L’association de la «machine à obéir » et de la « machine à tuer » conduisent les génocidaires à une mutation profonde de leur « être en soi » avec apparition chez eux d’une déshumanisation profonde. On retrouve cet état de fait dans le témoignage d’un SS Perry Broad qui fut affecté en tant que garde à Auschwitz puis passa à sa section politique. Ce témoignage a été écrit après la guerre ce qui peut le rendre suspect, il l’est cependant moins que celui de Hoess car il présente les faits bruts sans chercher à se justifier.
Un court paragraphe décrit bien les mentalités des SS en charge de l’extermination :
« Si l'on demandait à un SS, en présence de ces cadavres des deux sexes et de tous âges gisant sur le sol le visage apaisé, pourquoi on faisait mourir tous ces êtres humains,on recevait généralement la même explication, qui lui paraissait parfaitement suffisante : «Il le faut ! » Ces individus d'esprit borné, disposés au sadisme et à la mégalomanie et qui ne méritaient même pas le nom d'être humain, constituaient un sol bien fertile pour la propagande. Ils se croyaient fermement les représentants d'une race supérieure qui avait le droit de refuser aux hommes tout droit de vie, et même de les exterminer par tous les moyens disponibles. Pour eux, tout simplement, un Juif n'était pas un être humain. »
Dans ce texte, trois mots résument parfaitement les mentalités de ces SS : borné, sadique et mégalomane.
Ils sont bornés par le fait qu’ils agissent sans se poser de questions sur ce qu’ils accomplissent, ayant perdu tout sens critique et libre arbitre. Quand on leur demande pourquoi ils acceptent d’exécuter de tels actes, ils ne savent répondre que « il le faut » ; ils sont devenus incapables d’analyser ce qui se passe en eux comme si leur cerveau avait été décérébré, ils ne sont même plus des esclaves car ceux-ci gardent en eux la capacité de se révolter, ils sont devenu des automates.
Broad emploie aussi le mot sadique pour qualifier ces SS. On pourrait en effet penser qu’ils réaliseraient leur tâche mécaniquement, sans manifester de sentiments particuliers ; pour beaucoup, ce n’est pas le cas, le mot sadique fait penser qu’il ressentent une grande jouissance à accomplir leur mission : on les imagine sélectionner avec délectation ceux qui dans la file d’attente pourrait manifester un semblant de résistance pour les entrainer à l'écart et les abattre, contempler le groupe d’êtres humains nus alignés devant la porte de la chambre à gaz en imaginant la surprise qui les attend ; on peut aussi les imaginer regardant à travers la vitre blindée les suppliciés tentant d’échapper à la suffocation puis s’abattre sans vie. Il me semble évident que les SS prennent plaisir à ce qu’ils font sous couvert de la rigidité disciplinaire à laquelle ils sont astreints. D’ailleurs pourquoi avoir des scrupules puisque les autorités leur ont fourni l’alibi parfait : les juifs ne sont pas des hommes !
Le troisième qualificatif utilisé par Broad est celui de la mégalomanie des SS en charge de la solution finale. Elle se réfère, selon moi, à deux caractéristiques :
. la première est le sentiment de toute puissance qu'on en eux les SS d’Auschwitz, ils peuvent décider d’un simple geste de la destinée de milliers d’êtres humains, ils peuvent tuer eux-mêmes qui bon leur semble, personne ne leur demandera de compte, ils ont droit de vie et de mort sur tous les déportés, ils n’ont pas à fournir la moindre justification , seule comptera pour eux leur efficacité dans le traitement de la solution finale.
. Ce sentiment de toute puissance est évidemment renforcé par cette phraséologie idéologique qui fait d’eux une race supérieure comme l’indique Broad.
Ainsi, ces trois mots résument parfaitement la vision que l’on peut avoir ces « machines à tuer » que sont les exécutants des génocides. Cette description des SS par Broad me semble beaucoup plus conforme à la réalité par rapport à celle que fait Hoess des SS et de lui-même lorsqu'il fait état de doutes et d’incomprehension à propos des ordres que leur hiérarchie leur donne.
À suivre....
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