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jeudi 23 juillet 2015

Mentalités et comportements au temps de la croisade (115) : LES HOSPITALIERS DE SAINT JEAN DE JERUSALEM SOUS LES SUCCESSEURS DE RAYMOND DU PUY JUSQU'À 1187

LA PARTICIPATION  DES HOSPITALIERS À LA GUERRE OFFENSIVE : LE BILAN

Dans les articles précédents, j'ai tenté de montrer la participation des hospitaliers aux combats qui se livraient en Terre Sainte au moyen de trois exemples : l'abandon de la défense de Paneade-Baniyas, le combat de la fontaine de Cresson et la convention portant sur l'envoi de chevaliers et piétons de l'Ordre lors de la quatrième expédition d'Egypte.

En lisant les chroniques des contemporains, principalement de Guillaume de Tyr, Bernard le Trésorier et Jacques de Vitry qui sont en libre accès sur internet, je n'ai pas trouvé d'autres mentions faisant allusion aux hospitaliers en tant que combattants, hormis les trois exemples cités plus haut.

Le premier, rappelons-le, concernait les événements survenus à Paneade (Baniyas). Le seigneur du lieu, ne pouvant plus assumer seul la défense de la cité tant militairement que financièrement, en avait concédé la moitié aux Hospitaliers. Ceux-ci organisèrent une caravane afin d'équiper la part de la ville qui leur revenait tant en approvisionnement qu'en armes. Elle fut prise en embuscade par les turcs et pillée. Plutôt que de continuer à défendre Paneade, les Hospitaliers préfèrent rendre la part de la ville que le seigneur leur avait concédée. On ne peut pas dire que les Hospitaliers ait eu, dans ces circonstances,  une attitude combattive !

On pourrait me rétorquer que si les Hospitaliers possédaient de nombreuses forteresses, c'est qu'on estimait à juste titre qu'ils avaient la capacité de les garder ; pourtant, on peut penser aussi que la donation de ces forteresses était surtout due au fait que les Hospitaliers disposaient de ressources financières importantes qui leur permettaient de renforcer les défenses de ces forteresses en les rendant quasiment imprenables. Dans cette perspective, la capacité combattante des hospitaliers était moins prise en considération que leur richesse. En outre, avant Hattin, il est probable que les garnisons de ces place-fortes hospitalières comprenaient surtout des soldats stipendiés commandés par quelques frères profès.

Dans le deuxième exemple, celui de la bataille de la fontaine de Cresson, on ne peut pas dire non plus que les hospitaliers ont été le fer de lance du combat : ils n'était qu'une dizaine alors que les templiers étaient 70 et les chevaliers laïcs 40. En outre, on a l'impression, à la lecture de Guillaume de Tyr, que les dix hospitaliers ont rencontré fortuitement l'armée en marche et qu'ils se joints à elle.

Le troisième exemple, celle de la quatrième expédition en Egypte a montré une participation beaucoup plus importante de l'Ordre qui est est engagé en tant que tel dans la guerre, avec non seulement un contingent conséquent de combattants mais aussi avec la détermination de la part du butin qui lui reviendra. Pourtant, il existe ici aussi une ambiguïté quant à la qualité des combattants : sont-il des moines-chevaliers profès ou des chevaliers et piétons enrôlés par l'Ordre et payés pour le temps de la campagne ?

Guillaume de Tyr montre que le maître "emprunta encore des sommes considérables, et les distribua à tous les chevaliers, qu'il allait cherchant de toutes parts pour les attirer à lui", ce qui signifie qu'il s'adressa à des chevaliers extérieurs à l'Ordre et rétribués. Par voie de conséquence, on peut en déduire que les 1000 chevaliers et piétons enrôlés formaient probablement l'essentiel  de l'armée de l’Hôpital. Cette armée était néanmoins placée sous l'autorité militaire des dignitaires de l'Ordre qui avait constitué une structure de commandement. Dans ce cas, et si mon hypothèse est la bonne, il ne semble pas que l'expédition ait compté beaucoup de moines-chevaliers.

Ainsi, les trois exemples cités semblent montrer que les Hospitaliers en tant que tels ne participèrent  que de manière limitée aux guerres tant offensives que défensives ; par contre, l'Ordre avaient un rôle essentiel dans la défense  des Etats francs par la garde des forteresses qu'ils rendirent inexpugnables et à partir desquelles il était possible de lancer des incursions limitées dans les vastes marches-frontières qui leur furent concédées par les princes laïcs.

L'expédition d'Egypte eut cependant d'importantes conséquences pour l'Ordre comme le montre M Delaville Le Roux.

En premier lieu, après l'échec de l'expédition, il se développa des violentes critiques contre le maître Gilbert d'Assailly, non pas sur le principe de la guerre, mais sur les dépenses occasionnées par celle-ci et surtout par le fait que le Maître ait agi de sa propre initiative sans consulter le chapitre : les emprunts effectués pour financer la guerre avaient tant obéré les finances de l'Ordre qu'il se trouva chargé de dettes pour longtemps. L'Ordre appauvri ne pouvait plus s'occuper de ce qui était sa mission essentielle, apporter secours aux pauvres et aux malades.  Devant de telles critique, Gilbert d'Assailly décida de résigner sa charge.

La deuxième conséquence survint quelques années plus tard sous la forme de la bulle " PIAM ADMODIUM " du 2 août 1179 du pape Alexandre III. Celle-ci va définir avec précision les conditions dans lesquelles les Hospitaliers peuvent faire la guerre : il faut que l'étendard de la Sainte Croix soit déployé pour la défense  du royaume ou le siège d'une place occupée par les infidèles. Le pape enjoint aussi aux hospitaliers de ne pas délaisser le soin des malades et des pauvres au profit du métier des armes.

Cette bulle a le mérite de définir clairement la place des hospitaliers dans les guerres des Etats francs de Terre sainte :
     . Interdiction de participer à une guerre offensive.
     . Seule la guerre défensive et la défense des forteresses est acceptable.
Cette mise en application de la bulle papale permet de comprendre l'importance du rôle des Hospitaliers dans la bataille de Hattin au cours de laquelle se joua l'avenir du royaume de Jérusalem.

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