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samedi 7 juin 2014

LE RÈGNE DE LA MORT XIVe et XVe SIÈCLES (6) : les DANSES MACABRES

Les deux premiers types d'oeuvres d'art du 15e siècle décrits précédemment évoquent le Christ mort sous la double forme des Pietàs et des Mises au Tombeau. Pourtant, le Diable n'a pas encore le champ libre : avant de pouvoir agir sans entraves, la Mort doit le débarrasser de tous les puissants qui pourraient protéger, défendre l'humanité et intercéder auprès de Dieu : c'est le thème des DANSES MACABRES. 

La danse macabre la plus ancienne, datant du premier quart du 15e siècle, se trouvait au CIMETIÈRE DES INNOCENTS À PARIS  sous le cloître qui en occupait la partie sud ;  elle fut détruite au 17e siècle lors du percement d'une rue mais on en conserve les poèmes qui l'illustraient sous forme de deux manuscrits intitulés : " les vers de la danse macabre de Paris tels qu'ils sont présentés au cimetière des innocents". On conserve aussi un autre manuscrit du 15e siècle comportant ces vers accompagnés de dessins retranscrits, peut-être des copies de la fresque originelle. Les vers accompagnant la danse macabre de Paris sont très intéressants sur les mentalités qu'ils révèlent.

En ce qui me concerne, la plus élaborée des danses macabres que je connaisse est celle peinte par BERNT NOTKE (v1435- mort à Lubeck en 1517) et conservée à l'EGLISE SAINT NICOLAS DE TALLINN  (Estonie). On connaît  ce grand peintre, entre autre, par deux représentations de la danse macabre :
   . La première est à Tallinn, c'est une magnifique œuvre d'art mais on n'en conserve que la première partie qui ne comporte que cinq vivants entrainés par la mort, le reste étant perdu.
   . La deuxième danse macabre fut commandée à l'artiste après une peste qui frappa la ville, elle se trouvait à l'église sainte Marie, elle fut remplacée au 18e siècle par une copie qui  fut détruite en 1942, il n'en reste que des photographies. Elle comportait vingt quatre personnages. (1)

Une belle danse macabre existe aussi en Slovénie, elle pourra compléter utilement la danse macabre de BERNT NOTKE.

À l'aide de toutes ces sources, il sera possible de montrer comment la Mort s'organise pour détruire le monde en entraînant les puissants dans une ronde infernale.

LA DANSE MACABRE DE BERNT NOTKE
Elle sera décrite ici en trois scènes successives :

1- le RÉCITANT.
Il est installé sur une haute chaire et présente en prologue ce qui va suivre. Voici quelques extraits de ce que le  poème de la danse macabre de Paris lui fait dire :
La Mort n'épargne ni petit, ni grand.
En ce miroir chacun peut lire
Qu'il devra un jour danser ainsi.
Sage est celui qui s'y contemple bien!
La Mort mène les vivants;
Tu vois les puissants partir en premier,
Car il n'est personne que la Mort ne vainque.

2- un MORT MUSICIEN JOUANT DE LA CORNEMUSE.
Sur cette peinture, tous les morts sont semblables :
     . Ce sont moins des squelettes que des cadavres en voie de décomposition : membres décharnés, côtes saillantes, trou béant à la place du bas-ventre, mâchoire apparente, orifices oculaires et nasal creux.
     . Ils sont vêtus de leur linceul dont ils se sont faits une sorte de manteau.
     . Ils gesticulent ce qui fait virevolter les linceuls, leurs mouvements désordonnés s'opposent étrangement aux poses statiques des vivants,
     . Dans la plupart de ces danses macabres, les morts portent quelques attributs : un cercueil, une faux, une bêche ou une pioche.

Dans la danse macabre de Paris, les musiciens sont au nombre de quatre, ils jouent de la cornemuse, de la harpe, du tambourin et de l'orgue portatif. Voilà un extrait de ce qu'ils disent :

Vous danserez tous cette danse 
Un jour, les bons comme les méchants. 
Vos corps seront mangés par les vers. 
Hélas! Regardez-nous: 
Morts, pourris, puants, squelettiques; 
Comme nous sommes, tels vous serez.

3- LE MORT CONDUISANT LA DANSE.
d'une main, il tient sur son épaule un cercueil, de l'autre, il agrippe le Pape par son manteau rouge.
Comme on le verra dans la suite de cette danse macabre de BERNT NOTKE, à aucun moment, les vivants n'entrent dans la danse, C'est même l'inverse, ils résistent tant qu'ils peuvent : le Pape, par exemple, est tiré par son manteau et poussé par le mort qui le suit, il en sera de même pour les autres vivants.

4- le PAPE, il est reconnaissable à sa tiare, la triple couronne qui témoigne de sa suprématie tant temporelle que spirituelle sur l'empereur (parfois représenté avec deux couronnes superposées) et les rois (qui ne portent qu'une couronne), il tient un bâton surmonté de la croix patriarcale.

5- un MORT qui pousse le Pape et tire l'empereur.

6- derrière se trouve un décor étrangement apaisé : on aperçoit un bord de mer, une tour de ville, une ville, et une campagne verdoyante, un curieux contraste avec la danse macabre du premier plan !

NOTE
1- ces personnages sont dans l'ordre : le pape, l'empereur, l'impératrice, le cardinal, le roi, l'évêque, le duc (détruit en 1799), l'abbé, le chevalier, le chartreux, le maire, le chanoine, le noble, le médecin, l'usurier, le chapelain, le fonctionnaire, le sacristain, le marchand, l'ermite, le paysan, le jeune homme, la jeune fille et l'enfant dans son berceau.

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