LA GUERRE DE BRETAGNE : LES OPÉRATIONS MILITAIRES.
Après avoir décrit le passage du Couesnon, la tapisserie de Bayeux présente la guerre menée par Guillaume contre le duc de Bretagne. Cette dernière comporte trois phases décrites successivement et semblant constituer une seule histoire en réduisant l’expédition normande à une simple et glorieuse promenade militaire ; ce ne fut probablement pas le cas, en effet, la chronologie donnée par la tapisserie de Bayeux n’est pas corroborée par le récit de Guillaume de Poitiers, le seul chroniqueur ayant raconté en détail l’expédition de Bretagne.
La première phase de la campagne eut lieu à Dol ; rappelons les faits mentionnés dans le précédent article : un vassal de Conan, appelé par Guillaume de Jumièges, Rual, s’était révolté contre son suzerain. Ce dernier décida de mettre le siège devant Dol, un des points fortifiés construit par Rual. Rual fit alors appel à Guillaume qui ne manqua pas de profiter de l’occasion pour attaquer la Bretagne.
.ET VENERUNT AD DOL ET CONAN FUGAVERIT : et il vinrent à Dol et Conan prit la fuite
Cette partie du récit correspond au récit de Guillaume de Poitiers. A l’arrivée de l’armée normande, Conan abandonna le siège de Dol : « Conan, comme s'il eût craint d'être frappé d'un coup de foudre qui le menaçait de près, s'enfuit avec la plus grande promptitude … abandonnant le siège de Dol, château situé sur son territoire… Cet homme, misérablement épouvanté, écouta plutôt sa frayeur, et continua de fuir. »
La tapisserie de Bayeux est d’un grand intérêt en ce qui concerne le château de Dol et les méthodes d’attaque employées par les normands :
Le château de Dol est construit sur une butte (A) sans doute artificielle et entourée de fossés (B) ; une rampe (C) permet d’accéder au château. Cette rampe se termine par une porte (D) ouvrant sur un bâtiment qui évoque plus une tour qu’un château proprement dit, cette tour est quadrangulaire, elle comprend deux niveaux, le premier niveau comporte deux ouvertures (E), le second étage est terminé par une plateforme crénelée.
Les cavaliers normands attaquent, ils chargent, protégés par leurs boucliers (F) et portent des javelots (G). Quand l’ennemi est à portée de leur javelots, ils ouvrent leurs boucliers, dégagent leurs poitrines pour posséder plus de force et lancent leur javelots (H). Il est étonnant de remarquer qu’un seul cavalier porte un casque et une cotte de mailles, les autres ne sont habillés que de leur tunique.
Cette attaque de la tour de Dol est surprenante eu égard au bandeau explicatif et au texte de Guillaume de Jumièges ; en effet, l’assaut ne pouvait pas se porter sur la tour puisque celle-ci est tenue par l’allié du duc normand. Dans ce cas, il faudrait imaginer que l’attaque a eu lieu contre l’armée bretonne assiégeant Dol mais qui n’est pas représentée sur la tapisserie.
Un petit personnage (J) descend de la plateforme de la tour au moyen d’une corde, sans doute est-il chargé de prévenir Guillaume que l’attaque des normands est devenue inutile puisque Conan vient de fuir.
NOTE COMPLÉMENTAIRE
LE JUGEMENT DE GUILLAUME DE POITIERS SUR LA BRETAGNE.
La Bretagne était incroyablement peuplée d'hommes de guerre; car, dans cette contrée, un chevalier en engendrait cinquante en épousant, à la manière des Barbares, dix femmes ou davantage ... De plus cette nombreuse population s'applique beaucoup aux armes et au maniement des chevaux, et néglige entièrement la culture des champs et la civilisation; ils se nourrissent de très abondants laitages et fort peu de pain. De vastes territoires, qui ne portèrent presque jamais de moissons, sont pour leurs troupeaux de gras pâturages. Lorsqu'ils n'ont pas de guerre étrangère, ils se nourrissent de rapines et de ravages domestiques, et s'exercent au brigandage. Ils vont au-devant des combats avec une joyeuse ardeur, et combattent avec fureur. Accoutumés à repousser, ils cèdent difficilement. Ils exaltent et célèbrent par des réjouissances leurs victoires et la gloire qu'ils se sont acquise dans les combats. Ils prennent plaisir et gloire à enlever la dépouille des morts.
Sans commentaire !
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