REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
. Toutes les citations de mes articles proviennent de recherches sur les sites gratuits sur Internet



Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

mardi 26 janvier 2016

Les WAYANAS (12), amérindiens de Guyane.

LES MODES DE PENSEE TRADITIONNELLES DES INDIENS WAYANAS suite.

La deuxième  caractéristique est l'absence dans leurs civilisations de nos conceptions morales : M Hurault en donne de nombreux exemples :
     - l'adultère est répandu : si une femme est sollicitée par un soupirant, elle dira oui contre quelques cadeaux et profitera de l'absence de son mari pour céder à son prétendant ; le mari, s'il surprend sa femme avec un amant, entrera dans une violente colère mais généralement, il préfère ne rien savoir.
     - le divorce ne donne pas lieu à des querelles, si l'homme désire se séparer de sa femme, il ira dormir dans une autre case et vice-versa, c'est tout.
     - l'avortement est courant : si la femme est enceinte de son amant, si les jeunes filles ont des aventures avant le mariage, si la femme se juge trop faible pour avoir des enfants...
     - le respect des vieillards, le culte des ancêtres n'existent pas dans leur mode de pensée.

WAYANAS ET OCCIDENTAUX : DES COMPORTEMENTS ANTINOMIQUES

Ainsi, les comportements sociaux tout comme les modes de pensée des Wayanas sont aux antipodes de celles des civilisations occidentales :

    . Le problème du temps ne se pose pas chez les indiens, seul compte pour eux l'instant présent. À l'inverse, pour les occidentaux, le présent n'est ressenti que comme une résultante du passé et comme prémices du futur.

   . Le syndrome de l'heure, si prégnant pour notre civilisation, ne compte pas non plus pour les Wayanas. Nous passons notre vie la montre rivée au poignet, courant sans cesse comme pour conjurer l'implacable et inexorable avance des aiguilles du temps. Cette course contre la montre est doublement frustrante : d'abord, parce que l'on arrive jamais à faire tout ce qu'on voudrait, ensuite,  parce qu'elle brime l'impulsivité qui est en chacun de nous. Rien de tel ne se produit chez les Wayanas, ils se contentent de vivre au rythme de la journée avec un soleil qui se lève et se couche presque toujours à la même heure, avec un temps journalier chaud et moite et toujours semblable.

   . Le phénomène de causalité est pratiquement vide de sens pour les Wayanas alors que c'est un des moteurs de nos modes de pensée ; tout événement possède une cause dans le passé et aura des conséquences dans l'avenir ; les Wayanas ne peuvent appliquer cette contrainte puisque leur passé tout comme leur futur sont absents dans leur mentalité.

   . Le fait d'agir selon l'impulsivité du moment est, selon moi, commun aux Wayanas et aux occidentaux ; il suffit par exemple d'observer ces derniers pendant leurs vacances : ils passent d'une chose à l'autre selon un cheminement sans logique apparente, combien de fois entend-on des réflexions du type : pendant les vacances, je ne me donne aucune contrainte, je me lève quand je veux, je mange quand je veux... Ce comportement ressemble à celui des Wayanas qui agissent aussi selon l'impulsion du moment ; cependant, dans les sociétés occidentales, il ne peut se produire qu'à de rares moments de détente.

   . La notion de la satisfaction du désir et du refus de toute contrainte semble commun aux Wayanas comme aux occidentaux ( surtout depuis la perte de toute valeur morale depuis le milieu du 20e siècle) ; pourtant, cette ressemblance n'est qu'apparence, les Wayanas peuvent agir selon leurs impulsions du moment puisqu'ils n'ont pas d'autres obligations que la satisfaction de leurs besoins physiologiques ; par contre, chez les occidentaux, le désir d'agir selon les impulsions du moment est sans cesse bridé par les multiples contingences de leur vie quotidienne. Le syndrome de l'heure et son corollaire l'obligation d'efficacité à tout prix, la course contre le temps, l'envie de posséder sont, entre autre, les impérieuses obligations qui limitent tout désir de sortir du moule dans lequel on enferme l'être humain de nos pays dit civilisés.

   . Le refus de toute contrainte au nom de son individualisme et le besoin d'assouvir ses désirs sont également communs aux Wayanas et aux occidentaux ; pourtant la mise en application de ces mentalités communes est foncièrement différente de l'un à l'autre.
          - pour les occidentaux, la satisfaction immédiate de leurs désirs est effectué en général au détriment des autres selon un aphorisme du type : " je suis libre de faire ce que je veux, peu n'importe que mes désirs soient réalisés au détriment de la liberté des autres", cette mentalité conduit à une volonté de puissance et de domination qui est un des moteurs de notre civilisation,
          - pour les Wayanas l'aphorisme devient : " je suis libre, je fais ce que je veux mais il ne faut pas que la satisfaction de mes désirs me conduisent à susciter la vindicte des autres qui créera un rapport de force qui me sera très désagréable"

Ainsi, l'analyse effectuée par M Hurault permet de trouver des caractéristiques mentales bien spécifiques des comportements humains antérieures à l'éclosion de nos civilisations industrialisées :
     . Absence de perspectives temporelles tout comme de projection dans l'avenir,
     . Représentation vague des phénomènes de causalité,
     . Détestation de toute contrainte et de tout conflit,
     . Équilibre entre l'impulsivité du désir et les déboires qui pourraient en résulter.

Peut-on alors penser que les wayanas peuvent représenter une illustration du " bon sauvage"  libre et heureux tel que l'avait défini Jean Jacques Rousseau ? Pas tout à fait car cette société, sans loi sociale et sans contraintes, ayant dès rapport sociaux pacifiques et vivant dans un parfaite égalité de fait, n'est pas exempte de règles ; elles émanent de leurs coutumes et de leurs conceptions du monde et vont induire de très nombreux "tabous", eux-mêmes conséquences de l'animisme et du chamanisme qui seront l'objet des prochains chapitres.

lundi 25 janvier 2016

Les WAYANAS (11), amérindiens de Guyane.

LES MODES DE PENSEE TRADITIONNELLES DES INDIENS WAYANAS

La simple visite, même pendant quelques jours, d'un village Wayana ne suffit évidemment pas á comprendre les modes de pensée des Wayanas même si certains traits de ceux-ci transparaissent encore dans la vie quotidienne. J'ai donc utilisé comme source, un très intéressant livre de M Jean Hurault sur les indiens Wayanas afin de trouver une référence à ce que j'ai pu visuellement constater. Selon cet auteur qui écrit dans le dernier tiers du 20eme siècle, les Wayanas, bien qu'ils aient modifié en partie leurs modes de vie sous des influences extérieures, ont conservé la plupart des traits marquants de leurs mentalités.

Parmi les traits marquants de celles-ci, on peut en citer deux  :
     . L'absence de référence à une projection dans le temps ce qui induit un comportement essentiellement subjectif marqué par l'immédiateté et par une vie essentiellement rythmée par les impulsions du moment,
      . L'amoralité au sens d'absence de nos conceptions morales.
 
L'absence de projection dans le temps se marque par divers comportements notés par M Hurault : il n'existe pas de sentiments d'engagement durable : " l'indien promet et s'engage en toute bonne foi, ensuite d'autres impressions le sollicitent et il oublie plus ou moins complètement ou du moins ne retrouve plus le sentiment qui l'avait poussé ; personne ou presque ne fait de projets à plus de 24 heures... " . Comme le disait un explorateur du 19ème siècle, " ils ne piquent d'être l'esclave de personne, pas même de leur parole",

En conséquence de cette absence de vision de l'avenir, l'indien Wayana vit dans l'immédiateté : " un homme, á moins d'être poussé par des nécessités impérieuses, fait rarement deux jours de suite le même travail, dans la même journée, il en entreprend volontiers deux ou trois délaissant l'un reprenant l'autre... Un homme va travailler dans son abattis, prend sa hache, se dirige vers le chemin, puis, arrivé aux limites du village s'arrête revient s'étendre dans son hamac et se met à jouer un air de flûte qui trottait dans sa tête."

Cette vie au jour le jour rythmée par l'impulsivité se remarque dans la vie de tous les jours du village, il suffit d'observer les Wayanas, ils sont assis dans leur hamac, profitant de l'instant présent, vivant placidement, comme au ralenti.

Elle se remarque surtout  dans les manières d'être : M Hurault en donne de nombreux exemples :
     . Les wayanas suivent leurs impulsions sans considérer ce à quoi cette impulsion pourra conduire faute d'esprit critique, de projection dans l'avenir et de référence au passé, ils ignorent le doute et le remords et n'admettre jamais avoir tort, En outre, par le fait qu'ils n'ont pas de vision dans le temps, ils n'établissent pas de relations de cause à effet dans leurs comportements et dans ce qui en résulte. Ils ne tirent donc aucune expérience du passé.

     . Ils n'admettent aucune contrainte, ce qui implique un comportement foncièrement individualiste se refusant à toute règle morale qui pourrait avoir une valeur contraignante ; tout désir doit être satisfait immédiatement.

     . De ce qui précède, on pourrait penser qu'entre les indiens règne "la loi du plus fort" ce n'est pas le cas : de même qu'ils n'admettent aucune contrainte, les Wayanas évitent toutes émotions désagréables, ils ne veulent pas s'attirer d'ennui ni avec les hommes ni avec les esprits de peur des conséquences désagréables qui pourraient en résulter. En conséquence, ils évitent tout conflit et tout ce qui pourrait en provoquer s'ils infligeaient des contraintes aux autres.

   . Ils règlent les conflits par la fuite : si lors de la mort d'un chef, il s'élève une contestation pour sa succession, le groupe qui n'a pas obtenu satisfaction préfère quitter le village et part s'installer ailleurs : Paradoxalement, l'individualisme se conjugue avec des comportements sociaux généralement pacifiques. De même, on ne porte pas de jugement sur les autres, sauf si on s'estime personnellement lésé, par contre, les indiens sont volontiers cancaniers, colportant et amplifiant tous bruit qui court pour en rire.

     . Enfin, cette instaneité á sa contrepartie : " l'émotion, libérée de la revendication... et de toute forme de contrainte connaît un grand épanouissement, chaque geste, chaque parole traduit une intense joie de vivre. Dans le cercle de leur vie familiale, ils témoignent d'une gaité pleine de finesse et d'une affectivité délicate et discrète. Ils savent apprécier la beauté des paysages et de recevoir du contact intime et permanent de la forêt des émotions intenses et colorées."

A suivre,,,

dimanche 24 janvier 2016

Les WAYANAS (10), amérindiens de Guyane.

L'ORGANISATION SOCIALE DU VILLAGE

Le régime matrilocal se conjugue au niveau social par la prééminence des hommes : le père détient l'autorité sur sa famille et participe à l'éducation de ses enfants.

Il existe un  chef du village mais sa fonction n'est plus qu'une survivance du passé guerrier des Wayanas. Il donne son avis, suggère des solutions mais ne les impose pas, d'ailleurs, les indiens Wayanas n'accepteraient qu'on les commande.

Dans cette société, Il n'y a pas d'appropriation des terres tant au niveau du village lui-même qu'à celui du particulier, cela est dû d'abord à la faible densité de la population qui permet de déplacer le village sans que l'on se heurte à un voisin ; de même, les indiens ne sont pas attachés à la terre, elle ne leur sert qu'à se pourvoir en nourriture. La seule appropriation individuelle existante découle du principe que celui qui a défriché une terre la conserve tant qu'il décide de la cultiver. Il arrive que les indiens se groupent en particulier au niveau de la constitution des abattis ; cependant, il ne s'agit pas d'un travail communautaire mais beaucoup plus d'un système du prêté-rendu, il faut que l'autre rende les journées de travail qu'on lui a fournies.

Au niveau de la vie matérielle, la femme est dépendante de son mari, sans qu'existe vraiment de lien de subordination : c'est le mari qui effectue les ventes des objets fabriqués (vannerie par exemple) et qui achète ce dont sa femme a besoin ; hommes et femmes travaillent ensemble à planter l'abattis, mais c'est la femme qui se rend seule à l'abattis pour récolter le manioc.
.
Cette société traditionnelle possédait donc des caractéristiques qui étaient aux antipodes de nos organisations sociales :
     . Des familles élargies organisées par génération alors que nous privilégions la structure familiale au sens étroit du terme.
     . Une famille constituée surtout par référence à l'aïeule commune alors que notre société établit la prédominance de la filiation par l'homme,
     . Une appropriation des terres effectuée temporairement et uniquement pour assurer sa subsistance alors que notre système  implique l'accumulation des richesses.
     . une grande égalité entre les indiens qui découle de l'absence de propriété privée alors que notre société implique l'inégalité de fait au nom de la libre-entreprise.
     . Un lien étroit des indiens à leur environnement qu'ils respectent au nom de leurs croyances animistes tandis que nos civilisations veulent asservir la nature à nos besoins sans souci de sa préservation.

Est-ce alors cette société ante-industrielle que je recherchais pour témoigner de la nature de l'homme ? Pour mieux le mesurer, il peut être intéressant d'étudier les modes de pensée des Wayanas.

samedi 23 janvier 2016

Les WAYANAS (9), amérindiens de Guyane.

Suite de l'article précédent. 

La situation est exactement semblable au niveau d'une fille appelée X dans le tableau : au niveau de la génération N sont utilisés les qualificatifs suivants :
     - FRERES, garçons  issus des mères de la génération précédente,
     - SOEURS, les filles issues des mères de la génération précédente
     - BELLE SOEUR, les filles issues des beaux-pères de la génération précédente,
    - ÉPOUX, les garçons issus des beaux-pères de la génération précédente avec qui elle pourra se marier.

Ce système de matrilignage se conjugue avec un système de patrilignage exactement parrallele avec une organisation semblable pour X, cela donne :
     - N-2 : GRANDS PÈRES
     - N-1 : PÈRES  ET BELLES-MÈRES
     - N : ÉPOUX, BELLES-SŒURS, FRÈRES , SOEURS

L'adjonction de ces deux systèmes conduit à un système mixte complexe basé sur trois idées principales :
     - le matrilignage associé au patrilignage qui se caractérisent par des appellations qualifiant chacun l'un par rapport aux autres,
     - la création de niveaux générationnels sans toutefois que se définissent des classes d'âge spécifiques,
     - des règles strictes concernant le mariage endogame  qui n'est effectué qu'avec ceux ou celles que l'individu appelle époux ou épouse, et qui conduisent à ce que les membres du village vivent en vase-clos.

Pour qu'un tel système fonctionne, il faut que le village comporte au minimum 40 à 60 personnes. Comme ce n'est pas généralement le cas, il est nécessaire de pratiquer le mariage exogame, ce qui a vu l'apparition de  principes dérivés  :
     - Les filles restent dans le village de leur mère,
     - les garçons s'installent dans le village de leurs femmes et aident leurs beaux-pères dans son travail en guise de compensation.

A suivre...

vendredi 22 janvier 2016

Les WAYANAS (8), amérindiens de Guyane.

Suite de l'article précédent

LES LIENS DE PARENTÉ

Le village était traditionnellement structuré autour d'un système de parenté complexe qui était basé sur un double système
     - le matrilignage en tant que groupe de base fondé sur une aïeule commune avec transmission par les femmes. Cependant, il existe parallèlement un patrilignage basé sur l'ancêtre masculin.
     - l'endogamie, le mariage à  l'intérieur de la parenté limité à ce que chacun appelle époux ou épouse
Á la différence de ce que l'on trouve en Afrique noire, aucun culte n'est rendu à l'ancêtre commun qui n'est pas considéré comme le protecteur de sa lignée.

Ce système traditionnel se révèle en particulier dans le qualificatif employé dans la dénomination des membres du lignage.

Voici d'abord l'exemple d'un homme appelé Y dans le cadre du matrilignage :

   . Á la génération N-2, Y appelle toutes les femmes de cette génération GRAND-MÈRE, qu'il s'agisse de sa grand-mère effective ou de sa grand mère classificatoire qui n'est donc pas sa grand-mère véritable au sens où nous l'entendons.

   . Á la génération N-1, Y utilise deux termes pour qualifier les gens de cette génération, enfants des grands mères :
           - les femmes sont toutes qualifiées de MÈRE ,
           - les hommes sont appelés BEAU PÈRE , dont une partie est l'équivalent de nos oncles maternels

   . Á la génération N, apparaissent quatre qualificatifs : Y appellera :
           - SOEURS,  toutes les filles issues des mères de la génération précédente.
           - FRÈRES, Tous les garçons issus des mères de la génération précédente.
           - BEAUX-FRERES, tous les garçons issus des beaux-pères de la génération précédente.
           - ÉPOUSES, toutes les filles issues des beaux-pères de la génération précédente. C'est parmi elles que Y devra choisir une épouse.

A suivre...

jeudi 21 janvier 2016

Les WAYANAS (7), amérindiens de Guyane.

Suite de l'article précédent

LES CULTURES

Á l'inverse des Noirs Réfugiés qui n'hésitent pas à installer leurs abattis loin du village et s'y rendent en pirogue, les indiens Wayanas établissent leurs cultures aux abords immédiats du village en sorte qu'une simple marche de quelques minutes suffit pour les apercevoir.

Pour cultiver le manioc, il est nécessaire de défricher un coin de forêt,  les indiens, tout comme les Noirs Réfugiés commencent à mettre le feu dans ce qu'on appelle l'abattis. Cette pratique sur brûlis est indispensable :  le sol étant délavé, il est pratiquement infertile, il convient donc de l'enrichir grâce à la cendre. Les Wayanas plantent alors le manioc, il suffit de mettre une branche dans le sol pour qu'elle repousse ; de même, comme on le voit sur la photo, sont plantés des arbres fruitiers et des bananiers. Les abattis sont de petite taille, environ 400 m2 par famille.

Au bout de quelques temps, l'abattis devient un fouillis végétal car les arbres repoussent en même temps que le manioc si bien que l'on a du mal à reconnaître le champ cultivé. Après plusieurs années, il est nécessaire de changer d'abattis soit du fait que la terre est devenue infertile,  soit à cause de l'apparition des fourmis manioc ; très vite, la végétation naturelle reprend le dessus et il s'établit une forêt secondaire au sous-bois très abondant dominé par quelques arbres plus grands.

Plus loin encore, la grande forêt se développe avec ses caractéristiques habituelles : grands arbres sempiternels aux feuillages se rejoignant d'un arbre à l'autre, formant une canopée sous laquelle règne une pénombre chaude et moite ; lianes de toutes sortes utilisant l'arbre comme support, soit en s'enroulant autour du tronc, soit en s'agrippant sur le tronc pour s'élever vers la lumière ; plantes épiphytes accrochées aux hautes branches dont les racines pendent presque jusqu'au sol ; sous-bois abondant constitué en particulier par la pousse des fruits des grands arbres tombés au sol ; sol spongieux parcouru par les insectes...

Partout se produit une compétition pour accéder à la lumière, les jeunes arbres tentent de s'élever le plus haut possible. Ils sont le vivier du renouvellement de la forêt ; en effet, lorsqu'un grand arbre meurt, il entraîne dans sa chute d'autres arbres tant leurs branches sont entremêlées, cela constitue une clairière de lumière permettant aux jeunes arbres de se développer.. C'est d'ailleurs dans ces clairières que les Wayanas cultivaient autrefois, à l'époque où ils n'étaient pas établis au bord de l'eau.

Dans ces conditions, la vitalité de la végétation empêche toute construction de routes, seuls des chemins permettent de s'enfoncer dans la forêt ; si on ajoute à ce fait que le fleuve n'est accessible qu'aux canots, on peut mesurer à quel point, les Wayanas sont largement coupés du monde.

Ce milieu de vie, bien que difficile, n'est cependant pas hostile à l'homme du moins si il sait s'adapter à lui sans vouloir singer les modes européennes ; à cet égard, remplacer les toits de palmes par des toits de tôle est une aberration :  alors que les toits anciens formaient écran à la chaleur, les toits de tôle la laissent passer et même surchauffent l'intérieur de la maison.

A suivre...

mardi 19 janvier 2016

Les WAYANAS (6) amérindiens de Guyane.

Suite de l'article précédent

La dernière case est le TUKUSIPAN, la grande case servant aux fêtes et aux cérémonies. Sur le faite intérieur de cette case se trouvent deux objets de grande importance : le disque maluana du plafond et les cages servant au maraké.

Le disque central comporte dès représentations de trois esprits des eaux (ipo) dont il faut se méfier car ils sont particulièrement redoutables :
   . Molokot : un monstre aquatique ayant simultanément des pattes et des nageoires,
  . Kuluwayak : monstre à deux têtes qui autrefois dévorait les indiens,
  . Esprits Tamok : des nains vivant dans la rivière venant de nuit dans les villages s'attaquer aux enfants.

Le second type d'objet qui est conservé dans le TUKUSIPAN sont les cages à MARAKE (Kunana) qui servent à l'épreuve des guêpes et des fourmis. C'est un rite essentiel pour les wayanas qui se produit sur chacun à partir de l'âge de 11-12 ans et qui se renouvelle périodiquement dans la vie (théoriquement jusqu'à huit fois, en réalité quatre au grand maximum). Cette épreuve ne possède pas de caractère obligatoire, subir le MARAKE est, pour l'indien, une grande fierté qui prouve son courage.

Sitôt que dans un village, on décide d'un MARAKE, chaque candidat se fait connaître. L'ensemble des rites dure trois mois ponctués de cérémonies de danses rituelles alternant avec des périodes de réclusion des candidats. L'épreuve proprement dite se déroule à la fin des trois mois. Les cages sont emplies de fourmis et de guêpes et on les applique sur le dos ou la poitrine. L'épreuve dure quelques minutes, c'est assez pour infliger de grandes souffrances qu'il faut supporter sans sourciller.

Le costume des aspirants au Maraké

Le DEGRAD
il est l'objet d'un intense lieu de vie, les canots y sont amarrés, on y vient aussi pour se laver, faire la vaisselle, laver le linge.. Les enfants s'amusent à pêcher à l'arc, c'est là aussi où accostent les habitants des villages invités lors des fêtes...


Sur la photo, on peut se faire une idée de l'environnement des wayanas, une rivière large aux berges couvertes de forêts denses à perte de vue.



A suivre...

dimanche 17 janvier 2016

Les WAYANAS (5) amérindiens de Guyane.

Suite de l'article précédent

La troisième sorte de case est celle qui permet la préparation du manioc, base de la nourriture des Wayanas. Dans cette case se trouvent les ustensiles qui permettent son traitement.



Le manioc est d'abord râpé, pour cela, on utilise actuellement une boîte de conserve que l'on aplatit et dans laquelle on perce des trous. La pâte obtenue est ensuite mélangée à de l'eau puis mise dans une couleuvre, un grand sac tressé comme celui qui est posé sur une traverse sur la photo ci-dessus, la couleuvre est suspendue verticalement à un arbre de manière à permettre au jus toxique du manioc de s'écouler.

Il en résulte de gros boudins de  manioc blanc que l'on dépose ici dans un ancien canot hors d'usage.

Le manioc est ensuite cuit sur une grande plaque de cuisson posée sur trois pierres et mangé en galettes. (Cassave)

On peut aussi faire fermenter le manioc pour en faire une boisson appelée CACHIRI qui servira lors des grandes fêtes et pendant les MARAKE (rite d'initiation). Autrefois, selon ce que j'ai appris dans ce village, le cachiri était fabriqué par les femmes qui mâchaient le manioc et le recrachaient pour que se produise la fermentation

Hormis les galettes de manioc, les wayanas se nourrissent essentiellement de poissons qu'ils pêchent à l'arc et aussi à l'hameçon en particulier sur les bancs rocheux des sauts. C'est pour eux le principal apport de protéines et de lipides.

Ils mangent très peu de viande, et cela pour trois raisons :
     . Le gibier est rare dans la grande forêt,
     . Il existe de nombreux tabous que l'on ne doit pas transgresser à propos de ces animaux
     . Les animaux d'élevage ne sont pas mangés, les wayanas les considèrent comme impurs puisqu'ils ont été nourri avec des déchets, ils élèvent simplement quelques poulets et des chiens pour la vente.

Par ailleurs, leur nourriture comporte les produits de leurs jardins, (bananes, ignames, canne à sucre, ananas...) et de cueillette (œufs de tortues, larves, insectes...)

A suivre...