REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
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Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

samedi 21 mai 2016

LA LIBERTÉ (27) ET LE CHOIX ENTRE LE BIEN ET LE MAL

L'ENSEIGNEMENT SUR LE BIEN ET LE MAL DES RELIGIONS MONOTHÉISTES (suite)

Il convient cependant de relativiser ce côté factice du libre-arbitre en tant que liberté qui n'en serait pas une (1) ; tout dépend en effet de ce que l'on entend par acte positif permettant le salut. On trouve dans les livres saints et chez leurs commentateurs tout une série d'interprétations possibles de ce qui est bien et de ce qui ne l'est pas.

Ainsi, dans le christianisme, on passe d'une conception d'un Dieu vengeur et implacable envers ceux qui désobéissent comme dans l'Ancien Testament au Dieu d'amour et de miséricorde des Evangiles. Voici par exemple deux citations qui éclairent ce dualisme :

" Samuel dit à Saül: «'... Ecoute donc les paroles prononcées par l'Eternel! Voici ce que dit l'Eternel, le maître de l'univers: Je me souviens de ce que les Amalécites ont fait à Israël lorsqu'ils lui ont barré le chemin à sa sortie d'Egypte. Va maintenant frapper les Amalécites. Vouez à la destruction tout ce qui leur appartient. Tu ne les épargneras pas et tu feras mourir hommes et femmes, enfants et bébés, boeufs et brebis, chameaux et ânes.» (1-SAMUEL 15)

"Bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous maltraitent. Si quelqu'un te frappe sur une joue, présente-lui aussi l'autre. Si quelqu'un prend ton manteau, ne l'empêche pas de prendre encore ta tunique. Donne à quiconque te demande, et ne réclame pas ton bien à celui qui s'en empare.…(LUC 6)

Ces deux exemples montrent que le salut peut être obtenu selon les cas par le bellicisme ou le pacifisme selon le texte auquel on se réfère.

 A cela s'ajoute l'enseignement de l'église avec d'autres antagonismes comme celui utilisé par saint Bernard pour justifier les massacres accomplis par les croisés médiévaux et qui indique que l'homicide est un péché tandis que le malicide (tuer le mal qui est en un homme) ne l'est pas ! De tels enseignements conduisirent aux excès des croisades et plus tard des tribunaux de l'inquisition !

Il en est de même dans l'Islam concernant le DJIHÂD selon les commentateurs musulmans : dans la Sunna, la tradition musulmane, les docteurs en droit musulmans distinguent trois sortes de Djihad :
     . le 'Djihad' le plus grand ('Djihad' al-akbar), celui contre l'ennemi intérieur et contre le mal qui détourne du bien,
     . Le 'Djihad' al-asghar (Djihad le plus petit), celui contre l'ennemi extérieur pour défendre la religion dans une perspective uniquement défensive.
     .  le 'Djihad' le plus noble ('Djihad' al-afdal) qui signifie « dire la vérité devant un oppresseur en ne reniant pas sa foi en Dieu » (2)

Dans ces conditions, tout dépend quel Djihad sera mis en avant, ce qui permet à chacun d’établir une interprétation qui lui soit propre.  

De ce qui précède, j'en conclue que les notions de bien et de mal sont, dans les religions monothéistes dérivées du judaïsme, des valeurs relatives et non absolues, elles dépendent des interprétations que l'on peut en faire. Si je reprends ma métaphore du tiroir, chaque croyant peut trier les valeurs que lui proposent les religions par l'emploi de sa raison de ses croyances ou de sa foi  et les classer en toute liberté.

(1) voir l’article précédent

(2) Un internaute anonyme d'un forum musulman écrit cette phrase : "Chaque individu peut lire le Coran et la Sunna, mais quiconque ne peut les interpréter, car chacun projette ses états d'âmes dans son interprétation. Les gens englués dans l'ignorance et l'obscurantisme sont gouvernés par les pulsions de leur ego, et par conséquent vivent dans l'époque de l'ignorance, même si l'on est au vingt et unième siècle. Leur interprétation des textes sacrés, de la Bible, des Evangiles et du Coran correspond au niveau ... matérialiste de leur compréhension et de leur imagination. L'on ne peut pas accuser le texte, si son interprétation est erronée. "


vendredi 20 mai 2016

LA LIBERTÉ (26) ET LE CHOIX ENTRE LE BIEN ET LE MAL

L'ENSEIGNEMENT SUR LE BIEN ET LE MAL DES RELIGIONS MONOTHÉISTES

Dans les religions monothéistes héritées du judaïsme, le mal  tout comme le bien sont des valeurs préexistantes à l'homme. Le mal possède une existence propre personnifiée les anges déchus que sont Satan et sa cohorte de démons. En conséquence, il existe un antagonisme entre le bien voulu par Dieu et les incitations au mal émanant du diable qui sert de toile de fond à toute l'existence des croyants.

Les religions monothéistes, à l'exception toutefois du protestantisme, ajoute à ce dualisme Dieu/diable une autre idée fondamentale, celle du libre-arbitre.

Le libre-arbitre établit en théorie la liberté de l'homme, il n'est à l'origine prédisposé ni par le bien ni par le mal, c'est lui qui choisit quel sens il va donner à son existence : respectera-t-il les valeurs éthiques contenues dans les livres émanant de Dieu ou se laissera-t-il tenter par les multiples sollicitations du diable pour accomplir le mal ?

Théoriquement, ce libre-arbitre ne constitue pourtant chez les croyants des religions monothéistes qu'une liberté factice puisque se laisser aller au mal pendant sa courte vie terrestre, conduira à une damnation qui,elle, sera éternelle ; à l'inverse, faire le bien et respecter les commandements de Dieu permet d'être sauvé pour l'éternité . Le croyant est donc conditionné par l'alternative salut/damnation qui correspond au dualisme bien/mal. Chaque acte est accompli non au nom d'une liberté totale de choix, mais en fonction de ce qu'il adviendra lors de la pesée du bien et du mal au moment du jugement dernier. 

A suivre...


jeudi 19 mai 2016

LA LIBERTÉ (25) ET LE CHOIX ENTRE LE BIEN ET LE MAL

Suite de l’article précédent

Les thèses socratiques ont servi de base à une grande partie de la philosophie occidentale jusqu'au 19ème au moins. Pendant longtemps, la prééminence du bien n'a pas été contestée au moins dans les thèses philosophiques en vogue. Le philosophe qui  théorisa le mieux ces idées est Emmanuel Kant dans " la religion dans les limites de la simple raison"

L'idée fondamentale de Kant est, comme je l'ai écrit précédemment,  que la raison, l'outil par excellence de la connaissance, ne peut s'appliquer qu'au monde sensible des sciences expérimentales ; tout ce qui dépasse le monde sensible pour accéder à la métaphysique ne peut être que spéculation puisque sans fondement. Comme l'indique le titre de son ouvrage, "la religion dans les limites de la simple raison", Kant va tenter de trouver les valeurs qui fondent le bien et le mal par la raison et non pas par une recherche transcendantale. En ce sens, Kant va "déthéologiser" la religion en passant de la croyance à la connaissance au moyen de l'outil-raison.

En premier lieu, Kant tout comme Platon indique que le mal absolu n'existe pas en tant que valeur préexistante à l'homme car un mal immanent rendrait subjective et imparfaite l'universalité de la raison.  De même Kant constate que le mal n'existe pas dans la nature, plantes et animaux ne manifestent aucune tendance au mal car, pour cela, il faudrait que la nature dispose d'une liberté de choix. C'est seulement chez les hommes que cette tendance existe et résulte de la liberté de choix qu'il possède.

Même chez les hommes, il n'existe pas d'autonomie du mal, le mal n'apparaît qu'en tant que valeur antagoniste par rapport du bien quand l'homme s'en détourne. Il réside dans le fait que l'homme, délibérément, choisit de privilégier ses désirs sur les valeurs morales.

Pour Kant, l'origine du mal est inhérent à l'homme mais sans que l'on sache comment une telle valeur s'y trouve. Cependant, cette valeur n'est pas la réalité la plus profondément ancrée dans l'homme, l'homme naturellement est porté au bien mais cette prééminence  naturelle vers le bien est sans cesse confrontée à la tendance au mal qui résulte de la volonté de satisfaire ses désirs égoïstes et ses plaisirs : lorsque l'homme choisit de faire le bien, il se produit immédiatement un penchant à résister. Il existe en l'homme une prédisposition au bien et un penchant pour le mal.

La tentation de faire le mal provient de la conscience même de l'être humain, lorsqu'on choisit le mal, on le fait délibérément car c'est un acte de liberté individuelle : en se voulant sourd à la loi morale et au devoir, on construit délibérément le mal en nous.

Pour Kant enfin, la loi morale doit être universelle, il retrouve dans les valeurs morales du christianisme les prescriptions éthiques que chacun est capable de retrouver en laissant agir sa propre raison.

Ainsi, Platon et Kant ont en commun une idée essentielle, la prééminence du bien sur le mal :
     - pour Platon, des exercices intellectuels permettent d'accéder à la connaissance de soi et suffisent pour éliminer le mal et trouver le bien qui préexiste dans l'âme,
     - pour Kant, le bien est la valeur la plus profondément ancrée dans l'esprit humain, le mal n'étant qu'un penchant auquel on succombe en toute liberté en privilégiant ses plaisirs à l'observance de la loi morale découlant du bien.

D'autres philosophes ont également mentionné une préexistence chez l'homme de tendances vers le bien ou le mal ; ainsi,  Rousseau indique que, par essence, l'homme à l'état de nature est naturellement bon et que c'est la société qui le  pervertit tandis que Hume  part du postulat que l'homme est un loup pour l'homme et que seule la société peut canaliser sa violence et son appétit de puissance.

L'ensemble de ces thèses part du postulat qu'il existe une préexistence de valeurs chez l'homme qui sont, en quelque sorte innées. Or il me semble que, quand par l'introspection on veut aller jusqu'au bout de la connaissance de soi, on se trouve essentiellement face à des acquis et non à des valeurs ex-nihilo , cela explique que chacun est différent de son voisin : il s'effectue en chaque être humain un dosage différent de valeurs qui constituent sa personnalité et son individualité.

lundi 16 mai 2016

LA LIBERTÉ (24) ET LE CHOIX ENTRE LE BIEN ET LE MAL

Après la description de la liberté par la connaissance de soi et du dualisme liberté-croyance, il s’agit pour moi de tenter de montrer dans un troisième volet sur le sujet de la liberté comment celle-ci peut aboutir tout autant au le choix du bien comme à celui du mal.

Les chapitres précédents consacré à la liberté de l'être m'avait conduit en effet à poser le problème du choix des valeurs constitutives de l’être.  C’est de ce choix, effectué en toute liberté pour tous ceux qui dépassent le casier du paraître et  des alibis, que découle la manière d'être de l’homme qui peut tout à la fois devenir un saint mais aussi un monstre assoiffé de sang.

Devant de telles disparités, il convient de savoir comment s'opère le choix des valeurs que chacun va privilégier, cela pose la question du bien et du mal.

Pour répondre à cette question, on peut se placer à trois niveaux avant de tenter une synthèse :
     - les théories traditionnelles de la philosophie,
     - les enseignements de la religion,
     - les théories de Nietzsche.

LES THÉORIES TRADITIONNELLES DE LA PHILOSOPHIE DE PLATON A KANT

Il s’agit d’un courant de la philosophie qui dérive des thèses socratiques exprimées par Platon dont l'idée fondamentale est que le mal résulte uniquement de la méconnaissance de soi, le mal en soi n'existant pas.

Ce postulat platonicien dérive de la théorie des "Idées pures" l'âme, naturellement parfaite, se dégrade en quittant le monde des Idées pour le monde sensible et ne devient plus qu'un pâle reflet de ce qu'elle était ; néanmoins, sa perfection d'origine reste enfouie au plus profond de la nature humaine.

Platon pense que l'être humain possède en lui tout ce qu'il faut pour retrouver les idées pures que son âme possédait ex-nihilo, il lui suffit par la maïeutique de se débarrasser de ses fausses croyances qui ne conduisent qu'au mal pour se connaître soi-même en retrouvant sa perfection d'origine  et au bien primordial qui était en elle.

Platon en tire trois conclusions :
     - d'abord, la connaissance de soi et la prise de conscience de la perfection primitive de son âme ne peut conduire qu'au bien, le mal résultant de la non connaissance du bien ; se connaître soi-même, c'est  donc aller nécessairement vers le bien,
     - le bien est inné alors que le mal résulte des hommes,
     - le bien qui résulte de la connaissance de soi est le même chez tous les hommes, En conséquence, il se constitue en notion à vocation universelle.

Ces conséquences peuvent, selon les conclusions auxquelles je suis parvenu, être réfutées à trois points de vue :
          . L'inné est négligeable au profit de l'acquis et ne se cantonne qu'aux instincts primaires : il n’existe donc pas de bien en soi préexistant,
          . La réalité introspective est plus complexe que ce qu'en dit Platon puisque le tiroir de l'être recèle de multiples valeurs allant tout autant vers le bien que le mal,
         . Enfin, selon moi, le tiroir de l'être recèle si une grande variété de valeurs, qu'il n'existe pas de vérité universelle.

A suivre...


vendredi 8 avril 2016

LIBERTÉ (23) ET CROYANCE

Suite de l’article précédent

Dans sa "critique de la raison pure", Kant associe aux mots croyance celui de foi. Cela pose une question d'importance : la foi est-elle compatible avec la liberté ontologique que j'ai estimée totale au niveau de ces croyances. Encore faut-il s'entendre sur le sens que l'on peut donner au mot "foi"

Au sens strict du terme, la foi ne s'applique qu'au domaine religieux et en particulier aux religions révélées, il ne s'emploie pas au niveau des croyances forgées par la raison comme l'athéisme, le déisme, le panthéisme..., la foi échappe par sa définition même à toute rationalité. Dans ces conditions, il peut exister quatre possibilités :

     -" je mets ma vie en accord avec mes convictions religieuses et j'obéis fidèlement à ses préceptes, cela me permettra le salut, la notion de foi m'est étrangère.

     - ma croyance est une conséquence de l'étude rationnelle que j'ai effectuée à partir des acquis avec un raisonnement du type " cette croyance est en accord total avec mon être, je crois en tout ce qu'elle enseigne, j'ai foi en elle et j'organiserai ma vie en fonction de ses commandements"

     - elle peut être aussi une révélation avec un événement fortuit par lequel l'être se sent brusquement irradié par l'amour de Dieu et y trouve la réponse à ses interrogations concernant ses croyances. Cet événement peut prendre de nombreuses formes, apparitions, intense émotion, conséquence d'un vœu... Parmi tous les exemples, on peut citer la phrase que l'empereur Constantin aurait dit avant la bataille du pont Milvius : « Dieu des chrétiens, si tu me donnes la victoire, je croirai en toi. »

     - enfin elle peut être une valeur préexistante à l'homme comme l'enseigne le calvinisme avec la prédestination : Dieu a décidé de toute éternité qui serait sauvé et qui ne le serait pas. Selon cette conception, la foi est immanente en ceux qui serons sauvés et dont Dieu favorisera toutes les entreprises ; par contre, les autres, pourront mener une vie vertueuse, ils seront néanmoins damnés.

Dans les deux premiers cas, la liberté de l'homme face à la foi est  totale ; dans le troisième, elle est partielle, enfin, dans le quatrième  cas, elle  n'existe théoriquement pas, pourtant il est permis de penser que, même dans ces religions à prédestination,, les croyants peuvent retourner l'argumentation : " tout me réussis dans la vie, c'est que Dieu m'a prédestiné au salut "

Ainsi, de ce qui précède, on peut constater que la méthode d’introspection et la liberté qui en est la conséquence, non seulement peut s'appliquer à tous les domaines mais aussi de la croyance et même de la foi

Dans cette perspective, il se pose une question fondamentale que j'ai plusieurs fois évoquée : comment s'opère le tri des valeurs et quelle méthode de classement va-t-on utiliser dans le «tiroir de l’être » ;  pourquoi les uns sont des saints tandis que d'autres deviendront des assassins ? Au-delà en effet de l'idée de liberté, il se pose la question du bien et du mal, Il ne s'agit pas ici de considérer le bien et le mal dans la société mais de le faire au niveau de l'être ontologique. ce sera le troisième volet de cette série d'articles sur la liberté.

jeudi 7 avril 2016

LIBERTÉ (22) ET CROYANCE

Suite de l’article précédent

Ainsi, selon Kant, il existe deux domaines distincts qui vont largement influer sur notre liberté :

   - Celui qui émane de la raison et  mène au raisonnement scientifique ; dans ce domaine, on ne dispose que d'une marge étroite de liberté, encore que les sciences sont souvent composées de faits avérés, démontrés et indéniables ( par exemple, la terre tourne autour du soleil), d'hypothèses invérifiables ou en cours de vérification (par exemple, le big-bang), de conceptions qui dépassent l'intellect humain (la notion d'expansion infinie de l'univers ), de constats inexpliqués, de controverses ... Ces trois dernières caractéristiques peuvent permettre à l'homme de prendre position en toute liberté, c’est ainsi le cas en ce qui concerne le réchauffement climatique : pour les uns, il s'agit d'un phénomène naturel pour lequel l'homme a peu de part, pour les autres, il a une cause en grande partie humaine. Ainsi, la liberté de choix ne s'applique que dans les secteurs hypothétiques quasiment métaphysiques dans laquelle la raison s'égare sans fondements réels.

   - A l'inverse, au niveau du domaine de la croyance, on jouit d'une liberté totale avec un choix qui s'effectue à partir du niveau des acquis dont on a conservé le souvenir. certains vont inclure in-extenso ces acquis dans les valeurs à laquelle on adhère ; les uns affirment par exemple la conception suivante :  " je suis chrétien parce que mes parents m'ont donné une éducation chrétienne, j'ai suivi les cours de catéchisme et allais à la messe tous les dimanches, je crois en Dieu et en Jésus Christ en tant que fils de Dieu," ; d'autres diront de la même manière  : " je suis musulman parce que mes parents m'ont donné une éducation musulmane, j'ai suivi les cours de l'école coranique, je vais à la mosquée tous les vendredis, je crois qu'il n'y a qu'un seul Dieu et que Mahomet est son prophète"

D’autres encore vont également tenter d'appliquer à leurs acquis la méthodologie de la raison même si, selon Kant, ils ne reposent pas sur des fondements solides, Ainsi apparaissent diverses interprétations souvent antinomiques qui correspondent à la liberté de chacun. En voici quelques exemples :
   . "Dieu existe au nom du principe de causalité : tout effet ayant une cause, il faut bien qu'il y ait à un moment donné un démiurge qui a créé le monde, (1)
   . " Je ne crois pas en Dieu parce que le principe de causalité tout comme celui de finitude sont des concepts humains et non des postulats applicables à l'univers. Je crois que l'univers est régi par d'autres règles que l'homme ne peut pas appréhender dans le monde clos qui est le sien. D'ailleurs comme l'écrit Schopenhauer, le principe de causalité conduit à un non-sens d'abord parce que l'on ne pourra jamais accéder à la cause primitive, ensuite, parce si on trouve une cause première, on remet en cause le principe même de causalité,
   . Je suis émerveillé par la beauté et l'harmonie de l'univers, il ne peut y avoir qu'un Dieu pour avoir créé une telle splendeur,
   . Nous ressentons la beauté du monde sans être sûr que cette beauté existe en soi, nous ne disposons que des moyens de nos sens pour en juger, notre vue est limitée par le fait que nous ne percevons que trois couleurs fondamentales, notre perception des sons est également limitée. Notre émerveillement face au monde n'est que le fait de nos propres limitations et n'a rien à voir avec une création faite pour nous et à notre mesure par un Dieu.
   . Ce monde que certains ressentent comme merveilleux n'est que le fruit de la sélection naturelle et de la loi du plus fort"

De toutes ces assertions contradictoires qu'il est impossible de vérifier puisque dépassant toute rationalité objective, chacun choisit celles qui lui semblent le plus adapté à  son " ego", sa conscience qui pense. C'est en ce sens que l'homme jouit de la totale liberté quand il décide de privilégier telle ou telle croyance convenant le mieux à la constitution de son « casier de l'être ».

A suivre…

(1) c'est en particulier le cas par exemple de Voltaire qui justifie son déisme par l'emploi de sa raison seule

" Quand je vois une montre dont l’aiguille marque les heures, je conclus qu’un être intelligent a arrangé les ressorts de cette machine, afin que l’aiguille marquât les heures. Ainsi, quand je vois les ressorts du corps humain, je conclus qu’un être intelligent a arrangé ces organes pour être reçus et nourris neuf mois dans la matrice; que les yeux sont donnés pour voir, les mains pour prendre, etc. Mais de ce seul argument je ne peux conclure autre chose, sinon qu’il est probable qu’un être intelligent et supérieur a préparé et façonné la matière avec habileté; mais je ne peux conclure de cela seul que cet être ait fait la matière avec rien, et qu’il soit infini en tous sens. J’ai beau chercher dans mon esprit la connexion de ces idées: « Il est probable que je suis l’ouvrage d’un être plus puissant que moi, donc cet être existe de toute éternité, donc il a créé tout, donc il est infini, etc. » Je ne vois pas la chaîne qui mène droit à cette conclusion; je vois seulement qu’il y a quelque chose de plus puissant que moi, et rien de plus."

mardi 5 avril 2016

LIBERTÉ (21) ET CROYANCE

Il s'agit du deuxième volet de mon étude sur la liberté : tout ce que j'ai écrit dans les articles à propos du thème "liberté et connaissance de soi" se réfère au choix de valeurs effectué par le crible de l'outil-raison ; il se pose alors la question de savoir si cette méthode peut s'appliquer au système des croyances ? 

Pour répondre à cette question, il est nécessaire d'abord de distinguer entre raison et croyance : Emmanuel Kant traite, entre autre, de ce thème dans la " critique de la raison pure", il est possible de donner un résumé simplifié de ses grandes théories :

   - La méthodologie de la raison est utilisable pour la connaissance d'un phénomène objectivement décelable par l'expérimentation pour qui il est possible d'appliquer les "concepts à priori" (causalité, quantité, qualité...) afin d'élaborer une loi générale ; par contre, la croyance ne repose sur aucun objet physique, elle dépasse ce stade pour accéder à ce qui est au-delà de la physique, la métaphysique transcendantale qui comporte, selon Kant, Dieu, le monde et l'âme. cette différenciation  fait qu'il  existe une barrière infranchissable entre raison et croyance.

     - la raison humaine tend à dépasser cette barrière en établissant des théories métaphysiques d'autant plus générales qu'elles sont sans fondement objectifs. La démarche métaphysique s'effectue à l'inverse de celle que l'on peut appliquer au niveau du monde sensible par l'outil-raison. Dans celui-ci, on part de l'expérience pour établir des lois générales ;  par contre dans la métaphysique, on crée ex-nihilo  une théorie générale et on tente ensuite de rechercher si elle pourrait posséder des fondements. (Dialectique transcendantale)  En ce sens, Kant est aux antipodes de la pensée de Descartes qui part de la notion d'idées claires, distinctes et universelles pour conclure à l'existence de Dieu en tant que démiurge de ces idées claires.

     - la philosophie transcendantale ne porte donc pas sur des objets de connaissance, elle n'est pas une science, ne produit pas de connaissances objectives et n'accroît pas notre savoir.

     - pour adhérer à de tels systèmes transcendantaux, il faut accomplir une double démarche, celle de la foi qui permet de croire à ces systèmes sans fondements objectifs et celle de la liberté qui permet de choisir entre ces systèmes celui qui parait le mieux correspondre à soi.

dimanche 3 avril 2016

LA LIBERTÉ, FRUIT DE LA CONNAISSANCE DE SOI (21)

CONCLUSION SUR LA LIBERTÉ PAR LA CONNAISSANCE DE SOI

De ce qui précède, on peut conclure que la liberté ontologique ne peut s'obtenir que par la connaissance de soi et par l'introspection qui permet seule cette connaissance afin d'accéder aux "  bons casiers " selon la métaphore qui m'a servi de fil conducteur. La voie royale est celle qui mène au "casier de l'être" mais pour y accéder, un long chemin est nécessaire car il faut d'abord de détourner du "casier du paraître " en évitant les divers embranchements qui conduisent aux " casiers des alibis et faux-semblants". Une fois que ce tri est terminé, l'être humain est libre puisqu'il sait pourquoi il agit.

Pour accomplir ce voyage en soi, il n'est besoin que d'un véhicule : la raison et le raisonnement logique seront au volant,  le courage  servira de carburant et la volonté de pilote. Dans notre société, c'est le carburant qui manque : peu de gens ont le courage d'aller jusqu'au bout d'eux-mêmes, ils préfèrent tirer à eux le manteau des apparences, ce qui leur permet de refuser cette évidence de leur esclavage de fait.

La  connaissance de soi ne mène pas nécessairement à la sagesse comme l'indique Platon : l'être en soi constituant ses valeurs indépendamment des notions de bien et de mal ; par contre elle mène à la liberté en soi.

Enfin, chaque événement extérieur modifie l'être et même peut le remettre totalement en cause, la démarche est donc sans cesse à renouveler Cependant, quand on est habitué, on retrouve facilement le chemin.