Les forteresses littorales (suite)
TYR est construit sur un îlot relié à la terre par un long cordon sableux. Elle est puissamment fortifiée et semble imprenable d'autant qu'il est impossible d'installer des machines de guerre sur le sable.
Possession des Fatimides et voyant que ceux-ci ne la secourait pas, la cité se donna à l'atabeg de Damas, Tughtekin qui envoya des renforts. La garnison de Tyr multiplia les raids dans la campagne de Galilée qui fut ravagée.
Les francs répliquèrent par la construction des forteresses de SCANDELION, CASAL-IMBERT et LE TORON. Elles avaient trois buts :
. sécuriser la campagne en la protégeant des raids venus de Tyr,
. servir de base de départ pour la conquête de la cité,
. couper la ville de ses communications avec l'extérieur en contrôlant les routes d'accès qui pourraient amener des renforts : la route du sud et surtout la route Tyr-Damas par laquelle Tyr pourrait recevoir des troupes envoyées par l'atabeg de Damas.
Un premier siège fut tenté en 1111-12 mais l'arrivée de l'armée de Tughtekin obligea le roi Baudouin 1er à le lever. Le second siège débuta en février 1124. Il fut mené conjointement par l'ost royal et par une flotte vénitienne. Pour tenter de le faire lever, la cité d'Ascalon organisa une manœuvre de diversion en lançant une offensive sur Jérusalem . Parallèlement, l'atabeg de Damas vint avec son armée aux portes de Tyr, cependant le blocus tint bon et Tughtekin accepta la reddition de la ville en juillet 1124.
REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
. Toutes les citations de mes articles proviennent de recherches sur les sites gratuits sur Internet
Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com
lundi 18 mai 2015
dimanche 17 mai 2015
Mentalités et comportements au temps de la croisade (69) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs
Les forteresses littorales du royaume de Jérusalem
La première croisade, rappelons-le avait suivi la route littorale au printemps 1099, mais pressée d'en finir et de délivrer au plus tôt le Saint-Sepulcre, elle s'était contentée de passer sans se préoccuper de soumettre les nombreux ports qui s'égrènent le long de sa route. Seul JAFFA, exutoire portuaire de Jérusalem , avait été conquis et permettait de relier les croisés à l'Occident.
Certaines de ces cités portuaires s'étaient alors calfeutrées derrière leurs remparts, espérant que les croisés ne feraient que passer tandis que d'autres avaient offert de leur faire allégeance si toutefois la croisade s'emparait de Jérusalem , ce fut par exemple le cas de Barut ( Beyrouth), de Sidon, d'Acre et de Cesarée.
La création d'un système défensif littoral fut étroitement dépendante de la conquête pendant laquelle s'établit une distinction entre les ports anciennement fortifiés où les francs se contentèrent de renforcer les murailles et les forteresses construites de toute pièce.
Dès les premières années qui suivirent la création du royaume de Jérusalem sont effectuées la plus grande partie des conquêtes : Haiffa en 1100, Arsur et Cesarée en1101, Acre en 1104, Barut (Beyrouth) et Sagette (Sidon ) en1110.
Pour les croisés, la tâche fut relativement aisée : ces cités étaient alors sous l'obédience théorique des Fatimides d'Egypte, trop lointain pour intervenir, elles connaissaient la cruauté des croisés et firent obédience. La conquête fut facilitée aussi par la présence des flottes italiennes de Gènes et de Venise ; l'ost royal ne pouvait en effet investir la cité portuaire à conquérir que par la terre, ce qui laissait libre la possibilité aux assiégés de s'approvisionner par voie maritime. La présence des flottes italiennes permettait d'effectuer un blocus complet. Il va de soi que cette participation eut sa contrepartie, les villes italiennes reçurent de nombreux privilèges dans les villes conquises.
Cette conquête fut réalisée au détriment des accords passés antérieurement, l'exemple de Cesarée est à cet égard significatif : les croisés avaient signé une trêve lors de leur passage en 1099, elle était assortie des conditions habituelles : allégeance, lourd tribut en argent ou en approvisionnement. En 1101, le roi Baudouin 1er reçut de la cité une demande de renouvellement de la trêve, il la refusa, préférant la conquérir. L'aide d'une flotte génoise permit à ce dessein d'aboutir. Gènes pour prix de cette aide, reçut 1/3 de la ville. Plus tard, fut construire près du port une petite forteresse, le Merle, destinée à la fois à surveiller le port mais aussi à contrôler le comté de Cesarée qui s'était constitué.
Cesarée est typique de la double évolution qui se produisit un peu partout :
. on passa rapidement de la situation de trêve qui maintenait les anciens dirigeants à celle de conquête préludant à la constitution d'un fief.
. Il se créa une association port et ville fortifiée-forteresse-seigneurie.
Apres 1100, l'ensemble du littoral est aux mains des francs à l'exception toutefois de deux ports importants, Tyr et Ascalon.
À suivre...
La première croisade, rappelons-le avait suivi la route littorale au printemps 1099, mais pressée d'en finir et de délivrer au plus tôt le Saint-Sepulcre, elle s'était contentée de passer sans se préoccuper de soumettre les nombreux ports qui s'égrènent le long de sa route. Seul JAFFA, exutoire portuaire de Jérusalem , avait été conquis et permettait de relier les croisés à l'Occident.
Certaines de ces cités portuaires s'étaient alors calfeutrées derrière leurs remparts, espérant que les croisés ne feraient que passer tandis que d'autres avaient offert de leur faire allégeance si toutefois la croisade s'emparait de Jérusalem , ce fut par exemple le cas de Barut ( Beyrouth), de Sidon, d'Acre et de Cesarée.
La création d'un système défensif littoral fut étroitement dépendante de la conquête pendant laquelle s'établit une distinction entre les ports anciennement fortifiés où les francs se contentèrent de renforcer les murailles et les forteresses construites de toute pièce.
Dès les premières années qui suivirent la création du royaume de Jérusalem sont effectuées la plus grande partie des conquêtes : Haiffa en 1100, Arsur et Cesarée en1101, Acre en 1104, Barut (Beyrouth) et Sagette (Sidon ) en1110.
Pour les croisés, la tâche fut relativement aisée : ces cités étaient alors sous l'obédience théorique des Fatimides d'Egypte, trop lointain pour intervenir, elles connaissaient la cruauté des croisés et firent obédience. La conquête fut facilitée aussi par la présence des flottes italiennes de Gènes et de Venise ; l'ost royal ne pouvait en effet investir la cité portuaire à conquérir que par la terre, ce qui laissait libre la possibilité aux assiégés de s'approvisionner par voie maritime. La présence des flottes italiennes permettait d'effectuer un blocus complet. Il va de soi que cette participation eut sa contrepartie, les villes italiennes reçurent de nombreux privilèges dans les villes conquises.
Cette conquête fut réalisée au détriment des accords passés antérieurement, l'exemple de Cesarée est à cet égard significatif : les croisés avaient signé une trêve lors de leur passage en 1099, elle était assortie des conditions habituelles : allégeance, lourd tribut en argent ou en approvisionnement. En 1101, le roi Baudouin 1er reçut de la cité une demande de renouvellement de la trêve, il la refusa, préférant la conquérir. L'aide d'une flotte génoise permit à ce dessein d'aboutir. Gènes pour prix de cette aide, reçut 1/3 de la ville. Plus tard, fut construire près du port une petite forteresse, le Merle, destinée à la fois à surveiller le port mais aussi à contrôler le comté de Cesarée qui s'était constitué.
Cesarée est typique de la double évolution qui se produisit un peu partout :
. on passa rapidement de la situation de trêve qui maintenait les anciens dirigeants à celle de conquête préludant à la constitution d'un fief.
. Il se créa une association port et ville fortifiée-forteresse-seigneurie.
Apres 1100, l'ensemble du littoral est aux mains des francs à l'exception toutefois de deux ports importants, Tyr et Ascalon.
À suivre...
samedi 16 mai 2015
Mentalités et comportements au temps de la croisade (68) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des Etats francs.
LES FORTERESSES DU ROYAUME DE JERUSALEM
Le royaume de Jérusalem présente la même configuration géographique que les deux états francs septentrionaux avec d'Ouest en Est, une succession semblable de reliefs en bandes longitudinales comme il est noté sur la coupe ci-dessous :
- A : une plaine littorale qui s'élève insensiblement vers l'Est pour atteindre une ligne de crête montagneuse culminant à plus de 1000m. C'est sur les parties hautes de ce versant que se trouvent les principales villes : Jérusalem , Hebron, Naples (Naplouse),
- B : un versant abrupt correspondant à la faille,
- C : un profond fossé d'effondrement ( la fosse syrienne) parcouru par le Jourdain qui forme le lac de Tibériade et se jette dans la mer Morte.
- D : le rebord occidental de la faille, formant une nouvelle crête montagneuse,
- E : à l'Est de la crête se trouvent de vastes plateaux.
Sur la carte ci-contre, ne sont figurées que les lignes principales de relief. Les montagnes sont assez massives et forment une barrière continue, c'est le cas des mont Liban (1) et des monts de Judée (5) et cela explique qu'on ne trouve que deux trouées transversales :
. Au niveau de Tyr avec une trouée (2) entre le mont Liban et les collines de Galilée empruntée par le fleuve Litani et qui conduit à la haute vallée du Jourdain,
. Au niveau d'Acre-Haiffa une trouée (4) limitée au sud par le Mont Carmel puis par les montagnes de Judée. cette trouée permet de rejoindre le lac de Tibériade.
En ce qui concerne le lacis de forteresses, on retrouve la même répartition que dans les forteresses de la principauté d'Antioche et du comté de Tripoli mais avec deux particularités notables :
. Le royaume comprend l'ensemble des lieux saints, cela explique la présence de nombreuses forteresses sécurisant et surveillant les voies de pèlerinage. Elles sont souvent construites par l'ordre du Temple qui avait reçu, lors de sa fondation, ce rôle de protection des pèlerins.
. Le royaume de Jérusalem, à la différence des deux Etats septentrionaux, possède un hinterland étendu sis-Jourdain. Les francs ont conquis de vastes domaines au delà du fossé d'effondrement formant deux ensembles : la Terre de Suete et surtout la Seigneurie d'Outre-Jourdain qui se termine en pointe sur le golfe d'Aqaba et possède un accès à la Mer Rouge.
Comme pour les deux autres états francs de Terre Sainte, je décomposerai ma présentation des forteresses existant antérieurement à 1187, en trois ensembles :
. Les forteresses littorales,
. Les forteresses situées entre le littoral et la fosse syrienne, elles sont toutes établies sur les voies principales de communication tant pour le commerce que pour les pèlerinages mais elles peuvent se muer en voies d'invasion,
. Les fortifications et systèmes défensifs des marges orientales.
À suivre
Le royaume de Jérusalem présente la même configuration géographique que les deux états francs septentrionaux avec d'Ouest en Est, une succession semblable de reliefs en bandes longitudinales comme il est noté sur la coupe ci-dessous :
- A : une plaine littorale qui s'élève insensiblement vers l'Est pour atteindre une ligne de crête montagneuse culminant à plus de 1000m. C'est sur les parties hautes de ce versant que se trouvent les principales villes : Jérusalem , Hebron, Naples (Naplouse),
- B : un versant abrupt correspondant à la faille,
- C : un profond fossé d'effondrement ( la fosse syrienne) parcouru par le Jourdain qui forme le lac de Tibériade et se jette dans la mer Morte.
- D : le rebord occidental de la faille, formant une nouvelle crête montagneuse,
- E : à l'Est de la crête se trouvent de vastes plateaux.
Sur la carte ci-contre, ne sont figurées que les lignes principales de relief. Les montagnes sont assez massives et forment une barrière continue, c'est le cas des mont Liban (1) et des monts de Judée (5) et cela explique qu'on ne trouve que deux trouées transversales :
. Au niveau de Tyr avec une trouée (2) entre le mont Liban et les collines de Galilée empruntée par le fleuve Litani et qui conduit à la haute vallée du Jourdain,
. Au niveau d'Acre-Haiffa une trouée (4) limitée au sud par le Mont Carmel puis par les montagnes de Judée. cette trouée permet de rejoindre le lac de Tibériade.
En ce qui concerne le lacis de forteresses, on retrouve la même répartition que dans les forteresses de la principauté d'Antioche et du comté de Tripoli mais avec deux particularités notables :
. Le royaume comprend l'ensemble des lieux saints, cela explique la présence de nombreuses forteresses sécurisant et surveillant les voies de pèlerinage. Elles sont souvent construites par l'ordre du Temple qui avait reçu, lors de sa fondation, ce rôle de protection des pèlerins.
. Le royaume de Jérusalem, à la différence des deux Etats septentrionaux, possède un hinterland étendu sis-Jourdain. Les francs ont conquis de vastes domaines au delà du fossé d'effondrement formant deux ensembles : la Terre de Suete et surtout la Seigneurie d'Outre-Jourdain qui se termine en pointe sur le golfe d'Aqaba et possède un accès à la Mer Rouge.
Comme pour les deux autres états francs de Terre Sainte, je décomposerai ma présentation des forteresses existant antérieurement à 1187, en trois ensembles :
. Les forteresses littorales,
. Les forteresses situées entre le littoral et la fosse syrienne, elles sont toutes établies sur les voies principales de communication tant pour le commerce que pour les pèlerinages mais elles peuvent se muer en voies d'invasion,
. Les fortifications et systèmes défensifs des marges orientales.
À suivre
jeudi 14 mai 2015
Mentalités et comportements au temps de la croisade (67) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs.
Les forteresses protégeant la plaine d'Akkar et de la Boquée
Au niveau de la plaine d'Akkar et de la Boquée, les francs ont construit deux lignes de forteresses établis sur les promontoires dominant la plaine. Ces deux lignes épousent les lignes du relief en figurant une forme approximativement triangulaire.
La ligne nord est adossée aux pentes du Djebel Ansarieh entre la plaine et le territoire des Ismaéliens qui occupent la partie sud du même djebel : de ces forteresses, les plus importantes sont aux mains des ordres militaires : CHASTEL BLANC et ARIMA ressortent des templiers à l'époque de Hattin, le KRACK DES CHEVALIERS est possession des chevaliers de saint Jean de Jérusalem .
. ARIMA (1) et CHASTEL BLANC (2) possèdent la même histoire : les templiers les ont récupérés ruinés par deux incursions de Nour-Al-Din en 1167 et 1171 avec, entre temps, un tremblement de terre en 1170. C'est après cette période, que le comte de Tripoli, jusqu'alors propriétaire des lieux céda ses châteaux aux templiers à charge de les reconstruire. Ces deux forteresses sont chargées à la fois de surveiller la plaine et les territoires ismaéliens, elles sont complétées par des tours de surveillance et châteaux de moindre importance.
. Le KRACK DES CHEVALIERS, (3) possession des Hospitaliers de saint Jean de Jérusalem depuis 1142 est la pièce maîtresse de la défense de la ligne nord de protection de la plaine d'Akkar et de la Boquée, il est situé sur un promontoire dominant la Boquée et contrôle toute la région environnante. Aux fonctions des deux autres forteresses, surveiller la plaine et les territoires des ismaéliens, s'ajoute le contrôle de la haute vallée du Nash-el-Khebir qui permet de rejoindre le fossé d'effondrement (plaine du GHAB) vers RAFANEE. Cette haute vallée comportait de nombreux points fortifiés et en particulier le château de TOUBAN (4) remis aux hospitaliers en 1180.
La ligne sud, moins exposée aux incursions venues de l'est, possède une ligne, semble-t'il, moins dense de fortifications. Les plus importantes sont aux mains des Hospitaliers de saint Jean de Jerusalem .
. La ligne comporte à l'ouest, deux châteaux de plaine construits sur de légères buttes, GOLIATH (5) (remis aux hospitaliers en 1127 qui ne sert que de refuge et de base de départ et d'approvisionnement des chevaliers) et FELICIUM. (6) ( remis aux hospitaliers en 1142 en même temps que le KRACK DES CHEVALIERS)
. Le long de la Boquée se trouve la forteresse principale de GIBELACAR, (8) elle constitue le pendant du krack des chevaliers formant la partie sud de la tenaille qui protège l'accès à la plaine , elle domine aussi la plaine de la Beqa. GIBELACAR fut remis aux hospitaliers en 1170.
. Le long de la Boquée se trouvent enfin plusieurs châteaux étroitement liés au système défensif de GIBELACAR, dont MELECHIN ( 7), possession des hospitaliers à partir de 1181.
Les forteresses contrôlant un col sur une voie de passage ouest-est
Parmi ces forteresses, on peu citer la forteresse de MOINETRE (9) établie sur la voie menant de Gibelet à Baalbeck.
Les forteresses destinées à la colonisation et au contrôle des plaines du fossé d'effondrement et en particulier de la plaine de la Beqa.
Il va de soi que les riches cultures des fossés d'effondrement furent l'objet de la convoitise des comtes de Tripoli. Pour les francs, une des places les plus importantes était la ville de RAFANEE ; son contrôle avait une quadruple importance :
. Il permettait de commander une voie importante de communication entre Homs et la plaine d'Akkar via la Boquée.
. Il donnait le contrôle des riches terres agricoles qui l'entourent et devait permettre de coloniser la région.
. Il donnait aux francs une base pour des conquêtes ultérieures.
. Il permettait d'organiser des razzias dans la Beqa.
La première croisade était passée par RAFANEE en 1099 et Raymond de Saint Gilles décida d'entamer sa conquête après la prise de Jérusalem Pour cela, comme il l'avait pratiqué à Tripoli, il enteprit de construire à peu de distance de la ville une forteresse appelée MONTFERRAND.(9); à peine construite, la forteresse est prise par l'Atabeg de Damas Toghtekin et démantelée, ce qui amène à une nouvelle tentative de reconquête par les francs. Celle-ci se termine par un traité conclu entre le comté de Tripoli et l'atabeg en 1109. Trois dispositions sont importantes :
. Les francs acceptent de ne plus razzier la Beqa, en échange, ils recevront un tiers des récoltes.
. Les châteaux de la MOINETRE et de GIBELACAR sont laissés aux francs.
. En échange, les chateaux de Masyaf, TOUBAN et le HOSN AT ABRAD (le futur KRACK DES CHEVALIERS) seront garantis de toute attaque et devront en outre payer tribut au comte.
Cet accord ne fut pas respecté par les francs qui s'emparent du Hosn at Abrad et de Rafanée en 1112. Rafanée changea plusieurs fois de mains jusque 1137, date où Zengi, atabeg de Mossoul reprit définitivement RAFANEE et MONTFERRAND.
Cette reconquête nécessita la recomposition de la défense du comté de Tripoli : le point clé de cette défense fut reporté de RAFANEE- MONTFERRAND situés au débouché de la route passant par la haute vallée du Nash-el-Khebir au HOSN AT ABRAD situé plus en aval et commandant la route de la moyenne vallée du Nash-el-Khebir. Il fallait faire de ce fortin un lieu inexpugnable ; comme les comtes de Tripoli n'avaient pas les moyens de la reconstruction, il fut décidé de remettre le fortin a l'ordre de l'hôpital qui en firent le KRACK DES CHEVALIERS.
Au niveau de la plaine d'Akkar et de la Boquée, les francs ont construit deux lignes de forteresses établis sur les promontoires dominant la plaine. Ces deux lignes épousent les lignes du relief en figurant une forme approximativement triangulaire.
La ligne nord est adossée aux pentes du Djebel Ansarieh entre la plaine et le territoire des Ismaéliens qui occupent la partie sud du même djebel : de ces forteresses, les plus importantes sont aux mains des ordres militaires : CHASTEL BLANC et ARIMA ressortent des templiers à l'époque de Hattin, le KRACK DES CHEVALIERS est possession des chevaliers de saint Jean de Jérusalem .
. ARIMA (1) et CHASTEL BLANC (2) possèdent la même histoire : les templiers les ont récupérés ruinés par deux incursions de Nour-Al-Din en 1167 et 1171 avec, entre temps, un tremblement de terre en 1170. C'est après cette période, que le comte de Tripoli, jusqu'alors propriétaire des lieux céda ses châteaux aux templiers à charge de les reconstruire. Ces deux forteresses sont chargées à la fois de surveiller la plaine et les territoires ismaéliens, elles sont complétées par des tours de surveillance et châteaux de moindre importance.
. Le KRACK DES CHEVALIERS, (3) possession des Hospitaliers de saint Jean de Jérusalem depuis 1142 est la pièce maîtresse de la défense de la ligne nord de protection de la plaine d'Akkar et de la Boquée, il est situé sur un promontoire dominant la Boquée et contrôle toute la région environnante. Aux fonctions des deux autres forteresses, surveiller la plaine et les territoires des ismaéliens, s'ajoute le contrôle de la haute vallée du Nash-el-Khebir qui permet de rejoindre le fossé d'effondrement (plaine du GHAB) vers RAFANEE. Cette haute vallée comportait de nombreux points fortifiés et en particulier le château de TOUBAN (4) remis aux hospitaliers en 1180.
La ligne sud, moins exposée aux incursions venues de l'est, possède une ligne, semble-t'il, moins dense de fortifications. Les plus importantes sont aux mains des Hospitaliers de saint Jean de Jerusalem .
. La ligne comporte à l'ouest, deux châteaux de plaine construits sur de légères buttes, GOLIATH (5) (remis aux hospitaliers en 1127 qui ne sert que de refuge et de base de départ et d'approvisionnement des chevaliers) et FELICIUM. (6) ( remis aux hospitaliers en 1142 en même temps que le KRACK DES CHEVALIERS)
. Le long de la Boquée se trouve la forteresse principale de GIBELACAR, (8) elle constitue le pendant du krack des chevaliers formant la partie sud de la tenaille qui protège l'accès à la plaine , elle domine aussi la plaine de la Beqa. GIBELACAR fut remis aux hospitaliers en 1170.
. Le long de la Boquée se trouvent enfin plusieurs châteaux étroitement liés au système défensif de GIBELACAR, dont MELECHIN ( 7), possession des hospitaliers à partir de 1181.
Les forteresses contrôlant un col sur une voie de passage ouest-est
Parmi ces forteresses, on peu citer la forteresse de MOINETRE (9) établie sur la voie menant de Gibelet à Baalbeck.
Les forteresses destinées à la colonisation et au contrôle des plaines du fossé d'effondrement et en particulier de la plaine de la Beqa.
Il va de soi que les riches cultures des fossés d'effondrement furent l'objet de la convoitise des comtes de Tripoli. Pour les francs, une des places les plus importantes était la ville de RAFANEE ; son contrôle avait une quadruple importance :
. Il permettait de commander une voie importante de communication entre Homs et la plaine d'Akkar via la Boquée.
. Il donnait le contrôle des riches terres agricoles qui l'entourent et devait permettre de coloniser la région.
. Il donnait aux francs une base pour des conquêtes ultérieures.
. Il permettait d'organiser des razzias dans la Beqa.
La première croisade était passée par RAFANEE en 1099 et Raymond de Saint Gilles décida d'entamer sa conquête après la prise de Jérusalem Pour cela, comme il l'avait pratiqué à Tripoli, il enteprit de construire à peu de distance de la ville une forteresse appelée MONTFERRAND.(9); à peine construite, la forteresse est prise par l'Atabeg de Damas Toghtekin et démantelée, ce qui amène à une nouvelle tentative de reconquête par les francs. Celle-ci se termine par un traité conclu entre le comté de Tripoli et l'atabeg en 1109. Trois dispositions sont importantes :
. Les francs acceptent de ne plus razzier la Beqa, en échange, ils recevront un tiers des récoltes.
. Les châteaux de la MOINETRE et de GIBELACAR sont laissés aux francs.
. En échange, les chateaux de Masyaf, TOUBAN et le HOSN AT ABRAD (le futur KRACK DES CHEVALIERS) seront garantis de toute attaque et devront en outre payer tribut au comte.
Cet accord ne fut pas respecté par les francs qui s'emparent du Hosn at Abrad et de Rafanée en 1112. Rafanée changea plusieurs fois de mains jusque 1137, date où Zengi, atabeg de Mossoul reprit définitivement RAFANEE et MONTFERRAND.
Cette reconquête nécessita la recomposition de la défense du comté de Tripoli : le point clé de cette défense fut reporté de RAFANEE- MONTFERRAND situés au débouché de la route passant par la haute vallée du Nash-el-Khebir au HOSN AT ABRAD situé plus en aval et commandant la route de la moyenne vallée du Nash-el-Khebir. Il fallait faire de ce fortin un lieu inexpugnable ; comme les comtes de Tripoli n'avaient pas les moyens de la reconstruction, il fut décidé de remettre le fortin a l'ordre de l'hôpital qui en firent le KRACK DES CHEVALIERS.
mardi 12 mai 2015
Mentalités et comportements au temps de la croisade (66) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs
LA FORTERESSE TEMPLIERE DE TORTOSE
Afin de montrer l'organisation spatiale d'une forteresse de Terre Sainte, on peut prendre l'exemple de celle de Tortose ; elle est particulièrement intéressante, à la fois parce qu'il en reste de nombreux ruines enchâssées dans les quartiers de la ville et parce que ces restes permettent de définir un plan architectural assez précis que l'on retrouve un peu partout dans l'architecture militaire de Terre Sainte.
Les relevés sur le terrain ne donnent guère d'indices de datation, cela fait que la description que j'effectuerai dépasse sans doute le cadre chronologique que je m'étais fixé, antérieur à 1187. Néanmoins, elle permettra de montrer l'inexpugnabilité du système défensif d'une citadelle et de montrer les progrès accomplis au niveau de l'architecture militaire.
La forteresse est construite dans le coin Nord-ouest de la ville au bord de la mer.
Elle comporte en premier lieu, un puissant donjon (1) élevé en bordure de rivage et entouré d'un fossé inondable (2) en cas d'attaque. Une porte sur la mer permettait de recevoir des approvisionnements en cas de siège terrestre prolongé. Ce type de tour pourrait représenter le premier état du château ; en effet, de telles tours de surveillance et de guet avait été construites un peu partout sur les lieux stratégiques de Terre Sainte.
Tout autour de cette tour, les templiers ont construit deux enceintes sans doute successives pourvues de tours (3 et 5 du plan), chacune étant précédée d'un fossé. (4 et 6) également inondable.
Comme le montre la coupe, chacun de ces remparts est pourvu de chemin de ronde et est adossé à une structure massive :
. Le rempart extérieur est adossé au rocher qui a été dégagé lors du creusement du fossé,
. En arrière du rempart intérieur a été construit un ensemble de casemates (7) servant de magasins qui en épaule la base à l'est et au sud.
Selon moi, un tel système permettait de se prémunir contre les attaques effectuées au moyen d'armes de jets puisque les projectiles que l'on envoyait, décrivant une courbe elliptique, venaient se fracasser contre la base des remparts que l'on avait, pour cette raison, protégée par les structures massives. Ces caractéristiques permettent de penser que le rempart intérieur était antérieur au rempart extérieur.
Dans ces deux remparts étaient creusées deux portes successives, toutes les deux situées sur le rempart nord, le seul donnant sur la campagne. Pour accéder au château, il fallait :
. Monter une rampe (8) établie dans le fossé puis passer la tour-porte (9) ; cette première partie du trajet était périlleuse pour les assaillants sur qui les défenseurs du château pouvait tirer des deux remparts de la forteresse
. Une fois la porte prise par les assaillants, ils se trouvaient dans le fossé intérieur qui menait à la porte intérieure (10) sous les tirs des défenseurs établis sur le chemin de ronde du rempart intérieur,
. Il fallait enfin emporter la porte intérieure qui était défendue par deux tours.
Ce système d'accès en chicane est d'une grande efficacité, les assaillants cheminent entre des remparts qui forment une sorte de gorge sans cesse à la merci des tirs des défenseurs ; pourtant, à Tortose, le système n'a pas été mené totalement à son terme comme au Krak des chevaliers où il est nécessaire de d'accomplir le tour complet de la gorge entre les remparts pour passer de la première porte à la seconde.
Le double rempart et le trajet en chicane caractérisent la plupart des grandes forteresses de Terre Sainte.
Passée la porte intérieure, on se trouve dans la cour. Adossés au rempart Nord se trouvent les bâtiments conventuels habituels aux fortifications templières : chapelle (11), grande salle capitulaire (12) qui servit aussi de salle de réception et d'apparat et devait être surmonté d'un dortoir. Il devait exister aussi un réfectoire et des cuisines... Ce qui est frappant dans les forteresses appartenant aux ordres de moines-soldats, c'est qu'après avoir franchi les remparts et moyens de défense , on se trouve finalement dans un monastère !
Afin de montrer l'organisation spatiale d'une forteresse de Terre Sainte, on peut prendre l'exemple de celle de Tortose ; elle est particulièrement intéressante, à la fois parce qu'il en reste de nombreux ruines enchâssées dans les quartiers de la ville et parce que ces restes permettent de définir un plan architectural assez précis que l'on retrouve un peu partout dans l'architecture militaire de Terre Sainte.
Les relevés sur le terrain ne donnent guère d'indices de datation, cela fait que la description que j'effectuerai dépasse sans doute le cadre chronologique que je m'étais fixé, antérieur à 1187. Néanmoins, elle permettra de montrer l'inexpugnabilité du système défensif d'une citadelle et de montrer les progrès accomplis au niveau de l'architecture militaire.
La forteresse est construite dans le coin Nord-ouest de la ville au bord de la mer.
Elle comporte en premier lieu, un puissant donjon (1) élevé en bordure de rivage et entouré d'un fossé inondable (2) en cas d'attaque. Une porte sur la mer permettait de recevoir des approvisionnements en cas de siège terrestre prolongé. Ce type de tour pourrait représenter le premier état du château ; en effet, de telles tours de surveillance et de guet avait été construites un peu partout sur les lieux stratégiques de Terre Sainte.
Tout autour de cette tour, les templiers ont construit deux enceintes sans doute successives pourvues de tours (3 et 5 du plan), chacune étant précédée d'un fossé. (4 et 6) également inondable.
Comme le montre la coupe, chacun de ces remparts est pourvu de chemin de ronde et est adossé à une structure massive :
. Le rempart extérieur est adossé au rocher qui a été dégagé lors du creusement du fossé,
. En arrière du rempart intérieur a été construit un ensemble de casemates (7) servant de magasins qui en épaule la base à l'est et au sud.
Selon moi, un tel système permettait de se prémunir contre les attaques effectuées au moyen d'armes de jets puisque les projectiles que l'on envoyait, décrivant une courbe elliptique, venaient se fracasser contre la base des remparts que l'on avait, pour cette raison, protégée par les structures massives. Ces caractéristiques permettent de penser que le rempart intérieur était antérieur au rempart extérieur.
Dans ces deux remparts étaient creusées deux portes successives, toutes les deux situées sur le rempart nord, le seul donnant sur la campagne. Pour accéder au château, il fallait :
. Monter une rampe (8) établie dans le fossé puis passer la tour-porte (9) ; cette première partie du trajet était périlleuse pour les assaillants sur qui les défenseurs du château pouvait tirer des deux remparts de la forteresse
. Une fois la porte prise par les assaillants, ils se trouvaient dans le fossé intérieur qui menait à la porte intérieure (10) sous les tirs des défenseurs établis sur le chemin de ronde du rempart intérieur,
. Il fallait enfin emporter la porte intérieure qui était défendue par deux tours.
Ce système d'accès en chicane est d'une grande efficacité, les assaillants cheminent entre des remparts qui forment une sorte de gorge sans cesse à la merci des tirs des défenseurs ; pourtant, à Tortose, le système n'a pas été mené totalement à son terme comme au Krak des chevaliers où il est nécessaire de d'accomplir le tour complet de la gorge entre les remparts pour passer de la première porte à la seconde.
Le double rempart et le trajet en chicane caractérisent la plupart des grandes forteresses de Terre Sainte.
Passée la porte intérieure, on se trouve dans la cour. Adossés au rempart Nord se trouvent les bâtiments conventuels habituels aux fortifications templières : chapelle (11), grande salle capitulaire (12) qui servit aussi de salle de réception et d'apparat et devait être surmonté d'un dortoir. Il devait exister aussi un réfectoire et des cuisines... Ce qui est frappant dans les forteresses appartenant aux ordres de moines-soldats, c'est qu'après avoir franchi les remparts et moyens de défense , on se trouve finalement dans un monastère !
lundi 11 mai 2015
Mentalités et comportements au temps de la croisade (65) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs
LES FORTERESSES DU COMTÉ DE TRIPOLI
Au niveau de son littoral, le Comté de Tripoli commence au sud de MARGAT et se termine un peu au nord de Beyrouth ; quant à son arrière-pays, comme pour la principauté d'Antioche, il est fluctuant : il ne comporte que des points isolés sur le littoral à l'époque de Raymond de Saint-Gilles, puis forme une ligne littorale continue avant de se développer jusqu'à la plaine de la Beqa, ensuite il régresse pour se cantonner aux rebords orientaux du Djebel Ansarieh et du mont Liban ; ces deux limites naturelles sont assez sûres d'autant qu'elles sont surveillées par un réseau efficace de forteresses.
Le comté est essentiellement centré sur la plaine d'Akkar qui s'épanouit sur le littoral entre Tortose et Tripoli, puis se développe en un sillon parallèle à la Beqa appelé la Boquée, et ensuite se rétrécit vers Homs en triangle ; c'est la trouée la plus méridionale de la partie nord du littoral. Appelée actuellement la trouée d'Homs, elle ouvre le passage vers la riche et fertile plaine de la Beqa. Celle-ci étant, bien entendu l'objet de la convoitise des croisés qui tentèrent de la conquérir.
Comme dans la principauté d'Antioche, on peut classer les forteresses en quatre grandes catégories :
. Les forteresses littorales,
. Les forteresses établies à mi-hauteur des versants surveillant et contrôlant la trouée d'Homs,
. Les forteresses adossées aux pentes dominant la Beqa et contrôlant un col,
. Les forteresses de colonisation établies dans la plaine de la Beqa et perdues en 1187
Les templiers possèdent trois de ces forteresses : TORTOSE, ARIMA et CHASTEL BLANC,
Comme pour la principauté d'Antioche, mon but n'est pas d'effectuer une description exhaustive des forteresses franques maïs beaucoup plus de déterminer la signification d'ensemble de leur localisation.
Les forteresses littorales
Du nord au sud, on trouve successivement :
- TORTOSE, la ville avait été prise par un détachement envoyé par Raymond de Toulouse lors du siège d'Archas. Sitôt le siège d'Archas levé, l'émir de Tripoli avait repris la cité ; après la conquête de Jerusalem, le comte de Toulouse, désireux de se créer une principauté autour de Tripoli dont il avait constaté la richesse, revint dans la région et réussit à s'emparer de Tortose dont il fit le point de départ de ses expéditions ultérieures. La place fut ensuite remise aux templiers, peu après une attaque de Nur-Al-Din survenue en 1152 qui s'employèrent à la renforcer pour la rendre inexpugnable. Face à Tortose se trouve un îlot, Rouad, qui fut également fortifié.
- entre Tortose et Tripoli, sur le rivage de la plaine d'Akkar, on ne trouve pas de forteresses car il n'y a pas de promontoires littoraux pour en construire.
- vers le sud, on trouve Tripoli que Raymond de saint Gilles s'était résigné à ne pas conquérir lors de la première croisade. Apres la prise de Tortose, il jeta son dévolu sur Tripoli et, pour s'en emparer, il construisit un château à quelques distances de la cité alors centrée autour de son port, CHÂTEAU PÈLERIN, à partir duquel il lança les attaques sur Tripoli. C'est dans de château qu'il mourut en 1105. La place de Tripoli ne sera conquise qu'en 1109.
- au sud de Tripoli, la côte redevient rocheuse ce qui permit la construction de forteresses surveillant la route littorale : CALAMON (1) puis NEPHRIN (2) établi sur un cap rocheux de 400 mètres de long, puis LE PUY DU CONNÉTABLE (3) qui surveille un étroit défilé entre versant et rivage, ne laissant place qu'à la route, BOUTRON, enfin GIBELET, l'antique Byblos au débouché d'un route difficile qui mène à Baalbeck.
Au niveau de son littoral, le Comté de Tripoli commence au sud de MARGAT et se termine un peu au nord de Beyrouth ; quant à son arrière-pays, comme pour la principauté d'Antioche, il est fluctuant : il ne comporte que des points isolés sur le littoral à l'époque de Raymond de Saint-Gilles, puis forme une ligne littorale continue avant de se développer jusqu'à la plaine de la Beqa, ensuite il régresse pour se cantonner aux rebords orientaux du Djebel Ansarieh et du mont Liban ; ces deux limites naturelles sont assez sûres d'autant qu'elles sont surveillées par un réseau efficace de forteresses.
Le comté est essentiellement centré sur la plaine d'Akkar qui s'épanouit sur le littoral entre Tortose et Tripoli, puis se développe en un sillon parallèle à la Beqa appelé la Boquée, et ensuite se rétrécit vers Homs en triangle ; c'est la trouée la plus méridionale de la partie nord du littoral. Appelée actuellement la trouée d'Homs, elle ouvre le passage vers la riche et fertile plaine de la Beqa. Celle-ci étant, bien entendu l'objet de la convoitise des croisés qui tentèrent de la conquérir.
Comme dans la principauté d'Antioche, on peut classer les forteresses en quatre grandes catégories :
. Les forteresses littorales,
. Les forteresses établies à mi-hauteur des versants surveillant et contrôlant la trouée d'Homs,
. Les forteresses adossées aux pentes dominant la Beqa et contrôlant un col,
. Les forteresses de colonisation établies dans la plaine de la Beqa et perdues en 1187
Les templiers possèdent trois de ces forteresses : TORTOSE, ARIMA et CHASTEL BLANC,
Comme pour la principauté d'Antioche, mon but n'est pas d'effectuer une description exhaustive des forteresses franques maïs beaucoup plus de déterminer la signification d'ensemble de leur localisation.
Les forteresses littorales
Du nord au sud, on trouve successivement :
- TORTOSE, la ville avait été prise par un détachement envoyé par Raymond de Toulouse lors du siège d'Archas. Sitôt le siège d'Archas levé, l'émir de Tripoli avait repris la cité ; après la conquête de Jerusalem, le comte de Toulouse, désireux de se créer une principauté autour de Tripoli dont il avait constaté la richesse, revint dans la région et réussit à s'emparer de Tortose dont il fit le point de départ de ses expéditions ultérieures. La place fut ensuite remise aux templiers, peu après une attaque de Nur-Al-Din survenue en 1152 qui s'employèrent à la renforcer pour la rendre inexpugnable. Face à Tortose se trouve un îlot, Rouad, qui fut également fortifié.
- entre Tortose et Tripoli, sur le rivage de la plaine d'Akkar, on ne trouve pas de forteresses car il n'y a pas de promontoires littoraux pour en construire.
- vers le sud, on trouve Tripoli que Raymond de saint Gilles s'était résigné à ne pas conquérir lors de la première croisade. Apres la prise de Tortose, il jeta son dévolu sur Tripoli et, pour s'en emparer, il construisit un château à quelques distances de la cité alors centrée autour de son port, CHÂTEAU PÈLERIN, à partir duquel il lança les attaques sur Tripoli. C'est dans de château qu'il mourut en 1105. La place de Tripoli ne sera conquise qu'en 1109.
- au sud de Tripoli, la côte redevient rocheuse ce qui permit la construction de forteresses surveillant la route littorale : CALAMON (1) puis NEPHRIN (2) établi sur un cap rocheux de 400 mètres de long, puis LE PUY DU CONNÉTABLE (3) qui surveille un étroit défilé entre versant et rivage, ne laissant place qu'à la route, BOUTRON, enfin GIBELET, l'antique Byblos au débouché d'un route difficile qui mène à Baalbeck.
dimanche 10 mai 2015
Mentalités et comportements au temps de la croisade (64) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs
Suite de l'article précédent
LES AUTRES FORTERESSES FRANQUES DE LA PRINCIPAUTÉ D'ANTIOCHE
Il est hors de mon propos de donner ici une description détaillée des forteresses franques, mais beaucoup plus de déterminer les conceptions qui présidèrent à leur localisation. A cet égard, les quatre types de forteresses définies précédemment permettent une classification assez simple :
En premier lieu se trouvent les forteresses littorales, la plus imposante est celle de MARGAT qui domine le port de Banias, et contrôle la route littorale. GIBEL possède aussi une forteresse établie dans un théâtre antique
Les plus importantes forteresses surveillent les passages entre le littoral et le fossé d'effondrement qui porte au sud du pont de fer le nom de GHAB.
. Le pont de fer (DJISR EL HADID) (5) était lui-même fortifié par deux tours qui furent prises par les francs vers 1161. Il etait contrôlé par le château d'HARRENC qui l'objet de luttes entre francs et turcs : il fut pris par les francs en 1098, repris par les armées de Nur EL Din de 1149 à 1158, récupéré par les francs puis reconquis par Nur en 1164, au moment de Hattin, la forteresse est aux mains des turcs.
. La route qui relie Lattaquie au pont du moyen Oronte (le DJISR EL SHROG) (7) était surveillé par un ensemble cohérent de grandes forteresses : EL-AIDO établi sur une croupe escarpée dominant le confluent de deux cours d'eau qui constituent le Nahr Khebir. SAONE établi sur un promontoire et surveillant a la fois la route de Lattaquié à l'Oronte mais aussi un col du littoral à l'Oronte situé plus au sud.
Une troisième catégorie comporte quelques forteresses qui sont établies sur les dernières pentes de la montagne à la fois pour surveiller le fossé d'effondrement et pour contrôler les cols traversant la chaîne du Djebel Ansarieh, c'est le cas par exemple du château de BOURZEY qui domine le Gharb.
Enfin, quelques forteresses ont été construites après la première croisade pour créer des centres de fiefs de colonisation : ces forteresses, au moment de la bataille de Hattin, ont été reprises par les turcs, ce fut le cas de MAARAT (9) qui subit un siège de cinq semaines au moment de la première croisade et où fut construit le château franc de La Marre et qui fut ensuite repris par les turcs et d'APAMEE.(8)
Enfin, se trouvent deux particularités qu'il convient de signaler :
- les deux châteaux de LAYCAS et de MALAVANS (11 de la carte) qui furent conquis par les ismaéliens, connus sous le nom de secte des Assassins. Cette conquête fit que la frontière entre la principauté et le comté se réduisit à une étroite frange de terrain.
- le château de CURSAT appartenant au patriarche d'Antioche qui en fit son refuge.
LES AUTRES FORTERESSES FRANQUES DE LA PRINCIPAUTÉ D'ANTIOCHE
Il est hors de mon propos de donner ici une description détaillée des forteresses franques, mais beaucoup plus de déterminer les conceptions qui présidèrent à leur localisation. A cet égard, les quatre types de forteresses définies précédemment permettent une classification assez simple :
En premier lieu se trouvent les forteresses littorales, la plus imposante est celle de MARGAT qui domine le port de Banias, et contrôle la route littorale. GIBEL possède aussi une forteresse établie dans un théâtre antique
Les plus importantes forteresses surveillent les passages entre le littoral et le fossé d'effondrement qui porte au sud du pont de fer le nom de GHAB.
. Le pont de fer (DJISR EL HADID) (5) était lui-même fortifié par deux tours qui furent prises par les francs vers 1161. Il etait contrôlé par le château d'HARRENC qui l'objet de luttes entre francs et turcs : il fut pris par les francs en 1098, repris par les armées de Nur EL Din de 1149 à 1158, récupéré par les francs puis reconquis par Nur en 1164, au moment de Hattin, la forteresse est aux mains des turcs.
. La route qui relie Lattaquie au pont du moyen Oronte (le DJISR EL SHROG) (7) était surveillé par un ensemble cohérent de grandes forteresses : EL-AIDO établi sur une croupe escarpée dominant le confluent de deux cours d'eau qui constituent le Nahr Khebir. SAONE établi sur un promontoire et surveillant a la fois la route de Lattaquié à l'Oronte mais aussi un col du littoral à l'Oronte situé plus au sud.
Une troisième catégorie comporte quelques forteresses qui sont établies sur les dernières pentes de la montagne à la fois pour surveiller le fossé d'effondrement et pour contrôler les cols traversant la chaîne du Djebel Ansarieh, c'est le cas par exemple du château de BOURZEY qui domine le Gharb.
Enfin, quelques forteresses ont été construites après la première croisade pour créer des centres de fiefs de colonisation : ces forteresses, au moment de la bataille de Hattin, ont été reprises par les turcs, ce fut le cas de MAARAT (9) qui subit un siège de cinq semaines au moment de la première croisade et où fut construit le château franc de La Marre et qui fut ensuite repris par les turcs et d'APAMEE.(8)
Enfin, se trouvent deux particularités qu'il convient de signaler :
- les deux châteaux de LAYCAS et de MALAVANS (11 de la carte) qui furent conquis par les ismaéliens, connus sous le nom de secte des Assassins. Cette conquête fit que la frontière entre la principauté et le comté se réduisit à une étroite frange de terrain.
- le château de CURSAT appartenant au patriarche d'Antioche qui en fit son refuge.
samedi 9 mai 2015
Mentalités et comportements au temps de la croisade (63) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs
LES FORTERESSES DE LA PRINCIPAUTÉ D'ANTIOCHE.
La principauté d'Antioche s'étend au niveau de son littoral du golfe d'Alexandrette (2) à Banyas (VALENIE pour les francs) avec un arrière-pays qui se limite un peu avant 1187 au niveau des crêtes dominant l'Oronte et le fossé d'effondrement. Les conquêtes effectuées au delà ayant été perdues.
Elles comporte deux trouées importantes, celle d'Antioche (4) entre DJEBEL AMANUS ET DJEBEL AKRA et celle de Lattaquié entre le DJEBEL AKRA et le DJEBEL ANSARIEH.
ces deux trouées débouchent chacune sur un pont établi sur l'Oronte dont le contrôle ouvre les accès vers l'Est :
. le pont de fer (DJISR EL HADID) (5) au niveau de la trouée d'Antioche qui contrôle la route menant à Alep.
. le pont établi sur le moyen Oronte (DJISR EL SHOGHR) (7), que l'on rejoint à partir de Lattaquié en remontant le cours du NHAL KHEBIR et qui mène également à Alep mais aussi à Apamée et au moyen-Euphrate.
La principauté comporte une plaine littorale étroite mais pourvue de nombreux ports : Arzouz (3) (PORT BONNEL), PORT SAINT SIMÉON (6) , exutoire d'Antioche, Lattaquié (ancienne LAODICÉE), GIBEL et VALENIE ( Banyas)
La localisation des forteresses franques dépend de ces contingences géographiques :
- surveillance des trouées et des cols au moyen de forteresses établies sur les pentes montagneuses qui bordent ces trouées et sur les pentes dominant le fossé d'effondrement.
- protection et garde des ports et du littoral.
LES FORTERESSES DES TEMPLIERS DANS LA PRINCIPAUTÉ D'ANTIOCHE
Les spécialistes en mentionnent quatre, citées par divers textes mais dont la localisation reste incertaine pour deux au moins.
La première, ROCHE DE ROISSEL, localisée par la toponymie locale, est une forteresse littorale gardant l'étroite bande côtière entre le rivage et les pentes du Djebel Amanus. Là passe une route qui, dans cette région disputée entre francs, arméniens et byzantins, fut fréquemment une voie d'invasion. A l'endroit le plus étroit, se trouve un site appelé la Portelle, (1) ce qui témoigne de l'exiguïté du passage. Le château de ROCHE DE ROISSEL est destiné d'abord à cette défense de cette route stratégique.
Un autre rôle de la forteresse est de protéger les rares ports qui se trouvent sur le littoral : Arsouz ( PONT BONNEL) (3) qui serait aussi le siège d'une commanderie et un port appelé actuellement Minat El Fridji, port des francs. L'autre port situé plus au Nord, Alexandrette, (2) trop proche de la Portelle et sur la voie des invasions, était trop peu sûr pour être utilisé efficacement par les francs.
Les trois autres forteresses templières se trouvaient sur les hauteurs du versant oriental du Djebel Amanus ; elles faisaient office de marches-frontières depuis la chute d'Edesse, contrôlaient les passes et cols qui reliaient le littoral à l'intérieur mais aussi surveillaient les mouvements ennemis du fossé d'effondrement :
. ROCHE GUILLAUME au nord contrôlait la passe qui partait de la Portelle et traversait l'Amanus
. TRAPEZAC au nord-est et GASTON ( Baghras) au sud-est surveillaient la route qui menait de la région d'Alexandrette, au col de Beylan puis débouchait sur le fossé d'effondrement.
Elles furent remises à l'ordre du Temple à une date imprécise, sans doute vers 1154 ; en 1168, TRAPEZAC et GASTON étaient possession des templiers quand un renégat de l'ordre s'en empara et fit allégeance à Nur Al Din ; à la mort de ce renégat, l'ordre reprit possession des deux châteaux qu'ils conservaient encore en 1187.
A suivre...
La principauté d'Antioche s'étend au niveau de son littoral du golfe d'Alexandrette (2) à Banyas (VALENIE pour les francs) avec un arrière-pays qui se limite un peu avant 1187 au niveau des crêtes dominant l'Oronte et le fossé d'effondrement. Les conquêtes effectuées au delà ayant été perdues.
Elles comporte deux trouées importantes, celle d'Antioche (4) entre DJEBEL AMANUS ET DJEBEL AKRA et celle de Lattaquié entre le DJEBEL AKRA et le DJEBEL ANSARIEH.
ces deux trouées débouchent chacune sur un pont établi sur l'Oronte dont le contrôle ouvre les accès vers l'Est :
. le pont de fer (DJISR EL HADID) (5) au niveau de la trouée d'Antioche qui contrôle la route menant à Alep.
. le pont établi sur le moyen Oronte (DJISR EL SHOGHR) (7), que l'on rejoint à partir de Lattaquié en remontant le cours du NHAL KHEBIR et qui mène également à Alep mais aussi à Apamée et au moyen-Euphrate.
La principauté comporte une plaine littorale étroite mais pourvue de nombreux ports : Arzouz (3) (PORT BONNEL), PORT SAINT SIMÉON (6) , exutoire d'Antioche, Lattaquié (ancienne LAODICÉE), GIBEL et VALENIE ( Banyas)
La localisation des forteresses franques dépend de ces contingences géographiques :
- surveillance des trouées et des cols au moyen de forteresses établies sur les pentes montagneuses qui bordent ces trouées et sur les pentes dominant le fossé d'effondrement.
- protection et garde des ports et du littoral.
LES FORTERESSES DES TEMPLIERS DANS LA PRINCIPAUTÉ D'ANTIOCHE
Les spécialistes en mentionnent quatre, citées par divers textes mais dont la localisation reste incertaine pour deux au moins.
La première, ROCHE DE ROISSEL, localisée par la toponymie locale, est une forteresse littorale gardant l'étroite bande côtière entre le rivage et les pentes du Djebel Amanus. Là passe une route qui, dans cette région disputée entre francs, arméniens et byzantins, fut fréquemment une voie d'invasion. A l'endroit le plus étroit, se trouve un site appelé la Portelle, (1) ce qui témoigne de l'exiguïté du passage. Le château de ROCHE DE ROISSEL est destiné d'abord à cette défense de cette route stratégique.
Un autre rôle de la forteresse est de protéger les rares ports qui se trouvent sur le littoral : Arsouz ( PONT BONNEL) (3) qui serait aussi le siège d'une commanderie et un port appelé actuellement Minat El Fridji, port des francs. L'autre port situé plus au Nord, Alexandrette, (2) trop proche de la Portelle et sur la voie des invasions, était trop peu sûr pour être utilisé efficacement par les francs.
Les trois autres forteresses templières se trouvaient sur les hauteurs du versant oriental du Djebel Amanus ; elles faisaient office de marches-frontières depuis la chute d'Edesse, contrôlaient les passes et cols qui reliaient le littoral à l'intérieur mais aussi surveillaient les mouvements ennemis du fossé d'effondrement :
. ROCHE GUILLAUME au nord contrôlait la passe qui partait de la Portelle et traversait l'Amanus
. TRAPEZAC au nord-est et GASTON ( Baghras) au sud-est surveillaient la route qui menait de la région d'Alexandrette, au col de Beylan puis débouchait sur le fossé d'effondrement.
Elles furent remises à l'ordre du Temple à une date imprécise, sans doute vers 1154 ; en 1168, TRAPEZAC et GASTON étaient possession des templiers quand un renégat de l'ordre s'en empara et fit allégeance à Nur Al Din ; à la mort de ce renégat, l'ordre reprit possession des deux châteaux qu'ils conservaient encore en 1187.
A suivre...
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