Au moment où le pape Urbain VIII commande le baldaquin de Saint Pierre à GIAN LORENZO BERNINI en 1624, la basilique saint Pierre de Rome n'est terminée que depuis quelques années seulement et n'est pas encore consacrée (elle le sera seulement en 1626).
En contemplant l'intérieur de l'édifice, on est saisi à la fois par le gigantisme de l'ensemble, par sa somptuosité, par l'unité de style et l'harmonie architecturale qui s'en dégage, comme si, à première vue, la basilique avait été construite d'un seul jet et par le même concepteur.
Ce ne fut cependant pas le cas :
. D'abord, parce que la construction s'étala dans le temps : commencée sous le pontificat de Jules II en 1506, elle se poursuivit jusqu'au premier tiers du 17eme siècle, soit pendant plus de cent ans. Pendant cette longue période, de nombreux événements se produisirent qui firent évoluer le style architectural italien : le triomphe de l'art de la renaissance, puis l'éclosion de l'art nouveau de la contre-réforme catholique après le choc de la réforme luthérienne. Cependant, ces évolutions, si elles influèrent l'architecture de Saint-Pierre en modifiant en particulier le plan de la basilique, n'eurent que peu d'effets sur son organisation d'ensemble.
. Ensuite, parce qu'alternèrent des périodes d'intenses activités de construction suivies par d'autres pendant laquelle l'érection de la nouvelle basilique fut mise en sommeil, soit parceque les papes eurent d'autres préoccupations, soit à cause du manque de moyens financiers (1)
. Enfin, par le fait que les papes confièrent la direction des travaux à des artistes renommés qui, chacun, présentèrent des aménagements du plan primitif, voire même des plans nouveaux ; ils ne restèrent cependant qu'à l'état de projets. En fait, trois seulement de ces artistes comptèrent dans la conception de saint Pierre de Rome : Bramante, Michel-Ange et Maderno.
Si ces diverses contingences n'ont guère influées sur l'aspect intérieur de saint Pierre de Rome, c'est que l'unité architecture n'a pas été inventée ex-nihilo pour la basilique : elle est en réalité héritée des concepts mis en œuvre par le Quattrocento (15eme siècle italien).
L'UNITÉ STYLISTIQUE DE SAINT PIERRE DE ROME, UN HÉRITAGE DU QUATTROCENTO.
la théorisation de l'architecture de la Renaissance qui servit de base à la basilique saint Pierre de Rome et à la plupart des églises des 16eme et 17eme siècle a été effectuée par les humanistes du 15eme siècle et en particulier par Léon Baptista Alberti (1404-1472) à partir de deux éléments :
- la redécouverte de l'héritage antique et de ce qu'il en subsistait à Rome avec en particulier le Panthéon surmonté de sa coupole à caissons, les voûtes en berceau des ruines romaines dont celles des thermes, les arcs de triomphe...
- une réflexion quasiment philosophique sur "l'art d'édifier" (De re aedificatoria, livre posthume d'Alberti) avec :
. recherche théorique au moyen des mathématiques des proportions idéales sur le modèle de l'harmonie des accords musicaux, découverte de la perspective à partir d'un point de fuite...
. Mise en application de la construction mentale qui résulte de cette recherche aux contingences matérielles du matériel à employer, du site, du sol, de la région... avec donc convergence de la forme (construction abstraite et idéalisée) à la matière selon les préceptes aristotéliciens.
Alberti va mettre en application ces théories dans une de ses œuvres majeures, la co-cathédrale saint André de Mantoue : il concevra cette église mais mourra avant la fin des travaux, la coupole ne sera réalisée qu'en 1490-95. Sur les deux illustrations qui suivent, seront mentionnées les caractéristiques qui inspireront les églises construites postérieurement et en particulier saint Pierre de Rome.
Il s'agit d'une église à nef unique (alors que les églises médiévales possédaient deux bas-côtés) en forme de croix latine. A la croisée du transept se trouve une coupole (1), elle est portée par quatre piliers de forme carrée (2) qui soutiennent de puissantes arcades (3) sur lesquelles est construite la coupole. Ces arcades constituent la naissance des quatre voûtes en berceau ornées de caissons qui recouvrent la nef (4), les deux bras du transept (5) et le chœur (6).
Cette structure avec coupole centrale et voûtes en berceau sur les quatre bras de la croix sera une des constantes de l'architecture baroque.
Le problème qui se pose avec une telle structure est, bien évidemment, le poids de la voûte et les risques d'écartement de ces voûtes ; à l'époque médiévale, on aurait construit d'épais contreforts qui aurait porté des arcs-boutants ; ce n'est pas ici le cas. Une autre forme de soutènement est apparue, celle des contreforts intérieurs (7) : ce sont d'épais murs qui vont s'élever de part et d'autre de la nef pour supporter la voûte.
Ces murs seraient disgracieux s'ils n'étaient pas masqués : ils se terminent au niveau de la nef par des pilastres (8) qui supportent une corniche à entablement (9). En outre, pour renforcer ces piliers en les arrimant l'un à l'autre, ont été créé des voûtes en berceau à axe perpendiculaire au sens de la nef (10)) qui permettent de constituer des chapelles latérales (11) ; enfin, entre chaque contrefort, se trouve un espace fermé servant, entre autre, de puits de lumière (12).
Ces contreforts intérieurs terminés par des pilastres qui constituent des chapelles latérales seront une autre caractéristique des églises baroques.
Les théories d'Alberti et ses réalisations vont constituer la référence pour la construction de Saint Pierre de Rome.
(1) c'est, rappelons-le, à cause de ce manque de moyens financiers que le pape Léon X mis en vente des indulgences, ce qui conduisit Luther à afficher ses 96 propositions sur la porte de l'église de Wittenberg, et aboutit à la naissance du protestantisme.
REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
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Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com
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