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lundi 13 juillet 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade (107) : LES HOSPITALIERS DE SAINT JEAN DE JERUSALEM SOUS LES SUCCESSEURS DE RAYMOND DU PUY JUSQU'À 1187

LA PARTICIPATION  DES HOSPITALIERS À LA GUERRE OFFENSIVE : L'EXEMPLE DES EXPÉDITIONS EN ÉGYPTE.

A l'avènement du roi Amaury en 1163, la situation du Proche-Orient musulman s'était considérablement modifiée à deux points de vue :
     . Au nord-est des Etats francs s'était constituée une puissance redoutable pour les chrétiens avec l'union des émirats d'Alep et de Damas en 1154 sous la domination de l'atabeg Nur-Al-Din. Cette puissance menaçait directement la principauté d'Antioche et le comté de Tripoli ainsi que la Galilée.
     . Au sud par contre, le califat fatimide du Caire s'était considérablement affaibli : le calife était un enfant et la cour califale voyait se dérouler une lutte féroce entre les postulants au titre de Vizir (celui qui dirige effectivement l'Egypte).

Entre ces deux puissances, le roi s'estimait pris en étau : s'il se produisait une attaque coordonnée des turcs de Damas-Alep et des Fatimides d'Egypte, le roi de Jérusalem n'aurait pas les moyens de lutter sur deux fronts, il lui fallait donc abattre un de ces deux ennemis pour empêcher toute alliance entre eux. Le choix du roi se porta sur l'Égypte qui semblait plus facile à vaincre vues ses divisions intestines.

Considéré après coup, ce choix fut une grave erreur à trois points de vue au moins :
     . Une alliance offensive  entre l'Égypte et les émirs turcs était inenvisageable à cette époque :  d'abord  parce qu'il existait une animosité profonde entre les turcs sunnites et les Fatimides chi'ites, ensuite et surtout par le fait que l'Égypte de l'époque, empêtrée dans ses querelles internes, n'avait pas les moyens de participer à une offensive contre les francs.
     .  A cette époque, l'Egypte fatimide n'était guère dangereuse pour les chrétiens, par contre l'union de Damas et Alep sous l'égide du même souverain l'était beaucoup plus, c'est contre Nur-Al-Din qu'il aurait fallu lutter en priorité.
    . L'attaque de l'Egypte présentait de grands risques stratégiques : si l'armée franque se trouvait en Égypte, Nur-al-Din aurait les coudées franches face aux Etats francs septentrionaux et en particulier face à la principauté d'Antioche. C'est ce qui se produisit, entre 1164 et 1167, l'atabeg lance plusieurs offensives pendant les expéditions d'Amaury en Égypte, s'empare d'Harrenc,  fait perdre à la principauté d'Antioche tout l'Outre-Oronte, prend Banyas en Galilée et obtient le partage du territoire de Tibériade jusqu'alors aux mains des francs.
     . Enfin, même si turcs et Fatimides se détestent, la solidarité entre musulmans conduisit l'Egypte à  demander secours à Nur-Ad-Din qui envoya un corps expéditionnaire en Égypte. Cela amena l'installation durable des turcs en Égypte. En ce sens, les expéditions en Égypte eurent les mêmes effet que l'attaque de Damas par la seconde croisade : la seconde croisade amena à l'unification de Damas et Alep sous l'égide de Nur-Al-Din, les expéditions d'Égypte aboutirent à l'unification des Etats de Damas, Alep et de l'Egypte sous la souveraineté de Saladin.

Ces risques sont exprimés par les historiens mais qu'en était-il des contemporains de l'événement ? Quels sont les facteurs qui influencèrent le roi de Jérusalem ? Il suffit de lire Guillaume de Tyr pour les trouver :
     . le premier facteur est le jeu dangereux du vizir de l'époque appelé Savar par Guillaume de Tyr avec des volte-face fréquentes entre Amaury et Nur-Ad-Din, recherchant l'appui de l'un contre l'autre et changeant d'allié selon les circonstances.
     . Cependant, pour moi, la principale motivation est l'appât du gain : l'Égypte est riche et le roi pourra lever dans ce pays des tributs exorbitants soit pour prix de son aide à Savar, soit comme indemnités imposés par le vainqueur. Si on consulte Guillaume de Tyr, on constate que les questions d'argent vont dominer ces campagnes. En extrapolant, on peut supposer que grâce  à cette manne financière, le roi pense pouvoir créer une grande armée capable de se retourner efficacement contre Nur-Al-Din.
     . Pour les croisés, il existe aussi un autre appât : il sera possible de se partager l'Égypte afin de permettre aux seigneurs présents de se constituer des fiefs pourvus d'importants revenus (ce fait est en particulier attesté pour les Hospitaliers) : ainsi, à ce niveau, l'histoire se répète :  comme pour la principauté de Damas, on se partage les terres d'Egypte avant même qu'elles ne soient conquises !
    . Enfin, on peut mentionner une motivation qui servira de prétexte et d'alibi, la protection des chrétiens coptes d'Egypte.

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