituanie complètement envahie par les armées russes et suédoises.

A l’issue de cette guerre, la Suède va s’emparer non seulement de la Livonie mais aussi de l’Ingrie : ainsi, la Baltique est devenue « un lac suédois ». Seule la Courlande échappe à cette conquête, restant sous la suzeraineté de la Pologne-Lituanie. La Suède organise ses conquêtes en quatre entités : l’Estland (capitale Tallinn), l’Ingrie (capitale Narva), la Livland (capitale Tartus puis Riga) et les Îles.

La SITUATION EN 1721  témoigne de l’avant-dernière modification du statut politique des pays Este et Letton. La Russie du Tzar Pierre 1er, toujours en quête d’un accès à la Baltique et à la possession d’un port en eau libre sur cette mer déclare la guerre à la Suède. Cette guerre est marquée en particulier  par  l’invasion de la Russie par les armées du roi de Suède Charles XII et par sa défaite à Poltava (1710)

A la PAIX DE NYSTAD, LA Russie s’empare de l’Estland, de la Livland et de l’Ingrie. Seul le duché de Courlande échappe à la conquête russe.

dimanche 29 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (7 ) : vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale


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RUSSIE, POLOGNE-LITUANIE ET SUÈDE ENTRENT EN JEU

La carte ci-dessus présente la SITUATION EN 1561 après la signature du traité de Vilnius qui crée de nouveaux partages des pays Este et Letton sans évidemment que les peuples autochtones aient eu leur mot à dire.

 L'époque qui suit le traité de Thorn de 1466 (voir article précédent) est marquée par l’entrée en scène progressive de deux nouveaux assaillants :
   . La Suède qui aspire à faire de la Baltique un lac suédois,
.  . La Russie menée par le tsar Ivan IV qui veut s’emparer de la Livonie afin d’obtenir aussi un accès à la mer et ainsi, contrôler la route commerciale menant de la Russie à la Baltique. Les hostilités entre les villes de la Hanse et la Russie  se sont déjà traduites par l’expulsion des marchands germaniques de Novgorod et la fermeture du comptoir de la Hanse,  cela a conduit les marchands Livoniens à expulser les marchands russes de Livonie en guise de représailles.

L’armée russe  envahit la Livonie en 1558, l’ordre de Livonie est vaincu, il fait appel à Sigismond II Auguste souverain de la  Pologne-Lituanie qui ne demande pas mieux d’intervenir afin de s’emparer de la Livonie tandis que  les villes Estes font appel à la Suède. Les russes sont obligés de se retirer.

Parallèlement à cette guerre, le grand-maître de l’ordre Livonien, Gotthard Kettler  devenu protestant, décide de séculariser son ordre comme l’avait fait en 1525 Albert de Brandebourg pour l’ordre Teutonique.

La fin de la guerre est concrétisée par le traité de Vilnius et par le partage des dépouilles entre les vainqueurs ;
     . L’Estonie du Nord devient suédoise,
     . Les îles sont attribuées aux danois,
     . La Livonie est partagée en deux parties :
          . Le Nord est constitué en duché et rattaché directement à la Lituanie, unie à l'époque à la Pologne  sous l’autorité du même souverain.
          . Le Sud devient le duché de Courlande qui est attribué à Gotthard Kettler, le dernier maître de l’ordre de Livonie sécularisé. Ce duché est placé sous la suzeraineté du roi de  Pologne.

Ainsi, après ce traité, la situation des deux pays Estes et Letton voit se différencier trois niveaux :
   . Tout en bas, une paysannerie asservie et attachée à la terre qui reste complètement à l’écart de ce qui se passe dans son pays.
   . Au-dessus, les bourgeois des villes commerçantes et les grands propriétaires d’origine germanique ; ces derniers maintiennent d’une main de fer leur domination sur le pays.
   . Au-dessus encore, le pouvoir politique émanant des conquérants ; ils obtiennent la coopération des barons baltes qui peuvent ainsi conserver leurs privilèges sociaux.

A suivre

vendredi 27 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (6 ) : vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale

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L’APOGÉE DE L’ORDRE TEUTONIQUE ET LA SITUATION EN 1466 APRÈS LA DÉFAITE DE TANNENBERG

Désormais, l’histoire des pays Este et Letton se confond avec celle de l’ordre Teutonique qui entamera une politique d’expansion comme le montre la carte de gauche ci-dessous,  présentant la situation au tout début du 15e siècle : l’ordre s’est étendu non seulement à l’ouest, mais aussi il a réussi à faire sa  jonction avec l’ordre Livonien après que Vytautas, grand duc de Lituanie, lui ait concédé la Samogitie.


Les velléités nouvelles  d’expansion des Teutoniques conduisent à l’intervention conjointe de Ladislas Jagellon, roi de Pologne et de son neveu Vytautas grand-duc de Lituanie et à la défaite de l’ordre Teutonique à la bataille de Grünwald- Tannenberg (24 juin 1410).

Cette bataille sonne le glas des visées hégémoniques de l’ordre Teutonique ; de nouvelles défaites l’obligent à accepter le traité de Thorn dont la carte de droite fait état :
   . La Samogitie revient à la Lituanie,
   . La Prusse dite royale revient à la Pologne,
   . Ce qui reste des territoires de l’ordre doit se placer sous la suzeraineté de la Pologne.

L’ordre de Livonie, ancien ordre des porte-glaives devenu branche autonome de l’ordre Teutonique, également affaibli, se voit imposer par le prince-évêque de Riga et les autres évêques du pays,  la création de la Diète de Livonie qui aura pour but de régler les différents entre les états composant la confédération dominant alors les pays Estes et Lettons : désormais, l'ordre de Livonie n'est plus le puissant pouvoir en pays Este et Letton, il doit composer avec les autres membres de la confédération,

À suivre

mardi 24 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (5) : vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale

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LA SITUATION DES PAYS ESTES ET LETTONS AU TEMPS DE LA COLONISATION ALLEMANDE

Les colons allemands se sont imposés et  superposés aux peuples Letton et  Este sans qu’apparaisse un quelconque amalgame des populations : ces deux mondes se côtoient et forment quasiment des entités sociales séparées.

D’un côté,  se trouvent ceux qui ressortent du monde germanique, ils se constituent en classe dominante et prospère  qui habite les villes enrichies par le commerce hanséatique ;  Riga et Tallinn servent de débouché aux produits russes (miel, cire, peaux et fourrures ) et approvisionnent la Rus par l’intermédiaire du comptoir de Novgorod ; les deux villes s’affilieront d’ailleurs à la Hanse au cours du 13e siècle.

Elles présentent encore aujourd’hui un aspect typiquement germanique associant :
   - des hautes maisons étroites à pignons donnant sur la rue,
   - une place principale où trône un Rathaus (maison du conseil)  pourvu d’un beffroi, manifestation que les villes sont devenues des petites républiques autonomes,
   - de très hauts clochers d’églises, de puissants remparts.

Commerçants et artisans s’unissent en guildes qui se réservent le monopole de l’activité économique et dans laquelle la spécificité germanique est maintenue intacte.

La campagne constitue un monde complètement séparé et dominé. Les vassaux nommés par les évêques et les chevaliers de l’ordre se sont taillés de vastes domaines qu’ils font cultiver par les paysans Estes et  Lettons sous forme de corvées selon un système typiquement féodal ; ils lèvent les impôts, dont la dîme, effectuent la justice et en perçoivent les revenus. Peu à peu, la situation des paysans jusqu’alors libres se dégrade, ils se voient imposer des mesures qui vont peu à peu faire apparaître un véritable servage, ils seront attachés à la terre sans pouvoir vendre leurs petites exploitations et ils subiront des corvées de plus en plus lourdes.  Des actes de vente de paysans apparaissent mêmes.

Les paysans se voient aussi dirigés spirituellement par des prêtres germaniques qui imposent l'évangélisation et répriment toute référence aux cultes païens traditionnels autochtones.

Un tel dualisme social et politique sera maintenu inchangé jusqu’au milieu du 19e siècle, les « barons baltes » s’adapteront aux envahisseurs successifs et en deviendront même des serviteurs zélés afin de garder leur influence sur la campagne.

dimanche 22 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (4) : vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale

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LA CONQUÊTE ET LA COLONISATION ALLEMANDE

Alors que les pays Estes et Lettons sont vaincus,  conquis et convertis sans doute superficiellement, il s’élève de nombreuses querelles entre l’ordre des Porte-Glaives et l’évêque de Riga ; ce dernier a reçu de l’empereur du Saint-Empire le titre de Prince-Évêque qui lui donne, outre son pouvoir spirituel, un pouvoir temporel avec suzeraineté sur les terres de son évêché. Au nom de ce pouvoir, il exige que lui soient remises les 2/3 des conquêtes, ce que l'ordre militaro-monastique, principal acteur de la conquête, n'est évidemment pas disposer à accepter.

La  carte ci-dessous présente LA SITUATION EN  1237 avec division des pays Estes et Lettons en six entités : quatre évêchés, l’ordre des Porte-Glaives, le Danemark.

Cette évolution s’est accomplie en deux temps :
     . En premier lieu, l’ordre des Porte-Glaives, décide d’envahir la Lituanie restée païenne, il est vaincu à la bataille de Saule (1236).
     . Affaibli, l'ordre doit se résoudre accepter trois dispositions nouvelles :
          . D’abord, par le compromis de Stenby, il doit admettre un partage du pays entre ses possessions et celles des évêques : ainsi se forme la confédération livonienne,
          . Il doit rendre au Danemark le pays des Estes dont il s'était emparé en 1227 sous prétexte de mater une révolte,
          . Il doit surtout consentir à être incorporé à l'ordre Teutonique qui a été créé en 1220,  dont il devient une branche autonome sous le nom d’ordre de Livonie.

A suivre

vendredi 20 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (3) : vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale

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LA CONQUÊTE ET LA COLONISATION ALLEMANDE
La conquête allemande résulte de deux motifs très différents l’un de l’autre :
   . Pour l’église, il convient de christianiser les derniers peuples païens d’Europe ;  les premiers missionnaires chrétiens sont bientôt relayés par les croisades autorisées par les papes Célestin III et Innocent III (1198-1200).
   . Les  allemands effectuent à cette époque une vigoureuse expansion commerciale vers la Baltique qui se marque en particulier par la fondation de Lübeck en 1143 puis par la création de la Hanse en 1181. Les marchands hanséatiques ont alors pour ambition de se substituer aux scandinaves sur la route menant à Novgorod.

Ces deux motifs se conjuguèrent pour mettre en oeuvre la soumission des peuples Este et Letton.

La carte ci-contre montre LA SITUATION EN 1225, vingt-cinq  ans seulement après l’appel à la croisade d’Innocent III.

la conquête  fut l’oeuvre de trois protagonistes :
     . Le chef de la croisade l’évêque Albert de Buxhövden qui, dès 1200, fonda Riga à l’embouchure de la Daugava ; désormais, grâce à cette fondation, la voie de Novgorod s’ouvrit au commerce hanséatique,
     . La croisade d’Albert, composée de chevaliers allemands venus temporairement dans les pays baltes, fut relayée par la fondation d’un ordre de moines-chevaliers (les Fratres militiae Christi ou chevaliers Porte-Glaives) qui prirent la tête des expéditions contre les Lettons puis les Estes. Après de durs combats, les chrétiens furent vainqueurs. .
     . Le roi du Danemark qui fut appelé à la rescousse pour prendre à revers les Estes. Il reçut pour prix de son aide le Nord de la région. (1) et ville de Reval. Tallinn fut fondée par les danois en 1219.

1 :  Les danois perdront le pays Este dès 1226 du fait d’une rébellion des Estes qui amène les Porte-Glaives à s’emparer du pays mais ils le récupéreront en 1237.

A suivre






mercredi 18 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (2) : vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale

LES VICISSITUDES DE L’HISTOIRE.

A l’origine, les peuples Estes et Lettons n’étaient pas destinés à subir une histoire commune tant ils étaient différents par leur provenance :
     . Selon les sources archéologiques, les Estes sont arrivés au bord de la Baltique au 4ème millénaire, ils utilisent une langue dite finno-ougrienne que pratiquent aussi les finnois, les peuples du Nord de la Russie et les hongrois, ils viennent peut-être de la région ouralienne.
     . Les Lettons seraient arrivés plus tard, au 3ème millénaire ; tout comme les Lituaniens, ils utilisent une langue indo-européenne.

Ils ont laissé de leur lointain passé, des traces archéologiques comme de la céramique cordée et des haches de pierre polie.

Les deux peuples Este et Letton ont en commun de ne jamais avoir dépassé à cette époque le stade des petites tribus dispersées,  ce qui les rendait très vulnérables face à leurs puissants voisins.

Les premiers visiteurs étrangers furent des navires grecs et romains venus acheter de l’ambre. Des peuples appelés Estes  sont nommément cités par Tacite :

"Au-delà des Suiones est une autre mer, dormante et presque immobile. On croit que c'est la ceinture et la borne du monde, parce que les dernières clartés du soleil couchant y durent jusqu'au lever de cet astre, et jettent assez de lumière pour effacer les étoiles. La vérité est que la nature finit en ces lieux.

En revenant donc à la mer suévique, on trouve sur le rivage à droite les tribus des Estyens. Ils ont les usages et l'habillement des Suèves ; leur langue ressemble davantage à celle des Bretons. Ils adorent la Mère des dieux. Pour symbole de ce culte, on porte l'image d'un sanglier : elle tient lieu d'armes et de sauvegarde ; elle donne à l'adorateur de la déesse, fût-il entouré d'ennemis, une pleine sécurité.

 Les Estyens combattent peu avec le fer, souvent avec des bâtons. Ils cultivent le blé et les autres fruits de la terre avec plus de patience que n'en promet la paresse habituelle des Germains. Ils fouillent même la mer, et seuls de tous les peuples ils recueillent le succin, (l’ambre) qu'ils appellent gless : ils le trouvent entre les rochers et quelque fois sur le rivage." Tacite, Germanie, XLV


Dès l’époque des grandes invasions ayant mis fin à l'empire romain d'occident, les pays Letton et Este sont l’objet de double convoitises :
     . D’un côté, les Varèges venus de Scandinavie utilisent la rivière Daugava et les fleuves russes pour effectuer un fructueux commerce avec l’empire  byzantin, ils fondent les cités-états de Novgorod et de Kiev en tant qu'étape vers Constantinople.
     . Vers l’est, s’installent des slaves qui envahissent périodiquement les pays baltes pour leur extorquer des rançons.



L’occupation du pays ne fut cependant pas leur fait ; au 13ème siècle se développèrent  de nouvelles menaces émanant du saint Empire Romain Germanique alors que les tribus Estes et Lettones, à la  différence des Lituaniens,  ne formaient toujours pas d’entités politiques structurées.

A suivre

lundi 16 octobre 2017

ESTONIE-LETTONIE (1) : les vicissitudes de l’histoire et émergence d’une culture nationale


L’Estonie et la Lettonie possèdent une histoire particulièrement douloureuse marquée par les invasions successives de leurs puissants voisins scandinaves, allemands et russes et par l’asservissement de leurs populations aux envahisseurs.

À l'exception d’une brève période entre les deux guerres mondiales, ces deux pays furent sous le joug de puissances étrangères pratiquement   dès leur origine et jusque 1990.

Dans ces conditions, on peut considérer comme un miracle que les peuples Estes et Lettons aient pu préserver l’essentiel de leur spécificité culturelle ce qui leur a permis de se constituer, malgré toutes les vicissitudes de l’histoire, en tant que  nations unies et souveraines.

C’est ce paradoxe que je voudrais tenter de montrer en décrivant d’abord les grandes phases d’asservissement de ces peuples puis en montrant comment s’est constituée leur culture.