REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
. Toutes les citations de mes articles proviennent de recherches sur les sites gratuits sur Internet



Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

mardi 14 mars 2017

…SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-60 : l’école publique (6)

Suite de l’article précédent

À cette époque, les parents avaient assez peu à débourser en fournitures scolaires, au moins dans l’école publique ; les livres et les cahiers étaient fournis par la commune, via une coopérative scolaire ou directement. Les élèves recevaient les livres et les cahiers le premier jour de l’école, il fallait les ramener à la maison et les couvrir soigneusement pour éviter qu’ils ne se dégradent plus qu’ils ne l’étaient. On rendait ces livres à la fin de l’année ; il me semble que les dégradations pouvaient être assorties d’une sanction pécuniaire. Néanmoins, beaucoup de livres étaient très abîmés,

Dans ces conditions, les parents ne devaient acheter que les fournitures scolaires de base. Tout d’abord, il fallait acquérir un sac d’école ; celui-ci était acheté à l’entrée en classe préparatoire et devait durer tout le temps de la scolarité.  Cela explique que la qualité première de ces cartables devait être leur solidité. Ces sacs étaient pratiquement tous semblables de couleur brune, généralement en carton bouilli ;  ils possédaient un aspect plutôt austère et se portaient dans le dos.

La deuxième fourniture obligatoire que les parents achetaient aussi pour toute la scolarité, était le plumier en bois. Les plumiers étaient de deux sortes : les uns ne comportaient qu’un seul niveau, les autres en comportaient deux, le niveau supérieur pouvant pivoter latéralement sur le niveau de base. Ils étaient tous munis d’un couvercle coulissant. Dans le plumier, on rangeait tout ce qui était nécessaire à la vie d’un écolier : le porte-plume et les plumes, les crayons noirs et de couleur, la gomme, la règle, le compas, le taille-crayon... Les trousses commençaient à apparaître mais elles n’étaient guère pratiques pour retrouver immédiatement ses affaires. Les plus jeunes possédaient aussi une ardoise qui leur faisait office de cahier de brouillon et un porte-mine. Il fallait aussi des buvards puisque l’on écrivait à la plume. Certains buvards comportaient déjà sur leur revers de la publicité.

A ces fournitures s’ajoutait la blouse, elle était grise pour les garçons et de couleur pour les filles. Le port de ces blouses était nécessité par le fait que quand on « passait au tableau » on pouvait se salir en maniant la craie. On dit aussi qu’il s’agissait de créer un semblant d’égalité dans la classe en permettant de masquer les tenues plus ou moins coûteuses des élèves. On laissait cette blouse le soir sur le portemanteau attenant à la  salle de classe et on s’en revêtait le matin en arrivant.

À suivre...

samedi 11 mars 2017

…SOUVENIRS DES ANNEES 1950-60 : l’école publique (5)

Suite de l’article précédent

Les périodes scolaires à l’école primaire  étaient assez différentes de celles pratiquées actuellement : l’année scolaire débutait le 1er octobre et se terminait le 14 juillet avec donc deux mois et demi de vacances ; cette disposition permettait aux enfants de la campagne d’aider leurs parents agriculteurs à effectuer la moisson et la vendange.

Dans l’année, selon le journal officiel de 1955 que j’ai pu consulter pour me remémorer de l’organisation de l’année scolaire, les congés scolaires duraient en tout un mois et s’établissaient comme suit :
   . Deux jours les 1er et 2 novembre pour la Toussaint et le jour des morts.
   . Dix jours à Noël du 23 décembre au soir  au 2 janvier inclus.
   . Deux semaines à Pâques fixées selon le calendrier liturgique
   . Quatre jours soit à mardi gras ou à la Pentecôte selon les dates du calendrier liturgique (quatre jours à mardi gras si le dimanche des rameaux tombe en avril, quatre jours à la Pentecôte si le dimanche des rameaux tombe en mars),

l'année scolaire comportait 178 jours effectifs de classe contre 162 actuellement (source OCDE)

Il n’existait pas de zones de vacances ; elles étaient inutiles car la plupart des gens ne partaient pas en vacances ou ne partaient qu’une fois, essentiellement en été. Seuls les nantis y allaient plusieurs fois dans l’année, la pratique du ski, par exemple, était considérée comme un sport qu’ils étaient seuls à pouvoir financièrement pratiquer.

Selon mon expérience, la semaine scolaire comportait 6 jours complets à raison de 6 heures de cours par jour, du lundi au mercredi puis du vendredi au samedi, le jeudi était, comme je l’ai déjà évoqué, jour de congé. L’école durait de 8h30 à 11h30 et de 13h30 à 16h30.

En nombre d'heures effective de classe, l'année scolaire en 1955 en comportait 1068 contre 804 actuellement (source OCDE)

A suivre....

jeudi 9 mars 2017

… SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-60 : l’école publique (4)

Suite de l’article précédent

La troisième caractéristique de cette époque était la présence d’écoles dans toutes les villes et quasiment dans tous les villages.  Dans les montagnes, on trouvait même de petites écoles rurales à mi- pente des versants, desservant de minuscules hameaux. À cette époque, les villages étaient encore des organismes bien vivants, chacun disposait d’une mairie,  d’une école, d’une église desservie par un curé et d’un « bistrot » où se retrouvaient les hommes après le travail et qui servait aussi d’épicerie. L’école était donc un des quatre éléments constitutifs d’un village, elle était la plupart du temps couplée avec la mairie dans un même bâtiment. Dans les classes uniques, le maître devait gérer l’ensemble des cours, ce qui l’obligeait à une organisation rigoureuse de son temps, il faisait cours aux uns tandis que les autres travaillaient en autonomie. Il existait des appartements au-dessus des salles de cours réservés aux instituteurs ;  souvent d’ailleurs, les instituteurs étaient mari et femme.

Les enfants se rendaient à pieds ou à vélo à l’école, il n’y avait évidemment pas de transports scolaires. Ils restaient jusqu’à la fin de leur scolarité dans ces écoles de villages ; l’absence de transports scolaires était seulement dommageable pour les enfants des villages qui quittaient l’école primaire en CM2 pour poursuivre leurs études au collège, ils devaient nécessairement internes.

J’ai eu l’occasion de visiter plus tard ces écoles de village ; l’ambiance y était assez extraordinaire, dans des locaux souvent un peu surannés, on y trouvait à la fois un esprit de famille, une ambiance de travail et une chaleur humaine qu’on ne rencontrait pas ailleurs ;  les élèves étaient en petits groupes, chacun travaillant dans le calme, les petits écoutaient souvent avidement les cours destinés aux plus grands, les plus grands trouvaient dans les cours des petits l’occasion de réviser ce qu’ils avaient oublié ou mal compris.

Dans les villages, l’instituteur était respecté et était considéré comme une notabilité, il était en effet à l'égal du curé et le maire dans l’estime que lui portaient les gens. En outre, l’instituteur était la plupart du temps, le secrétaire de mairie ce qui augmentait encore son prestige et son importance.

A suivre

mardi 7 mars 2017

…SOUVENIRS DES ANNEES 1950-60 : l’école publique (3)

Suite de l’article précédent

Pourtant, nous, enfants du peuple, ne ressentions pas les choses dans cette perspective d’une école à deux vitesses évoquée dans l'article précédent; l’essentiel pour nous était de se retrouver entre copains/copines du même village ou du même quartier, de partager les mêmes préoccupations et ayant les mêmes activités ; on formait une entité à part, unie par la fréquentation de la même école, de la même église ; cette entité se concrétisait plus tard par la participation à la même classe de conscription pour le service militaire.

Il convient certes de ne pas idéaliser la situation, les bagarres dans les cours de récréation existaient et il était de coutume que les plus grands ennuient les petits ou même les rackettent ; de même, il se produisait une hiérarchie à l’intérieur des classes populaires : ainsi, les enfants de commerçants et d’artisans  étaient jalousés par les enfants d’ouvriers dont la famille disposait de ressources moindres ; cependant les  situations de conflits pouvant exister  étaient vite réglées par l'instituteur qui était à la fois considéré et respecté et à qui on obéissait naturellement.

 Pendant une année, j’ai pu constater à quel point les mentalités des enfants du peuple étaient éloignées des préoccupations des enfants de nantis, ceux-ci les regardaient de haut, passaient leur temps à se vanter de leurs vacances, de leur loisirs, de leur argent, de leurs fréquentations, ils vivaient dans un monde superficiel quasi-virtuel, sans rapport avec la vie réelle ; ce monde m'était totalement étranger et je le trouvais détestable ; pour moi, seules les classes populaires disposaient du  bon sens, du courage et de l’opiniâtreté que le contact avec la réalité de la vie quotidienne leur avait permis de forger,  (je suis sans doute de parti-pris).

La deuxième caractéristique de l’école de cette époque était la séparation des sexes, il y avait des écoles de filles et des écoles de garçons dans les bourgs importants ; dans les villages, on trouvait des classes pour garçons et des classes pour filles. L’origine de cette division datait depuis l’instauration de l’école publique ; hormis le tronc commun des acquis fondamentaux de la lecture, de l’écriture et du calcul, l’enseignement dispensé alors n’était en effet pas le même pour les garçons que pour les filles. Les garçons devaient être préparés à devenir de bons travailleurs et de bons soldats, les filles à devenir de bonnes mères et de bonnes épouses. Certes, cette différenciation des programmes  avait largement disparu à mon époque, mais il en restait cette séparation des sexes qui n’avait plus de réels fondements sinon celui du respect d'une certaine morale.

Cette séparation des sexes qui était de règle dans toute la société d’alors, posait un problème car il y avait une méconnaissance de l’autre sexe ; on le connaissait seulement grâce aux copains ou copines  de ses frères et sœurs ou grâce aux enfants du quartier. A cela s’ajoutaient les préjugés de l’époque, la fille devait jouer à la poupée, être coquette mais pas trop, sensible et sage, presque soumise ; le garçon devait avoir des activités viriles, faire du sport, du vélo, monter aux arbres... ces préjugés créaient des archétypes qui aboutissaient encore plus à méconnaître l’autre sexe en l'idéalisant.

Dans de telles conditions, les rencontres entre garçons et filles se faisaient quasiment subrepticement ; on voyait par exemple, les garçons des classes de fin d’études attendre les filles à la sortie de l’école et découvrir, sans qu’ils en soient guère avertis, les nouveaux sentiments qui s’amorçaient entre eux. Les relations entre garçons et filles se développaient véritablement ensuite, en particulier lors des bals populaires régulièrement organisés un peu partout. Dans cette perspective, il convient d’ajouter que la sexualité était un sujet tabou, les seules qui soient précocement averties étaient les filles : dès leurs premières règles, elles étaient instruites des risques encourus en cas de relations sexuelles avant le mariage. Les enfants découvraient leur puberté soit tout seul, soit avec les copains/copines qui se vantaient souvent d’exploits qu’ils n’avaient généralement pas commis.

À suivre.

dimanche 5 mars 2017

… SOUVENIRS DES ANNEES 1950-60 : l’école publique (2)


Suite de l’article précédent

Cette organisation de l’enseignement formait l’essentiel de la scolarité pour ce que l’on appelait « les classes populaires », classes auxquelles je suis fier d’appartenir. Bien peu de jeunes continuaient leurs études après l’école primaire même si la République  avait prévu des passerelles permettant aux enfants du peuple de continuer leurs études, je les décrirai plus loin. Certes, comme actuellement, à l’issue du CM2, il était possible d’entrer en 6ème. Un examen d’entrée en 6ème avait été instauré, puis supprimé en sorte que c’étaient les instituteurs qui, tablant sur les capacités de certains élèves, incitaient leurs parents à orienter vers des études secondaires. Dans la classe de CM2 où j’étais scolarisé, ce fut le cas seulement de deux élèves.

Cet état de fait était dû non au niveau faible des élèves mais beaucoup plus au refus des parents comme des jeunes eux-mêmes de continuer des études. À cette époque, il y avait du travail pour tous, les usines embauchaient dès l’âge de 14 ans des jeunes en tant que manœuvre, les patrons prenaient volontiers des apprentis...  Or dans les familles, il n’y avait généralement qu’un seul salaire, ce qui permettait certes de vivre convenablement mais il ne fallait commettre aucune dépense excessive ; Dans ces conditions, le travail des enfants, tant garçons que filles, permettait de disposer d’un surplus de recettes pour la famille qui n’était pas négligeable. De même, beaucoup de jeunes étaient content de quitter l’école et d’entrer dans le monde du travail. Les parents leur donnaient de l’argent de poche, ce qui permettait de sortir, d’aller au cinéma ou au bal. Tout cela explique que peu de jeunes des classes populaires continuaient leurs études au sortir de l’école primaire.

L’école primaire était essentiellement fréquentée par les enfants émanant des classes dites populaires ; on ne mélangeait pas en effet les classes sociales même si, comme je l’ai écrit plus haut, des passerelles avaient été établies afin de permettre aux enfants du peuple de continuer leurs études. Les autres enfants, filles et fils de bourgeois et de nantis fréquentaient d’autres types d’écoles qui les menaient directement au baccalauréat. Dans les villes, les écoles confessionnelles étaient nombreuses, elles assuraient l’enseignement depuis l’équivalent du cours préparatoire jusqu’en terminale. La terminologie des classes de ces écoles n’était pas la même que celle des écoles primaires, on commençait en 11e puis en 10e et ainsi de suite jusqu’à la terminale. Il existait aussi de tels cycles dans l’enseignement public.

Le refus des classes sociales aisées d’inscrire leurs enfants à l’école primaire tenait non seulement au fait que l’on ne mélangeait pas les classes sociales mais aussi que l’école primaire avait, chez ces gens-là, une connotation détestable selon eux de laïcité exclusive empreinte de communisme. Pour ma part, comme pour mes condisciples, cela ne nous gênait pas : dans l’école de mon quartier,  la laïcité était plutôt tolérante tout comme l’était d’ailleurs  l’enseignement dispensé par le curé. Le seul moment pendant lequel pouvait s’élever une contestation se produisait lors de la retraite de communion car l’instituteur voyait fondre une grande partie de ses effectifs mais, dans ma paroisse, le curé s’efforçait de gêner le moins possible le déroulement de la scolarité.

En y réfléchissant après-coup, je ne peux que constater à quel point cette école à deux vitesses était un système théoriquement  détestable au niveau de l’égalité des droits : on cantonnait les classes populaires à rester à leur niveau tandis que les nantis pouvaient aspirer dès leur enfance à de hautes fonctions. Dans cette perspective, le  système scolaire perpétuait la division sociale et, selon l’interprétation marxiste, maintenait l’inégalité des classes et, en conséquence l’exploitation du prolétariat par le système capitaliste.  Cette situation était le fait des classes dirigeantes, il y eut cependant de timides évolutions à mon époque du fait de l’évolution de la société avec création de ces passerelles que j’évoquerai en terminant ce chapitre.

A suivre...

vendredi 3 mars 2017

…SOUVENIRS DES ANNÉES 1950-60 : l’école publique (1)

Cet ensemble d’articles sur l’école  fait suite au chapitre concernant  l’encadrement religieux de la société préalablement publié et provient du même auteur.

En ce qui me concerne, je ne pourrai évoquer ici que mes souvenirs de l’école primaire publique car c’est la seule que je connaisse vraiment. Il y avait cependant d’autres systèmes scolaires que j’évoquerai ultérieurement.

À cette époque, l’école primaire publique était le moyen par excellence de l’apprentissage pour les enfants de classes populaires ; elle avait pour but non seulement de leur permettre d’apprendre à lire, à écrire et à compter mais aussi à bien se comporter, à connaître l’histoire et la géographie du pays et à acquérir des notions de base dans les domaines des sciences, de la littérature et de la culture ; elle enseignait aussi des valeurs morales comme le respect des lois,  des règles de la vie en société et donnait aux jeunes le sens du travail et de la citoyenneté.

L’école primaire constituait un tout, elle était divisée en trois cycles une fois passée la classe préparatoire où, comme actuellement, on apprenait à lire, écrire et compter : le cours élémentaire pendant deux ans, le cours moyen pendant aussi deux ans et enfin, le cours de fin d’études de deux ou trois ans selon les cas. On entrait au cours préparatoire à l’âge de 6ans après l’école maternelle et, si on suivait le cursus normal sans anicroches de parcours, on accédait à la dernière classe de fin d’études a 13 ans, ce qui obligeait certains, nés en fin d’année, à refaire une année supplémentaire afin d’atteindre la fin de la  scolarité obligatoire fixée à l’âge de 14 ans.

A quatorze ans, on passait le certificat d’études primaires ; l’obtention de cet examen revêtait une grande importance tant pour le jeune que pour ses parents. Elle était la concrétisation du niveau obtenu et manifestait la réussite scolaire. Ceux qui avaient obtenu ce certificat en étaient particulièrement fiers ; généralement, les parents offraient une montre à leur enfant pour le récompenser mais aussi pour lui permettre d’être à l’heure au travail.

Le certificat d’études était un sésame permettant d’entrer avec honneur dans la vie active ;  certes, ceux qui n’avaient pas obtenu cet examen entraient dans la vie active comme les autres, mais ils avaient un peu honte  d’avouer qu’ils avaient échoué.

mercredi 25 janvier 2017

…SOUVENIRS DES ANNEES 1950-60 : l’encadrement religieux de la société (12)

Suite de l’article précédent

 Le samedi après-midi, tandis que les parents effectuaient les derniers préparatifs, les communiants allaient se confesser.

Le lendemain était le grand jour. Les communiants avaient rendez-vous à quelques centaines de mètres de l’église afin que se forme la procession qui parcourait la rue. Les filles ouvraient la procession par rangs de deux, classées selon la taille, les garçons suivaient également classés par rangs de taille. Les familles étaient présentes et suivaient les communiants en sorte que la procession devenait alors un véritable cortège. , tous portaient leurs « habits du dimanche », costumes, chemises blanches et cravates pour les hommes, belles robes et chapeaux pour les femmes,

A l’arrivée dans l’église, les communiants gagnaient les prie-Dieu qui leur étaient alloués et dont l’emplacement était déterminé en fonction des notes de l’examen de contrôle, comme je l’ai indiqué précédemment ;  leurs familles étaient placées sur le banc qui leur était adjacent. La messe était, bien entendu, une messe solennelle avec orgue et chorale, le moment fort étant celui de la communion proprement dite : garçons et filles formaient une procession et s’agenouillaient de chaque côté de la table d’autel pour recevoir la communion.

A l’issue de la messe, venait le moment de l’échange des cartes de communion  que l’on mettait dans son missel pour avoir un souvenir de ses amis puis chaque famille rentrait chez soi afin de déguster le bon repas qui les attendait. Au moment de l’apéritif, le communiant recevait de chacun un cadeau, il ne s’agissait pas de jouets mais beaucoup plus d’objets utilitaires ;  parmi ceux-ci, se trouvait la première montre que l’on était très fier de porter car elle était la manifestation tangible que l’on abordait une nouvelle étape dans sa vie.

Le repas comportait une entrée froide, une entrée chaude, de la viande avec son  accompagnement,  de salade et de fromage en enfin se terminait par une pièce montée sur laquelle trônait une petite effigie de communiant. Les adultes prenaient un digestif, tout le monde était joyeux à la fois à cause du bon repas qu’ils venaient de faire, de l’alcool servi à profusion et surtout du plaisir de se retrouver en famille.

Vers 16 heures, avaient lieu les vêpres, on s’y rendait en famille y compris ceux qui étaient un peu ivres et qui réussissaient malgré tout à conserver une certaine dignité. A la sortie des vêpres, on regagnait la maison, les invités buvaient un dernier coup puis chacun regagnait ses pénates, heureux d’avoir passé une si belle journée ; seuls quelques-uns s’attardaient et continuaient à boire et manger jusque tard dans la nuit.

Les jours qui suivaient la communion,  on se rendait chez le photographe qui faisait la photo officielle du  communiant, ces photos sont toutes semblables : le garçon debout  se tient légèrement de côté de façon à présenter au premier plan son brassard ; à ses côtés, se trouve un prie-Dieu sur lequel il pose le missel qu’il tient à la main. Les filles portent leurs belles robes de communiante et se tiennent de manière semblable avec également un prie-Dieu.

La communion solennelle était suivie l'année suivante d'une messe dite de renouvellement qui était la dernière occasion de porter le brassard ou la belle robe de communion et de la confirmation. Il existait beaucoup de racontars à propos de cette dernière cérémonie effectuée devant l'évêque qui, après avoir tracé le signe de la croix avec le Saint Chrême sur le front du confirmant, lui donnait une tape sur la joue. On disait que certains évêques donnaient des claques si violentes que quelques-uns tombaient à terre ! Bien évidemment, toutes ces histoires n'étaient que fariboles !  En ce qui me concerne, j'eus la chance de tomber sur un évêque dont le visage si était empreint de bonté et de douceur que je ressentis à peine la petite tape qu'il me donna sur la joue.

Il me reste à donner une conclusion à cette série d'articles émanant de mon expérience personnelle et concernant l'encadrement religieux de la société et l'imprégnation de l’église sur l'individu. Cette prégnance  a été ensuite vivement critiquée essentiellement parce qu’elle était censée limiter la liberté en créant des interdits et surtout parce qu’elle aboutissait à des traumatismes empêchant l’épanouissement de l’individu. En ce qui me concerne, je n’ai jamais subi de traumatismes dus à l’éducation religieuse que j’ai reçue ; au contraire, elle  m’a permis de m'intégrer dans la société de mon époque en mettant  en avant des pratiques telles que le respect des autres, des lois et des règles quotidiennes ainsi que le sens de la charité et du don de soi.

lundi 23 janvier 2017

…SOUVENIRS DES ANNEES 1950-60 : l’encadrement religieux de la société (11)

Suite de l’article précédent

Pendant les semaines qui précédaient la communion, les parents s’activaient pour cette grande fête, il fallait d’abord  lancer les invitations. En général, n'étaient conviés que les parents proches : le parrain, la marraine, les grands parents, les oncles et les tantes ainsi que les cousins. Le repas de communion se faisait en effet chez soi et il n’y avait pas toujours assez de place pour accueillir de nombreuses personnes. Il fallait donc trouver une grande table et des chaises pour tous les invités ; il fallait aussi prévoir  le menu, commander la pièce montée, acheter les produits nécessaires à la confection du repas ; pour ceux qui n'avaient pas de « frigo », il fallait se pourvoir en pains de glace pour  conserver les denrées au froid. Il fallait également trouver quelqu’un pour effectuer les derniers préparatifs du repas pendant que les parents du communiant étaient à la messe.

A cela s’ajoutait une tâche spécifique,  celle d’acheter des petites images pieuses et d’écrire au dos de cette image le nom du communiant et la date de la communion ; lors du grand jour, les communiants s’échangeaient les cartes que l’on insérait ensuite dans le missel ; on achetait aussi de beaux cartons pour écrire les menus. Les plus aisés faisaient imprimer ces cartes ainsi que les menus.

Quelques jours avant la communion, les parrains-marraines apportaient les deux accessoires nécessaires à la cérémonie, le missel et le chapelet ainsi que  le brassard pour les garçons. Les parents des garçons  devaient aussi acheter un habit neuf comportant un costume, une chemise blanche, une cravate et des souliers. Pour les filles, on achetait où on louait une grande robe blanche ornée de dentelles  et un voile. Cette robe qui  ressemblait à une tenue de mariage, mettait en évidence les différences de revenus des parents si bien que, quelques années plus tard, il fut décidé que tous les communiants porteraient  une simple aube blanche.

On allait aussi chez le coiffeur pour présenter le meilleur de soi et c’est les cheveux largement gominés et laqués que l’on abordait le grand jour.

À suivre...