REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
. Toutes les citations de mes articles proviennent de recherches sur les sites gratuits sur Internet



Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

lundi 28 juillet 2014

À la découverte de.. TROYES (4)

Si on s'élève dans la hiérarchie des richesses dans la ville de Troyes, on voit apparaître d'autres types de maisons.

L'HOTEL DU MOÏSE
L'hôtel dit du Moïse se trouve situé à l'angle de la rue Charbonnet et de la rue Paillot de Montalbert ; cet hôtel est ainsi nommé car il comporte une statue de Moïse à l'angle des deux rues. Sous la statue se trouve un puits.  Le terme d'hôtel ne se réfère pas à sa définition actuelle, il correspond à un édifice qui n'est plus une maison de marchand et pas encore une  demeure seigneuriale.

Cette maison est construite selon les mêmes types architecturaux que les autres maisons de la ville accolant une façade à pignon et une façade à lucarne.

Pourtant, il est aisé de voir que son propriétaire a franchi  une étape dans la hiérarchie des richesses :
   . Les façades ne sont plus construites en colombage mais au moyen d'une mosaïque de pierre de craie et de briques appelé damier champenois,
   . De même le rez-de chaussée ne comporte plus de boutiques ou d'ateliers mais plutôt des communs.
   . L'escalier ne se trouve plus à l'extérieur de la maison mais est incorporé dans celle-ci, on le devine au niveau des deux fenêtres qui surmontent la porte d'entrée.
   . Enfin, apparaît clairement au premier étage, le Piano Nobile qui est le logis du propriétaire,

Ce type de construction avec mosaïque de pierre de craie et de briques se retrouve dans le reste de la ville pour des demeures cossues : elle est aussi souvent associée au colombage. Voici deux exemples de maisons de notables comportant pour partie un rez-de-chaussée de damier champenois et un étage de colombage.

L'HOTEL DES ANGOISELLES occupe le coin entre la rue de la Montée aux Changes et la rue du général Sausset.
    .  Du côté de la rue du général Sausset, l'hôtel comporte au dessus de la boutique (1), deux étages à colombages sur encorbellement couverts de bardeaux (2), ce qui en fait sa grande originalité dans la ville,
     . Au niveau de la rue de la Montée au Change, en élévation, se trouve au rez de chaussée un mur en damier champenois associant pierres de craie et briques (3) , puis s'élèvent deux niveaux en encorbellement recouverts de bardeaux (4).
     . Cette façade est terminée par une cour comportant une tour-escalier (5)  recouverte d'ardoises.
     . Puis se trouve un mur en damier champenois surmonté d'un seul niveau de colombage, au centre s'ouvre une porte cochère (6) qui donne sur le cour arrière.

La FAÇADE SUR LA RUE LARIVEY de l'actuelle maison de l'outil et de la pensée ouvrière.
La maison de l'outil et de la pensée ouvrière est un ancien hôtel construit au milieu du 16e siècle  par un riche marchand pour y entreposer le sel, le vin et les étoffes. Il s'appelait alors "hôtel de l'aigle". Il devient ensuite, par legs de ce riche marchand, l' hôpital et le collège de la Charité  destiné " à l'instruction d'un collège de jeunes enfants, tant fils que filles, orphelins et pauvres, en la forme règle et manière qu'est le collège de la Trinité à Paris"  ; l'hôtel de l'aigle est désormais dénommé Hôpital de la Charité et accueille les enfants pauvres pour leur apprendre un métier et leur enseigner le nécessaire intellectuel et spirituel. Dès le début du 17e siècle, l'hôpital forma des bonnetiers et contribua au développement de cet industrie dans la ville.

La façade du musée sur la RUE LARIVEY comporte :
   . Un premier niveau comportant une base de pierre (1), puis une paroi avec alternance de pierre de craie et de briques selon le système du "damier champenois" (2).
   . Des consoles enchâssées (3) dans le mur portent le mur en encorbellement de l'étage ;  celui-ci comporte deux niveaux séparés par une poutre (4) :  un étage avec de grandes fenêtres (5)  et au dessus un grenier (6).
   . Le grenier est desservi par deux lucarnes (7)  qui permettent l'accès direct à partir de la rue aux greniers.

À l'intérieur se trouve une cour entourée de bâtiments qui associent damier champenois, colombages et éléments décoratifs de la Renaissance.

L'HÔTEL D'AUTRUY
Avec cet hôtel, on s'élève encore dans la hiérarchie sociale de Troyes : il a été construit au milieu du XVIe siècle et fut la demeure d'un maire de Troyes anobli par Henry IV.

Il comporte deux parties :
   . Un logis érigé selon le style du damier champenois,
   . Une haute tour-escalier qui se surélève pour constituer un donjon attestant que le propriétaire est noble.

Ainsi, se confirme bien cette utilisation des tours-escaliers destinées à témoigner de la richesse de son propriétaire, de sa volonté de mener une vie noble et enfin de l'anoblissement des plus distingués.

dimanche 27 juillet 2014

À la découverte de.. TROYES (3)

LA STRUCTURE INTERNE D'UNE MAISON À COLOMBAGE DE LA RUE KLÉBER
Il arrive que, parfois, une personne obligeante nous invite à entrer chez elle pour nous montrer sa maison, ce fut le cas pour cette maison de la rue Kléber. Elle est plus haute que les autres en ce sens qu'elle comporte quatre niveaux, avec un rez-de-chaussée servant autrefois  de boutique ou d'atelier, deux étages d'habitation et un grenier. Elle est aussi originale au niveau du colombage qui est effectué à partir du motif de la croix de saint André.

Cette visite a permis de tracer un plan sommaire de cette maison au niveau du rez de chaussée.

En premier lieu, la maison est construite sur une parcelle étroite sur la rue et toute en profondeur, ce qui est commun à la plupart des villes marchandes nées au Moyen-âge.

1 ancienne boutique avec une arrière-boutique,
2 long couloir qui conduit à une cour arrière,
3 ensemble de galeries étagées qui fait le tour de la maison sur trois côtés :
   - 3a galerie donnant accès aux étages de la maison principale,
   - 3b galerie adossée au mur de séparation de cette maison et de la maison voisine,
   - 3c escalier droit à l'italienne permettant de monter aux étages,
   - 3d galerie qui donne accès à une construction située à l'arrière de la parcelle (sans doute boutiques ou appartements).

Ce type d'agencement doit être commun à la plupart des maisons de Troyes.

LES MAISONS À TOUR-ESCALIER

À gauche, la cour intérieure d'une maison à tour-escalier de la Ruelle des Chats. 
La tour, adossée à la paroi,  comporte un escalier à vis. Elle témoigne de la richesse du propriétaire et de son aspiration à mener une vie noble : en effet, cette tour évoque d'autant plus un donjon urbain que la partie supérieure dépasse du toit comme dans les demeures nobles de la ville.

 À droite, la maison de l'orfèvre. 
Elle forme un coin de la rue Paillot de Montalbert et de la rue Chambeaux,  Dans ce quartier, les maisons anciennes abondent , elles étaient autrefois si serrées que l'orfèvre a été obligé de construire sa tour-escalier à l'extérieur de la maison dans l'angle des deux rues et non, comme de coutume, dans la cour arrière qui dessert les étages ;  la tour est en encorbellement et à toit conique recouvert d'ardoises en losanges , elle est soutenue par deux cariatides et un atlante : comme on le voit, l'utilisation de l'encorbellement permet toutes les audaces !

samedi 26 juillet 2014

À la découverte de TROYES (2)

UN JEU DE CONSTRUCTION À L'EPREUVE DU TEMPS
Les maisons anciennes de Troyes sont érigées selon le système des jeux de construction, elles sont accolées les unes aux autres ce qui augmente la solidité d'ensemble ; pourtant, sur le sol instable de certains quartiers, il arrive fréquemment que se produisent des affaissements en sorte que les poutres horizontales se modifient et penchent de manière importante sans toutefois que la maison ne s'écroule, cette caractéristique s'observe particulièrement dans ces maisons de la  rue Gambrey

Ces maisons solides n'ont qu'un seul ennemi, le feu !

LE REMPLISSAGE DES MURS ENTRE LES POUTRES VERTICALES QUI FORMENT LE COLOMBAGE
Ce qui frappe dans les maisons de Troyes, c'est le faible espace entre les poutres verticales pour le remplissage ; cela s'explique par la nature de celui-ci :

La photo de gauche montre le remplissage le plus commun dans toute la ville avec utilisation de la brique, dans ce cas, la taille de la brique détermine l'espacement entre les poutres verticales.

Sur la photo de droite apparaît un type plus fruste de remplissage avec du torchis et du bois, on le trouve soit dans les maisons les plus pauvres, soit surtout dans les granges et écuries construites à l'arrière de la maison.

LE SOUTENEMENT DE L'ENCORBELLEMENT
L'encorbellement est tenu par des corbeaux de bois triangulaires qui naissent, comme le montre la photo ci-dessous, sur les poutres verticales articulant la structure du rez-de- chaussée.  Ces corbeaux supportent les poutres de bois sur lesquelles s'élève le mur en encorbellement.

Beaucoup de ces corbeaux ainsi que les poutres de façades sont ornées de motifs sculptés.

En voici quelques exemples :

   . Sculpture représentant saint Roch, sur une poutre verticale du rez de chaussée.
   . Sculptures des corbeaux de bois supportant l'encorbellement, parmi celles-ci se trouvent des représentations de figures diaboliques ou d'animaux fantastiques.

Ces sculptures s'explique par un souci prophylactique :
   . En ce qui concerne saint Roch, cela est évident puisque ce saint est invoqué en cas de peste
   . En ce qui concernent les figures fantastiques ou diaboliques, il doit d'agir de repousser le mal ( et sans doute le mauvais oeil) en le représentant, de telles figures se retrouvent par exemple dans les gargouilles des églises.

vendredi 25 juillet 2014

À la découverte de ... TROYES

la ville de Troyes possède tant de nombreuses œuvres d'art architecturales que l'on pourrait qualifier cette belle cité de monument historique dans son ensemble. Pour moi, un des intérêts de Troyes réside en tout premier lieu dans les flâneries que l'on peut effectuer dans les rues et ruelles afin de découvrir les maisons à colombages de la ville.

Toutes ressortent du même type. Voici tout d'abord l'exemple d' UNE MAISON À L'ANGLE DE LA RUE VIARDIN ET DE LA RUE  GENTIL .

Elle est représentative  des maisons traditionnelles de Troyes par le fait que chacune des deux façades donnant sur les deux rues, correspond aux deux types  d'élévation que l'on trouve dans toute la ville ancienne.

 La maison est construite entièrement en colombage, les deux niveaux supérieurs étant en encorbellements portés par des consoles de bois.

La FAÇADE À PIGNON comporte trois niveaux :
   . Au rez de chaussée se trouve la boutique ou l'atelier dont on voit ici un des côtés,
   . Au premier étage, est établie la salle commune du logis avec une fenêtre centrale,
   . Au dessus, se trouve le grenier.

La structure des poutres sur cette façade est simple :
     . une poutre verticale principale s'élève au centre et monte jusqu'au pignon, servant à délimiter les vantaux des fenêtres,
     . Des poutres horizontales séparent chaque étage et supportent les planchers mais aussi constituent les croisillons des fenêtres.
     . Des poutres verticales très serrées forment les murs ; entre ces poutres,  le remplissage est ici couvert de crépi.
     . Enfin, des poutres transversales obliques ont été incorporées à l'ensemble, elles doivent permettre d'augmenter la rigidité de la façade, cependant, elles peuvent avoir aussi d'autres buts soit esthétiques soit même prophylactiques.
     . le pignon en forme de berceau renversé en arrondi surmontant la façade est typique de l'architecture de la ville.

Cette façade à pignon représente une des formes de façade courante dans la ville

L'autre façade que je qualifierai de FAÇADE À LUCARNES, comporte également trois niveaux :
   - le niveau de la boutique ou de l'atelier,
   - le niveau du logis d'habitation avec une seule fenêtre. ( une lucarne a dû être ajoutée)
   - le niveau du grenier qui correspond au toit, et aux deux lucarnes qui s'ouvrent sur celui-ci ;  l'avant-toit de ces lucarnes comporte parfois encore  une poulie par laquelle on peut monter les marchandises dans le grenier qui servait d'entrepôt.

Bel ensemble de maisons à pignon de la rue Dominique. 

À SUIVRE

jeudi 10 juillet 2014

Les immigrés algériens et les français . La fracture

4/ 1962-1963
Le 3 juillet 1963 se produit l'indépendance effective et officielle de l'Algérie ; cet événement conduisit à une modification du concept de nationalité  vis à vis des algériens : tandis que les "français de statut de droit civil" restent français sans qu'il leur soit nécessaire d'effectuer une quelconque démarche, les "français musulmans d'Algérie" de statut de droit local perdent la nationalité française et deviennent automatiquement algériens sauf s'ils demandent la nationalité française au moyen d'une déclaration dite "recognitive".

Ainsi, les immigrés algériens vivant en France  qui étaient jusqu'alors français se retrouvent du jour au lendemain étrangers dans le pays et donc ressortissant des règles réglementant le droit des étrangers à s'installer en France.

Trois correctifs seront cependant apportés à cette situation :
   . Les accords d'Evian prévoient la libre circulation des personnes entre les deux pays, celle-ci sera néanmoins de plus en limitée du fait du gouvernement français qui veut éviter une immigration massive d'Algériens en France : sept ans de guerre et le départ massif des " pieds-noirs" ont désorganisé l'Algérie qui se retrouve dans un état exsangue.
   . Les enfants d'immigrés algériens de statut local venus en France avant le 1er janvier 1963 et nés en France seront automatiquement français même si leurs parents ne le sont pas. (le système durera jusque fin 1993)
   . Enfin les supplétifs algériens ( les Harkis) seront français puisqu'ils ne peuvent prétendre à la nationalité algérienne.

5/ la situation actuelle
Qu'en est-il aujourd'hui un peu plus de 50 ans après l'indépendance : les faits que je viens d'énoncer sont-ils encore actuels dans les mentalités collectives ? Il convient à cet égard de différencier les descendants des français métropolitains de l'époque et ceux des immigrés algériens. Il s'agit  bien évidemment d'analyses personnelles au vu de ce que j'ai pu constater.

En ce qui concerne les FRANÇAIS D'ORIGINE MÉTROPOLITAINE, j'ai la sensation que tous ces événements ont été largement oubliés : la France a pansé ses plaies, les pieds-noirs se sont réintégrés dans la société française même s'ils conservent la nostalgie de leur passé algérien. S'il n'y avait pas les commémorations officielles, le souvenir de la guerre ranimé parfois par des films documentaires, les querelles d'école entre historiens sur les bienfaits de la colonisation, la présence des associations dite CATM, il n'y aurait plus guère de souvenirs de ce passé. La page est tournée.

Pour moi, les événements anciens entre la France et l'Algérie n'ont pas grand chose à voir avec la montée de la xénophobie qui caractérise actuellement la France. Celle-ci s'explique, selon moi, avant tout par un phénomène du repli sur soi,  lui-même dû au fait que la France se ressent en profond déclin tant sur le plan économique que sociétal et culturel. Ce phénomène s'est observé à de nombreuses fois dans le passé : alors qu'une civilisation qui croit à son avenir sera ouverte sur le monde et favorable au libre échange, une civilisation en déclin sera protectionniste et se fermera à tout ce qui provient de l'extérieur. À cela s'ajoute le fort taux de chômage qui induit un pessimisme foncier avec l'impression que l'on ne s'en sortira jamais.

C'est dans ce cadre qu'il convient de considérer la position de beaucoup de français face à la présence des étrangers en France, qu'ils soient maghrébins ou non ; si les maghrébins sont l'objet d'une vindicte particulière, c'est simplement parce qu'ils sont les plus nombreux  et qu'une partie d'entre eux se sont tournés vers d'autres voies que l'assimilation. .

Ce repli sur soi n'est en rien condamnable, par contre s'il se colore de racisme, il devient évidemment intolérable.

Au niveau des  DESCENDANTS DES IMMIGRES ALGERIENS vivant en France, il convient de remarquer d'abord que l'immense majorité d'entre eux ne pose aucun problème, ce sont des gens comme les autres qui se caractérisent seulement par quelques marques vestimentaires rappelant leur religion, ce qui n'est d'ailleurs pas le propre des musulmans mais de bien d'autres gens. Ils réprouvent le fondamentalisme et le terrorisme et témoignent, s'il en était besoin,  que l'Islam est dispensatrice de paix. Ils ont souvent des salles dans lesquelles ils pratiquent leur culte et participent aux activités organisées dans ce cadre. Ont-ils pour autant oublié le passé de fracture fait de haine et d'exploitation par le travail ? Il est difficile de le dire ; selon ce que j'ai pu en entendre, ils se ressentent français à part entière et réussissent à transcender le rejet qui souvent les entoure.

Pourtant c'est parmi eux que se développe, à leur corps défendant,   des mouvements qui se révèlent dangereux.

En premier lieu, il est apparu un phénomène spontané de ce que l'on qualifie exagérément de ghettoïsation. La deuxième moitié du 20ème siècle a vu se développer de grands quartiers de HLM dans les banlieues des villes destinés à loger les gens dans des conditions décentes. Dans un premier temps, ces HLM étaient habitées par une population mêlée surtout d'origine métropolitaine ; peu à peu, l'élévation du niveau de vie fit que ces populations quittèrent les HLM et accédèrent à la propriété. Cela conduisit au repeuplement des HLM par des populations, entre autre, d'origine africaine. L'arrivée de toutes ces personnes amena beaucoup des derniers  primo-occupants encore en HLM à quitter leur appartement : Au bout du compte, les HLM furent surtout  peuplés de descendants d'immigrés qui constituèrent un microcosme social évoluant selon leur propre civilisation et s'éloignant peu à peu du modèle français.

Dans ces quartiers se développe un fort taux de chômage touchant en particulier les jeunes qui, souvent du fait de leur double culture préservée par leurs parents et leur environnement, réussissent mal à l'école et quittent le système scolaire sans formation. Ce sont ces jeunes désœuvrés qui vont se sentir attirés par le fondamentalisme, il  va leur donner un idéal que la civilisation française en déclin ne peut plus leur donner. Pour ces jeunes, il est probable que leur choix personnel a pu être influencé par le passé, mais ce n'est pas dans le passé qu'ils tirent leurs conceptions de vie mais plutôt dans leur croyance en la lutte pour la victoire de l'Islam.

Ainsi, cinquante ans après l'indépendance de l'Algérie, la fracture existe toujours mais elle est plus le fruit d'une appréciation divergente du présent et du futur que d'une haine venue du passé.

CE BLOG S'INTERROMPRA JUSQU'AU 25 JUILLET PAR MANQUE DE LIAISON INTERNET JUSQU'A CE JOUR.

Les immigrés algériens et les français . La fracture

2/ de 1945 à 1954
En 1945, conformément aux déclarations de la conférence de Brazzaville et du programme du conseil national de la résistance,  l'Assemblée constituante approuve  le 25 avril 1946, un projet de loi, à l'initiative de Lamine Gueye, député du Sénégal, octroyant la pleine "citoyenneté" à tous les ressortissants de l'empire colonial :

À partir du 1er juin 1946, tous les ressortissants des territoires d'outre-mer (Algérie comprise) ont la qualité de citoyen, au même titre que les nationaux français de la métropole et des territoires d'outre-mer. Des lois particulières établiront les conditions dans lesquelles ils exerceront leurs droits de citoyens.

Cette situation fut cependant vite explicitée dans un sens défavorable aux autochtones : les algériens étaient déclarés de nationalité française mais avec détermination de deux grandes catégories :
     . Les "sujets français" qui possèdent un statut personnel de droit local, (ici musulman donc régi par la loi coranique) , ils seront qualifiés de " français musulmans d'Algérie" ce sont essentiellement les autochtones.
     . Les "citoyens français" qui ressortent du statut civil de droit commun, régi par le code civil. Ils ont quatre origines :
          . Les colons français,
          . Les étrangers nationalisés,
          . Des "sujets français" ayant demandé à devenir  citoyens français et qui ont accepté de renoncer à tout ce qui, dans le Coran, est incompatible avec le Code civil ( comme la polygamie),
          . Enfin certains " sujets français",distingués par leur personnalité (officiers par exemple), pouvaient aussi être "citoyens français" à titre personnel.

Cette caractéristique se retrouve au niveau du suffrage universel avec la répartition de la population selon le système du double collège (qui ne sera supprimé qu'en 1958) :
   . la loi du 5 octobre 1946 etablit que la Métropole envoie 544 députés à l'Assemblée nationale, l'Algérie 30, également partagés entre citoyens de statut civil français et citoyens de statut local (le reste des colonies envoie 34 députés seulement)  
   . Autre exemple, le statut de l'Algérie, déterminé par la loi du 20 septembre 1947, institue une Assemblée territoriale de 120 membres, dont 60 sont élus par les Français de statut civil français (environ 1.000.000 en 1954) et par certains citoyens de statut local distingués par leurs titres ou leurs mérites, et 60 sont élus par les autres citoyens de statut local (8.487.000 en 1954).

En ce qui concerne le problème de l'immigration, la loi de 1946 a pour conséquence d'établir la libre circulation entre la métropole et l'Algérie, à la condition toutefois, pour les francais musulmans d'Algerie, de posséder une carte d'identité (ce qui n'est pas exigé des métropolitains mais s'étendra à eux après 1955)

Pour le reste la situation de l'immigration algérienne en France n'évolue guère :
   . Une main d'œuvre essentiellement peu qualifiée, masculine et jeune venant temporairement en métropole (même si le temps de présence est plus long), sous-payée, ressortant d'une protection sociale limitée.
   . Des conditions toujours aussi déplorables de vie, en particulier du logement (à Paris, 27000 algériens occupent 17000 chambres ) même si se constituent des services sociaux permettant de lentes améliorations.

À cette époque se développe déjà de la défiance envers les algériens, en particulier au niveau de l'insécurité : on voit apparaître des mentions de celle-ci, en particulier dans les journaux :
  . " la criminalité Nord-Africaine soulève un problème national" (le Monde 1949)
  . " dans certains quartiers de Paris, l'arabe est le roi de la nuit" (l'Aurore 1948)

3/ de 1954 à 1962
Pendant cette periode se produit une évolution considérable des mentalités due " aux événements d'Algérie" que l'on ne qualifiait pas alors de guerre.

En premier lieu, il existe en métropole une conviction quasiment unanime, "l'Algérie c'est la France" ; on montrait partout que le progrès et la civilisation était le fait de la France et en particulier des citoyens d'Algérie qui avaient  durement travaillé pour mettre en valeur le pays. Seuls les partis d'extrême-gauche et quelques intellectuels étaient anticolonialistes mais ils n'étaient guère entendus à ce sujet.

Dans ces conditions, la situation des immigrés algériens en France paraît aux métropolitains totalement paradoxale : tandis que certains algériens combattent pour l'indépendance de leur pays, d'autres immigrent en grand nombre !

À cela s'ajoute un autre phénomène : les périodes de présence des algériens augmentent de plus en plus et l'immigration se produit non plus pour les hommes seuls mais pour des familles entières  ( de 1954 à 1962, le nombre de familles algériennes en France passe de 7000 à 30.000) ce qui fait penser à une installation définitive en France métropolitaine.

L'explication de cette évolution est à rechercher dans la situation de l'Algérie à l'époque des "événements". L'insécurité est devenu constante : le FLN (front de libération nationale), à partir de ses bases dans les montagnes, effectue des incursions dans la plaine, incendie les fermes et tue les colons, il se livre aussi à des attentats dans les villes et dans les bourgs. Dans les villages isolés règne la terreur : la rébellion s'en sert de point d'appui et de base de ravitaillement ; ce fait amène l'armée française à des mesures de représailles qui ne servent à rien puisque, sitôt le départ des français, les soldats de l'armée de libération reviennent et punissent de mort ceux qui auraient pu se laisser convaincre par les français. Finalement, l'armée française décide deux mesures radicales : on oblige  les villageois à quitter leurs village et on incendie les montagnes ainsi que tout ce qui peut servir de base au FLN . Les villageois sont réinstallés dans des "centres de regroupement" où sévit le déracinement et la misère. D'autres se réfugient dans les bidonvilles  entourant les villes. Parmi tous ces gens transplantés, beaucoup tentent de partir en Métropole.

Ces immigrés, en grande majorité favorables à l'indépendance, vont se trouver dans une situation de plus en plus inconfortable :
   . En premier lieu, ils sont l'objet des pressions du FLN, en particulier au niveau de leur participation financière au combat, ils subissent aussi les conflits entre le FLN et le MNA de Messali Hadj, ces conflits auraient fait presque 4000 morts selon les sources ministérielles françaises,
   . En outre, ils sont l'objet d'une surveillance constante de la police qui les suspecte systématiquement d'organiser la violence et les attentats ;  la police mène une politique de répression avec arrestations massives et internement arbitraire.
   . Enfin, ils sont l'objet d'une hostilité confinant à la haine de la part des métropolitains : on les affuble de noms grossiers, on s'écarte d'eux par peur des actes hostiles qu'ils pourraient perpétrer : l'algérien devient l'ennemi et on a peur de lui.

La guerre d'Algérie établit donc une très profonde fracture entre les immigrés algériens venus en France pour travailler et les français métropolitains : elle va se perpétuer ...

mercredi 9 juillet 2014

Les immigrés algériens et les français . La fracture

Il convient pour terminer ce chapitre HOMMAGE A TOUS LES MOULOUD de donner une conclusion établie moins sur des impressions subjectives exprimées par des poèmes que sur la réalité complexe des rapports entre les algériens et les français et de tenter de comprendre si la déchirure constatée aujourd'hui est le fruit du passé ou non.

Il existe au niveau de ces rapports une chronologie en quatre périodes :
   . Jusqu'en 1945
   . De 1945 à 1954
   . De 1954 à 1962
   . Depuis 1962

1/ JUSQUE 1954, apparaît une situation qui entre exactement dans le moule colonial :
En premier lieu, cette immigration est effectuée essentiellement  parmi les collectivités tribales démantelées par les dépossessions foncières effectuées par la colonisation (selon ce que j'ai pu en lire, sur 7 millions d'hectares de terres disponibles, la colonisation en occupe 2,9 millions). C'est cette spoliation qui amène à la fois le déplacement des populations et la paupérisation, surtout en Kabylie

Cet appauvrissement des structures traditionnelles a pour conséquence une grande partie des flux migratoires. Ceux-ci ne sont pas spontanés et individuels ; l'immigration est décidée et organisée au niveau des familles ou des assemblées de village ;  les immigrants sont des hommes jeunes partant pour un temps déterminé (de quelques mois à un ou deux ans) afin de gagner de l'argent dont ils enverront une grande partie à la communauté  qui les a envoyés pour lui permettre de survivre. Il s'établira ensuite une rotation : quand l'un rentre, un autre part ; souvent celui qui part prend la place de celui qui rentre tant pour se loger que pour travailler. À cette époque, l'immigration ne concerne que des hommes jeunes, souvent mariés,  et elle est temporaire.

Ce système n'est cependant pas du goût des colons, propriétaires de plantations ou entrepreneurs craignant une hémorragie de la main d'oeuvre disponible. Cela conduit le gouvernement général d'Alger à édicter toute une série de mesures afin de limiter les départs : ainsi, à partir de 1924, il faudra disposer d'un contrat de travail, d'un certificat d'aptitude au travail, d'un certificat médical attestant l'absence de maladies contagieuses, d'une carte d'identité avec photo pour obtenir le certificat d'embarquement. Les règles deviendront peu à peu de plus en plus restrictives  avec, par exemple, le versement d'une caution correspondant au voyage de retour.

Les immigrants vivent dans des conditions difficiles du fait que rien n'est organisé pour eux, beaucoup s'entassent dans des meublés, dans des hôtels miteux  ou dans des dortoirs collectifs. Ils ne sont cependant pas isolés, et cela pour trois raisons :
     . d'abord, comme on l'a dit plus haut, parce que celui qui arrive occupe la place de celui qui est revenu au pays et est donc en pays de connaissance dès son arrivée ,
     . Ensuite, par le fait que ces immigrés ont tendance à se retrouver selon les villages ou les régions ce qui leur permet de ne pas être isolés dans un pays qu'ils ne connaissent pas et de s'entraider,
     . Enfin, par le présence d'organisations comme l'Etoile Nord Africaine qui coordonne la pensée politique des immigrants. Elle agit d'abord dans la mouvance du parti communiste puis seule et s'oriente eapidement vers l'idée d'indépendance. Il en sera de même, après dissolution de l'Etoile Nord Africaine en 1937, par le Parti du Peuple Algérien (supprimé en 1939). À cet égard, il convient de remarquer que c'est parmi ces immigrés qu'est née l'idée de l'indépendance algérienne.
À SUIVRE

lundi 7 juillet 2014

A LA GLOIRE DE TOUS LES MOULOUD (9) poèmes de tolérance et d'antiracisme. 

MERCI

À ce triste moment de racisme croissant, 
J'ai voulu, par ces vers, dire ma vérité.
Beaucoup d'entre eux sont morts pour notre liberté
Nous l'avons oublié, c'est si loin dans le temps ! 

Nous avons autrefois pillé les colonies
Extirpé de leur sol tout ce qu'il possédait,
Sur leurs terres dégradées ne poussent désormais
Que des plants épuisés : nous leur avons tout pris ! 

Leur sang et leur patrie  ne nous suffisaient pas ! 
On exploita aussi quasi-servilement 
Leur sueur au travail, la force de leur bras.

Tout semble consommé ils vous ont rejetés
Moi, je vous dis merci et suis reconnaissant 
Envers tous ces Mouloud qui nous ont tant donné

COMPLÉMENT : UN TEXTE SUR LA MONOCULTURE DE L'ARACHIDE AU SÉNÉGAL IMPOSÉE À L'EPOQUE COLONIALE. et montrant, entre autre,  comme indiqué dans le poème,  l'épuisement des sols

La monoculture arachidière pratiquée essentiellement avec l'emploi de la traction animale, de semences améliorées et d'engrais chimiques a fortement contribué à la dégradation des terres dans le bassin arachidier. En effet, l'introduction de la traction attelée a permis une rapide occupation des sols du bassin et bouleversé les systèmes anciens de culture surtout en ce qui concerne la place des arbres dans les champs.

L'agroforesterie traditionnelle est abandonnée pour faciliter les labours, tandis que les jachères se réduisent puisqu'on fait confiance aux engrais chimiques pour la fertilisation.

D'autre part, la culture de l'arachide rend le sol particulièrement vulnérable après la récolte, le laissant à découvert et sans dévolution de matière organique (racines, restes de culture). Le paysage modifié, plus ouvert, facilite l'action de l'érosion éolienne, très active sur les sols sablonneux.

La croissante déstructuration de ces sols, trop travaillés et avec peu de matière organique, n'a fait qu'augmenter ce problème en exigeant des apports d'engrais toujours croissants pour maintenir les rendements.

De plus, la croissance démographique a fait accélérer les effets néfastes de ce système cultural. En effet, les chutes de rendements ont provoqué chez les producteurs le besoin d'élargir leurs champs, tandis que la multiplication des nouveaux producteurs occupait toutes les terres possibles, éliminant jachère et bois et occupant même des sols peu aptes à l'agriculture. Ce processus rendait l'articulation de l'agriculture avec l'élevage difficile par la diminution des fourrages en saison sèche et rompait avec un autre volet des systèmes traditionnels.

Le retrait des subventions de l'État a fait ultérieurement baisser les rendements et la croissante incertitude climatique rendait très risqué l'achat et l'utilisation des intrants. L'alternative est d'étendre toujours les champs d'arachide avec un très bas rendement et/ou vendre du bois ou du charbon aux marchés urbains, ce qui intensifie le déboisement.

SOURCE Concertation Nationale Coopération des Ruraux.  Dakar