L’histoire médiévale de l’Alsace et du château de FLECKENSTEIN est, dans un premier temps, liée à celle de la dynastie de Hohenstaufen et du duché de Souabe. Il convient. en premier lieu, de déterminer les circonstances qui ont amené à cette convergence.
L’Alsace, à l’époque mérovingienne, était rattachée à l’Austrasie. Elle formait alors un duché et comportait deux comtés, le Nordgau et le Sundgau (correspondant aux diocèses de Bâle et de Strasbourg mais aussi aux deux provinces romaines du bas-Empire). La fonction de Duc fut supprimée par Pépin le Bref mais l’Alsace resta nominalement un duché. Devenu, après la partage de Verdun de 843, une possession de Lothaire, le duché fut rattaché en 870 (traité de Meersen) au royaume de Germanie.
Le duché de Souabe se constitua à une époque plus récente, au tout début du 10e siècle. C’est un des quatre duchés formant, à cette époque, l’ossature du royaume de Germanie avec la Saxe, la Franconie et la Bavière. Le roi de Germanie, Henri l’Oiseleur (Duc de saxe en 912 et roi de Germanie de 919 à sa mort en 936), incorpora le duché d’Alsace au duché de Souabe, créant ainsi un vaste «État » de part et d’autre du Rhin.
Le fils d’Henri l’Oiseleur, Otton (Roi de Germanie en 936 est couronné empereur en 962 jusqu’à sa mort survenue en 973), créa une nouvelle entité politique en donnant à l’évêque de Strasbourg le pouvoir temporel de comte sur les domaines qu’il dominait ; ce nouveau comté s’ajouta aux deux pouvoirs comtaux du Nordgau et du Sundgau.
L’accession de la famille des Hohenstaufen au titre de duc de Souabe date du milieu du 11è siècle : On était, à cette époque, en pleine querelle des investitures qui mettait aux prises le pape et l’empereur à propos de la nomination des évêques. Le duc de Souabe, Rodolphe de Rheinfelden, avait pris le parti de la papauté contre celui de l’empereur Henri 4 (Roi de Germanie en 1054, empereur de 1084 à 1105). L’empereur décida alors de le destituer et de le remplacer par un seigneur souabe, Frédéric.
A Frédéric 1er, duc de 1079-1105, succéda à la tête du duché de Souabe, son fils Frédéric 2 dit le Borgne, il prit le nom de Hohenstaufen du nom du château qu’il s’était fait construire. Il fut duc de Souabe jusqu’à sa mort survenue en 1147
C’est à l’époque de Frédéric Le Borgne que se constitua la mainmise des Hohenstaufen sur l’Alsace avec, entre autre, la construction des châteaux de HAGUENAU où il établit une de ses résidences et de FLECKENSTEIN. (1)
La construction du château de FLECKENSTEIN sur un promontoire gréseux à la limite nord de domination des possessions du duc, fut consécutive aux événements qui survinrent à la mort d’Henri 5, fils d’Henri 4 et empereur de 1111 à 1125. Frédéric Le Borgne fut un ardent défenseur de l’empereur tandis que se constituait une alliance entre les partisans de la papauté. Cette alliance, menée par le prince-archevêque Adalbert de Mayence, comprenait, entre autre, Lothaire de Supplinbourg, duc de Saxe. A la mort de Henri 5, il y eut deux candidats à sa succession : Frédéric le Borgne et Lothaire de Supplinburg, c’est ce dernier qui fut élu roi des romains en 1125 et devint empereur en 1133.
Entre les deux candidats, la lutte était inévitable : sous la menace d’une invasion de ses états par les coalisés, Frédéric décida de protéger ses possessions alsaciennes par la construction de châteaux à leurs confins, le château de FLECKENSTEIN fut l’un d’entre eux.
Frédéric, ayant fait la paix avec Lothaire en 1135, on peut dater la construction du FLECKENSTEIN au cours du premier tiers du 12è siècle. On ne connaît pas la manière dont fut gérée la nouvelle construction, sans doute, le duc y nomma un de ses chevaliers en tant que ministériel. Aucun nom n’est cependant attesté avant la deuxième moitié du 12è siècle quand un certain Gottfried, en garde du château de Fleckenstein, vint faire son temps de service à Haguenau.
NOTE COMPLÉMENTAIRE
Je rappelle, pour mémoire, que pendant son règne, Lothaire essaya de contrôler l’Alsace ; une de ses réformes consista à supprimer les comtés de Nordgau et Sundgau et à créer en 1186 deux Landgrave dans les mêmes circonscriptions que précédemment.
Le landgraviat est un poste de prestige qui n’était pas assorti d’une inféodation de seigneurie. Dans la circonscription qu’il administrait au nom du souverain, le Landgraf avait le droit de convoquer le ban, de conduire les vassaux de l’empereur à la guerre, de battre monnaie, de lever de nouvelles charges, il exerçait seul la haute justice, alors que les seigneurs fieffés ne possédaient que le droit de basse-justice.
Le premier landgraf du Sundgau fut un seigneur possessionné en Argovie, Adalbert de Habsbourg, qui reçut aussi l'avouerie de l'abbaye de Murbach.
(1) Frédéric le Borgne fit aussi construire le château du Haut-Koenigsbourg.