REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
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vendredi 4 décembre 2020

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (9)

LE TRIPTYQUE DU JUGEMENT DERNIER DE BRUGES 

LA PARTIE INFERIEURE DU PANNEAU DE GAUCHE : LE PARADIS. 

La partie centrale et basse comporte successivement de haut en bas :

     . B un paysage apaisé en toile de fond associant des collines, un vaste lac et des forêts  peints en couleur pastel à dominante bleue.

     . C : un édifice composite en forme de tour. Au centre une fontaine comprenant un bassin d’où s’échappent quatre ruisseaux (D), au-dessus, une terrasse à balustrade (E ) comportant quatre gargouilles qui projettent l’eau dans le bassin, enfin, au-dessus de la tour, une terrasse où se trouvent des élus et une sorte de kiosque en fer forgé. Une telle tour était déjà représenté sur le retable de Vienne, on en trouvera aussi une dans le triptyque du « jardin des délices ». 

     . Tout autour de la fontaine et en dessous sont figurées les activités des élus dans le jardin d’Eden : en voici quelques exemples : 

          . (F) : une barque en forme d’aile d’oiseau flotte sur un lac aux eaux bleues, à la proue de cette barque sont représentés quatre anges sonnant de la trompette, au centre de la barque est installée une tente rouge sous laquelle s’abritent de nombreux élus. Devant cette tente, un ange brandit une croix pourvue d’une longue hampe. 

          . (G) : Une fleur renversée sur laquelle est monté un élu cueillant un rameau.

          . (H) : trois élus à genoux écoutant un ange ailé jouer de la lyre, cet ange porte sur la tête un diadème décoré d’une croix.

           . (I) : un gros fruit rouge abrite un grand nombre d’élus assis.

Un peu partout s’éparpillent les élus, les oiseaux et les animaux dont une licorne. 

 

lundi 30 novembre 2020

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (8)

 LE TRIPTYQUE DU JUGEMENT DERNIER DE BRUGES

Il est apparemment plus conforme aux formes habituelles et conventionnelles des triptyques médiévaux, il présente en effet les trois éléments de bases qui les caractérisent : le paradis, le jugement dernier, l’enfer.

 Ce n’est cependant qu’une apparence, en fait, ce triptyque est une parfaite illustration de la pensée dominante au 15e siècle organisée autour du règne de la mort et de l’enfer.

 

L’œuvre se décompose en quatre parties 
   . 1 le paradis
   . 2 le jugement dernier
   . 3 la destruction des œuvres humaines témoignage de la perversité humaine
   . 4 les premiers tourments des damnés sur la terre même 
   . 5 la descente des damnés vers l’enfer représentée par une tour grise. 

LA PARTIE SUPERIEURE DU PANNEAU DE GAUCHE : LE PARADIS. 


  La partie supérieure du panneau de gauche représente une silhouette (A) en grisaille à demi effacée, comme en filigrane, elle figure un personnage assis qui porte une sphère posée sur son genou. Selon moi, il s’agit de Dieu le Père qui se caractérise souvent en tenant un globe figurant la terre qu’il a créée.

La silhouette est dessinée au centre d’un cercle clair se détachant nettement de la corolle de nuages gris qui l’entoure. Devant ce cercle clair volèrent trois anges reconnaissables à leurs ailes déployées. Trois autres anges, figurées en gris sur le fond bleu du ciel volent également vers le cercle clair. 

 La silhouette est dessinée au centre d’un cercle clair se détachant nettement de la corolle de nuages gris qui l’entoure. Devant ce cercle clair volètent trois anges reconnaissables à leurs ailes déployées. Trois autres anges, figurées en gris sur le fond bleu du ciel volent également vers le cercle clair. 

 Cette partie du triptyque pose problème, certains pensent que le peintre aurait voulu effacer la silhouette après l’avoir peinte ; selon moi, ce n’est pas concevable. L’explication de cette étrangeté est peut-être à chercher dans la distinction commune à l’époque de Jérôme Bosch  entre paradis céleste et paradis terrestre. Ainsi, on retrouve le cercle lumineux vers lequel se dirigent des anges dans un polyptyque de Jérôme Bosch appelé « vision de l’au-delà » on y voir des anges mener des élus vers le paradis céleste par un tunnel de nuages.

 

dimanche 22 novembre 2020

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (7)

  LE TRIPTYQUE DU JUGEMENT DERNIER DE VIENNE (suite)

LA PARTIE BASSE DU  PANNEAU DE DROITE.

 Jérôme Bosch y représente, en continuité avec le panneau central, des scènes d’enfer sur terre de ceux que la pesée vient de damner, on retrouve sur les deux panneaux, les mêmes représentations des tortures des damnés.

 Parmi les particularités de ces tourments, on peut citer les deux taches vertes correspondant à un démon crachant le feu (6) à droite et, à gauche, à un gros animal qui porte un pagne (7) et semble avaler des damnés.

La partie la plus importante est située en bas du panneau :

     . (8) Dans la tente de couleur rouge sont rassemblés tous les damnés que les démons ont conduits jusque à cet endroit, Jérôme Bosch y représente des gens en pleurs, un damné essaie de se sauver mais il est implacablement entraîné sous la tente par un démon de couleur noire. Tous manifestent leur angoisse en attendant le sort qui leur sera réservé.

   . (9) Devant la construction pourvue d’une porte sombre qui doit correspondre à l’entrée du monde infernal, se tient un personnage en armure portant un sceptre, on peut penser qu’il s’agit de Satan lui-même. De part et d’autre, se trouvent de nombreux démons qui semblent offrir  deux damnées à ce personnage  ..







 CONCLUSION 

Si on regarde ce triptyque dans son ensemble, on est frappé par le pessimisme et par la face obscure qu’il révèle : chute des anges rebelles, chute d’Adam et Ève qui n’ont pas résisté à la tentation diabolique, damnation de la quasi-totalité de l’humanité vouée aux tortures de l’enfer : on est véritablement dans le règne de la mort et de l’enfer tel qu'on le concevait au 15è siècle: les hommes sont irrésistiblement attirés par le mal, ils viennent d'en subir  les conséquences lors du jugement dernier. 

Ce triptyque possède un rôle pédagogique évident, celle de prévenir les êtres humains du devenir qui les attend s’ils ne se repentent pas de leurs péchés. En ce sens, il me semble incongru de qualifier cette œuvre de burlesque, c’est plutôt l’inverse dont il s’agit.

PROCHAIN ARTICLE :: LE TRIPTYQUE DU JUGEMENT DERNIER DE BRUGES

 

jeudi 19 novembre 2020

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (6)

 LE TRIPTYQUE DU JUGEMENT DERNIER DE VIENNE (suite)

 LA PARTIE BASSE DU PANNEAU CENTRAL

Tous les démons sont représentés de la même manière par Jérôme Bosch, ce sont des créatures difformes et composites, certains ont l’aspect d’humains déformés, d’autres ont pris la forme d’animaux ou de fruits, d’autres associent des corps d’humains et d’animaux, tous sont à la fois hideux et grotesques. On a l’impression que ces démons ont choisi leur costume à la fois pour effrayer les damnés mais aussi pour s’amuser de leur laideur. En ce qui concerne les damnés, ils sont tous nus : selon la conception médiévale, ils sont représentés ainsi après leur résurrection

Les démons arrivent en cortège  par un chemin (S) provenant d’une gorge étroite, et passant au-dessus d’un pont, ils sont précédé d’un char pourvu d’un attelage à quatre roues qu’un démon retient pour ne pas qu’il dévale, un damné et un démon se tiennent sur ce char.

 Juste à côté est représenté un interstice (T) dans la falaise fermé par une trappe rouge, quand elle s’ouvre, un damné est projeté dans le vide puis noyé dans le lac qui se déploie de part et d’autre du pont.


 Parmi les scènes de torture, les plus intéressantes sont situées au niveau inférieur de la partie basse, De gauche à droite on peut voir :

     . (U) Un homme que l’on force à boire un liquide contenu dans un tonneau.

      . (V) une démone qui fait cuire un damnés à la broche, au-dessus d’autres damnés pendus attendent de subir le même sort

     . (W) une démone fait cuire à la poêle un damné qui a été découpé en morceaux

     . (X) un damné, posé sur les branches d’un arbuste, est  découpé, sans doute pour le faire cuire dans la poêle. Le démon se sert d’un damné en guise de monture.

     . (Y) un autre damné va être découpé au moyen d’un grand hachoir par un démon portant un luth

     . (Z) un autre, percé d’une flèche, est  attaché bras et jambes sur une lance. Il servira sans doute de mets dans la cuisine.

 A droite, sont dessinés un démon portant une armure et un bouclier chevauchant un poisson (1), des damnés accrochés ou empalés aux branches d’un arbre en attendant d’être brûlés (2) ainsi qu’un grand couteau (3)

 Enfin, parmi les tortures significatives, on peut aussi citer : la grosse cruche verte surmontée d’un moulin (4) qui sert moudre des damnés, une autre cruche devant laquelle est figurée une roue à aubes mues par un damné (5) …

Il existe encore bien d’autres scènes loufoques ou dramatiques, en sorte que l’on peut être admiratif de l’imagination débordante de Jérôme Bosch mise au service d’une tâche pédagogique : susciter chez ceux qui regardent le triptyque l’horreur du péché et la crainte des tourments infernaux.

 

 

 

 

 

 


lundi 16 novembre 2020

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (5)

LE TRIPTYQUE DU JUGEMENT DERNIER DE VIENNE (suite)

LA PARTIE CENTRALE DU PANNEAU CENTRAL et LA PARTIE HAUTE DU PANNEAU DE DROITE


 
Elle montre  l’état de la terre après que les démons aient investi la terre, toutes les œuvres humaines ont été détruites, seules subsistent des ruines (N), celles-ci sont mis en valeur par le peintre grâce à la couleur jaune ocre des flammes qui ont détruit ces bâtiments. Le sol est de couleur ocre sans végétation.

 Un peu partout dans cette partie centrale, des groupes d’êtres humains (O) sont constitués formant une masse indistincte à peine visible dans l’environnement sombre, sans doute s’agit-il de damnés que l’on rassemble ou de démons qui sortent des profondeurs de la terre pour leur infliger les premières tortures avant de les conduire vers  l’enfer et, Ainsi certains damnés seront pendus au gibet (P) tandis que d’autre sont noyés dans un lac aux eaux noires (Q)

Cette scène de destruction se continue sur LA PARTIE SUPÉRIEURE DU PANNEAU DE DROITE

On retrouve les ruines fumantes, les silhouettes noires qui se rassemblent  ainsi qu’un lac où se noient des damnés et où se trouve un bateau.

A suivre..


 

mercredi 11 novembre 2020

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (4)

LE TRIPTYQUE DU JUGEMENT DERNIER DE VIENNE (suite)

LA PARTIE SUPÉRIEURE DU PANNEAU CENTRAL

Sur la partie supérieure de ce panneau, est représentée la Jérusalem céleste dans une bulle demi-circulaire descendue du ciel au-dessus de la terre. Elle comporte une des scènes habituelles qui compose un jugement dernier médiéval

  


     . (H) Au centre, le Christ portant la tenue de la passion recouverte d’un pagne et d’un manteau rouge est assis sur un double arc de cercle qui pourrait correspondre aux deux bords d’un arc-en-ciel.

     . (J) de part et d’autre sont représentés les apôtres, ils sont à genoux, les mains jointes, paraissant indifférents à ce qui se passe au-dessous d’eux. Deux d’entre eux semblent même discuter !

     . (K) au niveau supérieur, sont peints la Vierge Marie et un personnage barbu à demi dissimulé qui doit être saint Jean Baptiste.

     . (L) les quatre anges de l’apocalypse sonnent de la trompette.

 A la différence des jugements derniers médiévaux, le panneau ne représente ni la résurrection des morts ni la pesée des péchés. On a l’impression que tout est terminé et que s’est déjà effectué le tri entre les élus et les damnés.

     . (M) à droite on peut apercevoir quelques silhouettes montant vers le ciel afin de gagner le paradis, ce sont les élus, ils sont très peu nombreux.

     . Tout le reste du panneau central est occupé par la destruction des œuvres terrestres et par les supplices des damnés.

 Cette disproportion entre le nombreux des élus et celui des damnés témoigne bien des préoccupations du 15e siècle et du règne de la mort : l’humanité est livrée à la mort et au diable à cause des péchés des hommes.

 

samedi 7 novembre 2020

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (3)

  LE TRIPTYQUE DU JUGEMENT DERNIER DE VIENNE (suite)

VUE D'ENSEMBLE DU TRIPTYQUE OUVERT


 Le retable de Jérôme Bosch se lit de gauche à droite en cinq phases :

     . La chute : la défaite des anges rebelles (1) le jardin d’Eden (2), le péché originel et le paradis perdu (3)

     . Le jugement dernier (4)

     . La fin des temps et la destruction des œuvres humaines (5)

     . Dès la fin du jugement dernier, les démons se précipitent sur terre pour torturer les damnés et leur faire subir déjà les tourments de l’enfer (6)

      . Les damnés sont précipités par une porte vers les abysses de l’enfer (7)

 Cette importance de l’enfer et des destructions dans la structure de l’œuvre corrobore exactement cette croyance fondamentale du 15e siècle, l’humanité entière est vouée à la mort et à l’enfer à cause du péché des hommes.

 LE PANNEAU DE GAUCHE : LA CHUTE ET  LE PARADIS PERDU


Ce panneau comporte deux parties distinctes illustrant toutes les deux la chute : chute des anges rebelles, chute d’Adam et Ève due au péché originel. 

 Dans la partie supérieure, est représenté Dieu dans une mandorle (A). Cette mandorle est portée  de figures minuscules que l’on devine être des anges.(B). Elle est sans doute descendue du ciel afin que Dieu préside à la création. Au-dessous est figuré un ciel nuageux, il est le théâtre d’une lutte acharnée entre des myriades d’anges  revêtu de blanc qui sortent de partout pour combattre les anges déchus (C ) que l’artiste a peint comme des insectes maléfiques de couleur noire, les anges déchus sont vaincus et  précipités sur terre.

 


Au centre du panneau se déploie le jardin d’Eden (D), il est présenté comme une campagne légèrement vallonnée associant de vastes espaces de prairies, entrecoupés de bosquets, un lac et quelques rochers épars en falaise. Dans ce décor idyllique vivent, ça et là, en toute liberté, quelques animaux sauvages.





La partie basse du panneau se lit de bas en haut

   . (E) : Dieu crée Ève à partir d’une côte d’Adam, Adam est encore endormi, d’une main, Dieu relève Ève qui s’éveille à la vie et de l’autre esquisse un geste qui ressemble à une bénédiction.

   . (F) : le péché originel : Adam et Ève se trouvent près du pommier, Ève montre à Adam la pomme qu’un être vient de lui donner. Cet être  est un être hybride  : son torse et sa tête sont ceux d’un humain, par contre la partie basse de son corps est celui d’un animal comportant des pattes courtes et griffues et une longue queue.

   . (G) : un ange vêtu d’une aube blanche et d’un manteau rouge brandit une épée et chasse Adam et Ève qui se dirigent vers la droite et donc vers le panneau central sur lequel est représenté le jugement dernier où ont été jugés les descendants d’Adam et Ève qui ont subi la tare du péché originel et donc sont en proie aux influences et tentations démoniaques

A suivre..

 

dimanche 1 novembre 2020

QUATRE TRIPTYQUES DE JEROME BOSCH (2)

 LE TRIPTYQUE DU JUGEMENT DERNIER DE VIENNE

 Le triptyque du JUGEMENT DERNIER actuellement conservé à Vienne serait, selon les plus récentes théories des historiens d’art, une commande datée de 1504 de Philippe le beau, fils de l’empereur Maximilien de Habsbourg et époux de Jeanne, fille de Ferdinand d’Aragon et d’Isabelle de Castille, pour orner son palais de Bruxelles.

 Cette hypothèse est corroborée par la représentation en grisaille sur le retable fermé de Saint Jacques, patron de la Castille et de Saint Bavon, patron des Pays-Bas, or, à cette époque, Philippe le Beau possédait à la mort de sa mère, Marie de Bourgogne l’héritage de Bourgogne et la Castille en tant que mari de Isabelle de Castille.

 Ce JUGEMENT DERNIER, toujours selon les historiens de l’art, représente un tournant dans l’œuvre du peintre, c’est dans ce triptyque que Bosch atteint la plénitude de son art qui lui donnera la  notoriété qu’on lui connaît ensuite.

 Il se caractérise par une particularité que l’on ne trouvait que rarement exprimée (sauf peut-être dans le retable de Rogier Van Der Weiden), celle de montrer une œuvre présentant une fresque didactique et chronologique alors que les retables antérieurs du jugement dernier associaient simplement de gauche à droite le paradis, le jugement dernier et l’enfer. 



A suivre...