REMARQUE
. Tous les articles de ce blog ont été rédigés par moi-même sans emprunt littéral à d'autres auteurs, ils sont le fruit d'une documentation personnelle amassée au cours des ans et présentent ma propre vision des choses. Après tout, mon avis en vaut bien d'autres.
. Toutes les citations de mes articles proviennent de recherches sur les sites gratuits sur Internet



Mon blog étant difficilement trouvable par simple recherche sur internet, voici son adresse : jeanpierrefabricius.blogspot.com

vendredi 15 mars 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (29) : LICHTENBERG

Le château à l’époque des HANAU-LICHTENBERG

Jusque 1570, le château resta en indivis entre les deux familles de Hanau et de Zweibrücken-Bitche.
La réunification survint à l’extinction de la famille des Zweibrücken-Bitche. (voir article précédent)

Le comte Philippe 5 de Hanau-Lichtenberg, désormais seul possesseur de la seigneurie de Lichtenberg, décida de transformer son château. Il est probable que ce dernier n’avait guère subi de modifications notoires depuis les travaux de l’évêque Conrad de Lichtenberg.

Pour cela, il fallait en grande partie recomposer sa structure  en l’adaptant au style et aux conceptions architecturales de l’époque de la Renaissance :
   . Il fallait d’abord, transformer le logis d’habitation de manière à en faire une résidence palatiale, comme on en trouvait en Italie, avec de larges fenêtres permettant à la lumière d’entrer partout.
   . Surtout, il était nécessaire de modifier les moyens de défense, afin de les adapter à l’utilisation des canons et des armes à feu. Pour cela, on devait utiliser les techniques récemment inventées par les architectes italiens.

Ces nouveaux moyens de défense sont au nombre de quatre :
   . il fallait créer de nouveaux remparts appelés « chemin couvert » (1) en avant des anciens. Ils sont plus larges qu’épais et comportent  une base de terre surmonté d’une terrasse. Le chemin couvert  est précédé d’un glacis (2) en pente, destiné à amortir le choc des boulets de canon. Le terme de chemin couvert s’explique sans peine : il était possible à des soldats de tirer sur les assaillants proches, tout en étant couverts par les tirs de canon que l’on effectuait du haut du rempart principal.
   . En arrière de ce rempart, était creusé un fossé sec ou en eau, il était bordé de deux murs à pans inclinés appelés escarpe (3) et contrescarpe (4).
   . Des bastions (5) s’inséraient aux angles du chemin couvert ; ils étaient construits de manière à ce qu’il n’existe aucun angle de tir mort. Ils comportaient des terrasses où étaient disposés les canons. Les bastions pouvaient aussi comporter des casemates de tir.
   . Des demi-lunes (6) remplaçaient les barbacanes médiévales. C’étaient des fortifications pourvues de bastions qui étaient en particulier situées en avant de la porte d’entrée et lui servait d’accès.

Philippe de Hanau-Lichtenberg, pour mener à bien ses projets,  fit appel à l’architecte de la ville de Strasbourg, Daniel Specklin, qui  avait adapté, précédemment, une partie du rempart de Strasbourg aux nouvelles formes de fortifications. Un de ses dessins théoriques est présenté ci-dessus.

On possède de lui deux aquarelles représentant le château de Lichtenberg.

La première dût servir à mettre en œuvre la première partie des travaux de reconversion des défenses de la forteresse. Cette aquarelle est  précieuse car elle montre bien l’aspect  du château médiéval ainsi que le début des travaux de rénovation.

Au centre de la forteresse se trouve un rocher (A) aux parois probablement recreusées par les hommes pour rendre l’escalade impossible. Il porte le Haut-Château, celui-ci est entouré d’une courtine (B) qui fut arasée par Daniel Specklin pour créer une terrasse d’artillerie. Le haut-château comporte deux tours rondes sur la gauche du dessin (C)  et une autre tour sur la  droite (D) qu’on dit être le logis seigneurial primitif. Au centre de la cour, s’élève le donjon (E). Cette partie de la forteresse devait représenter  la construction originelle. Pour y accéder, il fallait utiliser un chemin escarpé (F).

En contrebas, se trouve la basse-cour, elle est entourée d’une courtine de forme irrégulière comportant des esquisses de tours. Au niveau de cette muraille, apparaissent quelques transformations de l’époque de Daniel Specklin :
     . La courtine (G) a été presque arasée de manière à installer une terrasse adaptée à l’usage des armes à feu et pourvue de fenêtres de tir.
     . Une tour, sans doute préexistante (H), construite en avant du rempart, a été écrêtée pour créer un bastion d’artillerie permettant de protéger l’entrée du château située en contrebas.
     . Certains pans de la muraille (I) comportent des bouches à canon donnant peut-être sur une casemate,

La basse-cour comporte plusieurs logis dont celui construit par l’évêque Conrad de Lichtenberg (J).
Il est desservi par une tour enserrant un escalier à vis et surmontée d’une horloge. Un autre bâtiment (K), également desservi par une tour escalier, se trouvait dans l’alignement du précédent. La présence de plusieurs logis s’imposait puisque le château était possédé en indivision par plusieurs branches de la famille. Parmi ces logis, l’un d’entre eux (L)  comporte  des éléments architecturaux de style renaissance qui font penser à une construction neuve

 Sur cette basse-cour se trouvait la chapelle (M) dont il subsiste actuellement le chœur. Les autres bâtiments étaient sans doute des communs ou d'autres logis de moindre importance.  On ne trouve pas, dans ce château, de tour du puits, il comportait, en effet, une source dont la présence avait été un des arguments décisifs lors du choix d'implantation de la forteresse à créer. . Il existait aussi une citerne servant à recueillir l’eau de pluie sous le sol du haut château ; un puits surmontait cette citerne.

D’autres constructions sur la basse-cour ont été réalisées par Daniel Specklin, mais elles ne sont pas visibles sur l’aquarelle. C’est le cas en particulier de l’arsenal qui jouxte le rocher du haut-château du côté Nord.

A suivre

lundi 11 mars 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (28) : LICHTENBERG

L’histoire du château de Lichtenberg

Pour tenter de reconstituer l’histoire du château et de ses seigneurs, j’ai consulté divers documents qui ne donnaient, à ce propos,  que des renseignements partiels et même contradictoires. Le texte ci-dessous est de mon fait, il résulte d’une interprétation de ces sources. Même s’il est sujet à caution dans ses détails, il relate néanmoins les grandes phases de l’histoire de Lichtenberg.

Pour tenter de comprendre cette histoire, il faut d’abord se référer aux événements qui survinrent après la mort de l’empereur Henri 6 Hohenstaufen, fils de Frédéric Barberousse, en 1196. Il existait deux prétendants à la succession du défunt, Philippe de Souabe, frère d'Henri 6 et Otton de Brunswick. Pour punir ceux qui soutenaient Otton en Alsace, les armées des Hohenstaufen envahirent le pays, ils s’emparèrent, entre autre, du château de Hunebourg tenu par une puissante famille comtale richement possessionnée en Alsace du Nord, sous la vassalité de l’évêque de Metz. Ils possédaient en particulier la région où sera construit plus tard le château de Lichtenberg. Au cours de l’assaut, le comte de Hunebourg fut tué ainsi de ses deux frères ; l’héritage des Hunebourg revint donc au quatrième frère de la fratrie, Conrad ; celui-ci était  devenu évêque de Strasbourg, de ce fait, il n’aurait pas d’héritier direct.

Pour cogérer le comté de Hunebourg, Conrad  s’entendit alors avec un autre seigneur du voisinage, Albert (2) de Dabo-Moha qui était aussi comte de Metz, également sous la vassalité de l’évêque de Metz. Ce sont ces deux personnages qui s’entendirent pour créer un nouveau château afin de défendre leurs possessions orientales, le choix fut fait, aux alentours de 1202,  d’un promontoire jusqu’alors dépourvu de défense ; il fut appelé Lichtenberg.

Pour assurer la garde du château, les coseigneurs s’entendirent pour désigner une famille qui devait être apparentée à la fois à l’évêque et au comte. Comme à l’accoutumée, cette famille prit le nom du château et eut très vite l’ambition de s’abstraire des tutelles de leurs suzerains et de proclamer leur seigneurie, franche de toute dépendance.

C’est en 1209 qu’apparaît pour la première fois  dans une charte le nom de Lichtenberg.

Les sires de Lichtenberg profitèrent de la mort de leurs deux coseigneurs pour réussir  dans leurs ambitions :
   . Conrad de Hunebourg mourut en 1202, il est probable qu’il possédait un logis au château, celui-ci fut alors habité par un certain Rodolphe, membre du chapitre de Strasbourg et archidiacre qui mourut à son tour en 1209.
   . Albert de Dabo-Moha décéda en 1212, il n’eut qu’une héritière, Gertrude, qui, mariée à trois reprises, n’eut cependant pas d’héritier. Quand elle mourut en 1225, les terres alsaciennes de Dabo revinrent à l’évêque de Strasbourg.

Il est probable que c’est après la mort de Gertrude, que les terres de Hunebourg, entrées en déshérence, furent inféodées par l’évêque de Metz aux Lichtenberg. En 1241, le sire de Lichtenberg reçut en outre l’avouerie des terres de l’évêché de Strasbourg avec le droit de faire de leurs fils cadets un chanoine prébendier du chapitre épiscopal. Les Lichtenberg héritèrent aussi de la charge de prévôt de l’abbaye de Neuvillers les Saverne fondé par l’évêque de Metz, jusqu'alors tenu par les Hunebourg.  Ainsi, les sires de Lichtenberg dépendaient de deux évêques, ceux de Metz et de Strasbourg.

C’est à cette période qu'ils crûrent pouvoir se débarrasser de la tutelle de l’évêque de Metz en profitant des dissensions survenues, à la mort de l’évêque Jacques de Lorraine (1261). Deux candidats aspiraient  à la succession, Philippe de Florange et Guillaume du Traînel ; le sire de Lichtenberg du moment décida d’intervenir et s’érigea en protecteur de l’évêché. Ce fut pour lui malencontreux car le duc de Lorraine, Ferry 3, prit les armes et le contraignit à se reconnaître à nouveau vassal-lige de l’évêque de Metz.

A la fin du 13 è siècle, La notoriété de la famille vint plutôt du côté de l’évêché de Strasbourg. En effet,  comme convenu par l’accord de 1241, Louis 1er de Lichtenberg fit de  son fils cadet, Conrad, un chanoine de la cathédrale de Strasbourg. En 1273, il fut élu évêque de Strasbourg et le restera jusqu’à sa mort en 1293. Il fit ériger la façade occidentale de la cathédrale de Strasbourg ainsi qu’un logis  seigneurial dans le château de Lichtenberg, resté en indivision dans la famille. On dit que Conrad puisa largement dans les ressources de l’évêché pour se construire une résidence digne de ce nom. A sa mort, son frère  Frédéric fut également élu évêque de Strasbourg (de 1299 à 1305). Un troisième membre de la famille, Jean fut aussi évêque de 1353 à 1365, il reçut le titre de Landvogt de Basse Alsace, titre que conservèrent ensuite les évêques de Strasbourg.

Pendant toute la période les querelles furent très nombreuses entre les différentes branches de la famille qui possédaient en indivis le château et la seigneurie de Lichtenberg. A l’époque de l’évêque Jean, il existait trois branches entre lesquelles la mésentente déboucha même sur des conflits armés.

Pour éviter ces dissensions, un accord fut signé, il stipulait que chaque branche s’engageait, en cas d’absence prévisible  de survivants dans sa famille, à remettre sa part aux survivants, c’est ainsi qu’en 1405, sous Louis 4, la seigneurie fut réunifiée. Cependant à sa mort en 1434, la seigneurie fut à nouveau divisée entre ses deux fils Louis et Jacques qui ne s’entendaient pas. Il fallut attendre 1470 pour que se produise une nouvelle réunification sous Jacques à la mort de son frère.

Jacques de Lichtenberg fut élevé à la dignité comtale par l’empereur Frédéric 3, il sera le seul à porter ce titre car il n’eut pas d’héritier pour lui succéder à cette dignité ; à sa mort, survenue en 1480, ce sont ses deux nièces, les filles de Louis, qui reçurent ses possessions :
     . Anne épousa le comte Philippe de Hanau.
     . Elisabeth épousa le comte de Zweibrücken-Bitche.

C’est donc en 1480 que survint l’extinction de la dynastie apparue au tout début du 13è siècle.

LA SEIGNEURIE DE LICHTENSTEIN DANS SON ENVIRONNEMENT POLITIQUE 
AU 14è SIECLE
   .
Prochain article : le château de Lichtenberg à l'époque des Hanau-Lichtenberg 

vendredi 8 mars 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (27) : LICHTENBERG

Au cours de ce chapitre consacré aux châteaux médiévaux de l’Alsace Bossue, l’ordre de mes descriptions n’est pas le fait du hasard : j’ai tenté, en effet, d’établir une hiérarchie dans les impressions que m’ont données  les visites des quatre premiers châteaux décrits :

   . Le château de FALKENSTEIN est une ruine laissée tel quelle, sans intervention contemporaine malencontreuse, c’est dans ce château que l’on ressent le mieux l’ambiance régnant à l’époque médiévale. C’est là aussi que l’on retrouve toute la poésie et la magie d’un lieu chargé d’histoire qui se laisse découvrir en silence au hasard de la promenade.

   . Le château de FLECKENSTEIN a subi une première altération, minime toutefois, quand il fut transformé  en une sorte de parc de loisirs pour les enfants : le parcours ludique organisé rompt le rythme de la visite et enlève tout le charme de la découverte : il faut avoir beaucoup de concentration d'esprit au milieu des familles braillardes côtoyant le visiteur, pour se laisser aller à son imagination.

   . Le château du HAUT BARR serait resté une belle ruine s’il n’avait pas été construit cette auberge d’un pseudo style germanique étalant sa terrasse au milieu des ruines ;  ressentir, par exemple,  la spécificité architecturale d’une tour au milieu des clients venant consommer, n’est pas chose aisée.

   . Le château de LUTZELSTEIN que je viens de décrire, aurait dû être un enchantement vu l’importance historique de la citadelle. Il  ne présente, hélas,  au visiteur que des bâches de plastique incongrues dans le magnifique écrin des collines forestières des Vosges gréseuses.

   . Le dernier château que je me propose de décrire est celui de LICHTENBERG. Pour moi, il est l’archétype de ce qu’il ne faut pas faire : non seulement, il est devenu un lieu de loisirs mais surtout, on a voulu réhabiliter les ruines en « glissant de nouvelles formes architecturales dans les ruines » ; le  résultat est en grande partie désastreux : comment peut-on ressentir le passé quand le regard est agressé par ces aménagements disharmonieux qui rompent toute l’ambiance à laquelle on aspire quand on visite un château médiéval. C’est dommage, car le château, comme les précédents, possède une riche histoire et des ruines particulièrement intéressantes.

Prochain article : l’histoire du château de Lichtenberg

mercredi 6 mars 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (26) : LUTZELSTEIN (LA PETITE PIERRE)

Le renforcement de la citadelle de Lutzelstein selon les plans de Vauban

Il ne reste que quelques murs des fortifications aménagées à l’époque de Louis 14 et détruits en 1872 ;  En outre, l’ensemble  des ruines est actuellement  peu visible car la forêt a colonisé la zone.

Comme précédemment lors de ma description du château, j’ai redessiné l’aspect que devaient posséder les aménagements construits au 17è siècle à partir d’un plan en 3D présenté sur un terre-plein dominant ces anciennes fortifications
 

 . Venant du chemin (1), il fallait, pour entrer dans le Stadtel, passer un premier fossé (2) par un  pont-levis qui donnait à une demi-lune (3) 

. On accédait alors, par un second pont-levis  construit au-dessus d’un nouveau fossé (4), à un nouvel ouvrage (5) qu’il fallait traverser pour accéder au chemin (6) menant au Stadtel

   . Par un troisième pont-levis au-dessus du troisième fossé (7),  on pouvait alors gagner la porte du Stadtel (8).

   . Enfin, en avant de cet ensemble, était construit un mur d’escarpe à la forme irrégulière  correspondant au rebord du promontoire (9)

Photo de droite, le mur de la demi-lune
Photo de gauche, une poterne faisant sans doute partie des ouvrages avancés de la fortification

L’ensemble construit en avant du Lutzelstein ne ressemble pas aux grandes forteresses aménagées par Vauban (absence en particulier  de bastions), cela s’explique aisément du fait de l’étroitesse du promontoire.

Prochain article : le château de Lichtenberg

lundi 4 mars 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (25) : LUTZELSTEIN (LA PETITE PIERRE)

Le château de Lutzelstein

N’ayant pas visité le château proprement dit à cause des travaux qui en interdisent l’entrée, je me contenterai de donner, ci-dessous, les indications que j’ai pu trouver par ailleurs en les reportant à la fois  sur le plan général de la citadelle et sur un dessin représentant la partie centrale du logis que j’ai effectué grâce aux gravures anciennes existantes.

(G) Un fossé sépare la ville haute de la ville ancienne ; au fond de ce fossé se trouve une citerne. Le mur d’enceinte est, ici, bien conservé, il comporte une échauguette ainsi que des meurtrières établies au niveau du sol intérieur du château. Le fossé est fermé latéralement par des murs pourvus de fenêtres de tir.

(M) La porte d’entrée du château de style renaissance.Elle était défendue par un pont-levis dont on aperçoit encore le mécanisme.

(N) un étroit passage mène au logis seigneurial qui s’ouvre par une tour escalier (O).

(P) le logis seigneurial, réaménagé à l’époque de Georges-Jean, servit ensuite de casernement pour la garnison française ; en 1870, il devint le siège de l’administration des Eaux et Forêts du Reichland puis, en 1975, celui du Parc Naturel Régional des Vosges du Nord.

(Q) une poudrière remplaça l’ancien donjon détruit.

(R) jardin ( ?) aménagé en terrasse d’artillerie.

(S) rocher en avancée ayant probablement servi de tour de guet.
A suivre

samedi 2 mars 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (24) : LUTZELSTEIN (LA PETITE PIERRE)

LA CHAPELLE SAINT LOUIS

Quand les armées de Louis 14 s’emparèrent  de Lutzelstein,  le roi décida non seulement  de conserver le château et même d’en augmenter les défenses mais aussi d'y maintenir une garnison.

L’église étant alors dévolue au protestantisme, il n’existait pas de lieu de culte pour les soldats français d’obédience catholique. Cela explique que l’on construisît pour eux une chapelle dédiée à saint Louis, l’ancêtre du roi. Cette chapelle fut en service de 1683 année de sa consécration, à 1737, date de la transformation de l’église protestante en église Simultanée (le chœur devenant catholique tandis que la nef conservait le culte protestant). Après différentes affectations, la chapelle est devenue le « musée du sceau alsacien ».



LES FORTIFICATIONS DU STADTEL

Au niveau du promontoire portant la ville, il n’est possible de ne voir qu'une partie de la muraille dans un parc accessible au public : elle comprenait des fenêtres de tir d’artillerie.

Le reste du rempart est  probablement détruit ou masqué  par des constructions postérieurement ajoutées.





Pour mesurer l’importance des fortifications, il faut se rendre en contrebas du promontoire et parcourir le chemin qui court le long de celui-ci. A cet endroit, comme dans les autres châteaux de l'Alsace bossue, on retrouve une  falaise retaillée dans le grès. Il arrive même que la falaise soit en surplomb sur le chemin. Parfois, lorsque les frondaisons des arbres s’écartent un peu, on peut apercevoir les restes du rempart  de la ville, reconnaissables à leurs  murs rectilignes.




C’est seulement dans les endroits où la pente du promontoire s’adoucit que sont construits de hauts murs de grès à bossage.



Dans cet ensemble impressionnant, la principale attraction est la tour du puits non à cause de son originalité, car de telles tours apparaissent dans les autres châteaux, mais par le fait que l’on peut apercevoir un des deux bassins alimentant les puits, ainsi que les galeries d’amenées d’eau creusées dans la roche à l’époque de Georges-Jean.


Prochain article : le château

jeudi 28 février 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (23) : LUTZELSTEIN (LA PETITE PIERRE)

Les fresques du chœur de l’église simultanée

Les fresques du chœur et de l’abside constituent la partie la plus intéressante de la visite de l’église Simultanée. On a du mal à en voir l’unité même si trois ensembles apparaissent nettement :
    . Au niveau de l’abside et au-dessus de l’autel est représenté le couronnement de la Vierge (1), cela rappelle que l’église était  dédiée à l’Assomption, il est cantonné de quatre fresques (2) figurant les quatre évangélistes.
    . La partie centrale est consacrée à l’histoire de la déchéance de l’humanité sous l’effet du péché : sont représentés la tentation et le péché original (5) l’archange Michel (4) qui lutte sans cesse contre les démons et le jugement dernier (3)
    . La partie ouvrant sur la nef comporte des scènes évoquant la rédemption : l’arbre de Jessé (6) montrant la généalogie de Jésus, l’ascension (7) et la Pentecôte (8). Assez curieusement, l’élément central de la rédemption, la crucifixion, n’est pas évoquée.

Voici quelques photos particulièrement évocatrices de ces fresques

Le couronnement de la Vierge montre la Vierge Marie agenouillée devant Dieu assis sur un trône. Il porte une longue barbe à deux pointes et d’une main bénit Marie. Fait inhabituel : Dieu est coiffé d’une tiare papale et porte le pallium. Cette figuration ne permet pas de discerner s’il s’agit du Père ou du Fils. A l’arrière-plan, sont représentés deux anges dont l’un joue du luth. Il va de soi que cette glorification de Marie ne plut pas au protestant qu'était Georges-Jean

Les quatre  évangélistes sont accompagnés des images symboliques qui permettent de les reconnaître. De gauche à droite, on reconnaît
     . Saint Mathieu écrivant sur un livre avec  l’enfant représenté ici comme un ange tenant aussi un livre.
     . Saint Marc portant un livre à moitié fermé avec le lion.
     . Saint Luc lisant  et le taureau.
     . Saint Jean et l’aigle. l’évangéliste écrit sur un rouleau déployé tandis que l’aigle vole devant lui.

Voir, en note ci-dessous, les textes montrant la manière dont on a accolé aux Évangélistes leurs images symboliques.

Sur le mur de la voûte ogivale du chœur est représenté le péché originel :    Adam et Ève sont nus devant le pommier. Le serpent s’est enroulé autour du tronc et semble s’adresser à Adam. Ève est facilement reconnaissable : ses seins sont figurés et elle porte de grands cheveux. Bien entendu, les sexes ne sont pas évoqués. .


Sur ce même mur est figuré le jugement dernier :
   . Au centre de la scène  est peint le Christ en gloire, il est entouré de deux personnages dont l’une doit être la Vierge Marie. Au-dessus du Christ, un ange brandit une épée. Cette partie de la scène est révélatrice des mentalités du 15è siècle : à cette époque,  tant de  calamités  s’abattent sur les hommes que cela leur donne l’impression que tous seront voués au Diable et à l’enfer à cause de leurs péchés. L’ange brandissant l’épée s’apprête à infliger la punition que l’humanité mérite.
   . La concrétisation de cette impression apparaît en dessous : elle montre des anges armés d’épée précipitant les damnés vers les flammes de l’enfer. Dans cette représentation du jugement dernier ne sont représentés ni la pesée des péchés ni le Paradis  comme s’il semblait automatique que tous les êtres humains soient damnés.
Cette représentation a évidemment pour but d'amener les chrétiens au repentir tant qu'il est encore temps

Prochain article : la chapelle saint Louis et les remparts entourant le Stadtel

L’attribution des images symboliques aux évangélistes provient, entre autre  de trois sources dont je donne ci-dessous quelques extraits significatifs :

   . La vision Ézéchiel (1.1 ; 4-11) : « J’ai vu un vent de tempête venant du nord, un gros nuage, un feu jaillissant et, autour, une clarté ; au milieu, comme un scintillement de vermeil du milieu du feu. Au milieu, la forme de quatre Vivants ; elle paraissait une forme humaine. Ils avaient chacun quatre faces et chacun quatre ailes.
Leurs jambes étaient droites ; leurs pieds, pareils aux sabots d’un veau, étincelaient comme scintille le bronze poli. Des mains humaines, sous leurs ailes, étaient tournées dans les quatre directions, ainsi que leurs visages et leurs ailes à tous les quatre. Leurs ailes étaient jointes l’une à l’autre ; ils ne se tournaient pas en marchant : ils allaient chacun droit devant soi.
La forme de leurs visages, c’était visage d’homme et, vers la droite, visage de lion pour tous les quatre, visage de taureau à gauche pour tous les quatre, et visage d’aigle pour tous les quatre. Leurs ailes étaient déployées vers le haut et deux couvraient leur corps »

   . Jean écrit dans l’Apocalypse que quatre êtres vivants entourent le trône de Dieu “Le premier animal ressemblait à un lion, le deuxième à un jeune taureau, le troisième avait comme une face humaine, et le quatrième semblait un aigle en plein vol".

L’attribution de ces quatre images symboliques aux évangélistes est attribuée à Saint Jérôme (5 è siècle »   dans son « commentaire sur saint Matthieu » : « la première face, celle d’un homme désigne Matthieu qui dans son début semble écrire l’histoire d’un homme, « livre de la généalogie de Jésus Christ, fils de David, fils d’Abraham » ; la seconde désigne Marc qui fait entendre la voix du lion rugissant dans le désert, « voix de celui qui crie dans le désert, préparez la voie du Seigneur, aplanissez ses sentiers » ; la troisième face, celle du jeune taureau, préfigure l’évangéliste Luc qui commence son récit au prêtre de Zacharie (le prêtre a pour mission d'égorger un taureau dans le cadre du culte à Yahvé)  ; la quatrième, celle de l’évangéliste Jean qui prend des ailes d’aigle pour s’élancer plus haut encore et traiter du Verbe de Dieu »

mardi 26 février 2019

Cinq châteaux des Vosges gréseuses (22) : LUTZELSTEIN (LA PETITE PIERRE)

l’église Simultanée

L’église « Simultaneum » porte ce nom depuis le 18è siècle après que la décision ait été prise de faire coexister les cultes catholiques et protestants dans le même lieu. Elle possède une longue histoire.

Elle fut construite par Burckhart de Lutzelstein dont j’ai évoqué la biographie dans un précédent article : prévôt du chapitre des chanoines de Strasbourg, il avait été élu évêque en 1394 mais il fut démis de sa charge l’année suivante. Pour récupérer le comté de Lutzelstein, devenu vacant depuis la mort de son frère, il se fit relever de ses vœux et se maria. C’est lui qui décida de construire l’église en la dédiant à l’Assomption de la Vierge Marie. Il  institua un collège de quatre chanoines pour la desservir. Après sa mort survenue en 1416, il fut enterré sous le dallage de  l’église avec son épouse.

Vint alors le temps de Georges-Jean, comte de Veldenz et de Lutzelstein (1544-1592). Il  fit convertir l’église catholique en un temple de l'église réformée. A ce moment, les voûtes ogivales  du chœur et de  l’abside étaient recouvertes de fresques, Georges-Jean, en tant que protestant,  ne pouvait l’accepter, il les fit recouvrir. Il est enterré avec son épouse  dans le chœur de l’église ainsi que son fils et héritier Georges-Gustav.

C’est au 19è siècle que l’église prit son aspect actuel :
     . Les fresques furent redécouvertes lors d’une restauration, elles étaient bien conservées et furent restaurées.
     . La nef  fut démolie et reconstruite, les pierres tombales de Burckhart et de son épouse, insérées jusqu’alors dans le dallage, furent remontées et replacées dans  le nouveau mur de façade.

Aspect actuel de l’église
   . Sur la photo de gauche, on en aperçoit la façade du 19è siècle ; en avant de l’église, se trouve le mur du fossé qui sépare le Stadtel du château ainsi qu’une échauguette dominant ce mur.
   . La photo de droite représente l’intérieur de l’église ;  le contraste entre la nef du 19è siècle et le chœur du 15è est patent, les fresques sont peintes sur la voûte du chœur.

   . La photo de gauche  montre les pierres tombales de Burckhart et de son épouse transférées de la nef sur le mur de façade de l'édifice

   . La photo de gauche représente de ce qui subsiste de la tombe de Georges-Jean et de son épouse. 

En voici l'épitaphe 

 «  Georges-Jean, par la grâce de Dieu, comte palatin du Rhin, duc de Bavière, comte de Veldenz et Sponheim est décédé le 8 avril 1592. Dieu veuille lui accorder une joyeuse résurrection au dernier jour. Amen », 

Deux de ces titres sont (duc de Bavière et comte de Sponsheim) sont uniquement honorifiques et possédés par d'autres membres de sa famille.

Prochain article, les fresques du chœur de l’église simultanée