REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
. Toutes les citations de mes articles proviennent de recherches sur les sites gratuits sur Internet



Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

mercredi 12 avril 2017

LES CANARIES : impression de voyage (4) ; LANZAROTE

L'ÎLE DE LANZAROTE (suite)

La carte ci-contre montre de façon simplifiée les différentes phases de la construction de Lanzarote et la constitution de deux paysages dominants :

En ROUGE, les massifs volcaniques  anciens du stade du bouclier, ils correspondent à deux périodes d'éruptions successives :
   .   Le premier massif émergé au miocène moyen (entre 14,5 et 13,5 MA) est celui d’AJACHE,  il prend la forme d’un puissant massif volcanique s’élevant au-dessus d’un substrat sédimentaire sous-marin.
   .  Après 3 millions d’années d’inactivité volcanique, alors que le massif d’Ajache s’est lentement érodé, naît au nord de l’île actuelle un autre massif volcanique, celui de FAMARA, (miocène-pliocène entre 10,2 et 3,8 MA) ; à ce moment, il existe deux îles séparées par un bras de mer ainsi qu’un massif appelé Tlas (miocène supérieur 6,5-5,7 Ma)

Ces massifs sont si érodés que la partie visible actuellement ne se présente que comme de lourdes crêtes entaillées par les vallées.

 En VERT, les paysages constitués le long du Rift correspondent  en géologie à la phase  de régénérescence ; ils vont relier les deux boucliers  primitifs et se présentent sous deux aspects :
     . Des formes anciennes (VERT CLAIR) du pléistocène constituant la majeure partie de la structure de la partie centrale de l’île.
     . Des formes récentes (VERT FONCÉ) nées des deux dernières éruptions qui se produisirent pour l’une, à l’aube de l’humanité, (massif de la CORONA), et pour l’autre entre 1730-36 puis en 1824 (massif de TIMANFAYA)

Ces éruptions, même les plus récentes,  n’ont pas créées de montagnes. L’explication réside dans leurs  modes de constructions  qui prirent  deux formes particulièrement bien visibles sur les deux photos ci-dessous du parc de Timanfaya :

    . De grands épanchements de laves basaltiques très fluides de type hawaïen qui, de ce fait,  s’étalèrent sur de longues distances en agrandissant la superficie de l´île sans en augmenter l’altitude,
   . A ces épanchements de lave s’ajouta simultanément  la création de cônes volcaniques sur la ligne de Rift témoignant d’une activité volcanique de type strombolien avec projection de scories et de cendres. Ces cônes volcaniques évoluèrent ensuite en petites caldeira qui agrandirent le cratère primitif.

Ce sont ces deux dernières éruptions qui créent, selon moi, les plus beaux paysages et qui, à eux seuls méritent une visite de Lanzarote.

lundi 10 avril 2017

LES CANARIES : impression de voyage (3) LANZAROTE

L'ÎLE DE LANZAROTE

L’ile canarienne de Lanzarote est une des plus surprenantes des Canaries en ce sens qu’elle est aux antipodes des clichés auxquels on relie habituellement l’archipel : lieu de vacances idylliques, association de plages et de hautes montagnes verdoyantes, luxuriance de la végétation...Aucun de ces clichés ne s’applique à Lanzarote.

Ce qui frappe de prime abord, c’est l’aridité qui règne dans l’île. Il pleut 200 mm d’eau par an alors que la moyenne des précipitations à Tenerife est  de 992 mm. Cette aridité se remarque partout, une maigre steppe jaune pousse dans les endroits qui ont assez de terre pour permettre sa présence. Autrefois, les habitants devaient se contenter de ces maigres ressources en eau prenant la forme de pluies d’hiver grâce à des citernes mais aussi grâce à  l’apport d’eau transportée par bateaux-citernes venus des autres îles macaronésiennes.

Ce faible apport d’eau fut compensé par la construction d’usines de désalinisation consécutives aux projets de développement du tourisme et des stations balnéaires, il fallait en effet beaucoup d’eau pour emplir les piscines, entretenir les  pelouses et pour répondre aux exigences des vacanciers !

Désormais, Lanzarote peut pratiquer une agriculture irriguée qui met d’ailleurs en péril les anciennes pratiques culturales traditionnelles comme on le verra plus loin.

Cette aridité est due au fait du faible relief, Le point culminant de l’île est à 670 m alors que le Teide de Tenerife culmine à 3718 m. Dans tout l’archipel des Canaries, les pluies sont apportées par les alizés, des vents constants soufflant du Nord-Est au Sud-Ouest et traversant l’Atlantique pour gagner les îles antillaises et la côte américaine. Ces vents se chargent d’eau sur l’océan ; lorsqu’ils doivent s'élever du fait du relief, ils « s’allègent » déversant leurs pluies sur les versants qu’ils rencontrent. A Lanzarote, la faible altitude du relief n’accroche pas les alizés qui se contentent de passer sur l’île sans guère y prodiguer  leurs pluies.

La faible altitude générale peut paraître surprenante pour une île volcanique. On pourrait certes  penser que l’île est si ancienne que les volcans ont été tant érodés et qu’il n’en reste que des reliefs résiduels ; ce n’est pas le cas puisque la dernière éruption volcanique a eu lieu au début du 18ème siècle !  Pour expliquer ce paradoxe, il convient de s’intéresser à l’histoire géologique de l’île.

À suivre...

samedi 8 avril 2017

LES CANARIES : impression de voyage (2) L’HISTOIRE GÉOLOGIQUE DES CANARIES

Suite de l'article précédent

Aux Canaries, le phénomène du volcanisme de point chaud  est plus complexe que celui décrit pour l’île de La Réunion  du fait du déplacement lent de la lithosphère (entre Hierro et Lanzarote, 1,8cm par an contre 10cm par an dans le nord-ouest du Pacifique).

Les deux premières phases sont semblables à ce qui est indiqué dans l’article précédent à ce propos  :
     .1- création d’un volcan immergé puis émergé à l’aplomb du panache mantellique ; la montée  du matériel mantellique peut se produire selon deux modalités :
          . S’il rencontre une faille préexistante, il se fraie un chemin par cette faille (Rift longitudinal), c’est le cas à Lanzarote,
          . S'il ne se trouve pas de failles préexistantes, il se produit un bombement qui crée un Rift à trois branches comme à Tenerife et la Palma.

Le déplacement lent de la lithosphère fait qu’il se forme plusieurs volcans proches l’un de l’autre. Ceux-ci forment la structure de base de l’ile que l’on appelle BOUCLIER : ainsi, Lanzarote comporte deux de ces volcans-boucliers, Tenerife,  trois.

     . 2- le déplacement de la lithosphère éloigne lentement l’île de l’aplomb du point chaud, l'alimentation moindre de la chambre magmatique fait que la partie sommitale s’effondre créant une vaste caldeira quasiment circulaire.

   . 3 - La phase suivante est particulière  aux Îles Canaries due à nouveau au fait de la lente progression de la lithosphère : il se produit encore des remontées périodiques  de magma qui continuent à s’élever par les anciens conduits jusqu’à la faille et constituent de nouveaux complexes volcaniques alignés selon cette faille.

Cette phase est appelée «phase de régénérescence » par les géologues. Cette caractéristique explique par exemple que Lanzarote, bien qu’éloigné du point chaud, a subi sa dernière éruption importante au 18ème siècle. (1)

La carte ci-dessous comporte les trois types de paysages existants  émanant de cette construction géologique :
 
  . En ROUGE, les massifs, appelés boucliers,  créés à l’aplomb du panache mantellique lors de l’émergence des îles, ils forment le socle de l’île mais il n’en apparaît au niveau du sol actuel qu’une faible partie, le reste avant été recouvert par des éruptions ultérieures. Ces massifs ont subi une forte érosion en sorte qu’ils se présentent comme de lourdes crêtes entrecoupées de vallées. Parfois, comme à Lanzarote, une partie de ces massifs se sont effondrés dans l’océan.

   . En ORANGE, les formes ultérieures de création de  stratovolcan à caldeira qui peuvent correspondre à plusieurs phases volcaniques successives avec toujours le même scénario d’évolution : création d’un stratovolcan, effondrement de la partie sommitale avec formation de caldeira, nouvelle éruption volcanique qui recouvre la caldeira primitive et, à son tour, crée une caldeira.

   . En VERT, les reliefs formés à partir des rifts, ils prennent la forme de petits cônes volcaniques alignés sur la faille avec, de part et d’autre, de longues coulées de lave basaltique. Ces reliefs correspondent en géologie à la période dite de régénérescence.

Cette carte des paysages dominants permet aussi de mesurer les degrés d’évolution du volcanisme des Canaries avec les îles anciennes comme Lanzarote et Fuerteventura qui en sont à la phase de régénérescence et les îles les plus récentes comme La Palma et Hierro qui en sont seulement à la phase de constitution des boucliers ( phase de bouclier actif)

Cette classification schématisée que j’ai établie suite à la lecture de nombreux ouvrages scientifiques, me servira à la description des trois îles de Lanzarote, Gran Canaria et Tenerife.

Note 1
Les géologues utilisent une classification plus complexe avec cinq phases :
     . Phase de création du bouclier sous-marin avec principalement des basaltes,
     . Phase du bouclier actif
          . Stade du bouclier immergé qui diffère du précédent par une augmentation du débit des éruptions
          . Stade d’émersion
          . Stade du bouclier émergé
     . Stade final d’activité
     . Stade de régénérescence.

jeudi 6 avril 2017

LES CANARIES : impression de voyage (1) L’HISTOIRE GÉOLOGIQUE DES CANARIES



L’histoire géologique des îles Canaries est encore l’objet de nombreuses supputations de la part des géologues qui émettent ou ont émis  de diverses hypothèses à son propos.

Les dernières synthèses établies font état de l’interaction d’un point chaud et du déplacement lent de la plaque lithosphérique  africaine. Elles se basent sur une analyse de l’âge des roches volcaniques qui composent essentiellement ces îles et fait état d’une construction étalée dans le temps : les îles orientales sont  les plus anciennes (Lanzarote et Fuerteventura,),   les îles les plus récentes étant les îles de La Palma et El Hierro. Cette évolution est synthétisée par les croquis ci-dessous.


Avant de décrire  la manière dont se produit cette conjonction entre point chaud et déplacement de la plaque africaine, il convient de définir par des mots simples ce que sont les deux alternatives de la conjonction la lithosphère et le point chaud.

   . La lithosphère est la partie supérieure du manteau, elle comporte deux niveaux : la croûte terrestre solide et la lithosphère mantellique  (couche supérieure externe du manteau) qui se comporte comme un solide élastique (type bonbon mou)
    . Entre la croûte terrestre et la partie mantellique de la lithosphère se trouve la  discontinuité de Moho qui réside en une différenciation des roches et fut détectée par une irrégularité des ondes sismiques.
   . La croûte terrestre est composée de granite et roches sédimentaires (croûte continentale) et de basalte (croûte océanique) alors que la partie mantellique se comporte essentiellement de péridotite (olivine). Il existe aussi une différence de pression entre la croûte  terrestre et la lithosphère mantellique ( 2,8 t/m3 pour la première et 3,3 t/m3 pour la seconde)
     . La croûte terrestre se décompose entre croûte océanique peu épaisse (~7km) alors que la croûte continentale l’est beaucoup plus. La croûte continentale se comporte à la manière d’un iceberg : à la partie  émergée correspond une partie immergée selon le principe d’Archimède
     . Sous la lithosphère, se trouve une nouvelle couche du manteau appelée asthénosphère (jusque 670 km). Elle est également composée d’olivine mais du fait de la pression et de l’élévation de la température, elle réagit comme un solide déformable. Le passage  entre lithosphère et asthénosphère a été déterminé à l’isotherme 1350°. Une autre différence entre la lithosphère et l’asthénosphère est celle de leur densité : 3,3 t/m3 pour la lithosphère et 3,2 pour l’asthénosphère.
   
UN POINT CHAUD
.    . Il naît de la présence inhabituelle de matériel mantellique profond à la base de la lithosphère. Cette remontée s’effectue sous la forme d’un panache mantellique (en rouge), la densité de ce panache étant, en effet, inférieure à celle des terrains traversés. Sa chaleur provoque une fusion partielle à la base de la lithosphère, le matériel mantellique s’étend en superficie mais aussi, du fait de sa chaleur,  progresse vers la surface ; les  flux de chaleur  rendent  la lithosphère moins élastique, ce qui provoque une cassure qui crée un volcan.
.    . Un panache mantellique reste fixe alors que la lithosphère  qui se trouve au-dessus se déplace ( dérive des continents).
     . Cette caractéristique fait que le déplacement de la lithosphère va créer une chaîne de volcans alignés comme le montre le dessin ci-dessus qui reprend schématiquement la situation de La Réunion :
          . 1- phase de création du volcan lorsqu’il se trouve à l’aplomb du point chaud          
          . 2- le déplacement du point chaud crée un nouveau volcan, l'ancien volcan subit l’érosion avec effondrement sommital (caldeira) et latérale ( création de vallées torrentielles qui découpent les flancs du volcan et constituent des planèzes)

lundi 3 avril 2017

… SOUVENIRS DES ANNEES 1950-60 : l’école publique (16), conclusion

Suite de l’article précédent

Au terme de cette évocation de l’école primaire de mon enfance, je voudrais, en conclusion,  rappeler les trois caractéristiques qui m’ont principalement marqué :
   . En premier lieu, je citerai le sérieux de l’enseignement dispensé par les instituteurs, ils croyaient à leur mission et faisaient tout pour la mener à bien, ils mettaient en avant la laïcité tolérante de l’école, croyaient aux valeurs de la République, et avaient le  sens aigu du service  public.
  . En second lieu, je soulignerai à nouveau l’efficacité des méthodes pédagogiques au niveau de l’acquisition des connaissances, comme à celui de l’éducation civique qui donnaient aux jeunes les moyens de s’agréger à la société de leur époque et à ses valeurs démocratiques  ainsi qu' au monde du travail.
   . Enfin, il m’est apparu la profonde inégalité qui existait entre les enfants du peuple et ceux des nantis dont l’éducation suivait des filières parallèles même si, comme je l’ai écrit plus haut, il existait des possibilités pour les enfants du peuple d’accéder à l’université. Cette inégalité a été heureusement supprimée à partir de la loi Haby de 1975 qui a créé le collège pour tous, c’est à partir de ce moment qu’enfin été véritablement démocratisée l’école de la République.

PROCHAINE SÉRIE D'ARTICLES : LES CANARIES, impressions de voyage

samedi 1 avril 2017

… SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-60 : l’école publique (15)

Suite de l’article précédent

LES POSSIBILITÉS DE POURSUIVRE DES ETUDES

Pour terminer cette série d’articles à propos de l’école publique des années 1955-60, je voudrais préciser les possibilités ayant existé à cette époque de pouvoir continuer des études générales après l’école primaire. C’est au niveau du CM2 qu’existait cette possibilité. À mon époque, l’examen d’entrée en 6ème  avait été supprimé et c’était soit l’instituteur qui proposait aux parents de permettre aux enfants de poursuivre leurs études, soit les parents qui demandaient à l’instituteur d’envoyer leurs enfants vers des études secondaires.

A la campagne, il existait des cours complémentaires qui menaient de la 6ème à la 3ème avec passage à l’issue de la 3ème du BEPC (brevet d’études du premier cycle) ; à la ville, deux structures étaient susceptibles d’accueillir les enfants sortant de l’école primaire, les collèges et les lycées. Les collèges, en théorie, comme les cours complémentaires, accueillaient les enfants de la 6ème à la 3ème mais il existait des collèges qui permettaient d’aller jusqu’en terminale. Les lycées menait les jeunes jusqu’au baccalauréat avec possibilité de poursuivre à l’université.

Les enfants provenant des classes populaires et fréquentant l’école primaire n’allaient généralement que très rarement au lycée : il ne fallait pas mélanger les classes sociales, en rassemblant dans une même structure les enfants de bourgeois et de nantis aux enfants du peuple ! D'ailleurs, un enfant du peuple n’avait pas à espérer poursuivre des études longues ; après la 3ème, il pouvait certes poursuivre des études mais c'était le plus souvent dans un collège technique s'il n’était pas directement versé  dans le monde du travail. En conséquence, on ne trouvait que très peu d’enfants des classes populaires à l’université.

A l’issue de la 3ème des collèges, il existait une ultime porte de sortie pour les jeunes désirant poursuivre leurs études hors des lycées en passant le concours d’entrée de l’école normale d’instituteurs. Les élèves-instituteurs passaient quatre ans à l’école normale, trois ans pour passer le baccalauréat puis un an de formation, Ils étaient internes, étaient totalement pris en charge par l’état et recevaient même un salaire ;  une partie était donnée chaque mois en argent de poche, le reste était gardé par l’école pour constituer un pécule qui permettait, à l’issue de l’année de formation de s’établir matériellement là où ils seraient nommés. A l’issue de la classe de terminale, les normaliens étaient orientés  vers une formation soit pour devenir instituteur, soit pour devenir PEGC (professeur d’enseignement général de collège). En échange de ces avantages, les normaliens n’avaient que deux contraintes : réussir le baccalauréat et s’engager à servir pendant cinq ans minimum dans l’éducation nationale.

Ainsi, pour les classes populaires, fonctionnait un circuit complet : école primaire, collège et cours complémentaires, école normale qui formait des enseignants pour les écoles primaires et les collèges.

vendredi 31 mars 2017

…SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-1960 : l'école publique (14)

Suite de l’article précédent

Un autre contraste entre l’école d’autrefois et l’école actuelle réside dans le respect par les élèves de la DISCIPLINE, cela tenait à deux causes :
   . L’instituteur et surtout le directeur d’école étaient considérés, en particulier dans les villages, comme une notabilité tout comme le maire et le curé ; en outre, le fait qu’il soit aussi souvent secrétaire de mairie ajoutait encore à la considération dans laquelle les gens le tenait.
   . Nul ne remettait en cause l’autorité de l’instituteur ; s’il donnait une punition, non seulement elle était considérée comme bien fondée mais en plus, elle était souvent doublée par les parents.

De là à proclamer qu’une discipline parfait existait serait un leurre ! Il existait dans toutes les classes des élèves chahuteurs ou bavards qui n’écoutaient pas le maître ou parlaient sans lever le doigt, interrompant les autres où le maître. De même, parmi les élèves de classe de fin d’études, il y en avait qui attendaient impatiemment leurs 14 ans pour s’en aller ; la plupart avait déjà trouvé un travail ou  un apprentissage,  ils savaient qu’ils n’auraient pas leur certificat d’études du fait de leur trop  faible niveau ; en conséquence, il ne se gênaient pas pour défier le maître !

mercredi 29 mars 2017

… SOUVENIRS DES ANNEES 1950-60 : l’école publique (13)

Suite de l’article précédent

LE CLASSEMENT DES ÉLÈVES
Dans les petites classes, quand on avait bien travaillé, le maître distribuait des bons points. Quand on en avait dix, on les échangeait contre une image que l’on était tout fier de montrer aux parents ; cette pratique ne se produisait évidemment pas en cours moyen 2 qui est l’objet de mon évocation.

Outre le cahier du jour, le cahier du soir et les cahiers utilisés pour les différentes disciplines, il existait un dernier cahier, le cahier mensuel. Tous les mois en effet, avaient lieu des compositions qui permettaient au maître d’évaluer les élèves. Je ne me souviens pas bien de la teneur de ces compositions  ; elles devaient comporter au moins une dictée, une rédaction, des questions de grammaire et des problèmes de calcul. Chaque exercice état annoté par le maître et noté de manière à donner lieu à une évaluation finale permettant de déterminer le classement des élèves. Le cahier mensuel était ensuite remis aux parents pour signature ; les parents regardaient les notes mais surtout le classement car il leur permettait à la fois de mesurer l’évolution des résultats et les progrès accomplis, de connaître les points forts et les points faibles de leur enfant et de le positionner par rapport aux autres élèves de la classe.

Les résultats mensuels étaient collationnés par le maître et se traduisaient par un classement annuel qui déterminait le redoublement où le passage dans la classe supérieure et servait à la cérémonie de la distribution des prix. Celle-ci était organisée pour l’ensemble de l’école dans une salle municipale en présence du maire de la commune. Tous les instituteurs étaient présents ; sur la table,  se trouvaient de grandes piles de livres. Les parents et les élèves étaient évidemment invités à participer à la cérémonie.  Chaque maître prenait la parole et proclamait les résultats. A l’annonce de son nom, le lauréat s’avançait, montait sur l’estrade et recevait son prix.  Il est évident que l’élève ainsi récompensé, tout comme ses parents, étaient très fiers. Les livres reçus en prix étaient des livres d’auteurs adaptés au niveau des enfants. Dans mon école, il existait une particularité à propos de ces livres, les enfants de prisonniers de guerre  ou d’anciens combattants recevaient de plus beaux livres que les autres avec une belle brochure de couverture rouge.

On a souvent proclamé que ces classements des élèves ainsi que la distribution des prix étaient traumatisants pour les enfants, en particulier pour les derniers de la classe. A mon avis, ce système était beaucoup moins traumatisant que celui qui consiste à dire aux élèves actuels : «tu as de trop de mauvaises notes, tu ne seras pas orienté comme tu le souhaites » et qui établit une sélection par l’échec. Les classements avaient pour mérite de stimuler l’élève et de le conduire à progresser ne serait-ce que pour échapper au mécontentement des parents, mais aussi de lui donner une connaissance claire de son niveau dans la perspective de son avenir professionnel. D’ailleurs, à notre époque, il existe un paradoxe surprenant : le seul endroit où il n’existe pas de classement est le système éducatif, tout le reste de la société s’acharne à le pratiquer : dans l’entreprise, dans les sports et même dans les télé-réalités !

à suivre