REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
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Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

vendredi 22 mai 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade (73) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs

Les forteresses bordant les chemins de pèlerinage (suite)

De Jérusalem, les pèlerins se rendaient aussi vers la Galilée pour y prier aux endroits les plus importants de la vie et de la prédication de Jésus . Le chemin passe d'abord près du MONT DE LA TENTATION (12) gardé par une tour appartenant aux templiers, puis les pèlerins prennent la route de NAPLES (Naplouse) (13) A quelques distances de cette ville, ils peuvent se rendre au PUITS DE JACOB où Jésus rencontra la samaritaine. Ensuite, le chemin passe par la ville de SÉBASTE (14), l'ancienne Samarie dans laquelle ils prient sur la tombe de saint Jean le Baptiste ; c'est ensuite NAZARETH (15) avec la possibilité pour les plus valides de monter en haut du MONT THABOR, là où eut lieu la transfiguration (selon certains la transfiguration aurait eu lieu au mont Hermon, dans cette hypothèse, le mont Thabor aurait été le lieu du sermon sur la montagne : il convient de ne pas en tenir compte, ce qui est important, c'est ce que les pèlerins pensaient)

Cette partie de la route n'est gardée par quelques fortins et casaux ( villages fortifiés), cela s'explique par le fait qu'elle est relativement sûre :
     . elle longe en effet sur le haut versant des monts de Judée, montagne massive et retombant en un versant abrupt sur la vallée du Jourdain, ce qui exclut toute attaque de ce côté,
     . elle est protégée à l'est par de grandes forteresses établies aux lieux  stratégiques où se trouvent les rares lieux de passages possibles et à l'ouest par une ligne de fortins situés au pied des monts de Judée et que j'évoquerai dans le cadre des forteresses gardant les frontières et les points stratégiques.

Après Nazareth, les pèlerins se rendent à au lieu présumé des noces de CANA (16) (où Jésus transforma l'eau en vin) puis ils arrivent sur la voie menant vers TIBERIAS (17) et suivront les rives du lac jusque MAGADA ( Jésus y remis ses péchés à Marie Madeleine), TAGBHA ( mont des béatitudes où Jésus fit son sermon sur la montagne et enfin CAPHARNAÜM. (18) au cours de ce périple, ils pourront prier sur les lieux où Jésus fit de nombreux miracles et où se trouvaient les maisons de la plupart des apôtres dont saint Pierre.

Comme pour l'étape précédente, on ne trouve pas de grandes forteresses sur cette partie de l'itinéraire, le lac de Tibériade est en effet une zone bien protégée par les francs :
      . A l'est, se trouvent la TERRE de SUETE qui constitue un glacis de protection,
      . Au nord comme au sud du lac de Tibériade se trouvent de puissantes forteresses qui gardent les gués sur le Jourdain et la frontière.

Les pèlerins prennent ensuite le chemin du retour, plusieurs chemins sont possibles : de TIBERIAS, on peut remonter vers le Nord pour rejoindre la route d'Acre mais on peut aussi prendre une route plus au sud qui aboutit au littoral. Sur ces deux routes se trouvent des forteresses :
     . Sur la route du Nord se trouve SAFED (19), forteresse  des templiers dont le rôle premier est de surveiller la route de Damas,
     . Sur la route plus au sud se trouvent deux châteaux : SAPHORIE (20) (non loin de là se rassemble l'ost royal pour des opérations en Galilée) et LE SAFRAN (21) tous deux possessions  de l'ordre du Temple.

Une fois sur le littoral,  les pèlerins peuvent emprunter la route côtière, ce qui permet de passer par le MONT CARMEL (22). Sur cette route côtière, un seul point est dangereux : un étroit défilé au sud de Caiffa à l'endroit où les derniers contreforts du mont Carmel bordent le littoral qui fut longtemps un repaire de brigands détroussant les voyageurs. Pour la protection de ceux-ci, les templiers  construisirent la TOUR DU DÉTROIT (23), plus au sud se trouve un autre château appelé LE MERLE (24) avec le même rôle de protection.

Ces itinéraires que je viens de citer sont effectués par la plupart des pèlerins mais avec des variantes :
    . On peut choisir tout ou partie de ces chemins de pèlerinage selon ce que l'on ressent,
    . Il est aussi possible de faire l'itinéraire à l'envers, en partant d'Acre puis en se rendant en Galilée puis en descendant jusqu'au Saint-Sépulcre et à Bethleem. Ce type de circuit sera de plus en plus utilisé au 13e siècle quand, après Hattin, Jérusalem sera perdu.
    . Enfin, les guerres et incursions venues de l'Est empêchent de se rendre dans certains endroits trop dangereux au niveau de la sécurité.

mercredi 20 mai 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade (72) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs

Les forteresses qui se trouvent dans le royaume même peuvent être classées en deux grandes catégories :
      . Les forteresses qui jalonnent, contrôlent et surveillent  les itinéraires de pèlerinage,
      . Les forteresses qui protègent les frontières,

Les forteresses gardant les chemins de pèlerinage

Une grande majorité des pèlerins arrive en terre sainte au moyen des bateaux italiens de Venise et  de Gènes. Il existait deux ports principaux de débarquement, JAFFA et ACRE ; le premier fut surtout utilisé dans les premières années du royaume, le second sera le lieu d'arrivée de la très grande majorité des pèlerins au 13e siècle. En conséquence, l'itinéraire du pèlerinage peut se faire dans les deux sens selon le lieu de débarquement.

Je prendrai ici l'exemple d'un pèlerin qui débarque à Jaffa.

 il est très rare que des pèlerins accomplissent leur périple seul, ils cheminent par petits groupes et prennent souvent un guide, ce qui conduit à ce que les itinéraires tendent à se figer avec un cheminement qui est quasiment le même pour tous.

A partir de Jaffa, les pèlerins se dirigent vers LYDDA (1) (où ils vénèrent saint Georges) puis vers RAMLEH (2). Ensuite, la route se scinde en deux tronçons chacun défendu par une puissante forteresse établie au niveau des défilés qui permettent la traversée des monts de Judée.
     . Sur la route du Nord se trouve CHASTEL HERNAUT. (3) Cette forteresse de l'époque de Baudouin 1er fut détruite avant d'être terminée par une attaque conjointe des garnisons Fatimides d'Ascalon, de Tyr, Sidon et Beyrouth. Elle fut reconstruite par les habitants de Jérusalem et fut confiée aux templiers par le roi de Jérusalem en 1179
     Sur la route du Sud se trouve le TORON DES CHEVALIERS (4)  qui sera donné aux templiers en 1229, postérieurement à la bataille de Hattin. Cette forteresse est établie à un croisement entre la route qui mène à Jerusalem et celle d'Ascalon, c'est sur cette derrière route que se trouve BLANCHE GARDE et BETHGEBELIN. Un plus loin sur la route de Jérusalem, se  trouve BELMONT confié aux Hospitaliers.

Apres avoir accompli leur pèlerinage à JERUSALEM , les pèlerins peuvent se rendre vers le sud ou remonter vers la Galilée.

Au sud se trouvent Bethanie, BETHLEEM, (5) puis  HEBRON (avec la tombe des patriarches et de leurs femmes : Adam Abraham, Isaac, Jacob, et l'endroit où aurait été façonnés Adam et Ève) ; certains peuvent ensuite gagner LE MONT SINAÏ et le monastère sainte Catherine. Sur ce parcours, on ne trouve que de petits fortins, en effet, cette route ne nécessite pas de protection importante , elle est bordée par la mer Morte et se dirige vers le désert, hors des voies habituelles d'invasion.

Un autre itinéraire se dirigeait vers le Nord-Est en passant par JERICHO (6). Le but est d'arriver au Jourdain sur le lieu où Jésus aurait été baptisé par Jean le Baptiste. Les pèlerins se baignent dans l'eau du fleuve (7),  comme s'ils voulaient renouveler leur propre baptême.

Cet itinéraire était protégé par la forteresse de MALDOUIN (8) ainsi que par la  TOUR DU BAPTÊME sur le Jourdain. Ces deux  lieux fortifiés étaient aux mains des templiers.

mardi 19 mai 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade (71) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs.

Suite de l'article précédent

En 1124, seule la cité d'ASCALON etait encore aux mains des Fatimides d'Egypte.  De ce poste avancé de leurs positions, les Fatimides lançèrent de vastes opérations militaires sur le royaume de Jérusalem en 1101 et 1102 vers Jaffa, 1105 vers Ramla, 1106 vers Jaffa de concert avec les garnisons de Tyr, Sidon et Beyrouth, 1107 vers Hébron, 1124 lors du siège de Tyr pour faire diversion. En 1115 et 1125, les Fatimides lançèrent une expédition combinée associant armée et flotte de guerre vers Jaffa. Ces expéditions échouèrent et en 1123, la flotte égyptienne fut détruite par celle de Venise...

A ces incursions s'ajoutaient les raids menés par  la  garnison d'Ascalon : relevée tous les trois mois, elle avait pris l'habitude dès son arrivée de lancer un raid  sur la partie méridionale du royaume, ce qui rendait peu sûre la région et créait un climat périodique d'insécurité.

Les rois de Jerusalem décidèrent la construction de forteresses autour des voies d'accès menant  à Ascalon dans le but de :
    - contrer toutes les incursions de la garnison de la cité et les expéditions militaires égyptiennes,
    - sécuriser la campagne au sud du royaume,
    - couper Ascalon de ses bases d'approvisionnement égyptiennes et empêcher toute venue de renforts terrestres en l'encerclant par la terre.

Les rois de Jerusalem firent d'abord ériger trois forteresses, toutes semblables comportant un donjon et une courtine carrée pourvue de quatre tours d'angle.
     - BETHGEBELIN sur la route menant à Hebron, (saint Abraham)
     - BLANCHE GARDE sur la route menant à Jérusalem,
     - IBELIN sur la route menant à Jaffa.

Il ne restait plus qu'à barrer la route menant d'Ascalon à l'Egypte qui pouvait permettre l'arrivée de renforts par voie de terre, ce fut réalisé par la prise de GAZA en 1150 sous le règne de Baudouin III. La ville était alors en pleine décadence et désertée par ses habitants, elle fut facilement conquise et fut laissée aux templiers, à charge pour l'ordre de créer une forteresse.

Enfin, en janvier 1153 le roi investit ASCALON en effectuant un siège terrestre et maritime. Du côté de la terre, fut construite une grande tour de siège. L'arrivée d'une flotte égyptienne de 70 navires permit la levée du blocus maritime des francs. Les défenseurs de la cité, encouragés par cette bonne nouvelle, amassèrent entre la tour et la muraille des sarments recouverts d'huile et de poix, afin d'incendier la tour franque ; mais le vent dévia les flammes sur les remparts de la ville et une partie de la muraille s'écroula. Les templiers décidèrent seuls de s'élancer par la brèche apparue, ils furent vaincus et leurs quarante têtes dont celle du maître de l'ordre Bernard de Tremelay  furent exposées en haut des remparts !

Enhardis par ce succès, les assiégés tentèrent une sortie mais ils furent battus, ce qui amena la cité à capituler  le 19 août 1153 contre la promesse d'avoir la vie sauve, ce que les francs acceptèrent.

Vers le sud, une dernière forteresse fut construite en 1170 à l'extrême limite des possessions territoriales du royaume de Jerusalem, DARUM. Cette forteresse servait à empêcher les éventuelles incursions de l'armée fatimide mais surtout, elle avait pour but de préparer l'invasion de l'Egypte que réalisa le roi Amaury. (1)

(1) j'ai classé les forteresses construites pour la conquête des ports dans la catégorie des forteresses littorales mais elles auraient pu être mises dans la catégorie des moyens défensifs de l'arrière pays. Ce choix s'explique par le fait qu'elles furent construites pour la conquête du littoral et non pour la garde des routes du royaume. Il va de soi que ce dernier rôle existait aussi. 

lundi 18 mai 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade (70) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs.

Les forteresses littorales (suite)

TYR est construit sur un îlot relié à la terre par un long cordon sableux. Elle est puissamment fortifiée et semble imprenable d'autant qu'il est impossible d'installer des machines de guerre sur le sable.

Possession des Fatimides et voyant que ceux-ci ne la secourait pas, la cité se donna à l'atabeg de Damas, Tughtekin qui envoya des renforts. La garnison de Tyr multiplia les raids dans la campagne de Galilée qui fut ravagée.

Les francs répliquèrent par la construction des forteresses de SCANDELION, CASAL-IMBERT et LE TORON. Elles avaient trois buts :
     . sécuriser la campagne en la protégeant des raids venus de Tyr,
     . servir de base de départ pour la conquête de la cité,
     . couper la ville de ses communications avec l'extérieur en contrôlant les routes d'accès qui pourraient amener des renforts : la route du sud et surtout la route Tyr-Damas par laquelle Tyr pourrait recevoir des troupes envoyées par l'atabeg de Damas.

Un premier siège fut tenté en 1111-12 mais l'arrivée de l'armée de Tughtekin obligea le roi Baudouin 1er à le lever. Le second siège débuta en février 1124. Il fut mené conjointement par l'ost royal et par une flotte vénitienne. Pour tenter de le faire lever, la cité d'Ascalon organisa une manœuvre de diversion en lançant une offensive sur Jérusalem . Parallèlement, l'atabeg de Damas vint avec son armée aux portes de Tyr, cependant le blocus tint bon et Tughtekin accepta la reddition de la ville en juillet 1124.

dimanche 17 mai 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade (69) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs

Les forteresses littorales du royaume de Jérusalem 

La première croisade, rappelons-le avait suivi la route littorale au printemps 1099, mais pressée d'en finir et de délivrer au plus tôt le Saint-Sepulcre, elle s'était contentée de passer sans se préoccuper de soumettre les nombreux ports qui s'égrènent le long de sa route. Seul JAFFA, exutoire portuaire de Jérusalem , avait été conquis et permettait de relier les croisés à l'Occident.

Certaines de ces cités portuaires s'étaient alors calfeutrées derrière leurs remparts, espérant que les croisés ne feraient que passer tandis que d'autres avaient offert de leur faire allégeance si toutefois la croisade s'emparait de Jérusalem , ce fut par exemple le cas de Barut ( Beyrouth), de Sidon, d'Acre et de Cesarée.

La création d'un système défensif littoral fut étroitement dépendante de la conquête pendant laquelle s'établit une distinction entre les ports anciennement fortifiés où les francs se contentèrent de renforcer les murailles et les forteresses construites de toute pièce.

Dès les premières années qui suivirent la création du royaume de Jérusalem sont effectuées la plus grande partie des conquêtes : Haiffa en 1100, Arsur et Cesarée en1101, Acre en 1104, Barut (Beyrouth) et Sagette (Sidon ) en1110.

Pour les croisés, la tâche fut relativement aisée : ces cités étaient alors sous l'obédience théorique des Fatimides d'Egypte, trop lointain pour intervenir, elles connaissaient la cruauté des croisés et firent obédience. La conquête fut facilitée aussi par la présence des flottes italiennes de Gènes et de Venise ; l'ost royal ne pouvait en effet investir la cité portuaire à conquérir que par la terre, ce qui laissait libre la possibilité aux assiégés de s'approvisionner par voie maritime. La présence des flottes italiennes permettait d'effectuer un blocus complet. Il va de soi que cette participation eut sa contrepartie, les villes italiennes reçurent de nombreux privilèges dans les villes conquises.

Cette conquête fut réalisée au détriment des accords passés antérieurement, l'exemple de Cesarée est à cet égard significatif : les croisés avaient signé une trêve lors de leur passage en 1099, elle était assortie des conditions habituelles : allégeance, lourd tribut en argent ou en approvisionnement. En 1101, le roi Baudouin 1er reçut de la cité une demande de renouvellement de la trêve, il la refusa, préférant la conquérir. L'aide d'une flotte génoise permit à ce dessein d'aboutir. Gènes pour prix de cette aide, reçut 1/3 de la ville. Plus tard, fut construire près du port une petite forteresse, le Merle, destinée à la fois à surveiller le port mais aussi à contrôler le comté de Cesarée qui s'était constitué.

Cesarée est typique de la double évolution qui se produisit un peu partout :
     . on passa rapidement de la situation de trêve qui maintenait les anciens dirigeants à celle de conquête préludant à la constitution d'un fief.
     . Il se créa une association port et ville fortifiée-forteresse-seigneurie.

Apres 1100, l'ensemble du littoral est aux mains des francs à l'exception toutefois de deux ports importants, Tyr et Ascalon.

À suivre...

samedi 16 mai 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade  (68)  : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des Etats francs.

LES FORTERESSES DU ROYAUME DE JERUSALEM

Le royaume de Jérusalem présente la même configuration géographique que les deux états francs septentrionaux avec d'Ouest en Est, une succession semblable de reliefs en bandes longitudinales comme il est noté sur la coupe ci-dessous :

     - A : une plaine littorale qui s'élève insensiblement vers l'Est pour atteindre une ligne de crête montagneuse culminant à plus de 1000m. C'est sur les parties hautes de ce versant que se trouvent les principales villes : Jérusalem , Hebron, Naples (Naplouse),
    - B : un versant abrupt correspondant à la faille,
    - C : un profond fossé d'effondrement ( la fosse syrienne) parcouru par le Jourdain qui forme le lac de Tibériade et se jette dans la mer Morte.
   - D : le rebord occidental de la faille, formant une nouvelle crête montagneuse,  
   - E : à l'Est de la crête se trouvent de vastes plateaux.

Sur la carte ci-contre, ne sont figurées que les lignes principales de relief. Les montagnes sont assez massives et forment une barrière continue, c'est le cas des mont Liban (1) et des monts de Judée  (5) et cela explique qu'on ne trouve que deux trouées transversales :
     . Au niveau de Tyr avec une trouée (2) entre le mont Liban et les collines de Galilée empruntée par le fleuve Litani et qui conduit à la haute vallée du Jourdain,
     .  Au niveau d'Acre-Haiffa une trouée (4) limitée au sud par le Mont Carmel puis par les montagnes de Judée. cette trouée permet de rejoindre le lac de Tibériade.

En ce qui concerne le lacis de forteresses, on retrouve la même répartition que dans les forteresses de la principauté d'Antioche et du comté de Tripoli  mais avec deux particularités notables :
     . Le royaume comprend l'ensemble des lieux saints, cela explique la présence de nombreuses forteresses sécurisant  et surveillant les voies de pèlerinage. Elles sont souvent construites par l'ordre du Temple qui avait reçu, lors de sa fondation, ce rôle de protection des pèlerins.
     . Le royaume de Jérusalem, à la différence des deux Etats septentrionaux, possède un hinterland étendu sis-Jourdain. Les francs ont conquis de vastes domaines au delà du fossé d'effondrement formant deux ensembles : la Terre de Suete et surtout la Seigneurie d'Outre-Jourdain qui se termine en pointe sur le golfe d'Aqaba et possède un accès à la Mer Rouge.

Comme pour les deux autres états francs de Terre Sainte, je décomposerai ma présentation des forteresses existant antérieurement à 1187, en trois ensembles :
     . Les forteresses littorales,
     . Les forteresses situées entre le littoral et la fosse syrienne, elles sont toutes établies sur les voies principales de communication tant pour le commerce que pour les pèlerinages mais elles peuvent se muer en voies d'invasion,
     . Les fortifications et systèmes défensifs des marges orientales.

À suivre

jeudi 14 mai 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade (67) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs.

Les forteresses protégeant la plaine d'Akkar et de la Boquée 

Au niveau de la plaine d'Akkar et de la Boquée, les francs ont construit deux lignes de forteresses établis sur les promontoires dominant la plaine. Ces deux lignes épousent les lignes du relief en figurant une forme approximativement  triangulaire.

La ligne nord est adossée aux pentes du Djebel Ansarieh entre la plaine et le territoire des Ismaéliens qui occupent la partie sud du même djebel : de ces forteresses, les plus importantes sont aux mains des ordres militaires : CHASTEL BLANC  et ARIMA ressortent des templiers à l'époque de Hattin, le KRACK DES CHEVALIERS est possession des chevaliers de saint Jean de Jérusalem .
     . ARIMA (1) et CHASTEL BLANC (2) possèdent la même histoire : les templiers les ont récupérés ruinés par deux incursions de Nour-Al-Din en 1167 et 1171 avec, entre temps, un tremblement de terre en 1170. C'est après cette période, que le comte  de Tripoli, jusqu'alors propriétaire des lieux céda ses châteaux aux templiers à charge de les reconstruire. Ces deux forteresses sont chargées à la fois de surveiller la plaine et les territoires ismaéliens, elles sont complétées par des tours de surveillance et châteaux de moindre importance.
     . Le KRACK DES CHEVALIERS, (3) possession des Hospitaliers de saint Jean de Jérusalem  depuis 1142 est la pièce maîtresse de la défense de la ligne nord de protection de la plaine d'Akkar et de la Boquée, il est situé sur un promontoire dominant la Boquée et contrôle toute la région environnante. Aux fonctions des deux autres forteresses, surveiller la plaine et les territoires des ismaéliens, s'ajoute le contrôle de la haute vallée du Nash-el-Khebir qui permet de rejoindre le fossé d'effondrement (plaine du GHAB) vers RAFANEE. Cette haute vallée comportait de nombreux points fortifiés et en particulier le château de TOUBAN (4) remis aux hospitaliers en 1180.

La ligne sud, moins exposée aux incursions venues de l'est, possède une ligne, semble-t'il, moins dense de fortifications. Les plus importantes sont aux mains des Hospitaliers de saint Jean de Jerusalem .
      . La ligne comporte à l'ouest, deux châteaux de plaine construits sur de légères buttes, GOLIATH (5)  (remis aux hospitaliers en 1127 qui ne sert que de refuge et de base de départ et d'approvisionnement des chevaliers)  et  FELICIUM. (6) ( remis aux hospitaliers en 1142 en même temps que le KRACK DES CHEVALIERS)
      . Le long de la Boquée se trouve la forteresse principale de GIBELACAR, (8) elle constitue le pendant du krack des chevaliers formant la partie sud de la tenaille qui protège l'accès à la plaine , elle domine aussi la plaine de la Beqa. GIBELACAR fut remis aux hospitaliers en 1170.
      . Le long de la Boquée se trouvent enfin plusieurs châteaux étroitement liés au système défensif de GIBELACAR, dont MELECHIN ( 7), possession des hospitaliers à partir de 1181.

Les forteresses contrôlant un col sur une voie de passage ouest-est
Parmi ces forteresses, on peu citer la forteresse de MOINETRE (9) établie sur la voie menant de Gibelet à Baalbeck.

Les forteresses destinées à la colonisation et au contrôle des plaines du fossé d'effondrement et en particulier de la plaine de la Beqa.
Il va de soi que les riches cultures des fossés d'effondrement furent l'objet de la convoitise des comtes de Tripoli. Pour les francs, une des places les plus importantes était la ville de RAFANEE  ; son contrôle avait une quadruple importance :
     . Il permettait de commander une voie importante de communication entre Homs et la plaine d'Akkar via la Boquée.
     . Il donnait le contrôle des riches terres agricoles qui l'entourent et devait permettre de coloniser la région.
     . Il donnait aux francs une base  pour des conquêtes ultérieures.
     . Il permettait d'organiser des razzias dans la Beqa.

La première croisade était passée par RAFANEE en 1099 et Raymond de Saint Gilles décida d'entamer sa conquête après la prise de Jérusalem  Pour cela, comme il l'avait pratiqué à Tripoli, il enteprit de construire à peu de distance de la ville une forteresse appelée MONTFERRAND.(9);  à peine construite, la forteresse est prise par l'Atabeg de Damas Toghtekin et démantelée, ce qui amène à une nouvelle tentative de reconquête par les francs. Celle-ci se termine par un traité conclu entre le comté de Tripoli et l'atabeg en 1109. Trois dispositions sont importantes :
     . Les francs acceptent de ne plus razzier la Beqa, en échange, ils recevront un tiers des récoltes.
     . Les châteaux de la MOINETRE et de GIBELACAR sont laissés aux francs.
     . En échange, les chateaux de Masyaf, TOUBAN et le HOSN AT ABRAD (le futur KRACK DES CHEVALIERS) seront garantis de toute attaque et devront en outre payer tribut au comte.

Cet accord ne fut pas respecté par les francs qui s'emparent du Hosn at Abrad et de Rafanée en 1112. Rafanée changea plusieurs fois de mains jusque 1137, date où Zengi, atabeg de Mossoul reprit définitivement RAFANEE et MONTFERRAND.

Cette reconquête nécessita la recomposition de la défense  du comté de Tripoli : le point clé de cette défense fut reporté de RAFANEE- MONTFERRAND  situés au débouché de la route passant par la haute vallée du Nash-el-Khebir au HOSN AT ABRAD situé plus en aval et commandant la route de la moyenne vallée du Nash-el-Khebir. Il fallait faire de ce  fortin un lieu inexpugnable ; comme les comtes de Tripoli n'avaient pas les moyens de la reconstruction, il fut décidé de remettre le fortin a l'ordre de l'hôpital qui en firent le KRACK DES CHEVALIERS.

mardi 12 mai 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade (66) : LES FORTERESSES DES TEMPLIERS et le système de défense des états francs

LA FORTERESSE TEMPLIERE DE TORTOSE

Afin de montrer l'organisation spatiale d'une forteresse de Terre Sainte, on peut prendre l'exemple de celle de Tortose ; elle est particulièrement intéressante, à la fois parce qu'il en reste de nombreux ruines enchâssées dans les quartiers de la ville et parce que ces restes permettent de définir un plan architectural assez précis que l'on retrouve un peu partout dans l'architecture militaire de Terre Sainte.

Les relevés sur le terrain ne donnent guère d'indices de datation, cela fait que la description que j'effectuerai dépasse sans doute le cadre chronologique que je m'étais fixé, antérieur à 1187. Néanmoins, elle permettra de montrer l'inexpugnabilité du système défensif d'une citadelle et de montrer les progrès accomplis au niveau de l'architecture militaire.

La forteresse est construite dans le coin Nord-ouest de la ville au bord de la mer.

Elle comporte en premier lieu, un puissant donjon (1) élevé en bordure de rivage et entouré d'un fossé inondable (2) en cas d'attaque. Une porte sur la mer permettait de recevoir des approvisionnements en cas de siège terrestre prolongé. Ce type de tour pourrait représenter le premier état du château ; en effet, de telles tours de surveillance et de guet  avait été construites un peu partout sur les lieux stratégiques de Terre Sainte.

Tout autour de cette tour, les templiers ont construit deux enceintes sans doute successives pourvues de tours (3 et 5 du plan), chacune étant précédée d'un fossé. (4 et 6) également inondable.

Comme le montre la coupe, chacun de ces remparts est pourvu de chemin de ronde et est adossé à une structure massive :
    . Le  rempart extérieur est adossé au rocher qui a été dégagé lors du creusement du fossé,
    . En arrière du rempart intérieur  a été construit un ensemble de casemates (7) servant de magasins qui en épaule la base à l'est et au sud.

Selon moi, un tel système permettait de se prémunir contre les attaques effectuées au moyen d'armes de jets puisque les projectiles que l'on envoyait, décrivant une courbe elliptique, venaient se fracasser contre la base des remparts  que l'on avait, pour cette raison, protégée par les structures massives.   Ces caractéristiques permettent de penser que le rempart intérieur était antérieur au rempart extérieur.

Dans ces deux remparts étaient creusées deux portes successives, toutes les deux situées sur le rempart nord, le seul donnant sur la campagne. Pour accéder au château, il fallait :
      . Monter une rampe (8) établie dans le fossé  puis passer la tour-porte (9) ; cette première partie du trajet était périlleuse pour les assaillants sur qui les défenseurs du château pouvait tirer des deux remparts de la forteresse
      . Une fois la porte prise par les assaillants, ils se trouvaient dans le fossé intérieur qui menait à la porte intérieure (10) sous les tirs des défenseurs établis sur le chemin de ronde du rempart intérieur,
      . Il fallait enfin emporter la porte intérieure qui était défendue par deux tours.

Ce système d'accès en chicane est d'une grande efficacité, les assaillants cheminent entre des remparts qui forment une sorte de gorge sans cesse à la merci des tirs des défenseurs ;  pourtant, à Tortose, le système n'a pas été mené totalement à son terme comme au Krak des chevaliers où il est nécessaire de d'accomplir le tour complet de la gorge entre les remparts pour passer de la première porte à la seconde.

Le double rempart et le trajet en chicane caractérisent la plupart des grandes forteresses de Terre Sainte.

Passée la porte intérieure, on se trouve dans la cour. Adossés au rempart Nord se trouvent les bâtiments conventuels habituels aux fortifications templières : chapelle (11), grande salle capitulaire (12) qui servit aussi de salle de réception et d'apparat et devait être surmonté d'un dortoir. Il devait exister aussi un réfectoire et des cuisines... Ce qui est frappant dans les forteresses appartenant aux ordres de moines-soldats, c'est qu'après avoir franchi les remparts et moyens de défense , on se trouve finalement dans un monastère !