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jeudi 31 mars 2016

LA LIBERTÉ, FRUIT DE LA CONNAISSANCE DE SOI (18)

LA CONSTITUTION DES VALEURS DE L'ÊTRE EN SOI (suite)

RAISON ET LIBERTÉ (suite de l’article précédent)

Cette méthodologie des valeurs classées par l'outil-raison va permettre d'accéder à la liberté ontologique. Pour le montrer, je reprendrai ici mon anecdote du lépreux citée précédemment,  pour lequel ma réaction primaire fut l'horreur quand il me prit par l'épaule avec ses moignons afin de m'apitoyer.

Devant une telle situation, on peut avoir trois types de réactions :
     . Une réaction instinctive qui peut s'assimiler à un réflexe : de la même manière que l'on retire sa main d'un fourneau brûlant, on peut s'écarter du lépreux afin de préserver son corps d'une menace immédiate.
     . Une réaction émanant du  « tiroir du paraître » du type : " il a touché mon habit, il va falloir que je me change"
     . Une réaction émanant du « tiroir de l'être », cette réaction est propre à chaque individu puisqu'elle dépend uniquement du système de valeur qu'il a établi :
            - On peut avoir une réaction de compassion qui conduit à considérer que ces lépreux sont des êtres humains comme les autres  ayant leur dignité, que ce sont des êtres qui souffrent et qu'il faut les respecter en tant que tels en tentant de les aider à survivre par une obole,
            - ce ne fut cependant pas la réaction de tout le monde, d'autres ouvrirent dans leurs « casiers de l'être » un autre dossier, celui de la haine de l'autre, de la détestation de la différence, du mépris de ceux qu'ils considèrent comme des "sous-hommes" et à qui ils dénient une quelconque humanité.

J'ai constaté cette dernière réaction, non vis à vis des lépreux, mais à l'encontre d’enfants mendiants d'un bidonville des Indes : un touriste se débarrassa, en les repoussant avec rudesse,  de petits mendiants qui étaient autour de lui, il remonta dans le bus et, de la fenêtre ouverte, il leur jeta des bonbons ; le fait de voir ses enfants se battre pour ramasser les bonbons dût lui procurer une grande jouissance !

Je fus profondément choqué de cette réaction de l’individu, ce comportement me parut socialement exécrable, pourtant il ne l'était pas au niveau de sa liberté ontologique : au moment de cet acte que je ressentais comme vil,  il était, selon moi, pleinement en accord avec lui-même et avec les valeurs qui constituaient son être, c'est d'ailleurs ce qu'il nous expliqua ensuite. En effet, le tri des valeurs se fait indépendamment de la notion de bien et de mal,

De tout ce qui précède, on peut, selon moi, à nouveau, tirer la conséquence que chaque être humain est unique et possède son propre système de valeurs pour peu toutefois qu'il soit capable de dépasser son paraître pour rechercher ce qui constitue son être.  Chacun peut donc accéder à sa liberté ontologique s'il pousse son introspection au niveau du « tiroir de son être »; cette liberté ontologique lui est propre et correspond au système de valeurs qu'il façonne peu à peu.

Ainsi, l'aphorisme qui crée, selon moi, la liberté : " je fais quelque chose et je sais pourquoi je le fais" peut être complété en y incluant le niveau du système des valeurs : " je sais ce que je fais puisque je me réfère au système des valeurs constitutives de mon être que j'ai moi-même établi en toute liberté à partir des acquis qui sont en moi". C'est par la mise en pratique cet aphorisme que l'on dispose de la liberté absolue et totale.

On pourrait certes me rétorquer que cette liberté n'est pas absolue puisqu'elle est conditionnée par ses acquis : comment peut-on être libre si on reste esclave de ceux-ci et secondairement de ses instincts ?

La réponse à cet argument peut être effectuée par trois idées :
     . D'abord, la liberté ex-nihilo ne peut exister puisque l'inné se limite aux seuls instincts primordiaux ;  l'esprit à la naissance est une terre vierge de toute influence, c'est peu à peu que se constituent les acquis, la liberté ne peut apparaitre que dans le cadre de choix  effectués entre ces acquis.
     . Chaque homme dispose d'une panoplie si large d'acquis qu'il est possible de choisir les uns en les hiérarchisant et de rejeter totalement les autres. Il est aussi possible de reprendre tous ses acquis, de les analyser au moyen de la raison et d'établir son propre système de valeurs philosophiques.
     . Enfin, il est possible à chaque homme de transcender ses instincts pour en devenir le maître à condition toutefois que le minimum vital soit préservé. 

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