REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
. Toutes les citations de mes articles proviennent de recherches sur les sites gratuits sur Internet



Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

mercredi 4 septembre 2019

LA TAPISSERIE DE BAYEUX, témoignage de la vie et des mentalités au 11e siècle (4)

 LES PHASES DE L’HISTOIRE DE L’ANGLETERRE ANTÉRIEURES À 1066 (suite)

L´HEPTARCHIE

La carte suivante présente la situation au tout début du 9è siècle, un peu avant les invasions vikings.

En Angleterre, il s’est  produit un regroupement des petits états saxons primitifs en sept royaumes (l’Heptarchie) :
   . Les saxons ont constitué trois  royaumes : le SUSSEX (saxons du sud), l’ESSEX (saxons de l’est), le WESSEX, (saxons de l’ouest)
   . Les Angles ont fondé trois royaumes : l’EAST ANGLIE, la MERCIE, la NORTHUMBRIE (royaume résultant de la fusion entre deux états plus anciens, la BERNICIE et le DEIRA)
   . Le KENT forme le dernier de ces états aux mains des Jutes.

Cette répartition est plus théorique que réelle car il se produisit de nombreux regroupements :
   . A la fin du 8e siècle, Offa, roi de Mercie est qualifié de roi d’Angleterre.
   . De même, au début du 9e siècle, la Mercie contrôle le Kent, le Sussex  et l’Est-Anglie.
   . En 825, Ecqbert, roi de Wessex, soumet la Mercie et le Kent, l’Essex, le Sussex puis ajoute le Northumbrie à son domaine. La Cornouailles devient aussi vassale du Wessex. (1)


(1) NOTE COMPLÉMENTAIRE
Au nord de l’Angleterre, dans l’actuelle Ecosse apparaissent trois ensembles restés bretons :
   . Les territoires des Pictes.
   . Le royaume de Dalriada aux mains de Scots venus d’Irlande.
   . Le Strathclyde..

lundi 2 septembre 2019

LA TAPISSERIE DE BAYEUX, témoignage de la vie et des mentalités au 11e siècle (3)

 LES PHASES DE L’HISTOIRE DE L’ANGLETERRE ANTÉRIEURES À 1066 (suite)

LES INVASIONS GERMANIQUES (5è et 6è siècle)

Au tout début du 5è siècle, quand le limès rhénan céda sous la pression des peuples germaniques, les légions romaines évacuèrent la Bretagne. Les tribus celtes, livrées à elles-mêmes, s’organisèrent en petits royaumes indépendants. Ces royaumes durent affronter, comme à l’époque précédente, les incursions des Pictes, des Scots et des Saxons. Pour les combattre, certains chefs locaux firent appel à des guerriers germaniques à qui ils donnèrent des terres contre leur service mercenaire selon le statut de foederati utilisé à l’époque romaine.

Selon les chroniques de Bede le vénérable, ce serait en 446 que se produisit la première installation de guerriers germaniques venus du Jutland. Ceux-ci décidèrent de fonder un état : ainsi naquit, en 475 dans le Kent, un premier état germanique. La résistance des bretons (en particulier sous la conduite du légendaire roi Arthur) ne suffit pas à endiguer la deuxième vague d’invasion survenue au 6e siècle et la conquête de l’Angleterre par ceux que l’on qualifie du terme générique de Saxons. C’est ce que présente la seconde carte qui montre la situation des Îles Britanniques vers 600.

Trois aires de domination de peuples germaniques apparurent :
   . Les Jutes, au préalable installés dans le Kent, ont conquis l’île de Wight et son arrière-pays.
  . Les Angles venus de l’actuel Schleswig-Holstein s’emparèrent de la partie Nord-est de l’Angleterre.
   . Les saxons originaires de l’actuelle Frise orientale conquirent la partie Sud-Est de l’Angleterre.

Ces conquêtes, sauf dans le Kent où fut préservé l’héritage romain, aboutirent à une destruction systématique de la civilisation romaine tant au niveau des villes qu’à celui des églises et monastères. Les bretons-celtes qui voulaient rester indépendants se réfugièrent dans des contrées plus difficilement accessibles du Pays de Galles et de la Cornouailles, d’autre même quittent la Bretagne insulaire pour s’installer sur le continent en Armorique (Bretagne française actuelle). Il est cependant probable que la majorité des bretons sont restés sur place et, peu à peu, s’assimilèrent aux anglo-saxons.

Prochaine article : l'HEPTARCHIE

samedi 31 août 2019

LA TAPISSERIE DE BAYEUX, témoignage de la vie et des mentalités au 11e siècle (2)

LES PHASES DE L’HISTOIRE DE L’ANGLETERRE ANTÉRIEURES À 1066

Selon moi, il est impossible de comprendre les événements décrits dans la tapisserie de Bayeux sans connaître les circonstances historiques qui y ont présidé. La bataille d’Hastings est, en effet,  l’aboutissement d’un long processus qui vit l’intervention successive des peuples celtes puis des romains, des saxons, des danois et des norvégiens.

Pour effectuer cette description essentiellement événementielle, je me baserai sur plusieurs cartes que je commenterai.

L'EPOQUE ROMAINE

Au moment de la conquête romaine à l’époque de l’empereur Claude, les Îles Britanniques  sont peuplées par des celtes que l’on qualifie du nom générique de bretons. . ils sont regroupés, comme en Gaule, en tribus. Seule une partie de la Grande-Bretagne actuelle est occupée par les  romains ; la partie septentrionale, peuplée de Pictes,  échappe à leur domination. Pour empêcher leurs incursions vers le sud, les empereurs ont successivement fait construire deux murs défensifs : le mur d’Hadrien et le mur d’Antonin.

La carte présente la situation au Bas-Empire  avec deux évolutions majeures :
    . A l’époque de Septime-Sévère,  le mur d’Antonin a été abandonné et la défense de la Bretagne romaine s’est établie au mur d’Hadrien.
    . Lors de la réorganisation administrative de Dioclétien, la province de Britannia a été scindée en quatre afin de mieux lutter contre les Pictes mais aussi contre les Scots d’Irlande et les pirates saxons.

À cette époque, la Grande Bretagne est donc divisée en trois domaines de civilisations :
   . Les tribus septentrionales non romanisées.
   . Les tribus localisées entre les deux murs partiellement romanisés.
   . Les tribus celtes romanisées de l’Angleterre et du pays de Galles actuels.

Prochain article : LES 5è ET 6è SIÈCLES

jeudi 29 août 2019

LA TAPISSERIE DE BAYEUX, témoignage de la vie et des mentalités au 11e siècle (1)

PRÉSENTATION

LA TAPISSERIE DE BAYEUX (ou plutôt la broderie de Bayeux) raconte, sous la forme d’une bande dessinée, les prémices et l’histoire de la conquête de l’Angleterre par Guillaume duc de Normandie et se termine par la description de la bataille d’Hastings en 1066.

Diverses interprétations sont données quant à la datation, à l’origine et au lieu de fabrication  de cette œuvre magistrale qui mesure 68,38 m de long pour 50 cm de haut.
     . La plupart des historiens s’accordent sur le nom du commanditaire, ce serait le demi-frère du duc de Normandie, Guillaume le conquérant, Odon, évêque de Bayeux, devenu comte de Kent après la conquête,  qui est un des rares personnages cités, hormis bien entendu les trois protagonistes principaux, Le roi d’Angleterre, EDOUARD le confesseur, HAROLD et GUILLAUME
    . En ce qui concerne les artistes qui ont brodé l’œuvre, on s’accorde à y voir le travail de l’atelier d’une abbaye ; certains penchent pour l’abbaye de Saint Augustin à Canterbury dans le Kent, d’autres s’accordent sur une abbaye normande.
   . Au niveau de la datation, on peut penser que l’élaboration de la broderie dura au minimum deux ans et qu’elle fut commandée dès la fin de la conquête, ce qui donnerait une datation entre 1067 et 1069.

 La tapisserie de Bayeux présente un grand intérêt à trois points de vue :
   . Au niveau historique, il montre un événement d’importance qui orientera largement l’histoire médiévale de l’Europe : la conquête de l’Angleterre par le duc de Normandie, Guillaume. Pourtant, le récit de cette conquête sur la tapisserie présente uniquement le point de vue normand ce qui relativise son témoignage.
   . Au niveau de la reconstitution de la vie quotidienne et des mentalités, elle révèle un tableau exhaustif de la société de l’époque.
   . Au niveau des techniques artistiques qu’elle révèle.

prochain article : LES PHASES DE L'HISTOIRE DE L'ANGLETERRE AVANT 1066

lundi 1 avril 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (35) : LICHTENBERG

Le château de Lichtenberg avant la « rénovation » de la fin du 20è siècle

Depuis la destruction du château lors du bombardement de 1870, le château fut abandonné  et les ruines restèrent tels quelles pendant plus d’un siècle.

La photo, ci-dessous, montre l’état du château avant sa rénovation, on y retrouve, quasiment inchangé, l’aspect  de la forteresse tél que je l’ai décrite sur le plan de l’époque de Louis-Philippe :


   1 la demi-lune de la porte d’entrée.
   2 le rempart et la falaise qui le supporte.
   3 le fossé.
   4 le chemin couvert.
   5 le débouché du tunnel permettant d’entrer au château.
   6 les ruines du logis renaissance.
   7 les casernes.
   8 l’emplacement du réfectoire.
   9 le chœur de la chapelle
  10 l’emplacement du logis construit par Conrad de Lichtenberg dont il ne subsiste que la tour de l’horloge et les caves.
  11 le haut-château, il n’en reste que la grosse tour Ouest, adaptée à l’artillerie par Daniel Specklin. L’autre tour a disparu, sans doute depuis le 18è siècle.
  12 le puits surmontant la citerne.
  13 l’arsenal construit par Daniel Specklin.
  14 les casemates d’artillerie.

Ces deux photos prises dans les toutes premières années du 20è siècle, montrent l’état de la ruine à cette époque :

Au premier plan, se trouvent les murs éventrés des casernes ainsi que les ruines du logis renaissance reconnaissable à ses fenêtres en œil-de-bœuf et à sa porte surmontée d'un entablement sculpté.  En arrière, se profilent l’imposante tour du haut-château, la chapelle et la tour de l’horloge.

Le romantisme et la poésie de ces ruines a totalement disparu depuis la « rénovation », on se trouve désormais dans un édifice hybride et sans âme dont la visite est, pour moi, amateur de ruines médiévales, sans intérêt.

Mieux vaut se cantonner à admirer le château de Lichtenberg à partir  du village car, c’est de là que l’on peut lui retrouver un semblant d’authenticité.

FIN DU CHAPITRE SUR LES CHÂTEAUX DES VOSGES

vendredi 29 mars 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (34) : LICHTENBERG

La lente déchéance du château au milieu du 19è siècle.

Après la conquête de Lichtenberg par les français, le château fut livré au Génie qui recomposa les bâtiments existants pour les adapter à son nouveau rôle de place de garnison. Le  rapport du capitaine Anselmier  rédigé en 1834,  précise que «  le génie militaire, après avoir fait raser les anciens bâtiments, en construisit de nouveaux .. et ne laissa subsister que le donjon qui s'élève au centre de la plate-forme. »

On dispose, à ce propos, d’un intéressant plan montrant la forteresse à l’époque de Louis Philippe :

Ce plan montre d’abord que les deux  logis seigneuriaux (1)  dominant le rempart sud, ont été démolis. Du logis construit par l’évêque Conrad de Lichtenberg, il ne resta que les caves qui furent reconverties en casemates. Le  plan ne le mentionne pas, mais on laissa subsister aussi la tour de l’horloge convertie en tour de guet.

Le troisième logis (2), celui construit à  l’époque de Philippe de Hanau-Lichtenberg en style renaissance, fut utilisé comme caserne de temps de paix.

Un autre ensemble de bâtiments (3), sans doute anciens, fut reconstruit et servit également de caserne ainsi que de prison. Ces deux casernes pouvaient accueillir une garnison de 60 à 100 hommes.

Il ne subsiste de la chapelle  que le chœur (4), la nef disparut et fut remplacée par un réfectoire (5) assorti de cuisines.

Les autres bâtiments devinrent des magasins :
   . La tour ouest du haut-château (6) fut reconvertie en poudrière contenant, selon le capitaine de Guise, 5 tonnes de poudre.
   . Les anciens communs (7)  furent transformés en magasin du génie.
   . Un autre bâtiment devint le logement de l’artillerie. (8)
   . On peut penser que l’arsenal (9), construit à l’époque de Daniel Specklin, était toujours utilisé en tant que tel.

Je mentionne, sur le plan, pour mémoire, la demi-lune (10) reconstruite par Vauban.

Il  existait aussi d’importantes réserves de nourriture pouvant « contenir, en temps de guerre, 200 hommes avec une manutention pour 200 rations et 200 sacs; caves pour 400 hectolitres. »

En temps de guerre, le capitaine Guise indique que les équipements seraient à compléter : ils ne consistent que dans le couloir d’entrée au château, dans les casemates aménagées le long du rempart sud et dans les caves de l’ancien logis seigneurial, il manque « pour le temps de siège, qu'un abri voûté à l'épreuve pour y mettre à couvert la garnison »

Le livre de M Camille Lévy énumère les compagnies qui composèrent la garnison pendant la monarchie de juillet, elles ne stationnent, en moyenne, que pendant deux années et comportent, selon les cas, de 35 à 73 hommes. Il y a des même des moments où le château est inoccupé au grand dam des aubergistes du village.

Dans de telles conditions, on peut comprendre que le matériel militaire laisse à désirer Ainsi, quand la guerre fut déclarée le 19 juillet 1870, le château était quasiment à l’abandon. Voici ce qu’écrivit le sous-lieutenant Archer affecté au poste de commandant du fort et chargé d’en remettre en état les défenses. «  Je trouvai au fort un petit détachement de 5 hommes du 5e d'artillerie, commandé par le maréchal des logis Fonvielle; ce dernier était arrivé de Strasbourg le 22 juillet avec mission d'y faire les travaux nécessaires afin de pouvoir utiliser, aussi efficacement que possible, les sept vieilles pièces de canon dont le fort était armé.

Dès mon arrivée dans la place, j'en passai une inspection minutieuse pour m'assurer des moyens de défense qu'elle contenait et des travaux qu'il y aurait à exécuter pour la rendre à même d'opposer une résistance des plus sérieuses à l'ennemi dans le cas d'une mauvaise fortune de nos armes, ce que nous ne présumions guère à ce moment-là.

Comme munitions de guerre, je pus m'assurer qu'elles étaient à peu près nulles, si ce n'est 4 tonneaux de poudre à canon, 8 caisses de cartouches chassepot et quelques boulets creux non chargés dont je fus obligé de faire fermer l'orifice au moyen d'un bouchon en bois; une centaine d'obus complétait : encore ces derniers ; sans fusées, (ils) ne pouvaient être utilisés qu'avec des pièces rayées, et celles dont le fort était armé n'étaient que de vieilles pièces à âme lisse, de différents calibres, qui ne pouvaient produire qu'un médiocre effet en présence de la longue portée de l'artillerie ennemie.

Quant aux vivres, le fort ne possédait qu'une trentaine de caisses de biscuits qui étaient arrivées dans la place en même temps que moi. »

Au moment de l’attaque de l’armée wurtembergeoise, la garnison s’élevait seulement à 34 hommes dont six canonniers qui durent affronter l’ennemi avec des pièces ne fonctionnant pas, le 9 août le bombardement commença. Le 10, quand la garnison capitula, le château n’était plus que ruines.

prochain article : que reste t'il de médiéval dans le château de Lichtenberg ?

mercredi 27 mars 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (33) : LICHTENBERG

Le devenir de Lichtenberg après 1678.

A la différence des autres châteaux alsaciens, le château de Lichtenberg ne fut pas détruit: les français décidèrent de l’incorporer dans une ligne de défense frontalière allant de Bitche à Phalsbourg en passant par La Petite Pierre et Lichtenberg. Afin de moderniser ses défenses, on fit appel à Vauban qui visita le château et estima que c’était « un trou bon à raser » il se contenta de reconstruire la tour-porte d’entrée endommagée lors du siège en la remplaçant par une demi-lune possédant le saillant triangulaire conventionnel.

Le nouveau rôle assigné au château
Pendant tout le 19è siècle, les différents rapports rédigés par les officiers du génie en tournée d’inspection à Lichtenberg, montrent le très faible intérêt de la forteresse ; voici, ci-dessous, quelques extraits d’un rapport rédigé par le capitaine Guise en 1827 :

Il fait d’abord état d’un projet de route militaire entre Phalsbourg et Bitche, or Lichtenberg « ne se trouve ni sur ces communications  ni sur un débouché des Vosges. Cet éloignement de ces routes et de ces débouchés fait que l'on regarde ce fort comme ne pouvant servir à (la) défense directe (de la frontière) »

Pourtant, écrit le capitaine Guise, le château de Lichtenberg peut être doublement utile :
     . Il peut servir de « poste d’observation » du fait qu’il se trouve à 8 km en avant de la route militaire projetée.
     . Il peut servir de base de repli si la frontière était enfoncée : une armée  ennemie en pleine marche vers le centre du pays, ne pourrait, en ce cas, laisser un fort à son arrière dont la garnison pourrait harceler ses convois et son arrière-garde, celle-ci devraient stopper son offensive, le temps de prendre Lichtenberg, ce qui permettait aux armées françaises de se réorganiser.

Voici ce qu’écrit le capitaine Guise à ce propos «  Si l'on organise un corps de partisans destiné à couper les  communications que l'ennemi tenterait d'établir dans ce voisinage,…alors ce fort devient un intéressant poste d'observation pour ces partisans embusqués sous son canon pour se porter à l'improviste sur les convois de l'ennemi; il leur sert en même temps d'excellent appui si, dans leurs excursions, ils viennent à être poursuivis, en courant chercher leur salut sous les murs de ce château, dans le chemin couvert duquel ils trouveront un asile à l'abri…  par la protection des feux d'artillerie du fort, et où ils trouveront à renouveler leurs munitions, du secours pour leurs blessés et un lieu de dépôt pour leur butin.

« C'est sur ce rôle que doit jouer ce poste, qu'on basera la mise en état de ses fortifications et les améliorations à proposer, en ne (le considérant)  que comme un accessoire utile au système de défense de la crête des Vosges » la conséquence est sans appel, il ne faut pas «  se jeter dans des dépenses considérables, et de les borner à celles strictement nécessaires pour le mettre en état de rendre les services que l'on en attend ».

A suivre.

dimanche 24 mars 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (32) : LICHTENBERG

Le siège de 1678.

Afin de se trouver en position de force lors des négociations préliminaires à la paix de Nimègue, (voir article précédent), Louis 14 envoya une armée commandée par le maréchal de Créqui, ayant pour mission de lancer une offensive vers le Rhin. Cette offensive se porta sur Strasbourg, elle échoua, à la fois devant  la forte résistance des Impériaux et aussi à cause des difficultés d’approvisionnement de l'armée dues aux attaques et au pillage des convois qui y pourvoyaient.

Le maréchal de Créqui décida alors de faire retraite et établit son campement à Wœrth. C’est de Wœrth qu’il ordonna à un fort détachement de son armée de se porter sur  Lichtenberg, pour s’en emparer.

Cette décision du Maréchal peut s’expliquer de deux manières :
   . D’abord, il avait appris que les hommes des Hanau-Lichtenberg s’étaient joints aux Impériaux pour piller un convoi.
    . Pourtant, sa motivation principale était de faire en sorte qu’il n’existe plus en Alsace de places fortes pouvant servir de point d’appui à d’éventuelles résistances contre l’autorité royale. C’est dans cette perspective que la plupart des châteaux féodaux étaient presque systématiquement détruits.

A Lichtenberg, stationnaient une garnison de 300 à 400 Impériaux sous le commandement d’un officier appelé Dolne. Apprenant l’avancée de l’armée royale, il  décida d’incendier la ville située en contrebas du château, afin d'y empêcher l’installation des français, de les priver d’approvisionnement et de détruire les fourrages. En ce qui concerne la défense du château, Dolne estima que la raideur des pentes donnant  accès à la forteresse était telle qu’il suffirait de mitrailler les assaillants lorsqu'ils tenteraient  de donner l’assaut (1).

L’armée royale arriva dans la nuit du 7 au 8 octobre et réussit à s’installer dans la ville imparfaitement incendiée.

L’angle d’attaque fut choisi à l’endroit où s’effectuait la jonction des remparts de la ville et du château, là se trouvait, en effet, des chemins qui pouvaient permettre un assaut. En outre, il est probable que la pente était moins raide qu’ailleurs.

Une attaque fut lancée mais elle échoua. Cela conduisit les français à recourir à une autre solution : celle du sapement de la muraille par les mines. On dispose à ce propos d'un plan précis de la stratégie adoptée.

Trois batteries d’artillerie (A) sont mentionnées sur le plan, elles sont installées en triangle autour des remparts sud de la ville, Ces batteries comportent  chacune quatre canons. Le but des tirs était à la fois de couvrir  les assaillants lors de leur progression vers la paroi rocheuse et aussi d’endommager la muraille en créant des brèches propices à l'assaut.

Une tranchée de circulation (B) est dessinée sur le plan, elle est destinée à relier la batterie nord à un fortin entouré d’une palissade de rondins (C) où devait  se trouver le poste de commandement.

A partir de ce fortin, est représentée à l'ouest une nouvelle tranchée (D)  formant une ligne parallèle au rocher.

Elle s'ouvre sur des traverses (E)  permettant d’accéder au niveau de la paroi. Le plan montre que les traverses se prolongent par des galeries (F) souterraines creusées dans la roche et destinée à la pose de mines sous le rempart principal (signalées par un cercle bleu). L'explosion de ces mines ferait  écrouler le rempart ou au moins en détruire une partie.

Deux galeries (G)  furent également creusées en direction de la tour-porte.

En ce qui me concerne, je considère que ce plan était un projet d'attaque et qu'il ne reçut qu'un commencement de réalisation ; en effet, mener le projet à son terme nécessitait un long siège, or,
dès le 15 octobre, le commandant Dolne, comprenant ce qui se tramait, se rendit vite compte que sa défaite serait inéluctable, il décida alors de capituler et obtint que la garnison entière puisse être conduite  avec armes et bagages jusqu’à Strasbourg.

Comme ceux de Bitche et de  La Petite Pierre, le château de Lichtenberg ne fut pas démoli, il fut décidé d’y établir une garnison française et de l’intégrer dans la ligne arrière de défense du royaume.

Prochain article : Le devenir de Lichtenberg après 1678.

(1) les renseignements donnés proviennent du livre de M Camille Lévi : le bomardemment de Lichtenberg (1870) paru en 1913 ( source : Gallica)